Chapitre 4 : Assistante
Doliannah était perdue dans ses pensées. Elle ne pouvait penser à autre chose qu'Epinda et tout ce que sa mort avait changé. Dolly se répétait dans sa tête la même phrase : «Nous devions partir aujourd'hui». Mais elle redescendit sur terre lorsque le docteur Adonis Calano se tourna brusquement vers elle.
-Lady Kleiton est-elle au courant que vous étiez censées partir aujourd'hui avec votre amie ? demanda-t-il.
-Pas du tout, nous ne voulions pas la mettre en colère et éviter de lui dire si jamais il arrivait quelque chose...
-Vous avez le droit de partir comme cela ?
-Aucune idée, avoua-t-elle. Mais nous étions supposées quitter l'île donc Lady Kleinton n'aurait rien pu faire.
-Tout à l'heure, vous avez parlé d'un tuyau et d'une fenêtre, peut-on accéder à votre pièce par cet endroit ? demanda-t-il.
-Oui, Epinda glissait contre le tuyau et grimpait par là pour revenir. Sortir par la porte principale était trop risqué. On atterrit dans le jardin.
-Dans ce cas, je passerai par le jardin. Heureusement pour vous je suis médecin, personne ne me posera de questions si je me ballade avec un corps. Je vais aller chercher votre amie et la ramener, je tâcherai d'enlever le sang et je récupérerai toutes vos affaires. J'aurais simplement besoin de vous pour déposer une lettre annonçant votre départ, de vous et de votre amie. Lady Kleinton ne saura jamais la vérité. Je vous apporte de quoi écrire, ne bougez pas, Doliannah.
-Attendez, docteur, lança rapidement cette dernière, faisant se figer Adonis qui se tourna ensuite face à elle. Pourquoi faites-vous tout cela ? Je vous en suis très reconnaissante, cela va de soi, mais pourquoi m'aidez-vous ?
-Je ne peux pas vous sauver de la mort pour ensuite l'inviter à vous emmener, répondit-il. Vous soigner est une chose mais après ce qui vous est arrivé, comment pourrais-je vous laisser partir sans rien faire pour vous ? Doliannah, vous êtes jeune, jolie, gentille, et je suis certain que vous ne méritez pas ce qui vous arrive.
Sur ce, Adonis quitta la chambre et Dolly l'entendit fouiller dans la pièce à côté. La jeune serkonienne regarda sa main et ne put s'empêcher de se demander ce que le docteur pouvait penser de cela. Quand le docteur Calano revint, elle préféra cacher sa main gauche. Adonis lui posa le plateau sur les genoux avec une feuille de papier et un stylo.
-Je vous laisse écrire ce que vous voulez, dit-il. Vous êtes une femme intelligente, j'en suis sûr, vous saurez quoi dire.
Le docteur quitta une nouvelle fois la chambre et laissa Doliannah seule devant son papier. La jeune serkonienne eut envie d'incendier sa patronne mais se retint. Elle marqua qu'Epinda et elle quittaient la ville suite à un problème de famille pour la jeune tyvienne. Dolly s'excusait de partir si soudainement et souhaita bonne continuation à Lady Kleinton, même si elle ne pensait pas la fin de son mot. Adonis passa la porte, il tenait un sac, pour emmener les affaires de Doliannah et Epinda.
-Vous avez déjà terminé ? s'étonna-t-il.
-Il n'y a pas grand chose à dire, répondit-elle en lui tendant la feuille de papier. Merci, merci infiniment, comment vous remercier ?
-Ne me remerciez pas, je ne fais que vous aider, tout le monde devrait le faire.
-Je vous dois la vie, docteur.
-Oh, Doliannah, je vous en prie, appelez-moi Adonis ! répliqua-t-il avec un sourire. Bon, je vais y aller, ne bougez pas trop, vous devez vous reposez, vous avez perdu beaucoup de sang. Restez allongée, quand je rentrerai, vous pourrez bouger, je serai là, au cas où.
Adonis s'en alla. Doliannah s'allongea et pleura en pensant à Epinda. Elle fut secouée de sanglots en revoyant le doux visage de sa chère amie. Pendant plusieurs minutes, elle se lamenta sur son sort et pleurait la mort d'Epinda puis elle se releva, marcha jusqu'à la porte ouverte de la chambre et essaya son pouvoir de téléportation. Elle se retrouva dans un salon, avec un divan, deux fauteuils en cuirs, une cheminée en face des sièges, une grande table, elle retrouva du mobilier plutôt aisé mais pas autant que Lady Kleinton. Le seul bruit qu'on entendait était le bruit de l'horloge qui indiquait huit heures vingt. La jeune femme utilisa ensuite son pouvoir de vision pour observer la pièce. Elle vit des objets à travers les murs et entendit un chant très lointain qui venait de sous le sol. Doliannah comprit qu'elle trouverait des runes dans les égouts. La jeune serkonienne visita un peu la maison du docteur Calano qui n'était pas très grande mais pas petite non plus. Il n'y avait qu'une chambre, une salle de bain, une petite pièce pour les toilettes, le salon, la cuisine avec une table pour manger et un bureau avec une grande bibliothèque. Près de la salle de bain, on y trouvait une porte qui donnait sur un escalier qui menait à son cabinet, en dessous de la maison.
Doliannah regarda les nombreux livres du docteur, certains étaient des fictions, d'autres des livres scientifiques. Elle trouvait son bonheur et en prit un sur les légendes de magie noire. Dolly lut ce qu'elle trouva sur l'Outsider. Le livre étant écrit par l'Abbaye, l'Outsider n'était décrit comme un dieu accordant des dons. Mais la jeune serkonienne, concentrée sur la lecture, n'avait pas vu le temps passer et fut sortie de ses pensées en entendant la porte menant au cabinet s'ouvrir. Doliannah rangea vite le livre et sortit du bureau. Adonis portait son sac, désormais rempli et le posa sur la table basse, devant son divan et les fauteuils.
-Doliannah ? s'étonna-t-il en la voyant sortir de son bureau. Vous...
-Je visitais, l'interrompit-elle. Et quand j'ai vu votre bibliothèque, je me suis sentie obligée de regarder vos livres. Il y avait des choses intéressantes.
-Empruntez ce que vous voulez, je les ai tous lus, vous pouvez lire ceux que vous voulez.
-Et... comment était-ce ? demanda Dolly.
-Tout s'est bien passé, répondit-il en essuyant de la sueur de ses tempes. Personne ne m'a vu, j'ai récupéré vos affaires le corps sans problème. Et j'ai bien laissé le mot en évidence dans votre pièce pour que Lady Kleinton le trouve.
-Où est-elle ?
-Vous souhaitez vraiment la voir ? Elle est en bas, dans mon cabinet mais je préfère que vous descendiez pas.
-Pourquoi ?
-Vous sentez-vous prête à voir votre amie ? demanda-t-il. Je sais que cela peut être dur pour vous. Et puis, je vais probablement avoir des patients aujourd'hui, vous êtes censée être partie de Karnaca désormais.
-Elle est morte dans mes bras, Adonis, répliqua la jeune serkonienne d'une voix triste. J'ai vu ses yeux s'éteindre. Mais je veux la voir, lui faire mes adieux. Et puis, vous pensez que je pourrais vous aider dans votre travail ? Je serais votre assistante.
-Eh bien, je ne peux pas vous empêcher de la voir dans ce cas, nous irons ensemble. Et puis, votre proposition...
-Si vous acceptez, je pourrais rester près de vous, vous pourrez me surveiller, l'interrompit Dolly. Je ne vous dérangerais pas, je serais simplement là pour vous aider en cas de besoin et j'apprendrais des choses.
-Mais vous devez vous reposer.
-Je ne vais pas courir partout, je peux même rester assise s'il le faut, rétorqua-t-elle.
Doliannah sourit mais voyait bien qu'Adonis avait des doutes. Il fit quelques pas dans le salon avant de se retourner face à la jeune serkonienne.
-C'est d'accord, finit-il par dire. Vous serez mon assistante. Maintenant, si vous voulez bien me suivre, nous allons voir votre amie.
Tous deux descendirent les escaliers et se retrouvèrent dans une grande pièce de médecin, le cabinet du docteur Calano, l'endroit où il s'occupait de ses patients. Adonis ouvrit une autre porte et, suivi de Dolly, il entra dans la pièce. Ils se retrouvèrent dans une pièce plus froide, sans fenêtre et sur des tables médicales étaient posés des cadavres. Cependant, Doliannah n'en vit qu'un seul, celui d'Epinda. Elle et Adonis s'en approchèrent et la jeune serkonienne fixa son amie. Sa peau était encore plus blanche, ses yeux fermés, ses cheveux tachés de sang tout comme ses vêtements. Doliannah prit la main d'Epinda, une main terriblement froide. Dolly sentit des larmes monter et elle ne put se retenir de pleurer. Adonis fut désolé pour la jeune femme, il posa une main sur son épaule.
-C'est une belle jeune femme, dit-il.
-Vous auriez vu son sourire, il ne pouvait laisser personne indifférent. Epinda avait un si grand cœur, c'était vraiment une personne formidable.
-J'en suis certain.
-Qu'allez-vous faire d'elle ? demanda-t-elle en essuyant ses yeux.
-Nous allons l'enterrer comme il se doit, répondit-il. Nous irons voir dans quel cimetière nous pourrons installer sa tombe.
Doliannah appréciait vraiment tout ce qu'Adonis faisait pour elle. Tous deux restèrent devant Epinda pendant quelques minutes. La jeune serkonienne fit ses adieux à sa chère et tendre amie puis sortit de la pièce, en larmes. Le docteur Calano ferma la porte et s'approcha de Dolly, la mine triste. Doliannah se retourna face à lui et se jeta dans ses bras pour pleurer sur son épaule. Il ne la repoussa pas, au contraire, il la serra contre lui. Ils restèrent comme cela pendant plusieurs minutes. Puis le premier patient d'Adonis arriva.
-Allez vous changer, Doliannah, dit le docteur. Cherchez dans mon armoire, dans ma chambre, vous devriez trouver des habits à votre taille. Je.. je ne les range que dans le premier tiroir. Revenez dès que vous êtes prête, je serai dans la salle derrière moi avec mon patient.
Elle remonta par les escaliers dans la maison du docteur et retourna dans la chambre. Doliannah ouvrit ladite armoire et commença à chercher des vêtements à sa taille. Elle en essaya plusieurs avant de trouver son bonheur. Certes, Dolly portait des vêtements d'homme mais ils lui allaient bien. Elle enfila également des gants pour cacher la marque de l'Outsider et retourna en bas, dans le cabinet du docteur Calano. Adonis s'occupait déjà de son patient, un vieil homme.
-Qui est cette jeune femme au visage abîmé ? demanda la patient en la voyant entrer.
-Monsieur, je vous présente mon assistante, Doliannah, répondit Adonis. Elle est tombée il y a quelques jours mais ne vous en faites pas. Venez, Doliannah.
Le docteur expliqua tout à la jeune serkonienne qui écoutait attentivement. Il lui montra différentes choses et parfois, il lui demandait de lui passer un instrument. Dolly utilisait son pouvoir de vision pour voir à travers les meubles et trouver plus facilement ce qu'Adonis lui demandait. Il expliquait tout ce qu'il faisait à son assistante et il la laissa essayer plusieurs fois, lorsque ce n'était pas dangereux pour son patient. Au plus grand plaisir d'Adonis, la jeune serkonienne apprenait vite.
Les patients s'enchaînèrent, le temps passa rapidement. Adonis avait réussi à occuper la belle Doliannah pour la faire se concentrer sur autre chose que la mort de son amie. Aux alentours de midi, le docteur prenait une pause pour manger. Lui et Doliannah remontèrent dans sa maison. Adonis commença à cuisiner après avoir invité la jeune serkonienne à s'asseoir à la table du salon, ce qu'elle fit. Mais elle ne resta pas longtemps assise et rejoignit Adonis dans la cuisine.
-Je suis un terrible cuisinier, pardonnez-moi si mes plats sont infectes, rit-il.
-Laissez-moi faire, en tant que domestique, je me débrouille en cuisine, répliqua-t-elle avec un sourire. Je m'occupe de tout, vous n'avez pas à vous inquiéter.
Doliannah cuisina alors sous le regard d'Adonis. Une fois le repas prêt, ils s'assirent face à face à la grande table et commencèrent à manger.
-Je n'appelle pas cela ''se débrouiller'', lança-t-il après la première bouchée.
-Pourquoi ? Vous n'aimez pas ? demanda-t-elle.
-C'est excellent, Doliannah ! répondit Adonis avec un sourire. Vous êtes très douée. Cela faisait des semaines que je n'avais pas mangé quelque chose d'aussi succulent.
-Oh vraiment ? Eh bien, merci.
-Vous savez, Doliannah, vous pouvez enlever vos gants pour le moment, dit-il.
-Je préfère les garder, une habitude sûrement. En tant que domestique, je devais porter des gants.
-Comme vous voudrez, Doliannah. Et je voulais savoir, est-ce qu'être mon assistante vous plaît pour l'instant ?
-Beaucoup, je trouve votre métier très intéressant. Merci encore, Adonis.
Après le déjeuner, le docteur et la jeune serkonienne retournèrent dans le cabinet pour s'occuper de nouveaux patients. Plus les heures passaient, plus Adonis confiait des tâches de plus en plus difficiles à Doliannah qui apprenait vite. Elle ne fit presque aucune erreur et aucune dangereuse. Dolly continua d'utiliser son pouvoir pour trouver les objets que lui demandait Adonis et le trouvait très utile mais à chaque fois qu'elle s'en servait, elle se doutait que ce n'était pas pour cela que l'Outsider le lui avait donné. Doliannah pensa alors à l'assassin d'Epinda, elle devait le retrouver et lui faire payer, elle devait également comprendre pourquoi ce meurtrier avait absolument voulu récupérer la sorte de pierre.
Une fois que le soleil se coucha et que le ciel prit une teinte orangée, Adonis ferma son cabinet et, suivi de Doliannah, il remonta chez lui. Le docteur Calano sortit d'un tiroir de sa cuisine une bouteille de whisky et apporta deux verres, il posa le tout sur la table basse de son salon et se laissa tomber dans son fauteuil. Doliannah s'assit alors dans le deuxième fauteuil, calmement.
-Voulez-vous un verre ? demanda-t-il en prenant la bouteille. C'est un whisky de Dunwall, un des seuls points positifs de cette ville.
-Je n'ai jamais bu d'alcool aussi fort, avoua-t-elle.
-Vraiment ? Et que diriez-vous de goûter ?
-Eh bien, je vous fais confiance, vous pouvez me servir un verre.
Adonis remplit deux verres et en donna un à Doliannah. Il but une gorgée et regarda la jeune serkonienne hésiter, son verre en main. Finalement, elle le porta à sa bouche et but une petite gorgée qu'elle avala en vitesse avant de tousser, provoquant le rire du docteur Calano.
-C'est fort ! gémit-elle alors qu'il riait toujours. Mais ce n'est pas mauvais.
-Tant mieux si vous aimez, répliqua le docteur. Alors, cette journée ?
-Très intéressante, mais épuisante, avoua la jeune serkonienne.
-Vous êtes faible, il est normal que cette journée soit épuisante, d'autant plus que ce n'était pas de tout repos aujourd'hui. Que diriez-vous de prendre un bain ?
-Un bain ? répéta Dolly, surprise. Je n'en ai pas pris depuis des mois. Je me lavais avec un évier, c'est tout ce que nous avions... avec Epinda.
-Eh bien je vous en propose un, qu'en dites-vous ?
-Avec plaisir ! Mais je finis mon verre avant.
-Vous avez le temps, je vais le préparer, dit le docteur en reposant son verre vide.
Le docteur entra dans la salle de bain. Doliannah finit son verre en grimaçant légèrement puis prit les verres et alla dans la cuisine pour les nettoyer. Quand Adonis revint, elle venait de sortir de la pièce.
-Qu'avez-vous fait ? demanda-t-il.
-J'ai nettoyé les verres, répondit-elle. Où dois-je ranger la bouteille ?
-Vous n'avez pas besoin de faire tout cela, je peux le faire moi-même. Vous n'êtes pas ma domestique, Doliannah, vous êtes mon assistante, mon invitée. J'apprécie ce que vous faites mais vous n'en êtes pas obligée.
-Excusez-moi, Adonis, mais je me sens coupable sinon. Vous m'avez sauvé la vie et vous m'avez aidée, je me dois de vous remercier.
-Vous ne me devez rien, je n'ai fait que mon devoir, répliqua le docteur. Bref, votre bain est prêt, prenez les vêtements que vous voulez, demain, nous irons vous en chercher des nouveaux.
-Cela ne vous dérange pas que je reste ? demanda-t-elle.
-Pas du tout ! Je suis même rassuré en vous sachant à mes côtés, je ne voudrais pas qu'il vous arrive quelque chose. Je suis ravi de pouvoir vous aider, vous pouvez rester aussi longtemps que vous le voulez. À moins que vous ne vouliez toujours quitter Karnaca...
-Non... je... Je ne partirai pas. Pas maintenant en tout cas. Peut-être jamais... Merci infiniment, Adonis, je resterai un peu.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top