Table des accusations inutiles

J'ai songé, à force de recevoir les mêmes commentaires dénués d'arguments, qu'il y aurait peut-être un profit à renvoyer mes calomniateurs, au moyen d'un article, à une Table des accusations inutiles, un peu comme Schopenhauer dressa la liste des procédés de la mauvaise foi, à dessein de ne plus m'épuiser à y répondre. On sait quels égards j'accorde à mon temps, et je veux tenter une brève taxonomie des bêtises qu'on me rétorque régulièrement, de façon à pouvoir par numérotation y diriger le contradicteur. Je ne me soucierai pas de classer avec une grande propreté ces diverses réparties : pour ce qui m'intéresse, il suffit que je les indique aussi exhaustivement que possible, et que j'utilise des chiffres pour référence :

1. « Cela dépend : il y a en tout du bon et du mauvais, la vérité est toujours au milieu » (et autres proverbes similaires).

2. « Vous généralisez. Il y a des exceptions. Il faut relativiser. »

3. Étalage de concepts et d'abstractions invérifiables et non opposables. Introduction de théories absconses avec ou sans terminologie. Postulats sans fondement argumenté ou réduction du débat à un petit nombre de principe sans justification, défaut également appelé « pétition de principe ».

4. « Un auteur très réputé, ou telle référence estimée, n'est pas de votre avis (variantes : « j'expose ma culture sans rien préciser », et : « vous me faites penser à », pour discréditer ou changer de sujet). « Allez lire telles pages innombrables ou tel article spécialisé que je ne vais pas résumer. Vous n'êtes pas assez qualifié pour en parler », ou « vous manquez d'expérience. »

5. « Je me range du côté du nombre : la plupart des gens savent l'inverse de ce que vous dites. Vous êtes seul dans votre position. »

6. « Vous êtes trop long. Vous êtes pédant. Vous êtes obscur. Vous écrivez mal. »

7. « Vous faites semblant d'avoir cet avis. Vous n'êtes qu'un personnage. Vous parlez par pose sociale. Vous affectez ou vous jouez. »

8. « Vous avez une raison personnelle et cachée de dire cela, amertume ou rancune. »

9. « Vous êtes insensible, pas solidaire, égoïste, sans humour, sans légèreté, grincheux, misogyne, inhumain. » Son corollaire fameux : « Vous êtes blessant. »

10. « Vous êtes entêté, aveugle, absurde, fou, dangereux ou malade. »

11. Oralités, grossièretés, ironie, quolibet, insinuation ou injure.

12. « Tout ne se résume pas à la Raison » (notamment quand elle contredit l'auteur). « Aucun argument ne peut venir à bout de mes postulats. Vous abordez les choses trop en scientifique. Vous négligez l'intuition. »

13. Différents procédés de négation, parmi lesquels : « Je ne réponds pas vos questions ou à votre argument principal qui m'embarrasse. Vous êtes à côté du thème, vous êtes hors-sujet, je ne veux pas m'attacher à cet aspect que vous dites » (alors qu'il est manifeste que vous traitez assez directement du sujet).

14. « Vous avez tort mais je ne vous dirai pas pourquoi (pas envie, pas le temps, vous êtes trop têtu...) », et toute idée de gâchis ou défaut imprécisé : « Dommage que vous disiez cela, vous êtes passé à côté », etc. Toute fermeture qui se traduit par une formule de clausule pour vous faire taire quand la discussion n'est manifestement pas terminée : « Bonne soirée, Salutations, Je vous souhaite de trouver la réponse », etc.

Je proposerais alors, pour clarifier mes objections, de signaler ou par ordre d'importance – « Imp » – ou par ordre chronologique – « Chro » – les numéros de ces inepties quand il y en a plusieurs ; et par exemple, pour répondre succinctement à une réplique comme :

« moui moui, je commence à la connaître, votre pensée, il y a du bon et du mauvais, trop prolixe et ampoulée à mon sens, d'ailleurs, je fais comme vous et ne lis pas toujours tout jusqu'au bout. Peut-être avez-vous raison, peut-être pas. Nous ne serons jamais d'accord et c'est très bien ainsi. Passons à autre chose. »

... j'expliciterais, après avoir indiqué le lien de cet article, la codification suivante :

« Chro : 11, 1, 6, 14 »

Ou encore pour :

« mais je rêve, c'est bien notre Bouvard et Pécuchet parano qui m'appelle ainsi à la rescousse ! Ah ! pour sûr, vous ne changez pas vous ! quoique cette manière de balancer impromptu soit encore plus goujate que vos commentaires embrumés habituels. »

...je codifierais ainsi :

« Imp : 11, 10, 4 »

Cependant, je me connais : n'ayant pas coutume de laisser publier des saletés, sans doute les supprimerai-je, ce que je ferai ou immédiatement ou peu après les avoir numérotées afin que mon détracteur fût loyalement informé de mes raisons de bannir son message.

Post-scriptum sous forme de jeu : Classer par ordre, chronologique ou d'importance, les accusations inutiles présentes dans la réplique suivante :

« face à un primate il n'y a rien d'autre à faire. Mais su le primate savait lire il verrait qu'il y a des réponses. Sauf que quand on est enfermé dans sa tête, on ne sait pas lire les autres, et ça vous l'avez maintes fois prouvé. L'actualité de la poésie ? Bah cherchez la vous même, faites donc un effort pour une fois. Et ne croyez pas que vos vers de mirliton aient quoi que ce soit à voir avec de la poésie. Sur ce, je vous bloque car vous répondre me saoule presque autant que de vous lire. Je suis loin d'être le seul que vous saoulez. Si vous etiez capable de vous remettre en question vous le sauriez depuis longtemps. »

Post-post-scriptum : L'avez-vous remarqué ? Ma numérotation est moins hasardeuse que je ne le suggérais en introduction ; en effet, plus le numéo est élevé, plus le correspondant signale un esprit de fermeture et une malintention caractérisée. Ainsi, si l'on voulait tenter de mesurer de façon approximative le degré de Stupidité rhétorique (appelé S) d'un interlocuteur, on appliquerait, selon mon échelle des Accusations inutiles (appelée A), la formule suivante, où P représente le nombre de Propositions à analyser :

(caractères non pris en charge par Wattpad) S égale moyenne-de-A sur P

... ce qui (comme je n'ignore pas mon piètre niveau en mathématiques) est certainement mal transcrit mais est supposé se lire : la stupidité rhétorique de mon interlocuteur est égale à la somme des numéros de ses accusations inutiles divisée par le nombre de propositions analysées. C'est ainsi que, dans l'exemple : « Tout se vaut. Mais vous êtes un âne. », la Stupidité rhétorique se calcule : S égale (1+10)/2, soit 5,5 !

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