Variabilité des désirs sexuels des femmes par associations
Possiblement les femmes (les hommes aussi ?) associent-elles une manière de sexualité, leurs humeurs et pratiques, avec un certain « air » du partenaire, avec la « figure » qu'elles lui ont fixée, une image qui réalise chez elle un abord sexuel spécifique où leur conditionnement modifie leurs ébats. Elles ne songent pas par exemple à consommeravec le mari comme avec l'amant, elles deviennent tout autres selon la conception qu'elles se forment de la masculinité de leur amant, et l'évocation d'une expression idiosyncratique d'homme suffit à imprimer en elles un désir particulier. Typiquement, la même qui réclame au foyer de longs préliminaires avant de consentir à prêter un corps vêtu de façon pratique et inesthétique, se jette à l'extérieur directement à la ceinture d'un autre avec poses lubriques et lingeries fines. Elle n'envisage pas même la possibilité d'une inversion des rôles, qui lui semblerait une aberration révoltante et qui s'oppose en elle en un blocage psychologique pareil à la classification préambulaire et fermée d'un homme en ami ou en amant. Si elle s'examine bien, une femme, au souvenir de tel homme qu'elle a connu, sent un désir unique qui se rapporte à la représentation de cet homme, différent de tous les autres hommes ou catégories d'hommes qu'elle a connus, et c'est une représentation qui peut largement être indépendante de la nature-même de cet homme : elle éprouve des envies distinctes en fonction de l'image qu'elle s'en fait, selon par exemple qu'il lui paraît intellectuel, viril, rassurant, subversif, vulgaire, etc. Or, ce cloisonnement de fantasmes, par association d'un être non avec ses capacités mais avec une forme antérieure et issue d'une imagerie qui n'a pas forcément de rapport étroit avec sa réalité – il peut s'agir d'une impression de charisme, d'une posture générale, du timbre d'une voix ou des connotations d'une profession, toutes choses qui ne dépendent pas toujours d'efforts et qui se trouvent souvent fortuites –, tant d'associations départies de l'idée de santé physique ou mentale (il ne s'agit pas d'indiquer une préférence pour une beauté ou une sagesse), me paraît beaucoup plus propre aux femmes, parce qu'un homme ne se soucie pas tant de varier des manières de prendre que de les réaliser comme il peut suivant ce que la femme accepte – je veux dire que, s'il choisit des femmes qui ne lui inspirent aucun dégoût, il varie sa sexualité presque exclusivement selon le goût de sa partenaire, garde à l'esprit ce qu'il voudrait faire mais ne s'y essaie qu'à la mesure de ce qu'elle consent, parce que la jouissance mâle se situe surtout dans celle qu'il procure à la vision des abandons qu'elle offre. Plus uniment, un homme actif baise selon ses propres humeurs, il ne se soucie de l'identité de la femme qu'en relation avec ce qu'elle aime recevoir, tandis qu'une femme fait fluctuer ses humeurs de sexualité selon la représentation de celui avec qui elle couche, et devient une femme très différente si son amant lui communique une représentation opposée. Plus nettement encore, quand un homme baise bel et bien une femme, une femme baise une idée d'homme ; un homme ne baise différemment une femme qu'en fonction de ce qu'elle désire, elle baise différemment un homme en fonction de la façon dont elle se le figure – se l'appropriant pratique, bon, sensuel, athlétique, négligeable, etc. À l'inspecter, on trouvera toujours en la mémoire d'une femme que sa manière de baiser variait beaucoup d'un homme à l'autre sans que ces hommes baisassent avec beaucoup de différences ou de différence qu'elle n'eût provoquée, alors qu'un homme ne se souvient pas d'avoir vraiment distingué ses comportements sexuels d'une femme à l'autre, ou seulement que la variation des fréquence et positions sexuelles dépendaient chaque fois de ce que la femme était disposée à permettre. Ce contraste vient de ce qu'il entre plus de rôle en l'abord de la sexualité chez la femme, qu'elle requiert au commencement un entraînement plus artificiel de son désir, qu'elle a besoin de se donner pour elle-même des poses d'actrices qui l'excitent avant d'être vraiment excitée, et qu'elle décide de ces poses en fonction de l'image d'un partenaire, tandis que l'homme, en quelque sorte plus grossier et intègre, est rapidement prêt et ne demande qu'à se repaître du vagin sans s'interroger par exemple si c'est un jour où il peut ou s'il aurait tort d'en avoir envie. La femme intellectualise un rapport et même son rapport pour vérifier si elle sent l'opportunité d'un rôle qu'elle pourra s'attribuer dans l'objectif de se pourvoir d'une envie qui naît de son positionnement même par rapport à lui, tandis que l'homme n'écoute que sa pulsion conquérante et constate avec curiosité ces mouvements et variations de chattes qui, lorsque la femme est propice, l'échauffent extrêmement avec la sensation d'étrange et radicale exception. Une femme prétendra sans doute que la différence de son attitude procède de la différence même de la performance des hommes, parce que se présenter furieusement libidineuse envers un homme sexuellement décevant serait pour elle absurde et frustrant ; or, elle doit reconnaître que l'homme souvent n'a de « performance » qu'en fonction de la manière dont elle se présente à lui, et sa mémoire juste et franche, impartiale si possible, ne lui fera pas trouver qu'en-dehors de sa façon d'enflammer les hommes qu'elle a aimés il y avait en moyenne entre eux tant de distinctions (c'est plutôt pour exprimer ici, si l'on m'entend, non une flatterie à l'égard des hommes, mais que les hommes sont en général mauvais, faute de psychologie plus que rudimentaire) : elle se sentait seulement un exotisme plus valorisant à sucer la bite de son amant que celle à peu près identique de son mari, et s'imaginait plus de mérite à se faire valoir auprès d'un mâle libre que d'un époux déjà acquis. La femme à travers l'homme se regarde dès le préalable, elle n'agit sexuellement, en fonction de l'image de l'homme, que pour se pourvoir d'une image qui la facilite – c'est avant, peut-être, que sa frénésie naturelle, dans le vrai plaisir qui évanouit le calcul, la reprenne au cœur de la mêlée.
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