Une conséquence électorale du Contemporain peu fin

Une conséquence de la façon dont le Contemporain catégorique et manichéen est amené à voter sans considération objective des résultats d'un mandat ni sans examen des propositions alternatives aux oppositions les plus outrées, c'est que, à bien y réfléchir, il n'est plus nécessaire pour les candidats de « faire campagne », le suffrage étant établi d'avance dans l'esprit inerte de l'électeur. Cet électeur, on ne le voit certes plus jamais, à notre époque, retourné dans ses avis, ni même, à considérer objectivement les situations où l'on discute avec lui, convaincu par quelque argument que ce soit : ou il aspire à adhérer et se fabrique alors toutes les excuses et consolations pour perpétuer un président quels que soient sa capacité et son bilan, ou il se dirige vers l'un des deux partis les plus ostensiblement réputés « d'opposition » et il y est tout autant immobile. Ce que M. Zemmour a fait avec ses 7% consiste environ en la totalité de la marge de manœuvre dont est capable un candidat qui n'appartient ni au gouvernement ni à l'opposition historique. Mais, si l'on y regarde bien, ni M. Macron ni Mme Le Pen n'ont déployé d'énormes ressources pour se faire valoir : les Français, pesants, ne sont pas convertibles ; en fait, ils étaient déjà largement sûrs de leur vote, et les candidats avisés de cette réalité psychopathologique n'ont pas estimé utile de dépenser en frais et en efforts de quoi prendre surtout le risque d'une maladresse qui eût pu déplaire. Autrement dit, ils avaient déjà acquis l'image suffisamment grossière dont ils avaient besoin, et il leur était risqué d'en sortir si leur objectif était d'agréer à des Français eux-mêmes grossiers et qu'une nuance inattendue désarçonne et peut renverser.

Et tout logiquement, il n'est donc absolument d'aucune influence d'organiser un débat de second tour, ou bien il adviendra seulement ce qu'il s'est passé il y a cinq ans, à savoir qu'on prétendra qu'un des candidats y a perdu sur la foi de preuves subjectives étayées de codes fort conventionnels, mais uniquement à dessein d'expliquer pourquoi de toute façon on avait prévu de voter pour l'autre. Voilà pourquoi, aussi bien si j'étais M. Macron que Mme Le Pen, dans la mesure où les sondages annoncent un score serré qu'on risque d'abîmer dans les deux camps si l'on intervient, je me refuserais à une telle comédie où l'on feint encore, comme si c'était vrai, que le Contemporain est susceptible d'altérations de point de vue mais où l'on ne fait en vérité que s'épuiser à des éloquences agaçantes. On sait trop qu'il n'en ressort aucune vérité et que le vainqueur est toujours le poseur le plus superficiel, c'est-à-dire le plus à même de se mettre à la faible portée intellectuelle du Français qui ne lit pas et ne se souvient point de que c'est que la raison dont on lui parle quand on évoque Voltaire, sinon la mine plus ou moins agréable de son ancien professeur de français de quatrième.

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