Commenter sur les réseaux sociaux
Plus une personne qui « publie » dispose de contacts sur un réseau social, moins elle a de temps à consacrer à ses commentateurs, particulièrement à ceux nuancés qui ne se contentent pas de signaler un engouement de « fans » qu'elle préfère entretenir et auquel elle se sent tenue de répondre ; par conséquent le nombre croissant des contacts réduit son usage de se confronter à la critique et de garder son sens critique : elle expédie plutôt les subtils qui l'importunent et auxquels elle n'a guère de minutes à accorder, dans le lot ; or, pour assumer une telle négligence sans culpabilité, elle a besoin de se figurer que la subtilité contradictoire est toujours une variété de gêne ou d'agression, et c'est logiquement qu'elle s'accoutume à la considérer uniquement comme un propos vexatoire et inconstructif – toute sa pratique ne consiste plus qu'à vérifier qui la conforte et à lui attribuer l'encouragement et la sympathie qui conviennent.
Par ce côté, j'ai tort de commenter leurs articles, car il est certain que les critiques que j'y expose seront toujours mal entendues et se solderont invariablement par une variété d'insulte à mon encontre, et c'est ce qui n'arriverait guère si je me contentais d'écrire à des gens de petit cercle. D'un autre côté, malgré la brutalité de retour que je suscite, il y a inévitablement, parmi le nombre considérable des contacts de mon hôte, quelque témoin embarrassé de l'outrage qui m'est rendu, qui manifeste cette injustice, et par lequel je puis plus probablement que chez un auteur de peu d'adeptes faire la connaissance de gens distinguables et que je pourrai admirer.
C'est donc au choix : si j'aspire à converser en finesse, je dois élire un contributeur aux fréquentations rares ; si plutôt je désire faire une rencontre intéressante, il me faut risquer d'être injurié devant beaucoup de témoins. Dans les deux cas, mes intentions sont inchangées, car je ne lis toujours que les profils dont les articles me font réfléchir, et les commente infailliblement si j'y trouve un compliment à faire ou une objection à apporter, de sorte que c'est incidemment si mon interlocuteur est méconnu ou d'une certaine notoriété : moi, je reste équanime et égal.
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