Amalgame de la patience et de la sagesse

On a tort de penser qu'un signe manifeste de sagesse est la patience ; c'est un amalgame très fréquent : on confond l'habitude de l'innocuité, qui change progressivement un caractère en longanimité, et ce qu'on croit les attributs de l'esprit, modération, pondération, tempérance, qui sont, en passant, d'autres préjugés relatifs à la grandeur. On fait de certaines expressions extérieures des gages de profondeur – air calme, mine imperturbable, démarche lente et voix posée –, et l'on s'empresse d'y associer des qualités que rarement confirment une attitude et un discours : qu'on voie bientôt ces gens s'agacer et devenir dénigrants du moindre contradicteur ! Toute leur vertu est en pose – en pause, oserais-je écrire –, et dès qu'on les agite sur ce qui les touche, notamment sur leur prose, fussent-ils des yogis entraînés (ce sont des méditatifs dont l'art est surtout à mépriser et à nier ce qui les trouble), ils s'offusquent fort et, plutôt que soutenir un combat, ils vous ignorent et fuient, incapables et indésireux d'arguer de leurs raisons. Qu'on regarde bien à ce qu'il y a de commun à ces « patiences » qui répugnent à se justifier et qui, s'ils y sont acculés, se renfrognent comme des enfants vexés : ce sont des gens qui ont acquis l'usage d'attendre parce qu'ils ne font rien, parce qu'ayant adopté la coutume de ne pas agir ils se sont emplis d'une langueur qu'on mêle mal à propos avec l'expérience sûre des vieillards, apanage logique des : lecteurs, écrivains, prêtres et psychanalystes.

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