Ne laisser personne se dégrader
Une de mes garanties de ne pas déchoir, c'est de ne pas laisser mes contacts se dégrader : je continue ainsi à entretenir mon esprit critique, et, comme je suis dur en commentaires, j'incite à l'exigence de mes correspondants, tentés peut-être par des représailles. Ce m'est une éthique : ne pas tolérer la facilité, conserver mon intransigeance, et demeurer au sein d'une compagnie lucide que je n'abandonne pas complaisamment au déclin. Et tant pis s'ils me haïssent : ils me quitteraient de toute manière, faute de complicité intellectuelle et artistique – car on s'offusque toujours de ceux qui diffèrent et auxquels on ne veut point ressembler. Moi-même je ne puis les supporter dès qu'ils n'attendent plus que des compliments. Ainsi leur remarqué-je les défauts que nul de leurs amis ne leur reprochent, et, s'ils sont bêtement rancuniers, ils m'en veulent de ces assauts qu'ils ne peuvent comprendre, en appellent vite à leurs fidèles élogieux, tandis qu'au contraire s'ils restent curieux d'évolutions donc d'objections, ils me rendent leur gratitude, et s'étonnent avec plaisir qu'on trouve enfin à leur remontrer de pertinentes nuances : cela – qui sait ? – peut les revivifier. C'est pourquoi on doit toujours conserver des adversaires actifs pour se maintenir éveillé : au fond, les meilleurs alliés de votre grandeur sont toujours ceux qui vous piquent avec le plus d'assiduité et de perspicacité. Eh ! sans mentir : comme j'aimerais avoir un proche aussi impitoyable que moi !
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