Vers l'Amont

Ils m'ont tué ça, impitoyablement, ravagé sans même le savoir, roulé dessus et laminé. Ils me l'ont tué, abattu en plein vol comme on descend les oiseaux pleins d'espoir : il n'y a plus en moi que le mockingbird. Mon chant est perpétuellement une satire, et il perce désormais sans toucher ; c'est insensiblement qu'il atteint l'esprit ; il s'est comme condamné à un tel mode. Par mon travail acharné, j'ai abouti à la fine pointe de la raison, mais il me manque tout ce à quoi, par la raison seule, je ne puis accéder : le sentiment pur, l'état inaltéré du sentiment, l'essence du sentiment. J'ai acquis le froid réflexe de disséquer les esprits ordinaires, je n'ai pas acquis la discipline de l'épanchement moyen. En cela, je ne suis pas encore une littérature. Un domaine m'est hors de portée : je ne sais pas dire le beau inaltéré des passions. Et la conscience de cette lacune m'est plus douloureuse qu'on ne peut imaginer. Je me devine, dans mon art, une limite et un handicap. Je ne suis pas complet. Tout véritable artiste aspire à être total dans sa spécialité. J'ai raté cela.

N'en pas douter, ne pas se fabriquer d'illusions : a-t-on déjà vu un écrivain ayant besoin de musique pour sentir et soutenir des émotions normales ? A-t-on déjà vu un romancier éludant le sujet de l'amour ? Un auteur s'est-il déjà méfié de ses souvenirs au point de les exclure de sa production ? Je ne me suis pourtant pas défié d'explorer le pathos, je n'ai reculé devant aucun tabou, je ne me suis pas économisé et j'ai âprement lutté contre tous les stéréotypes, mais cette exploration n'a permis que de définir les contours d'un territoire douteux et mis à distance, où tout semble faux, dont les indigènes ne sont conformés qu'à des usages louches, aux frontières marquant chez moi le commencement d'une insigne répugnance. Ce furent là mes découverte et conquête capitales, j'y ai planté un drapeau absolu avec mon inflexible droiture, drapeau raide bardé d'avertissements, et pourtant j'ai ignoré, au sein de cette carte, l'harmonie interne du relatif, l'art caché loin derrière ce mécanisme habitué de la pauvreté et de la laideur, jusqu'à la beauté celée dans le mensonge et l'imbécillité : j'ai manqué de volonté généalogique pour repérer l'origine de la déviance, m'étant contenté de ce constat, aveuglant d'inédit, de la turpitude comme victoire, ébloui par mes éclaircissements successifs alors que c'est sûrement là, en-dessous ou derrière, que se situe le trésor de la vérité des affects humains. C'est bien avec un souci scrupuleux d'objectivité et de vérité que j'ai étiré et jugé la faille énorme des effusions contemporaines – je n'ai jamais rien sali à dessein –, mais de dégoût, après ces explications, je n'ai pas poursuivi l'analyse jusqu'à chercher la cause de cette corruption ni n'ai voulu observer en amont le point initial de toute cette mauvaise histoire. J'ai vu et examiné un courant pollué, mais stupidement je n'en ai pas remonté le cours vers la source immaculée et pittoresque, vers la source du mal où tout reflue peut-être jusqu'au bien. J'ai encore échoué, même ayant voyagé mieux que beaucoup d'hommes et rapporté des images et des réflexions plus exactes, plus dures comme le diamant et limpides comme le cristal. Je n'ai pas été encore assez profond, assez haut dans le soulèvement du mauvais vernis, de la crasse cumulée, de cette patine qui suinte. J'ai expliqué la couleur nauséabonde mais je n'en ai pas gratté l'enduit, négligeant que, sous toute vase, on trouve des roches et parfois des pépites. J'ai certes fixé le préjugé, révélé et défini, mais je n'ai pas rétabli l'émotion antérieure au préjugé. J'ai considéré qu'il n'y avait pas d'émotion, qu'il n'y en avait jamais eu, que l'émotion était un de ces dieux aussi faux que les autres, au lieu d'émettre l'hypothèse que l'émotion vraie n'a été que dégradée, que la fange l'a recouverte, que quelque chose a altéré la beauté de l'émotion qui exista pure, une fois, il y a longtemps, et dont il doit demeurer des ruines tièdes, peut-être des fumées, voire de ponctuelles reviviscences à blanc. J'ai percé à jour la teneur du préjugé, je n'ai pas percé à jour la teneur du sentiment. Je n'ai pas été au-delà de la corruption. Infra. J'ai abandonné : j'ai sondé dans le temps présent, je n'ai pas auguré dans les temps principiels. Je n'ai jugé que la couleur et l'espace, tout le visible. C'est vrai pourtant que ce visible est devenu à peu près la totalité. Ou c'est parce que j'ai l'œil perçant au présent. Je n'ai pas inspecté l'immatériel des strates passées. Voici ma Faute. J'ai négligé la distance comme le myope.

Par cette insuffisance, j'ai manqué à ériger des statues et à semer les graines artistiques de l'ivresse sentimentale. J'ai renoncé à bâtir sur ce sol : ayant perdu la foi en l'émotion, je n'ai pas voulu m'en servir. Il n'y a plus eu, dès lors, dans ma vie, que des mélodies étrangères pour soulever en moi quelque humanité, comme un vestige, comme les braises d'un très ancien feu que n'a cessé de recouvrir un froid immense. Ces élans préétablis me servaient de modèle à la compassion, comme autant d'artifices pour m'entraîner, pour comprendre les autres et pour me permettre surtout d'oublier provisoirement qui je suis devenu – et peut-être, puisque j'y songe, écrirais-je parfaitement un jour si je parvenais à oublier complètement qui je suis. Je pense en tous cas à tout ce que j'aurais pu écrire si je ne m'étais pas empêché toujours d'essayer de leur ressembler. Tous leurs ors s'étant révélés contrefaçons, je me suis même défié de l'or véritable. J'ai eu recours à des voix, à des trucs et des typicités, je m'en suis inspiré ponctuellement pour sentir et faire sentir sans légitimer, comme on savoure avec précaution quelque plat qu'on sait empoisonné ou narcotique, rien que pour l'effet, comme drogues muséales, de façon à pouvoir exprimer l'essence du cœur qui manque au mien, tari pour échapper à leur sinistre exemple, si totalement asséché... c'était longtemps à désespérer d'être. J'ai abandonné ce qu'il y avait en moi d'harmonieux et de fluide, en quoi consistait tout l'éclat qu'ils pouvaient comprendre, parce qu'il leur était à portée et parce que tout ce qui est à la mesure de leur compréhension m'est une vulgarité et une injure, en somme parce que cette tendresse, cette atteinte en moi, était faite de leur matière à eux, inextricablement viciée. J'ai peut-être confondu le foncier et l'intrinsèque, je veux dire peut-être ne sont-ils pas au fondce qu'ils sont devenus. Pourtant, impossible de ne pas associer une façon de faiblesse ou de décrépitude à ce qu'ils peuvent ressentir ou concevoir. Et le pire, malgré ce verdict implacable, c'est que j'avais aimé, oui, et aimé avec panache – je m'en souviens tant que c'est à crever de tout ce qui a cessé, de tout ce qui s'est arrêté en moi, de tout ce qu'ils ont emporté sans le savoir, de tout ce qui a passé, découragé et défait sous la honte de ce qu'ils sont et que j'exècre comme la sénescence de l'espèce. J'avais cette affection immense pour tout, affection par défaut, avec le désir innocent et étonnamment vaste d'être aimé en retour d'un amour de pleine lumière. J'avais un amour plus ardent et spontané que la plupart des enfants, comme si j'étais fait pour aimer et pour me faire aimer. J'avais confiance, le monde devait me surpasser en attendant que je le rejoignisse. Je croyais en la fière supériorité de l'homme et de la femme comme s'ils étaient exactement leur image, comme s'ils équivalaient sans faute à l'orgueil de leur image. Je ne savais pas l'hypocrisie, je le jure : je ne mentais parfois que pour sauver les autres de la déception. J'étais un enfant, et donc je ne doutais pas de tout ce qu'il y avait à apprendre. Je ne soupçonnais pas la Mascarade. Je les prenais pour ce qu'ils semblent. Combien j'ai écouté de chants, vu de films, ressenti d'émotions ! J'aimais tant cela que j'aurais voulu en écrire, avec tout le transport et même l'illusion du transport, cette illusion que je ne pouvais pas savoir encore ! Je me rappelle que c'est ce que je voulais écrire : la transmission de l'amour en moi, non tant par souhait de plaire que par désir de contribution, ce n'est bien qu'à cette condition que je voulais intéresser. Je voulais traduire avec le plus de force possible ce fond universel d'élan passionné, la flamme humaine que je supposais aussi naturelle et profonde que la lumière et la chaleur, j'adorais tant le pathos ! Puis j'ai grandi, vu, compris : non, des bougies, tout ça, des candélabres étagés ; l'homme avait cessé d'être l'enfant ouvert et curieux s'il l'avait été un jour. Un calcul omniprésent, si routinier, une telle méfiance accoutumée que le sentiment lui est devenu, en plus du travestissement, une inconscience. Normalité sociale qui enjoint d'altérer son rêve et qui tient à le conserver dans l'oubli même de sa dénaturation. Vieillir, voilà que c'est d'abord apprendre à feindre, puis apprendre la feinte comme volonté automatique. Vieillir, c'est manquer au vrai. Vieillir : ne plus trouver du goût aux chants que par imitation. Vieillir : convenir, se compromettre. Le voilà, le territoire que j'ai circonscrit sans erreur : le territoire de l'adulte du présent. Le territoire de l'homme compromis qui est Contemporain. Le territoire de l'homme qui a phagocyté l'Homme en lui. Le territoire de la sempiternelle copie, effacée et ternie à force d'imiter les successions d'usurpateurs de moins en moins convaincants, de plus en plus délavés.

Est-il donc trop tard pour devenir l'artiste que j'aurais aimé ? Je me méfie déjà trop des autres avec leurs mièvreries, leurs accès pathologiques, leurs penchants séculaires. Je ne vois plus que la trame retournée de toute conception humaine, que l'immonde décoloré des illusions, d'une griseur insipide et sans nom dont je porte l'emblème en grand Diagnostiqueur : comment revenir à la clarté intempestive, à la valeur de l'anti-homme moderne, si même la superficialité, puisqu'elle est insue, est devenue parmi nous une profondeur ? Un blasement forcé m'a saisi, un galvaudage de naïveté qui fut une éducation dans la conscience. J'aimais pourtant cet enfant, ce qu'il signifiait, on l'a tant désenchanté, tant trompé ! Est-ce donc fini, finis avant d'être nés au monde la voix tendre, la douceur fiable, les attentions sûres et solidaires, l'authenticité des émois, les innocences et les violons, les violons innocents, la musique sans arrière-pensée ; est-ce mort-né, mort en moi, mort pour toujours ? Alors, comment transmettrais-je pour le temps présent, moi qui n'entends rien comme les autres, moi dont les oreilles n'ont plus d'analogie avec mon « semblable », moi qui ne saurais résonner en lui le moindre grelot honnête, une seule note sans condescendance ni travestissement, moi dont la voix ne porte plus qu'une inaudible blessure ou qu'une cicatrice durcie ? Quels mots emploierai-je qui sauraient l'atteindre, lui qui ne possède plus que des mots grossiers assez répugnants, lui qui ne sait plus penser, sans s'en rendre compte, qu'avec une trivialité que je refuse même d'approcher ? Tout ce que j'en vois et devine m'inspire du mépris, je ne partage plus rien, j'ai déserté le champ des hommes depuis l'âge de son déclin ou depuis simplement que je m'en suis rendu compte : je suis l'anti-Hugo, je ne puis accueillir le matériau humain si corrompu et inessentiel que je le sais, je ne puis plus me l'incorporer, c'est terminé, rien d'eucharistique dans ce pseudo-Christ aux mœurs de bouc, il n'est pas jusqu'au simulacre, même facile, que je puisse tenir sans me renier. Oh ! ce n'est pourtant pas le succès que je regretterais, je me fiche bien du succès, il n'y a jamais de vertu à triompher parmi des sots, mais c'était pour le bonheur, juste pour ça, le bonheur non seulement de ressembler à quelque idéal, de revenir un peu à Adam avant le péché, mais surtout d'exceller en l'homme jusqu'à débusquer l'élixir au sein de la pureté explorée ; même, peut-on seulement écrire en dehors de ça, y a-t-il rien comme un auteur exilé de sa naïveté ? Au lieu d'une telle poursuite, mon sentier, parce qu'il est neuf, étroit et sombre, je le sais ne mènera nulle part, je ne m'y enfoncerai jamais assez pour y tracer une voie belle et reconnue, mon pas est encore trop circonspect parce que j'ai même peur de devenir semblable à ceux qui marchent. Je me rends compte de ce que j'ai perdu d'implication sentimentale, d'immersion émotionnelle, à tâcher de ne pas leur appartenir, et, si je n'ignore pas la grandeur et la nécessité de tout ce que j'ai entrepris et acquis seul, si je continue de trouver qu'ils véhiculent avec eux des siècles d'irréflexions haïssables et puériles, c'est quand même avec tout le transport du fond de l'espèce qu'ils les arborent, tandis que moi j'ai tout abandonné, tous les affects avec le préjugé et comme des préjugés, je n'ai plus accès à ce fond, j'ai tout jeté en même temps que le préjugé ! Je ne puis comme eux tous emprunter mes mots à l'homme pour le traduire, parce que je ne suis plus le prolongement d'un homme, je suis une impasse, le contraire d'une issue, je suis le terme d'une longue étude et la fin d'une race, sans prédécesseur ; je n'ai pas gardé la mémoire d'un homme, je suis une table rase, un anti-atavisme, j'ai renoncé à tout héritage, il ne me reste rien que j'eusse emporté d'avant. Que peut-il rester d'émotion sans une trace ? Quel débouché peut-il exister pour la solitude affermie ? Quel débouché littéraire dans le champ des émotions ? Est-ce que l'émotion n'est pas d'abord foncièrement le souvenir d'un autre ? L'émotion n'est-elle pas avant tout un média et un lien, à la fois un prolongement et une adhésion, c'est-à-dire une solidarité ? Ne suis-je donc pas perdu à l'émotion ? Condamné, comme une porte, contre cet accès-là ? Ne me suis-je pas définitivement verrouillé aux épanchements et aux tendresses, scellé, muré ? J'ai brûlé en moi la terre d'arbres dégénérés dont j'étais le témoin : serait-ce pour que de ces cendres repousse une végétation ? N'ai-je pas déjà tacitement admis que le problème venait du fait de l'existence de racines et de branches ? N'ai-je pas abhorré le principe même de la sève et de la chlorophylle ? Y a-t-il un arbre idéal qui ne ressemblerait presque aucunement à un arbre réel, que je pusse reconstituer ?

D'un autre côté, si je pouvais, si j'aimais... oh ! tout ce qui crèverait en moi en averse et comme l'orage ! Une plaie à vif ! à vif ! Je composerais des hymnes fondamentaux comme l'univers n'en a jamais entendus, je révélerais la force pleinement assumée de l'humanité, sa puissance et son essence tout entières jusqu'à en porter la nouvelle au néant des planètes les plus lointaines et irrespirables, si je pouvais seulement m'en servir, me fier à quelque chose, extraire un peu de bon de ce suc vénéneux des passions idiotes, en opérer la condensation et la sublimation... Mais je ne suis pas une telle plaie humaine et vibrante, je suis le fléau de l'homme présent. Les ères ne verront ni ne liront ce qu'aurait pu être magnifiquement une plaie comme la mienne, une quintessence de la beauté sentimentale telle que je l'aurais comprimée et extraite de manière supérieure si j'y avais cru. Je resterai à jamais une mockingstar – et l'on me détestera parce que je suis un monstre.

Je voulais écrire : « Si l'on savait seulement combien j'ai pleuré en écrivant cela » : mon premier mouvement, c'était pour concéder le fatidique et l'inexorable... Combien c'était perdu, crevé en moi pour toujours, et les tortures de componction et d'étude qu'il me faudrait endurer pour trouver ma pureté, m'y replonger sincère, dépasser la naïveté contemporaine et recouvrir celle de l'Homme vrai, de l'Homme primal, qui n'est plus et dont il ne reste aucun exemple... je voulais écrire cela. Mais je comprends que c'est une expérience qu'il me faudra tenter, que cette autre aventure m'attend : la plongée dans l'onde originelle de la déchéance sentimentale, la remontée généalogique vers l'Amont. Il faut me retremper aux feux rayonnants des forges légendaires, et recouvrer l'ardent volcan de l'homme atténué et pétrifié. Peut-être retrouverais-je ainsi le goût du métal fondu au lieu de paralyser mes élans dans la rouille friable des épées mauvaises de notre époque. Je n'ai que l'analyse pour commencer mon ébauche, mon voyage : mais qui à part moi entreprit jamais telle épopée ? Il ne suffit peut-être que de souhaiter vivre avec ardeur pour que cette quête ne fût pas vaine et qu'elle sentît le soufre ; je dois peut-être simplement renouveler ma capacité à sentir. Si ça se trouve, c'est uniquement un problème de poumon : j'ai oublié comme on souffle, comme on respire, j'ai oublié d'être, moi aussi, n'ayant fait qu'examiner des marionnettes. J'ai besoin d'autre chose, et je ne veux pas trop douter de ma conformation à recevoir et à supporter : si je suis fait comme un homme, il doit me rester de quoi faire émerger le vrai pur de la respiration encombrée et viciée, c'est sûrement un vrai qui ne doit pas tant coûter à l'instinct que cette croupissante végétation. Aussi, me concentrer pour le trouver. Qu'est-ce qu'une émotion, la profondeur d'une émotion ? Il faut que j'y plonge mon esprit et mes doigts ; seulement, je dois le faire sans la moindre intention de salir. Je dois y regarder non tel que c'est, mais tel que ça devrait être, pour revenir au Haut et dans l'espérance d'un Réveil. Je dois soulever la torpeur de mon âme sagace et en faire de l'art sentimental pour bouleverser le monde, pour lui rendre la conscience vive de ce qui a stagné et qui sourd en lui à l'état de somnolence et d'abrutissement, à l'état de conformité et de frustration. Un puissant tremblement de mœurs, comme une vague de révélation, doit surgir, balayer d'évidence cette misère obtuse et insatisfaite, et inonder en la libérant la mentalité de l'homme endormi jusqu'à l'imprégner de fraîcheur et de renouveau. Les eaux stagnantes, non, ne constituent pas le noyau de l'homme, il faut espérer que la vitalité pure se rappelle à l'homme en admiration et en appâts. Il faut croire que le noyau de l'homme dispose d'une longue mémoire, qu'il en demeure à l'état de larve accessible dans la consistance même de la génération.

... N'empêche : tout le mal qu'aura fait le siècle à qui n'ambitionne que d'exprimer l'Homme en l'homme, l'Homme profond perdu de l'homme superficiel ostentatoire. C'est un mauvais, un bien mauvais monde, décidément, pour écrire et pour être : se sentir submergé de sous-entendus et de malintentions, et ne devoir choisir qu'entre se condamner à la solitude ou se condamner à la norme... Il faudrait ne jamais tenir compte du monde, n'exister qu'en son propre cœur pour écrire comme on est en soi, pour développer et épanouir l'enfant en dehors de toute influence, libre, seul, son compagnon, son parangon son meilleur, sans s'opposer à ce qu'il est, lui le monde, rien qu'une bassesse plate et stylée...

Si une géode peut naître de cet effort, je veux qu'elle soit invaginée de pierres à la fois superbes comme d'incontestables joyaux, et mordantes comme des perce-tunnels, ou comme le diamant inquisiteur des impitoyables excavatrices.

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