Partie 25
Je venais d'accepter de tourner définitivement une page de ma vie. C'était stressant, ça faisait peur. J'avais peur d'être à nouveau décu, d'être à nouveau malheureuse. Donc j'avais décidé d'y aller doucement, de ne pas trop donner, de ne pas trop faire confiance, de ne pas trop m'investir, de me laisser une petite marge pour moi-même, pour me protéger. Mais je devais avouer qu'avec Demba c'était difficile de se retenir, difficile de cacher ma joie de le voir, difficile de refuser un baiser, difficile de ne pas éclater de rire de ses blagues. Il remplissait à nouveau ma vie et ça faisait du bien
Au début du mois d'Avril, il m'a mis en rapport avec un de ses amis et j'ai commencé à travailler dans une institution de microfinance. J'étais toute contente de retrouver une activité, d'avoir à m'occuper. En plus le travail était super intéressant et les personnes que j'ai trouvées sur place étaient gentilles avec moi. Je devais juste assister Mr Niang, le responsable des crédits et j'ai été bien accueillie. On partageait le même bureau et dès le début, il a essayé de me draguer même s'il était marié et avait des enfants. Comme je venais d'arriver et je n'avais pas trop envie de lui manquer de respect. Donc j'ai été très courtoise et je lui ai dit que j'avais un fiancé. Il a essayé d'insisté, mais je crois que les coups de fil de Demba ont fini par le décourager. Quand j'arrivais le matin, il y avait un message de lui me demandant si j'étais bien arrivée, à l'heure de la pause, il appelait sur le fixe et poussait le bouchon jusqu'à parfois me demander de lui passer Mr Niang. Et c'était une longue discussion sur les problèmes des crédits et des taux d'intérêt. J'étais un peu gênée et je lui demandais par tous les moyens de ne plus m'appeler mais il n'en faisait qu'à sa tête et disait que dans les entreprises, les nouvelles arrivées étaient systématiquement draguées. Donc il voulait marquer son territoire. Mais bon dans l'ensemble l'ambiance était très bonne et Mr Niang s'est montré par la suite très protecteur. Quand Demba venait me prendre, ils restaient longtemps à discuter et ceci a contribué à le rassurer et il appelait de moins en moins dans la journée.
Mais n'empêche, il tenait à toujours être présent. Donc si en semaine, c'était des coups de fil, les weekends on allait se poser parfois chez Adja avec Babacar. Elle adorait recevoir et les copains de ce dernier ne se privaient pas de venir diner et prendre du thé. Ils évoluaient tous dans le même secteur d'activités et avaient fait leur études dans la même ville en France. Ils étaient trois et les deux étaient déjà mariés. Leurs épouses venaient parfois mais la plupart du temps, comme elles avaient des enfants à bas âge, elles préféraient rester chez elle. Mais elles étaient très sympas et l'une d'elle était rwandaise. Josie était un joli brin de femme avec un accent chantonnant très particulier. J'adorais l'écouter parler et raconter sa vie au Rwanda. On ne s'ennuyait jamais avec elle sauf qu'il fallait avoir un sens de la déduction assez poussé car on ne comprenait pas toujours ce qu'elle disait, même si c'était du français. Donc chez Adja, il y avait toujours une bonne ambiance et ces 5 gaillards, malgré leur air responsable passaient leur temps à jouer débilement aux jeux vidéos et quand il y avait un match de championnat, c'était le rassemblement général. De vrais gamins dans un corps d'adulte. Nous on s'installait sur la terrasse et on discutait mais il fallait faire avec des cris qui nous faisaient sursauter. On écoutait souvent Josie, la rwandaise nous raconter sa vie. Elle avait assisté aux tueries durant le génocide et une partie de sa famille avait été tué sous ses yeux. Un soir on était toutes en larmes quand elle nous a raconté comment on a tué son frère devant elle et on l'a épargné. Je n'ai jamais compris la cruauté humaine et comment on pouvait tuer pour une croyance ou une appartenance ethnique. Elle était brave car malgré tout, elle était toujours souriante et bien dans sa peau.
Et ainsi, les samedis chez Adja c'était très cool et cette conviviabilité me faisait un bien énorme. Ici, je devais faire avec une bande de copains aux délires imprévisibles. Mais je crois qu'il subissait tellement de stress à leur boulot, qu'il avait besoin de décompresser de temps en temps. Bien évidemment, il n'était pas toujours ensemble et heureusement. Parfois on sortait seul, moi et Demba, ou on aller se poser chez lui. Mais j'évitais le plus possible ces situations car ça dégénérait rapidement. Je censure certaines parties pour les âmes sensibles, mais on ne faisait jamais « la chose » comme il disait. Il ne me comprenait, il ne comprenait pas mon entêtement à ne pas aller jusqu'au bout avec lui d'autant plus que j'étais « libre » dans tous les sens du terme (toujours ses expressions MDR). Mais ce sont les paroles de maman Fanta qui résonnait toujours dans ma tête. Au début de mon divorce, elle ne cessait de me répéter que c'était maintenant qu'il fallait plus se préserver car les dérapages arrivaient plus rapidement. Et puis faire l'amour sans être marier relevait pour moi d'une grande frivolité et je ne voulais pas être catalogué dans ce lot de filles. Donc malgré la pression de mon chéri et mes propres pulsions, je décidais toujours de stopper à temps et parfois c'était limite.
Ceci a contribué peut etre à faire qu'il était plus câlin, plus tactile, me disait tout le temps qu'il m'aimait. Malgré tout être avec lui était tellement grisant, tellement excitant que je n'y habituais jamais. A chaque fois qu'on devait se voir, j'avais cette petite boule au ventre, ce petit empressement, ce petit stress qui ne s'estompait que quand je le voyais et qu'il me faisait son sourire qui me faisait fondre. Bon, on n'était pas toujours ensemble aussi, et heureusement car j'avais parfois envie de rester tranquillement chez moi à discuter avec maman Fanta et les filles. En plus comme maman Fanta ne l'aimait pas trop, je calculais mes sorties, les aménageait pour ne pas trop la fâcher ou la contrarier. Pour parler de lui, elle l'appelait « sa nare bi » (ton arabe) et je devais toujours lui dire qu'il était sénégalais et je ne comprenais pas trop pourquoi elle ne l'appréciait pas. Mais bon, elle me parlait toujours de Badou et de sa légendaire générosité. En plus ils avaient gardé le contact et l'aidait beaucoup dans ses opérations de dédouanement lorsqu'elle revenait de voyage. Comme malgré le fait qu'on ne soit plus ensemble il venait quand même la voir (car j'estimais que c'était elle qu'il venait voir), j'avais toujours droit à des commentaires le concernant et de temps en temps, on se croisait à la maison. Dans ce cas, je les laissais discutait au salon, mais malgré cela, maman trouvait toujours des excuses pour me faire revenir et me laisser seule avec lui. J'essayais d'être aimable et heureusement qu'il n'insistait pas toujours. Quand il me parlait de nous deux, je lui répétais que j'avais quelqu'un dans ma vie. Mais il ne se décourageait jamais.
Tout comme Moha d'ailleurs, qui même une fois rentré, ne cessait de m'appeler et de me dire le grand amour qu'il ressentait pour moi. Moi qui pensais que ça serait plus simple une fois qu'il serait loin de moi, je m'étais trompé. Heureusement au moins qu'il a pu entrer en contact avec Coumba. Même s'il n'a pas pu la convaincre de rentrer, au moins, il m'a assuré qu'elle allait mieux et qu'elle changeait. Effectivement, quand je l'appelais elle reconnaissait qu'elle a pas mal déconné dans sa vie, mais que maintenant, elle ferait en sorte de rester sur le droit chemin. Je suis retourné voir tata Fatou et elle nous a remerciés de nous investir ainsi pour sa fille. Ça me rassurait de savoir qu'elle allait mieux et avait repris en main sa vie. Un jour je lui ai parlé de Demba et elle était toute contente que nous nous soyons remis ensemble. Elle disait que j'étais en de bonnes mains et que Demba m'a toujours aimé. Je la croyais volontiers et de toute façon, il faisait tout pour me le montrer.
On menait tranquillement notre vie entre petites crises de jalousie et moment câlins. Des crises de jalousie, il y 'en a eu pas mal tout simplement parce qu'il avait des filles qui étaient ses soi disant amies et qui se permettaient d'appeler à n'importe quelle heure et pour n'importe quelle raison. J'ai vite fait de mettre de l'ordre et de lui faire comprendre que s'il veut être avec moi, ses groupies là devaient arrêter. Adja m'avait prévenue qu'il avait une ribambelle de jeunes filles toutes aussi jolies les unes que les autres qui lui couraient après et que certaines étaient des sexfriends. Même s'il m'assurait qu'il n'y avait rien, j'insistais pour qu'il les remette à leur place. Donc quand on était ensemble, il précisait toujours qu'il état avec sa fiancée ou il leur demandait de ne plus appeler. Au bout de quelques semaines, les choses se sont apaisées et comme on était ensemble la plupart du temps, je n'avais vraiment plus trop de raison d'être jalouse. Comme il insistait, un jour on est allé voir son père. Je pensais trouver un vieux monsieur maladif, mais j'ai vu un monsieur, certes malade, mais pas si vieux que ça et aussi très charmant. Il avait des traits avec Demba et ne parlait que français. Il m'a félicité en disant que ça faisait des années que son fils ne lui avait pas ramené une fille. Il commençait à s'inquiéter. On est resté un bon moment à discuter de la France, des raisons pour lesquels il a préféré rentrer et de la montée de l'extrémisme dans ce pays qu'il a toujours aimé. Sa femme était encore là bas et attendais que la dernière finisse ses études pour rentrer. Comme Demba on ne s'ennuyait pas avec lui car il aait beaucoup de conversation et c'est sur le chemin du retour qu'il m'a expliqué qu'il avait un diabète et un cancer de la prostate et qu'il avait subi une opération et allait déjà mieux.
Donc tout allait bien entre moi et Demba mais un jour, Sokhna m'a appelé un jour pour me dire que Pa Ablaye était malade et qu'il ne cessait de me réclamer. Je ne voulais pas y aller et je culpabilisais un peu. Un jour il m'a appelé et m'a demandé de passer le voir car il avait vraiment ma nostalgie. Moi aussi il me manquait, mais je n'avais aucune envie de retourner dans cette maison. Un soir, j'ai fini tôt et j'ai pris mon courage à deux mains pour y aller. A la porte j'ai trouvé une des jumelles qui m'a salué très chaleureusement. Ça m'a étonné et je lui ai dit que je venais voir Pa Ablaye. Elle m'a fait entrer et il était vraiment malade. Je m'en suis voulu de n'être pas venu plus tôt alors que Sokhna me disait toujours qu'il n'était pas bien. Il m'a pris les mains et était tellement content de me voir qu'en ai versé des larmes. Malheureusement, il a commencé à me parler de Rassoul et de sa nouvelle femme qui ne faisait qu'amener des problèmes. Je n'avais pas envie d'écouter et je me demandais quel genre de problème on pouvait amener en à peine 6 mois de mariage. J'ai changé de sujet en lui parlant de la situation politique et il s'est assis et a tiré une tonne de journaux du tiroir de son lit.
- depuis des semaines personne ne me lit mes journaux. Si tu savais comme tu me manques.
Ça m'a touché et j'ai commencé par les journaux les plus récents. Il s'était assis sur le lit et on discutait en rigolant, quand j'ai entendu la voix de maman Oussey. Je me suis crispée et j'ai rapidement pliée les journaux pour dire à Pa Ablaye que je reviendrais.
- c'est à cause d'Oussey ? Elle a voulu te faire partir mais elle n'aura pas la paix. Sa nouvelle belle fille est pire qu'une peste. Rassoul m'a demandé de te parler. si tu veux son bonheur accepte de revenir avec lui.
J'étais déjà debout et je ne voulais pas le décevoir en lui disant mon avis sur tout ça.
- Mais Pa, tu oublie qu'il est marié.
Il a secoué la tête
- ce n'est pas une femme ça.
Avant qu'il ne développe je lui ai fait bise pour partir et c'est sur le pas de la porte que j'ai croisé mère Oussey.
- Fall, dis je le plus respectueusement possible et déjà sur le point de partir.
Elle m'a tiré à elle et m'a fait une accolade
- Diallo, diallo. Tu es venue voir ton père ? Il est malade et ne cesse de te réclamer. Toi, tu es gentille. Tu fais toujours partie de la maison. Viens quand tu veux. Pa est toujours attaché à toi et c'est parceque tu es bonne. Que Dieu te paye ma chérie
J'étais étonnée par autant de paroles gentilles de la bouche de maman Oussey. Je l'ai regardé un moment étonné et bouche bée sans trouver de mot. Je m'attendais à des paroles méchantes et comme d'habitude je m'étais dit que j'allais partir sans rien répondre. Mais là...
- je le considère comme mon père. Il a toujours été bon pour moi donc c'est normal.
Elle m'a souri et n'avait toujours pas lâché ma main.
- haa ma fille qu'est ce que tu es belle. Machallah. Il faut attendre Rassoul qu'il te voie.
Que dire. Elle me détaillait sans retenue et j'ai tiré ma main. Peut être un peu brusquement. Je ne sais pas, mais tout ça me paraissait bizarre. Je suis donc partie et le soir Rassoul m'a appelé pour me remercier d'être venue voir son père.
- Mon père t'a toujours aimé et considéré comme sa propre fille. Tout ce qu'il veut c'est qu'on se remette ensemble. Même ma mère a mis de l'eau dans son vin.
- Rassoul laisse tomber je t'en prie
- Non jamais. Je t'aime et je ferais tout pour te récupérer. Rien ne sera comme avant. Je ne laisserai plus personne se mettre entre nous.
J'ai préféré raccrocher pour ne plus entendre tout ce qu'il avait à me dire. J'étais passé à autre chose. Comme disait Demba, je ne voulais pas regarder le rétroviseur.
Malheureusement, quelques jours plus tard, il est décédé. C'est Sokhna qui, un matin m'a appelé en pleurs. J'étais en état de choc et je n'arrivais pas à y croire. J'étais déjà au bureau et j'ai essayé de tenir. Mais j'ai finalement éclaté en sanglot et Mr Niang a appelé Demba pour lui dire que je n'arrêtais pas de pleurer et qu'il ne savait pas pourquoi. Il est venu sur le champ et je lui ai expliqué que c'est mon ex beau père qui est décédé. Il m'a ramené chez moi et a tout fait pour me réconforter. A un moment Rassoul m'a appelé et c'est lui qui a décroché et je l'ai entendu dire que je n'allais pas bien et qu'il fallait rappeler. Mais Rassoul s'est surement présenté et il m'a tendu le téléphone le visage grave.
J'ai à peine reconnu sa voix et il m'a informé qu'on allait l'enterrer dans l'après midi et qu'il aimerait que je vienne après. Je lui ai assuré que je le ferais et je lui ai présenté mes condoléances. Il a éclaté en sanglot disant que son père tenait beaucoup à moi. Je ne trouvais pas de mots pour le réconforter et j'imaginais son niveau de tristesse. C'est très dur de perdre un parent. Demba est resté un moment avant de retourner travailler. En fin d'après midi, j'y suis allé avec maman Fanta et tata Fatou. A l'entrée, je ne tenais pas, je me sentais oppressée, j'avais mal, mal de voir sa place à l'entrée vide. Pa Ablaye m'aimait beaucoup. J'ai regretté de ne pas être venu le voir plus souvent, de ne pas être plus présente pour lui. Rassoul m'a aperçu et est venu vers moi. j'ai recommencé à pleuré et il m'a enlacé et il a essayé de me calmer sans succès. Ses tantes aussi sont venues vers moi et tout le monde disait que Pa Ablaye tenait beaucoup à moi et que jusqu'à sa mort, il disait qu'il voulait que je revienne dans mon ménage avec Rassoul car j'étais celle qui l'aimais le plus, plus que ses propres enfants. Tous ces témoignages m'allaient droit au cœur et j'aurais aimé dire aussi tout le bien que je pensais de lui, mais je ne pouvais pas parler. J'étais assise dans la cour sur une chaine et j'étais pliée, la tête sur les genoux à pleurer. Presque toute la famille est venue me réconforter. Même le frère de Pa Ablaye s'y est mis et au bout d'un moment, je me suis calmée. Rassoul était toujours à mes côtés et me frottait le dos pour me calmer.
Quand je me suis relevée, j'avais le visage en feu et j'ai croisé le regard d'Anta sur moi. Un regard meurtrier et tellement insolent. Elle n'avait pas l'air d'avoir versé une seule larme et son visage portait un léger maquillage et j'ai été étonné qu'elle ait eu le temps de prendre soin d'elle alors que son beau père venait de mourir. Je l'ai ignoré et je suis entré dans le salon pour voir maman Oussey. Mais il y avait trop de monde et je suis finalement resté dehors, mais heureusement que maman Fanta et tata Fatou étaient à l'intérieur. On est resté un long moment et comme mon oncle devait aussi venir pour lui aussi présenter ses condoléances, on l'a attendu avant de rentrer.
Demba m'a appelé ce soir et je lui ai parlé de Pa Ablaye et des relations particulières que j'avais avec lui. Il a compris et a compati à ma peine. Je savais qu'il voulait me demander si j'avais vu mon ex mari et que je lui donne des détails, que je le rassure quand à mon amour pour lui, mais je n'avais pas le cœur à calmer ses accès de jalousie.
Les jours suivants, j'étais toute triste. Je suis retournée pour la cérémonie de 3ème jour le samedi en début d'après midi et j'ai pu voir maman Oussey. L'autre femme de pa Ablaye avait quitté Thiès pour venir et elles étaient côte à côte sous leur pagne. Quand je suis arrivée, elle m'a tirée à elle et s'est mise à pleurer. J'ai essayé comme je pouvais de la réconforter et c'est sa coépouse qui s'est mise à parler. Elle m'a remercié et a dit tout le bien que Pa Ablaye pensait de moi.
- A chaque fois qu'il venait à Thiès, ton nom était toujours sur ses lèvres. Ta bonté, ton amour pour Rassoul, ta patience. Pour tout ça, relève la tête ma fille, personne ne t'égalera dans la famille.
Bizarrement, Maman Oussey a enchainé sur la même lancée, disant que j'aimais Pa Ablaye et le considérait comme mon père. Je suis resté un long moment Kiné est aussi venue avec Jules et ses enfants. Jules m'a salué chaleureusement et Kiné comme a son habitude, m'a juste fait un geste de la tête auquel je n'ai même pas répliqué. Jules m'a demandé de mes nouvelles et finalement on a échangé nos numéros. Après la prière de 17h, Rassoul est arrivée avec Anta. J'étais en train de discuter avec Sokhna et après un bref coup d'œil, j'ai continué à parler sans faire trop attention aux nouveaux arrivants. Anta a salué tout le monde sauf moi. C'était enfantin et surtout devant toute la famille et c'est une tante de Rassoul qui l'a interpellé en lui demandant pourquoi elle ne me saluait pas.
- celle là n'est pas ta coépouse. Il faut être correcte, ce n'est pas le lieu de montrer ton impolitesse.
Elle m'a tendu la main et j'en ai fait de même. Ensuite, pour ne pas augmenter à le malaise ambiant, j'ai dit à Sokhna que j'allais dire bonjour aux voisins et je me suis levée pour sortir. je suis resté un peu tard et il faisait un peu tard quand j'ai pris congé et Maman Oussey voulait que je reste pour diner. Mais j'ai décliné disant que maman était seule à la maison et que mon téléphone était déchargée. Elle m'a encore remercié et m'a demandé de venir lui rendre visite de temps en temps et je lui ai promis. Autant de gentillesse de sa part m'étonnait. Sokhna m'a raccompagné et Rassoul est sorti pour me proposer de me raccompagner. J'ai refusé disant que je préférais attendre un taxi, quand Anta est sortie pour lui dire qu'elle avait besoin de lui sur un ton ferme. Je n'ai jamais osé lui parler sur un pareil ton devant des personnes et je l'ai regardé. Il a fait celui qui n'avait pas entendu et m'a dit plus fermement de monter dans la voiture. J'ai hésité. Je ne voulais pas être source de problème et Sokhna m'a presque poussé dans la voiture après avoir lancé un regard incendiaire à Anta.
Le trajet s'est fait dans un silence complet et il avait mis des versets de coran à la radio. Un moment, j'ai osé un regard vers lui et il avait le visage fermé et grinçait ses dents, cette mauvaise habitude qu'il avait quand il était contrarié.
- tu grinces.
J'avais l'habitude de lui faire la remarque à chaque fois qu'il le faisait. Ça l'a au moins fait sourire.
- trop de problèmes.
Je n'ai pas répondu et heureusement qu'on était presqu'arrivé. Je l'ai remercié et il m'a prit la main
- c'est toi que je remercie. Pour tout.
On s'est regardé un moment. J'avais beaucoup de peine pour lui et il semblait vraiment affecté. J'avais juste envie de le prendre dans mes bras et de le réconforter, et je l'ai fait. Je l'ai enlacé et on est resté un bon moment comme ça sans rien dire avant que je ne m'écarte.
- Mon père a toujours voulu que tu reviennes.
- il m'aimait beaucoup. Surement plus que toi.
- c'est impossible. Personne ne peut t'aimer plus que moi.
Il m'a regardé tristement et je n'ai pas répondu. Je n'avais pas envie de continuer cette conversation. Ça ne servait à rien. Il était marié et c'était à la limite malsain. Je suis donc sortie sans rien dire.
Je n'avais pas remarqué la moto qui était juste à côté et c'est quand la voiture est partie que j'ai vu Demba. Il était adossé à la moto avec les bras croisés. Il avait des lunettes noires et le visage fermé. Mon cœur s'est mis à battre plus vite. Qu'est ce qu'il allait penser de tout ça. je me suis approché lentement car il n'avait pas bougé d'un iota. Arrivée en face de lui je lui ai agité la main devant ses lunettes
- where is the sun chéri ?
D'habitude, il rigolait à cette expression. Il mettait des lunettes noires même la nuit et c'est Babacar qui lui sortait souvent cette phrase. Mais il n'en avait cure et disait que la lumière des lampes lui faisait mal aux yeux. J'ai donc tiré ses lunettes et il avait les sourcils froncés et un air grave
- on entre ? lui dis je en lui prenant la main
Il a soupiré avant de me suivre sans un mot. Je savais qu'il était contrarié et à raison. Une fois à l'intérieur, je suis allé dire bonjour à maman et elle m'a posé plein de question sur mon ex belle famille. Elle était déjà couchée et je suis allée me changer avant d'aller trouver Demba au salon. Il manipulait son téléphone et même quand je me suis assise, il a continué de jouer à ses jeux débiles sur son téléphone.
- et ta journée ?
J'essayais de détendre l'atmosphère. Il a relevé la tête et m'a regardé. Un long regard plein d'interrogations.
- Ecoute, je sais ce que tu va penser mais tu te trompe. J'étais à la cérémonie de 3ème jour de mon beau père et Rassou m'a proposé de me raccompagner.
Il a continué à me regarder.
- j'ai essayé de te joindre toute la soirée.
- mon portable était déchargé.
Il a soupiré sans rien dire.
- quand je vous ai vu ensemble dans la voiture, j'ai complètement buggé. Je ne comprends pas. C'était quoi ?
- ce n'était rien, juste un geste de réconfort. Il a perdu son père. En plus il est marié maintenant. C'est fini entre nous
Il a gardé le silence un moment.
- Ok, si tu le dis.
Il s'est levé.
- je voulais qu'on aille manger quelque part, tu viens.
Je n'avais pas le cœur à sortir, pas le cœur à m'amuser
- je suis fatiguée Demba. J'ai des maux de tête. On attend demain, s'il te plait.
Il n'a rien dit et m'a tiré à lui. Je me suis levée et il m'a serré dans ses bras en me regardant fixement. Ensuite, il s'est penché et m'a embrassé. J'ai passé mes bras autour de son cou et j'ai répondu à son baiser. Je savais qu'il avait plein de doute et je voulais le rassurer. Il s'est à nouveau écarté.
- je t'aime Diouldé. N'oublie jamais ça.
- moi aussi je t'aime, n'oublie jamais ça.
Il est parti un peu déçu et je suis allée rejoindre maman Fanta dans sa chambre. Elle ne dormait pas et regardait la télé. J'avais besoin de parler et je lui ai expliqué la réaction de la famille de Rassoul qui ne cessait de faire des éloges. Elle a éclaté de rire en disant que c'était des paroles en l'air et qu'il allait me regretter encore longtemps.
- toi je ne sais pas pourquoi tu me parle de tout ça. Mais si jamais tu songes à retourner là bas, tu verras avec moi.
J'ai éclaté de rire.
- Non t'inquiète. Je ne retournerais pas. Et puis il n'est pas question que je sois deuxième femme. Non, je suis avec mon « naar », même si tu ne l'aimes pas.
- ce n'est pas ça. C'est juste que je sais que Badou t'aime. Il ne cesse de me parler de toi. Il a de grandes ambitions et je sais qu'il te rendra heureuse ma chérie. Je ne veux que ton bien tu le sais. Si tu veux vraiment me faire plaisir, donne-lui une chance. Il t'aime, il est responsable et tu n'auras pas à gérer des détails de belle famille.
Je ne trouvais rien à lui dire. Je voulais certes lui faire plaisir, mais pas en étant avec Badou. Non, je ne voulais plus être avec lui. Pour ne pas la vexer, j'ai promis d'y réfléchir avant d'aller me coucher. Demba m'a appelé pour me dire que finalement il n'a pas mangé et qu'il avait faim. On est resté à discuter longtemps et il m'a dit que demain toute la clique devait aller jouer au foot contre une équipe d'une autre banque et je devais venir supporter. J'ai promis de le faire
Vers 2heures, mon téléphone a sonné et c'était Rassoul. Je ne voulais pas décrocher, mais j'ai finalement pris l'appel. Il parlait doucement et me disait qu'il était mal, qu'il avait envie de me parler, qu'il voulait qu'on se voit demain. Je lui ai dit que j'étais occupé demain, et que je ne pouvais rien pour lui. J'avais vraiment pitié de lui et il m'a retenu au téléphone au moins une demi-heure. Je ne voulais pas couper et je l'ai écouté me parler de son père longtemps. Je me suis endormi avant qu'il ne finisse.
Le lendemain, j'étais vraiment fatiguée et j'avais sommeil. Mais Demba m'a appelé en pleine forme et criant qu'il était allé courir pour se préparer pour son match. Il me faisait rire, on dirait des gamins qui jouaient au navétane. Finalement, je suis allé chez Adja et j'ai trouvé tout le monde sur le pied de guerre. Du grand n'importe quoi. Adja était à fond avec son babacar, le boostant, l'encourageant tandis que moi je charriais Demba. Il aimait tellement prendre soin de lui, je lui faisais comprendre qu'on va le salir, qu'il va toucher à la poussière, mais il se contentait de sautiller en disant que sa place était dans les grands clubs anglais. Il faisait rire tout le monde et toute cette ambiance me faisait un peu de bien après ma triste semaine.
L'équipe adverse était constituée de jeunes hommes bien frais. Il fallait voir nos pauvres chéris courir derrière le ballon comme des âmes en peine. On en rigolait aux larmes. A la mi-temps, on est descendu sur le terrain et on les a bien charrié avant d'aller vers l'autre équipe pour les supplier de laisser nos chéris marquer au moins un but. Le match a repris et ça ne s'est pas amélioré. Juste avant la fin du match, Rassoul m'a encore appelé et je me suis mise à l'écart pour lui parler. J'avais pitié de lui et je ne voulais pas le rabrouer. Je lui ai demandé comment il allait et on a discuté. Il me disait encore qu'il voulait qu'on parle et je lui expliquait que j'étais occupé. Il m'a proposé de venir chez maman Oussey et on pourra se parler car il voulait que sa mère soit présente. Je ne voulais pas et on discutait tant que je n'ai pas entendu Demba venir. Je me suis retourné et il était debout derrière moi. J'ai bafouillé comme un enfant pris en faute.
- tu parles à qui ? M'a-t-il demandé en s'approchant.
J'ai coupé le téléphone sans prévenir.
- à personne.
Il s'est approché et a pris doucement le téléphone. Il a regardé et a vu le nom de Rassoul. Son visage s'est décomposé.
- c'était ton ex mari ?
J'ai hoché la tête.
- qu'est ce que tu me fais là Diouldé ?
Ce n'était pas ce qu'il croyait. Pas du tout. Je lui parlais juste pour le réconforter.
- ce n'est pas ce que tu penses. Il a perdu son père et...
- oui je sais. Tu m'as dit tout ça. Tu ne penses pas qu'il y'a d'autres personne plus que toi pour le réconforter ? Ou alors y'a des choses qui m'échappe. Explique-moi.
Il parlait doucement avec un air désemparé et me regardait fixement.
- rassure-moi, tu ne comptes pas me laisser tomber,
Puis presque dans un murmure
- encore une fois.
J'allais répondre quand Adja est arrivé avec Babacar pour rentrer. On devait tous retourner chez Adja et déjeuner là bas, mais Demba a décidé de rentrer car il était trop fatigué. J'ai compris qu'il était fâché et quand j'ai proposé de l'accompagner, il a refusé disant qu'il voulait vraiment être seul. J'ai voulu insisté mais finalement j'ai laissé tomber voulant lui laisser le temps de bouder. Je suis rentrée moi aussi à la maison et je me suis couchée. Je devais être vraiment fatiguée car j'ai dormi toute l'après midi et c'est vers le crépuscule que maman Fanta est venue comme d'habitude me réveiller car l'heure de la prière approchait et il ne fallait pas dormir à ces heures car on risquait d'avoir un mari djiin.
J'ai appelé Demba et je suis tombé sur sa boite vocale. J'ai encore essayé plusieurs fois et toujours rien. J'ai hésité un moment avant de décider d'y aller. J'ai sonné à sa porte longtemps avant qu'il ne se décide à ouvrir. Il devait être en train de dormir et était étonné de me voir. Je me suis installé au salon et j'ai attendu qu'il aille prendre une douche et se changer. Il est donc revenu tout frais et avec toujours ce petit air boudeur
- ca ne vas pas de circuler à cette heure ?
- je tenais à te voir. Je sais que tu es contrarié par tout...ça et je voulais qu'on en parle.
Je parlais sur un ton hésitant et il a haussé les épaules
- non je ne suis pas contrarié, juste surpris...je pensais qu'on avançait, qu'on construisait quelque chose tout les deux. Rien que tout les deux. Donc je ne comprends pas.
J'ai baissé la tête.
- c'est juste les circonstances Demba. Ce n'est pas comme un inconnu. On a vécu ensemble plus de 3 ans, on a tout partagé. Aujourd'hui je ne peux pas l'ignorer alors qu'il traverse des moments difficiles. Son père était comme un père. On partage la même douleur, c'est normal qu'on se soutienne
Il m'a regardé semblant ne toujours pas comprendre ce que je lui disais.
- ok. Mais es tu sûr qu'il a la même vision que toi de la chose. Peux-tu me jurer qu'il n'essaie pas de recoller les choses entre vous.
Je l'ai regardé un long moment sans trop savoir quoi dire. Non je ne pouvais pas lui assurer cela. Rassoul était toujours en train de dire qu'il voulait toujours de moi.
- tu vois. Donc j'ai vraiment raison de m'inquiéter Diouldé.
- tu dois me faire confiance. C'est de l'histoire ancienne pour moi.
J'étais désemparée, je ne savais pas comment lui expliquer que malgré tout c'était avec lui que je voulais être, c'était lui que j'aimais maintenant et qu'avec Rassoul c'était surtout de l'affection. Non je ne pouvais pas lui dire que malgré le divorce et même son remariage j'avais beaucoup d'estime pour lui.
- ai-je le choix ? Me demanda t-il doucement
Je gardais toujours le silence
- je t'ai dis que je tenais à toi et que je n'étais pas prêt à te perdre de nouveau. Je ferais tout pour ça. Je t'ai demandé de m'épouser peut être pas de manière conventionnelle mais tu n'as pas répondu disant que tu n'étais pas prête et que tu voulais attendre. Je respecte ton choix.
Oui, je n'avais pas trop envie de parler mariage. Trop peur de m'engager à nouveau et d'y laisser encore des plumes. Je voulais prendre mon temps.
- mais c'est tout ce que je peux faire. Si jusqu'à présent je n'arrive pas à te convaincre, je ne sais pas si on y arrivera.
Je me suis levée et je suis allée m'assoir sur ses genoux.
- Je t'aime et je t'assure que dans quelques temps on se mariera. Je te le promets.
Il ne disait toujours rien et je lui ai pris le visage avant de me baisser pour l'embrasser. Au début, il le faisait du bout des lèvres, mais quand j'ai glissé ma main sous son teeshirt, il a gémit et m'a tiré à lui pour répondre avec fougue. Comme d'habitude ce fut le déferlement de sensations, l'escalade des délices. Heureusement la sonnerie du téléphone nous a ramené à la réalité. Il refusait de répondre mais j'ai décroché. C'était sa fille car elle a automatiquement crié « papa ». Je lui ai tendu le téléphone et je me suis levée pour remettre mon soutif et mon débardeur. Il s'est levé pour aller répondre et est resté longtemps au téléphone à lui parler. Je l'ai rejoins dans la cuisine ou il était debout pour l'enlacer par derrière et lui déposer des baisers sur son dos. Il n'avait pas remis son teeshirt et sentait bon. Il a raccroché en envoyant de gros bisous à sa fille, avant de se retourner.
- pourquoi tu t'es rhabillée. Je me donne tellement de mal à tout enlever, dit-il en glissant ses mains sous mon débardeur
- pervers, lui ai-je répondus, en écartant ses mains.
Il m'a tiré à lui et on est resté un moment comme ça. J'avais la tête sur sa poitrine et j'entendais les battements de son cœur
- Saran va venir pour les grandes vacances. J'irais la chercher dans quelques semaines, le temps de prendre quelques jours de congé. Tu va enfin la connaitre.
J'étais ravie de connaitre enfin sa fille, même si j'avais un peu peur qu'elle ne m'aime pas. Je n'ai jamais eu à côtoyer des petites filles de son âge et je me demandais si j'y arriverais.
- et si elle ne m'aime pas ?
Il m'a écarté et m'a regardé étonné
- pourquoi elle ne t'aimerait pas ?
J'ai haussé les épaules.
- parce que je ne suis pas sa mère.
Il a rigolé avant de retourner au salon pour s'habiller. Je l'ai suivi.
- bah, il va falloir qu'elle t'aime parce que moi je ne peux plus vivre sans toi.
Comme il faisait tard, il m'a ramené à la maison et est descendu pour dire bonjour à maman Fanta. Au lieu de rentrer, on est resté encore un bon moment à discuter au salon et j'ai quand même promis de reprendre mes distances avec Rassoul
Le lendemain le train-train quotidien a repris son cours. Malgré les réticences de Demba, je continuais à discuter avec Rassoul de temps en temps et je le réconfortais du mieux que je pouvais. Mais sans plus. Un jour, alors que je déjeunais avec Adja à la pause, je lui en ai parlé et elle m'a remonté les bretelles disant que Rassoul était un grand garçon et qu'il pouvait gérer sa peine seul ou avec sa femme. Même quand je lui ai précisé qu'on ne parlait jamais d'une quelconque relation entre lui et moi
- qu'est ce que tu peux être naïve. Décidemment tu pense toujours que la vie est rose, le ciel est bleu et que le père Noel existe. Il veut t'attirer dans ses filets lentement mais surement. Réveille-toi. Tout ceci ne t'amènera que des problèmes et Rassoul n'en vaut pas la peine. Demba t'aime à la folie, il ne vit que pour toi, il ne parle que de toi. Arrête tes bêtises. Décidemment j'étais seule contre tous et j'avais l'impression que les gens voyaient le mal partout.
- vous voyez le mal partout. C'est juste une période. Demba me comprend. Il sait que je l'aime.
Elle m'a foudroyé du regard.
- ne me dis pas après que je ne t'aurais pas prévenu
Oh oui, elle m'avait prévenu. Mais je ne voyais vraiment pas le mal. C'était clair dans ma tête que j'aimais Demba, qu'il occupait mes pensées, enflammait mon corps. Non je ne voyais pas le mal dans tout ça. Des personnes divorcées peuvent bien rester en bon terme. Adja ne comprenait pas.
Et comme ma mère avait prévue finalement de venir pour le 40ème jour du décès de Pa Ablaye, j'avais décidé de lui parler de Demba.
Oui je savais ce que je voulais. Ca faisait plus d'un mois que Pa Ablaye était mort et Rassoul appelait de temps en temps pour discuter. On parlait de son deuil, de son père, de son travail et on évitait les sujets sur une éventuelle réconciliation car dès qu'il abordait cela, je raccrochais. Demba est parti au début du mois de Juin et juste avant son départ, on est sorti pour aller à la pointe des Almadies et on s'est posé devant la mer. On parlait de tout et de rien et il me sortait des blagues débiles mais qui me faisaient quand même rire. Après quelques secondes de silence
- c'est ici que tu m'as annoncé il y a quelques années qu'entre nous ça ne serait plus possible et que tu avais quelqu'un d'autre.
Il avait raison. C'était ici. Il n'avait pas oublié.
- et pourtant je t'aimais tellement, lui dis-je tristement. Mais Rassoul avait été tellement gentil avec moi. Tellement présent que je n'osais pas le trahir.
- je sais que tu m'aimais. Mais tu ne me pardonnais pas beaucoup de choses. A raison peut être. Et aujourd'hui. Tu me le caches mais je sais que tu lui parles souvent. Je ne sais pas ce que vous vous dites, je ne sais pas ou tu en es. Mais moi j'en suis toujours au même point. Je t'aime et je veux construire avec toi une famille.
Je l'ai regardé. Le clair de lune faisait briller ses yeux et il me regardait intensément.
- alors marions nous Demba. Je voulais prendre mon temps, mais j'ai l'impression que tu l'interprete autrement. Moi aussi ma vie se fera avec toi.
Il m'a regardé étonné.
- sérieux ?
J'ai souri.
- sérieux.
Il a hoché la tête un bon moment avec un sourire ravi. Comme il devait partir le lendemain et devait rester une vingtaine de jours, il a promis dès son retour de parler à son père. De mon côté, je devais en parler à ma mère quand elle sera là et à mon oncle. On est resté longtemps avant de rentrer avec la tête pleine de rêves.
Quelques jours après son départ, un soir, Rassoul m'a appelé. Ca faisait plus d'un mois que Pa Ablaye était mort et il s'était remis du choc. On a discuté un moment et il disait qu'il allait mieux et qu'il avait même repris son travail. Je l'ai félicité et encouragé et on a raccroché. Quelques minutes plus tard, le téléphone a encore sonné et c'était encore lui. Mais l'accueil a été plus...musclé
- espèce de sale petite pute. Après t'être faite engrossée par un de tes clients, tu pense que tu peux revenir récupérer mon mari. Tu me trouveras ici. Je vais te tuer. Sale pétasse.
- Anta qu'est ce que tu fais ? Entendis-je Rassoul crier avant que je ne raccroche.
J'étais sous le choc, mon cœur battait très vite. C'était Anta et elle était vraiment hors d'elle. Elle avait raison d'être fâchée. Mais qu'est ce qui m'a donc pris de faire ami-ami avec le mari d'une autre. Parceque quoi qu'on puisse dire Rassoul était marié et tous ces appels pouvaient être interprétés n'importe comment. Donc tout était de ma faute et je m'en suis vraiment voulu. Vraiment. Le téléphone a encore sonné, mais je n'ai pas décroché. Il a encore insisté, mais j'ai coupé avant d'éteindre le téléphone.
J'avais honte. Même si je voulais conserver de bonnes relations avec lui, ça ne devait pas être au détriment de son ménage.
Deux jour plus tard, Sokhna m'a appelé et je croyais qu'elle voulait juste me dire bonjour, mais elle m'a demandé ce qui se passait entre Rassoul et moi. Quand j'ai répondu qu'il n'y avait rien, elle m'a raconté qu'il y a eu une réunion de famille car Anta est venu se plaindre que je passais mon temps à appeler Rassoul et qu'on entretenait une relation sur son dos alors qu'elle est enceinte.
J'ai perdu la voix. Je ne pouvais plus rien dire. Tout ça me dépassait. Sokhna m'a dit que les tantes et oncles ont appelé Rassoul pour lui dire qu'il valait mieux qu'il m'épouse à nouveau au lieu de forniquer surtout que Pa Ablaye disait partout que tout ce qu'il désirait c'était que je revienne. Rassoul était d'accord et ils ont prévu de venir voir mon oncle pour leur expliquer la situation. Je tombais des nues. Je ne croyais pas tout ce qu'elle me disait. J'ai pris mon temps pour lui expliquer tout ce qui s'était passé et elle m'a dit qu'elle voulait juste savoir. Dès qu'elle a raccroché, j'ai appelé Rassoul.
- mais c'est quoi cette histoire Rassoul ? Criais-je au téléphone.
- quelle histoire ? Me demanda t-il d'un air innoncent
- ne fais pas celui qui ne sait rien. Sokhna vient de m'appeler et de tout me dire. Non seulement ta femme m'appelle pour m'insulter, mais en plus tu veux revenir demander le mariage. Mais qu'est ce qui ne tourne pas rond chez toi ?
- mais pendant tout ce temps on discutait Diouldé. Je croyais que tout allait bien à nouveau
- et après. J'avais pitié de toi Rassoul. C'est tout.
- écoute, de toute façon, les parents ont raison. Il vaut mieux qu'on se remette ensemble.
- vas te faire foutre Rassoul
J'ai raccroché rageusement le téléphone. Si tout ce que Sokhna a dit est vrai, il ne faut surtout pas qu'il aille voir mon oncle. Le connaissant comme je le connais, il serait capable de me donner en mariage sur le champ si on lui dit que je continue à fréquenter mon ex mari. J'étais tellement stressée que j'en trembais et j'avais des maux de ventre.
Mr Niang a remarqué mon trouble et dès qu'il ma demandé ce qui se passait j'ai éclaté en sanglot. Il m'a calmé en me disant que Demba n'était pas là et qu'il n'avait personne pour l'aider. Finalement, je me suis mise à lui parler de toute la situation. Il n'a jamais su que j'avais divorcé et était vraiment étonné. Quand j'ai fini de parler, il m'a suggéré de parler plus calmement à Rassoul et surtout de tout dire à Demba.
Avant de rentrer, je suis passée voir mon oncle surtout parceque j'avais peur que les oncles de Rassoul ne soient déjà passé. Heureusement, il était parti en Guinée pour quelques semaines et je suis resté quelques temps à discuter avec les cousines. Une fois à la maison, j'ai appelé Rassoul le cœur battant, lui demandant calmement de me dire ce qui s'était passé. Il m'a répété tout ce que Sokhna m'avait dit le matin. Il disait qu'Anta est allé se plaindre en disant que c'était moi qui le harcelait. Mais elle est tombée dans son propre piège car tout le monde voulait que je revienne donc ils ont saisi cette occasion pour parler de cela. C'était plus que je pouvais entendre.
- Anta est enceinte ?
Il a gardé le silence un moment.
- oui mais ça ne change rien.
J'étais partagé entre les larmes de rage ou de dépit.
- oui Diouldé. C'est tout ce que je veux dit-il presque dans un murmure. Tout ce que fais c'est pour toi. Si j'ai accepté d'épouser Anta c'est pour toi, pour que tout le monde nous donne une chance d'être ensemble tranquillement. J'en avais parlé à mon père avant sa mort. Il devait venir te parler, parler à tes parents pour que tu reviennes.
J'ai rigolé. Un rire jaune
- mais tu es mauvais Rassoul. Et tu pense mener ta vie comme ça. Au gré de tes humeurs et de ceux de ta famille. Les autres doivent suivre, comme des marionnettes.
- mais...
- ARRETE Rassoul, arrête. Je ne veux plus rien entendre. Je ne veux plus que tu m'appelles. Je le faisais pour ton père mais tu n'en veux même pas la peine.
- non je ne te laisserais pas
Cette fois j'ai failli pleurer de dépit. Mais j'étais trop énervée. Je n'ai jamais cru que Rassoul pouvais m'énerver comme ça.
- oui je veux que tu me laisse tranquille. Je ne voulais pas te détester, mais tu m'y pousse. Qu'est ce que tu pense que je pense de toi ? Tu es avec ta femme, tu dis que tu a été obligé de la prendre et pourtant tu trouve le moyen de la mettre enceinte. Arrête de me prendre pour une idiote ou pour une marionnette que tu peux manipuler à ta guise. Si tu étais le dernier homme sur cette terre, je ne me marierais jamais.
J'ai raccroché et je suis allé voit maman Fanta pour tout lui raconter. Elle s'est énervée contre moi disant que c'était de ma faute et qu'elle ne comprenait pas ma tendance à toujours vouloir plaire à Rassoul. J'ai essayé de lui expliquer, mais elle était trop énervée et je l'ai laissé digérer tout ça. Je me sentais incomprise et j'étais vraiment dépassée. J'ai appelé Demba et entendre sa voix m'a fait un bien terrible. J'ai commencé à pleurer et il ne comprenait pas. Je lui ai juste dit qu'il me manquait trop et que je l'aimais. Il m'a réconforté disant qu'il m'aimait encore plus. Je voulais lui expliquer tout ce qui s'était passé mais je n'avais pas le courage. Et Adja non plus. Elle m'avait prévenu de tout ça et j'ai fait la folle ou celle qui pensait pouvoir tout maitriser. J'étais en rage contre moi-même.
Les jours suivants je ne prenais aucun appel que je ne connaissais pas. Quand j'ai parlé de tout ça à Adja, elle m'a encore ramassé disant que j'avais bien cherché cela, allant jusqu'à douter de ma bonne foi
- j'ai vraiment l'impression que tu voulais créer des problèmes dans le ménage de Rassoul.
- comment tu peux penser cela Adja ? J'étais indignée
- mais comment veux tu que je pense autrement. Je ne te comprends pas. Vous entretenez quel sorte de relation ? Tu savais ce qu'il voulait et tu ne l'as pas freiné jusqu'à ce que ça déborde. Non Diouldé tu déconnes.
J'ai boudé et elle aussi. Mais après quelques jours j'ai su qu'elle avait raison et je suis allé la voir et on a discuté. Oui j'avais merdé sur ce coup. Surtout que Sokhna m'appelait en pensant elle aussi sérieusement que je comptais me remettre avec son frère. Maman Fanta aussi ne cessait de rouspéter disant qu'elle ne me comprenait plus.
Ma mère est arrivée est quelques jours plus tard avec ma petite sœur Fanta. Elle avait grandi et c'est incroyable elle était belle. Elle en donnait des frissons. Mes cousines disaient qu'on se ressemblait sauf que j'étais plus claire de peau et j'avais le visage plus fin. Je leur répétais que si je ressemblais à Fanta, j'allais compétir pour être miss. Je ne l'avais pas revu depuis mon voyage vers la Guinée et j'ai bien failli ne pas la reconnaitre. Elle avait 16 ans et avait un beau visage en forme de cœur et des fossettes sur les joues. Elles se sont installées chez Ibrahima qui entre temps avait pris en location un petit appartement car sa famille s'agrandissait. J'étais contente de revoir ma maman et au lieu de retourner après la pause j'ai appelé Mr Niang pour lui dire que j'étais un peu souffrante. On a reparlé de mon divorce, des accusations, du comportement de Rassoul. Ma mère était contente de voir que j'allais bien t a commencé à me sermonner surtout quand je lui ai raconté le dernier épisode avec la femme de Rassoul. Comme elle ne prenait jamais de gant pour dire certaines choses, elle m'a insulté en disant que je n'avais pas d'amour propre.
- une famille te rejette comme ils l'ont fait et toi tu ne peux même pas avoir un peu de vergogne et les supprimer de ta vie. Donc moi j'ai engendré une fille qui ne peut même pas se respecter.
J'en ai pris pour mon grade et à ce stade je crois que tout le monde avait raison de m'en vouloir. Donc j'ai écouté sans broncher et je me disais qu'elle pouvait vraiment tout me dire car je l'ai bien mérité. En rentrant, elle est venue avec moi pour parler à maman Fanta. Cette dernière était contente de la revoir et surtout très contente de revoir son homonyme qu'elle n'avait plus revu depuis toute petite. Comme moi, elle était étonnée de voir une si jolie jeune fille. Naturellement, elles se sont mises à parler de moi et toutes les deux ont recommencé à rouspété sur mon comportement. Comme ma mère devait aller présenter ses condoléances, elles ont convenus d'y aller ensemble et je devais les accompagner comme cela, les choses seront mises au clair. Maman Fanta m'a demandé si je voulais retourner dans mon ménage, mais ma mère ne m'a pas laissé répondre.
- ne lui pose pas cette question. Tu as été trop indulgente avec elle. Elle ne retournera pas la bas ou alors ca sera en passant sur mon cadavre. Une femme n'a que son honneur, que sa dignité. Cette famille lui a clairement fait comprendre qu'il la considère comme du n'importe quoi. Son mari s'est marié avec celle qui leur convient et maintenant on veut qu'elle revienne. Jamais Fanta. Ou alors attendez ma mort.
Tout le monde a éclaté de rire.
- Néné calme toi et rassure toi. Je n'y retournerais pas. Je ne veux même pas. J'ai commis l'erreur de lui parler fréquemment ces derniers temps. Mais c'était une erreur.
Elles sont restées longtemps à discuter et comme il faisait tard, elles sont restées dormir à la maison.
Le lendemain, c'était un samedi et on est parti en fin d'après midi. Maman Fanta avait appelé tata Fatou pour les accompagné. On a trouvé un des frères de Pa Ablaye, tonton Diop, ainsi que Jules. Maman Oussey nous a bien accueillies et quelques minutes plus tard Rassoul est arrivé. Ma mère a présenté ses condoléances disant beaucoup de bien de Pa Ablaye et surtout sur la façon dont il me traitait. Après cela l'oncle de Rassoul a aussi pris la parole en disant que le souhait de Pa Ablaye était que je revienne dans mon ménage avec son fils et que comme d'après ce qu'il savait, moi et Rassoul on était en train de se voir en cachette, il valait mieux officialiser les choses. C'est maman Fanta qui a pris la parole
- Diop, on a entendu ce que tu as dit. Mais je crois que pour le bien de tout le monde parfois il faut se dire la vérité en face. On vous remercie pour la belle initiative, mais je pense que Diouldé, il faut maintenant la sortir de vos plans. Diouldé ne me laissera mentir pour tout ce que je vais dire. Dès le début de son mariage, on lui a fait comprendre qu'on ne voulait pas d'elle.
Mère Oussey a commencé à vouloir parler, mais Pa Diop l'a interrompu en lui disant de laisser maman terminer
- Oussey, calme toi, ce que je veux dire je vais le dire une bonne fois pour toute. Parce qu'il faut dire que Diouldé a toujours été patiente avec toi. Pa Diop, comment comprendre que quand diouldé est partie de chez elle a cause de problème, Oussey n'a jamais voulu lever le petit doigt pour essayer d'arranger les choses au contraire, elle menaçait quiconque essaierait de résoudre le différend. Ce ne sont pas des accusations. Rassoul peut me démentir si je mens.
Ce dernier est resté silencieux et a fixé un point sur le sol.
- c'est seulement Pa Ablaye qui a tout fait pour que Diouldé revienne. Je vais faire l'impasse sur beaucoup d'autres choses qu'elle a subies, mais qui peuvent être interprété différemment selon la position ou on se trouve. Mais sache qu'elle a beaucoup supporté.
Il y a eu un petit silence. Maman Oussey ne cessait de gigoter à sa place.
- Pour finir, il y a eu ce grand scandale, ou n'importe quelle femme qui se respecte aurait pété les plombs. Je n'ai pas honte de le dire. Rassoul a trouvé Diouldé comme il se doit. Elle ne s'est jamais amusée avec d'autres hommes avant le mariage, et elle s'est vu accusé du jour au lendemain d'avoir non seulement un amant, mais en plus de s'être faite engrossé et d'avoir essayé d'avorter. Et c'est toi Oussey qui a lancé ces accusations.
Il y eut des murmures et Rassoul s'est tourné vers sa mère tandis que Pa Diop a secoué la tête. Mais maman Fanta était lancée.
- si elle voulait s'amuser, elle n'aurait jamais accepté de venir vivre chez sa belle mère pendant que son mari était en voyage. Elle serait restée chez elle ou elle était libre de ses mouvements. Elle l'a laissé au poste de santé toute seule pendant qu'elle faisait une fausse couche et le soir c'est la sage femme qui l'a raccompagné, comme une misérable vagabonde.
La tante de Rassoul a gémit et s'est tourné vers mère Oussey
- heyy Oussey...si c'était ta fille tu aurais fait ça ?
Maman Fanta a secoué la tête.
- ca aurait pu se passer autrement, mais Rassoul a cheminé avec sa mère. Il l'a laissé se débrouiller. Elle n'avait personne. Je n'étais pas là, sa mère non plus. Toi Rassoul tu n'as pas soutenu ta femme. Et pourtant personne ne la connait plus que toi. Si on t'avait réveillé en pleine nuit pour te dire que ta femme te trompe tu ne devais pas le croire, a plus forte raison tout ceci.
A ce moment je voulais que tout ceci finisse. Tout le monde était mal à l'aise et on ressortait des choses terribles. J'avais l'impression que c'était un règlement de compte.
- quelle femme peut accepter tout ça et revenir dans ce ménage, revenir dans cette famille ? Non, Diop. On n'est pas venue pour nous disputer, on n'est pas venue pour régler des comptes, mais juste pour vous faire comprendre qu'entre Rassoul et Diouldé plus rien n'est possible. Les choses sont allées trop loin. Je veux que vous compreniez que personne dans cette famille ne vous accordera à nouveau la main de Diouldé. Et en plus Dieu fait bien les choses. Il s'est marié avec sa cousine donc il n'est pas à court de femme. On vous demande alors de laisser tomber.
Elle s'est tue et c'est ma mère qui a pris la parole pour dire qu'elle partageait les dires de maman Fanta. Elle a dit qu'elle était venue de la Guinée pour présenter ses condoléances car quelque soit les problèmes, les deux familles se connaissent et doivent garder de bons rapports. Mais elle était quand même désolée que les choses se soient passées comme ça, mais qu'elle préfère sa dignité à tout le matériel de la terre. Après cela, Tonton Diop a voulu parler mais Jules lui a demandé la parole
- je ne devrais même pas intervenir, mais pour avoir assisté à pleins de choses je me dois de dire que Diouldé est une femme pondérée. Devant toute la famille, à plusieurs reprises on a essayé de l'humilier, de la rabaisser et elle n'a jamais réagi, elle ne s'est jamais emporté. Kiné est certes ma femme, mais c'est elle qui dirigeait tout. Mais Diouldé n'a jamais eu un mot de trop avec elle malgré tout. Elle lui a emprunté ses bijoux en or et a refusé de les rendre et pourtant Diouldé n'en a jamais fait scandale tout simplement pour ne pas amener des problèmes. Elles allaient voir des marabouts pour mettre fin à ce mariage. J'en ai parlé à Rassoul mais il minimisait les choses.
Rassoul a levé la tête et m'a regardé un moment. Il y a eu pleins de murmures dans le salon et j'ai eu honte. Mon Dieu je m'étais vraiment laissé faire. Maman Fanta bouillait.
Tonton Diop a repris la parole
- Rassoul c'est à toi que je vais m'adresser d'abord. On a honte. Vraiment. Diouldé est l'enfant de quelqu'un et tu as laissé faire tout ça comme si tu l'avais ramassé dans la rue. On a essayé d'intervenir tout simplement parce que pas une, pas deux, mais plusieurs fois moi et ton père on t'a parlé, on t'a mis en garde contre les agissements de ta mère qui faisait tout pour te séparer de ta femme. Mais tu disais toujours que tu savais ce que tu faisais et que ta mère t'aimais par-dessus tout et ne voulais que ton bien. C'est vrai, elle ne veut que ton bien, mais c'est toi qui connais ou il se situe. Diouldé est une fille bien et tout le monde dans la famille le sait. Tu as été négligent et tu l'as perdu. Si elle dit qu'elle ne veut plus revenir après tout ce qui s'est passé et tout ce que je viens d'apprendre, je ne vais pas insister. Après tout ce que sa mère vient de dire tout ce qu'on doit faire c'est présenter nos excuses.
Il s'est tourné vers ma mère
- oui, on vous présente nos excuses et on aurait peut être du intervenir depuis longtemps.
La tante de Rassoul l'a interrompu.
- walay on s'excuse. Mais tout cela c'est sa mère. Oussey pense qu'elle doit décider de la vie de son fils comme bon lui semble. Elle est allé dire partout que Diouldé est une mauvaise femme et qu'elle n'est intéressée que par l'argent. Et pourtant elle n'est pas capable de dire concrètement ce qu'elle lui a fait. Mais, elle a amené celle qu'elle voulait et cette dernière la première chose qu'elle a fait c'est la gifler. Elle n'en parle pas mais tout le monde le sait. Dieu est juste.
Mère Oussey s'est levée et a commencé à traité sa belle sœur de sorcière qui a toujours voulu la mettre en mal avec toute la famille. Il y a eu un brouhaha ou tout le monde parlait et Rassoul aussi s'était levé pour se mettre entre sa mère et sa tante. Mais la tante continuait à parler disant que de toute façon elle n'avait que ce qu'elle méritait et est même allé jusqu'à dire qu'elle avait marabouté Rassoul pour qu'il le suive au doigt et à l'œil. Pa Diop criait que tout le monde se taise et finalement on s'est levé pour sortir sans demander notre reste. Je pense que de toute façon il fallait les laisser régler leur problème entre eux. J'étais sur le pas de la porte quand Rassoul est arrivé derrière nous et m'a pris le bras.
- Diouldé attend un peu. Il faut qu'on parle.
J'ai tiré mon bras violemment
- Non on s'est tout dit Rassoul. Je t'en prie.
- c'est quoi cette affaire de bijoux.
J'ai soupiré et j'avais peur que mes mamans ne reviennent pour voir ce que je faisais.
- ce n'est rien. Je les lui donne de bon cœur.
On s'est regardé un moment.
- je suis désolé pour tout Diouldé. J'ai l'impression d'avoir reçu une gifle.
Il semblait vraiment affecté par tout ce qui venait de se dire.
- moi aussi.
J'ai tiré à nouveau mon bras et cette fois je suis sortie. Une fois à la maison, les commentaires ont continué un bon moment. Ma mère s'est encore disputé avec moi à propos des bijoux et maman Fanta a dit que dès le lendemain j'irai les récupérer. J'ai refusé disant que je n'en voulais plus et finalement je les ai laissés à leur palabre.
J'étais soulagée. Oui soulagée. Je savais que cette fois c'était clair dans toutes les têtes, que toutes les vérités ont été dites. J'ai appelé Demba mais il m'a répondu froidement et quand je lui ai demandé s'il y avait un souci.
- Adja m'a raconté qu'il y avait un souci avec ton ex mari. Diouldé tu ne penses pas que tu me prends aussi pour un con quelque fois ?
- qu'est ce qu'elle t'a dit ?
- peut être ce que toi tu aurais du me dire.
Je suis restée silencieuse un long moment ne sachant pas trop quoi dire. J'aurais du lui en parler, mais je voulais juste attendre son retour.
- j'allais le faire, mais je voulais attende que tu viennes.
- pourquoi j'ai cette impression que je suis juste une option. Que tu me gardes au cas ou ca ne marchera vraiment pas avec ton mari ?
Non non non, pourquoi pensait-il cela.
- mais ou vas-tu chercher ces bêtises ? Demba je ne sais pas ce qu'Adja t'a raconté, mais il faut que tu me croies. Je n'ai à aucun moment pensé qu'il pouvait y avoir quelque chose de nouveau entre moi et Rassoul. Plus depuis bien longtemps et jamais depuis qu'on est ensemble.
Il y a eu un long silence ou j'entendais juste sa respiration.
- ok si tu le dis. Je dois y aller. Ciao.
Il a raccroché et je suis resté un moment à écouter le bruit du téléphone. Je ne savais pas quoi faire. J'avais vraiment merdé. Il devait revenir dans une dizaine de jours. On devait se marier. Je ne pouvais pas laisser les choses se dérouler comme cela. Le lendemain, je suis allé voir Adja pour lui parler.
Dès qu'elle a ouvert la porte elle a compris ce que je venais faire chez elle. On s'est installé au salon et elle a commencé à parler disant que la veille tout le monde était chez elle et qu'il ne manquait plus que moi. Je l'ai écouté sans rien dire juste en souriant. Comme je ne disais rien, elle s'est tue et j'ai enfin pu parler
- Adja, je peux te poser une question ?
Elle m'a regardé étonnée
- est ce que ça te pose un problème que je sois avec Demba ?
Elle a tenu sa bouche et semblait étonné de cette question.
- qu'est ce qui te prend ? Pourquoi tu dis une chose pareille ?
- parce que je ne comprends pas. Pourquoi es tu allé dire à Demba qu'il ya eu quelque chose entre moi et Rassoul ? Ca t'avance à quoi ?
Elle m'a regardé sans rien dire avant de baisser la tête.
- Ce n'est pas moi. Je t'assure. J'en ai juste parlé à Babacar et c'est lui qui a dit qu'il avait l'impression que tu te moquais de Demba et il a estimé qu'il valait mieux qu'il soit au courant. C'est tout. C'est après que Demba m'a appelé et je lui ai dit que tu l'aimais même si..
- mais c'est à toi que j'ai parlé Adja. Pas à Babacar
- Babacar quoi ?
Il venait d'entrer au salon et me regardais fixement avec un air sévère.
- je demandais à Adja pourquoi vous êtes allé dire à Demba que j'étais avec Rassoul.
- c'est moi qui lui ai parlé. Je crois que tu ne joue pas franc jeu avec lui. Tu n'es pas sincère. Et lui il t'aime. Donc il devait être au courant. Je suis son ami et j'ai décidé de le mettre au courant.
J'ai gardé le silence un moment. Ensuite je me suis levée et arrivée à sa hauteur je me suis arrêtée.
- c'est toi Babacar qui me parle d'honnêteté ? C'est toi qui ose me dire que je ne joue pas franc jeu ?
Il m'a regardé sans rien dire.
- tu as donc la mémoire bien courte.
Il ne disait toujours rien et je suis sortie. J'avais quand même le cœur gros. Je ne comprenais pas Adja. Je la considérais comme mon amie. Comme ma confidente. Elle savait que je ne pensais pas à mal quand je parlais à Rassoul elle le savait. Mais j'aimais Demba et je ne voulais pas le perdre encore une fois. Donc je l'ai appelé une fois à la maison. Il a décroché mais m'a à peine parlé. Je lui ai présenté mes excuses pour ne pas lui avoir parlé de tout ça. Il se contentait de m'écouter, de dire qu'il m'avait entendu avant de me dire qu'il était occupé. C'était bizarre de le voir se comporter comme cela avec moi. Mais je me disais qu'il m'aimait assez et qu'il allait me pardonner. Oui j'avais espoir.
Les jours suivants, Adja a essayé de m'appeler mais je ne prenais pas. Un jour en sortant à la pause je l'ai vu qui m'attendait. Je n'avais pas le choix et on a déjeuné ensemble. Elle s'est mise à m'expliquer, disant qu'elle était désolée, qu'elle a appelé Demba pour lui parler. Je ne disais rien, mais je crois que c'était juste la goutte d'eau de trop. Elle est toujours allée raconter des choses sur moi à Demba. Je n'avais plus envie de faire confiance. Je lui ai dit que je la considérais comme une amie, mais que dorénavant, je saurais à quoi m'en tenir avec elle. Elle a semblé vraiment désolée et s'est encore excusé. Mais le mal était déjà fait.
Heureusement que ma mère et ma sœur était là et je ne voulais pas me mettre à déprimer devant elle. J'essayais au maximum de sortir avec Fanta et de lui faire visiter la ville. Elle faisait une formation en couture dans la capitale en Guinée et je voulais convaincre ma mère de la laisser à Dakar pour qu'on puisse l'inscrire dans un institut. Elle disait qu'elle adorait la coiffure et tout ce qui touche l'esthétique. Mais ma mère ne voulait pas. Elle disait que Fanta l'aidait et ne voulait pas qu'elle soit si loin d'elle. Maman Fanta s'y est aussi mise mais rien à faire. Elle n'aimait pas Dakar, elle n'aimait plus. Elle disait que c'était trop animé, que les filles étaient trop indécentes. Même avec moi, c'était le même problème. Mes pantalons étaient trop serrés, mes jupes trop courtes. J'étais toujours maquillée, je prenais trop soin de moi, je ne parlais que français, j'avais des manières...enfin bref, tout ce qu'elle n'aimait pas. Donc il était hors de question de Fanta reste.
Mais ça me faisait du bien d'être avec elle, de lui parler. Et entre ma mère et Demba j'ai failli devenir folle. J'ai passé une semaine à m'excuser auprès de Demba, mais c'était toujours la même chose. Il disait qu'il ne me faisait plus confiance. Que je l'avais déçu et qu'il avait du mal à me croire à nouveau. Quelques jours avant son retour, je lui ai dit que j'allais attendre son retour pour qu'on parle.
- je vais te faire un numéro de charme et je suis sûre que tu me pardonneras. Je te dis et répète que c'est toi que j'aime Demba. Arrête tes enfantillages bébé.
- tu commences à m'énerver Diouldé. Effectivement tu peux jouer de tes charmes pour avoir n'importe quel homme. Et c'est pourquoi tu te joue de moi. Babacar m'a longtemps prévenu, mais mon amour pour toi m'aveuglait.
J'ai soupiré. Je commençais à en avoir marre.
- Demba, ca fais des jours que je m'excuse, des jours que tu me sors des méchancetés sans que je ne dise rien. Mais je crois que ça commence à dépasser les bornes.
- prend le comme tu veux Diouldé.
J'ai gardé le silence quelques secondes.
- Ok Demba. Cette fois, tu n'auras pas besoin de me raccrocher au nez. Ciao.
J'ai raccroché. Je me sentais vide. J'étais fatiguée. J'avais l'impression que tout se liguait contre moi. Je ne comprenais pas. Y'avais t-il sur cette terre des gens qui ne doivent pas être heureux ? En faisais-je partie ?
Le lendemain, je suis allé parler à Mr Niang. Depuis quelques semaines, il me proposait un poste dans une nouvelle agence implanté dans une région proche de Dakar. Il disait qu'il devait redéployer des personnes et que je pouvais y aller pour avoir un poste plus stable. Je ne voulais pas en entendre parler, mais je commençais sérieusement à y songer. Un peu de recul me ferait tellement de bien. Il a sauté sur l'occasion en disant que ça serait une belle opportunité pour moi et qu'il allait en parler au directeur car j'étais quand même un bon élément qui avait un bon feeling avec les clients. Les Ressources humaines m'ont convoqué et j'ai passé un petit test et très rapidement on m'a signifié que je pouvais commencer à la fin du mois. Je n'en avais parlé à personne, mais quand la notification est arrivée, je n'avais plus le choix. Je n'avais encore rien de précis, pas de contrat bien stable, mais au moins les indemnités étaient plus importantes et j'avais la promesse que dans quelques mois, j'aurais un contrat. Je ne savais plus trop ce qui me retenait à Dakar et comme ma carrière en prendrait une autre tournure, je préférais ne pas laisser passer ma chance.
Quand j'en ai parlé à maman Fanta, elle a refusé disant que les régions ne sont pas faciles. Mais comme elle avait une connaissance là bas, je lui ai proposé d'aller là bas si cela pouvais la rassurer. Elle ne voulait toujours pas. Il a fallu des jours pour que je réussisse à la convaincre. Elle a appelé son amie Tata Daba et elle a accepté que je vienne chez elle. Bien entendu je lui ai dit que si tout va bien, je prendrais une chambre, mais elle disait qu'on n'en était pas encore là.
Depuis que j'avais parlé à Demba je n'avais plus de nouvelles. Chaque soir j'ai espéré qu'il m'appelle, qu'il s'excuse, mais rien. Le jour où il devait rentrer, je me suis sentie encore plus mal.. J'avais le cœur complètement brisé et je consultais chaque seconde mon téléphone. Je ne pouvais pas croire qu'il tournait aussi facilement la page. Ensuite je me suis imaginé qu'il avait peut être encore renoué avec son ex femme. Adja a essayé plusieurs fois de m'appeler mais j'avais juste décidé de ne plus répondre à ses appels. Les jours passaient et un jour j'i décidé de l'appeler. Il a laissé sonner longtemps. Il répondait brièvement à mes questions
- tu es toujours fâché ? Lui ai-je demandé finalement. Il était la depuis une dizaine de jours et il n'avait pas fait signe de vie
- à ton avis ?
- qu'est ce qu'il faut que je fasse ?
- laisse tomber Diouldé.
J'avais envie de pleurer.
- ok. Ciao dis je finalement après quelques secondes de silence.
J'en avais fait suffisamment. Dans un accès de rage, j'ai supprimé son numéro, de même que celui d'Adja. Une fois à la maison, j'ai pleuré de dépit.
Je me préparais pour mon voyage et j'étais un peu déprimée, même si je faisais tout pour que personne n'en sache rien. je n'en ai parlé à personne et ça me rongeait. Moha appelait souvent et continuait à me chanter son amour, mais je continuais à dire que je n'étais pas prête. Maman et Badou ont tout fait pour me faire revenir sur ma décision, mais finalement Badou s'est lassé et maman Fanta m'en a voulu. Mais je préférais rester seule. C'était plus facile.
Même Mr Niang avait remarqué qu'il y avait un souci entre Demba et moi et il m'a un jour demandé ce qui se passait car ce dernier n'appelait plus et ne passait plus. Je lui ai juste dit qu'on était plus ensemble sans trop développer. Il était désolé et disait que c'était vraiment dommage.
La veille de mon départ, j'ai stressée. J'étais ravie de partir, mais j'avais souvent peur. Peur de l'inconnue, peur de ne pas réussir à m'adapter, peur de ne pas trouver des personnes gentilles. Mais tout s'est bien passé. C'était une petite ville et une jeune fille au teint clair et aux petites manières se remarquait vite. En fait les gens confondaient ma timidité et ma réserve à une sorte de supériorité. Mais heureusement, les enfant de tata Daba étaient très gentilles avec moi, et m'ont vite intégré. A l'agence aussi, c'était la même chose. Les activités venaient de démarrer et le chef d'agence m'a beaucoup aidé à m'intégrer. Il faisait quand même très chaud et l'alimentation était différente. Mais comme je n'étais pas très gourmande, je me suis vite habituée.
Deux semaines plus tard, je suis retournée à Dakar et je devais reconnaitre que ma chambre, ma ville me manquait. Ma mère devait rentrer et je devais aller lui dire au revoir avec maman Fanta. Cette dernière voulait que son homonyme reste avec elle mais ma mère était intransigeante. Même Fanta voulait rester, et finalement, elle a eu la promesse de revenir l'année prochaine. Une fois de retour, je suis restée avec maman Fanta au salon à discuter. Elle m'a dit que Rassoul était passé à la maison il y a quelques jours et ils ont beaucoup parlé. Elle m'a remis les bijoux que j'avais donnés à Kiné en disant que c'est lui qui lui avait donné sans trop d'explications. Apparemment il ne parlait plus de mon éventuel retour, mais surtout voulait que je pardonne et que j'oublie pour qu'au moins on garde de bons rapports. Ce jour là, il m'a appelé et j'ai pris le téléphone. C'était timide et il y avait beaucoup de gêne entre nous. Il m'a parlé de sa visite à Maman et voulait me parler pour s'excuser pour tout ce qui s'était passé. il m'a expliqué que maintenant, il avait compris que c'était vraiment fini entre nous et qu'il n'insisterait plus, mais qu'il me souhaitait beaucoup de bonheur. Je l'ai remercié chaleureusement avant de lui promettre que tout était oublié. J'ai passé mon weekend à dormir et à regarder la télévision.
Je suis repartie le dimanche après midi, le cœur un peu lourd. Je ne sais pas pourquoi j'espérais toujours que Demba m'appelle, s'excuse. Mais rien. Et ça me faisait très mal. Je n'arrivais pas à le sortir de ma tête. C'était dur. Mais j'ai repris mon train-train quotidien. Ça m'aidait à oublier. A ne pas penser à lui. Je n'avais plus de nouvelles d'Adja. Je ne voulais plus. J'avais juste du mal à tourner la page Demba, mais j'essayais de me convaincre que ca me passera. Que je pourrais y arriver.
Cela faisait plus d'un mois que j'étais installée et je commençais à m'habituer à tout. Je retournais à Dakar puisque chaque weekend car les villes n'étaient pas éloignées. Je quittais les vendredi soir et revenais le lundi matin. J'avais la chance : le chef d'agence aussi faisait la navette car sa famille était à Dakar. Un weekend, j'ai trouvé Malik, Awa et la petite Diouldé à la maison. J'étais tellement contente de revoir Awa et surtout mon homonyme bien qu'on ne l'appelait que Fafa. Elle avait 8 ans et était mignonne comme tout et très éveillée. Malik s'était finalement remis avec Awa et ils étaient venus pour quelques jours. Elle était toute jolie et comme d'habitude gentille comme tout. On a beaucoup discuté et je lui ai juste expliqué que ça n'a pas marché avec mon ex mari sans trop entrer dans les détails. Elle était désolée disant que c'était bien dommage.
Comme je n'avais que le weekend, on a décidé de sortir tous ensemble à la plage le dimanche. En plus il faisait chaud. Même maman Fanta était de la partie. On est allé à l'ile de Ngor et la traversée s'est faite laborieusement avec maman Fanta qui refusait de monter sur la pirogue disant que ce n'était plus de son âge. Mais avec Malik et Awa, on a réussi à la convaincre. Ensuite s'est posé le problème des maillots de bain. Awa avait amené un deux pièces magnifique, mais comme elle était un peu enrobée, maman Fanta et Malik lui ont interdit de se montrer comme cela. Heureusement que j'avais mon maillot qui était plus...pudique et en une seule pièce. Malgré mes réticences, on a fait l'échange et malheureusement j'ai été le centre de nombreuses attentions bien malgré moi. Tout se passait très bien, la journée s'annonçait magnifique et je comptais en profiter. L'eau était bonne et j'y suis allé avec Fafa et on papotait dans l'eau quand je les ai aperçues.
Adja, Babacar, Demba et une fillette qui devait être sa fille Saran. Ils étaient sur la plage en train de s'installer et apparemment ils venaient d'arriver. Je ne voulais pas qu'ils me voient, mais c'était mission presqu'impossible puisqu'ils s'étaient installé pas loin de notre tente. Et le pire c'est quand j'ai vu Adja aller saluer maman Fanta et celle-ci désigner du doigt notre position. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai ressenti de la colère. Ça ne m'arrivait pas souvent de ressentir ce genre de chose, mais j'étais vraiment en rogne contre ces derniers. Adja m'a fait de grands signes. Je suis encore resté un long moment dans l'eau et je ne suis sortie que quand je les ai vus entrer. On s'est croisé presque sur la berge et je me suis arrêté un moment pour dire bonjour à Adja. Elle m'a dit qu'elle avait ma nostalgie et s'est plainte que je ne prenais plus ses appels et ne répondais pas à ses messages. Je lui ai dit que j'étais juste un peu occupé et comme Fafa me tirait, je suis sortie en ignorant royalement Babacar. Je ne voyais plus Demba et je le cherchais du regard quand je suis rentrée en plein sur lui. il m'a retenu par les épaules et je me suis dégagée. Mon cœur battait très fort et je ne pouvais m'empecher de l'observer un moment.
- salut, dis je finalement après quelques secondes
- salut.
Je l'ai contournée sans rien ajouté, en tirant Fafa. Ça me faisait mal de devoir faire comme s'il était un inconnu, mais je crois que c'était la meilleure chose à faire. Moi qui pensais que mes sentiments pour lui s'étaient un peu calmé, le revoir m'a fait comprendre qu'il n'en était rien. je suis allé m'installer à côté de maman Fanta qui a observé la scène de loin
- c'est bien ce que je pensais. Il y'a un problème entre vous ? Arrête d'être cachotière Diouldé. Quand je te demande tu me dis qu'il n'y a rien mais je savais bien que cette envie de partir, cet air de chien battu c'est parce que tu as un problème avec ton « nar »
- il s'appelle Demba. Et ce n'est plus mon rien.
Elle m'a regardé un moment et les larmes pointaient. Je voulais les repousser, mais elles sont tombées et je les ai essuyés rapidement
- alors pourquoi tu pleures ?
Je me suis recroquevillé et j'ai posé ma tête sur mes genoux. Je les voyais de loin s'amuser.
- je ne sais même pas. Je suis fatiguée maman.
Ma voix tremblait et j'ai encore pleuré. J'avais mis mes bras autour de mes jambes.
- ma fille ne fait pas ça. Calme-toi. La vie est parfois difficile, mais tu verras. Tout se passera bien
Elle parlait avec une pointe de tristesse dans la voix.
- je sais. Mais c'est parfois tellement difficile maman. J'ai parfois l'impression que le ciel me tombe sur la tête. A chaque fois que je pense que j'avance, je reviens au point de départ. J'ai envie de croire que tout va s'arranger, mais je désespère.
Elle me caressait le dos tandis que j'essuyais mes larmes qui ne pouvaient s'arrêter de couler.
- quand je te dis que tout va bien, ce n'est pas vrai. Je ne vais pas bien. Je suis épuisée mentalement, psychologiquement. Ma vie est un vrai gâchis.
- c'est normal après tout ce que tu as traversé. Mais ressaisis-toi. Ça se voit que tu aime ce Demba. Je ne sais pas le problème mais essayez d'arranger les choses.
J'ai souris et cette fois les larmes se sont arrêtées de couler.
- Non merci. Je crois que je vais aller me chercher un vieux qui aura pitié de moi.
On a éclaté de rire et je me suis un peu calmée.
- en tout cas tu es magnifique. Depuis tout à l'heure, tous les garçons ne cessent de te regarder.
- mais personne ne viens maman. Donc je fais peur...il faut que je mettre une pancarte avec la mention libre alors.
On a continué à discuter quand Awa et Malik sont arrivés et tout le monde s'est mis à chercher une solution pour mon célibat. Awa avait des cousins qui n'étaient pas mariés et était très enthousiastes à l'idée de me les présenter tandis que Malik gardait le silence. J'ai accepté et sans attendre elle a appelé son cousin pour lui dire qu'elle avait une fille à lui présenter. Je n'ai pas suivi la discussion car Demba et sa fille venait dans notre direction. Il a salué tout le monde et a fait les présentations.
- maman je te présente ma fille elle s'appelle Saran Sow.
- Diane Saran, rectifia la petite.
Elle a fait rire tout le monde et son père s'est excusé d'avoir raccourci son nom. Quand Demba est arrivé à moi elle s'est écriée
- c'est elle Diouldé ?
J'ai fait oui de la tête. elle m'a fait la bise.
- ben papa depuis qu'il est arrivé a dit qu'il fallait dévaliser les magasins de chocolat pour toi, mais après, il a tout mangé et ne t'as rien ramené.
J'ai souri surtout quand elle a regardé son père avec un air méchant.
- ce n'est pas grave ma chérie.
Demba est resté sans voix et après quelques secondes d'hésitation a pris congé. Saran est partie en me faisait un geste de la main et je le lui ai rendu. Elle était belle avec ses cheveux tout bouclés. Maman m'a regardé sans rien dire et Awa m'a pincé les côtes
- je le reconnais. C'est pas le beau gosse qui venait te chercher à la maison.
J'ai répondu que oui, mais que c'est du passé et que je voulais qu'elle me présente son cousin. On a mangé en groupe et en début d'après midi on est encore retourné dans l'eau. Je voyais Adja et Saran à leur place et je me demandais ou était Demba. Je ne savais pas pourquoi j'ai passé ma journée à l'épier, à surveiller sans en avoir l'air ses moindre faits et gestes. Tout à coup, j'ai senti des mains sur ma taille et j'ai sursauté pensant que c'était encore ses pseudos maitre nageur qui me touchait. Mais non. C'était Demba. J'ai perdu mes moyens et on s'est encore regardé un moment, on était très proche, trop proche. Je voulais partir, mais les vagues m'ont projeté contre lui et sans le vouloir je me suis accrochée à ses épaules. Sa main sur ma taille semblait me bruler. Je retrouvais ses sensations, ses picotements au creux du ventre. Je devais m'éloigner, mais ce regard, son corps collé au mien, cette proximité. C'était trop électrique. J'ai senti qu'il allait poser ses lèvres sur les miennes à son regard, j'ai senti qu'il en avait envie plus que moi. Je respirais difficilement et chaque vague me rapprochait encore plus de lui. Je me suis ressaisie. A temps. Dans un brusque mouvement, je me suis libérée et éloignée et j'ai nagé vers la rive. Il m'a appelé mais je ne me suis pas retournée. Je suis tombé sur Babacar qui voulait entrer et qui m'a pris le bras.
- Diouldé, je peux te parler.
J'ai regardé un moment sa main.
- Non Babacar. Je t'en prie. Il ya du monde. Je ne veux pas parler.
Il m'a regardé un moment et a lâché mon bras. Je suis allé m'assoir et maman fanta en a profité pour aller se promener avec Fafa tandis que je rangeais les affaires. Malik et Awa étaient toujours dans l'eau. Adja est venu me rejoindre pour soit disant me parler. Je lui ai sans le vouloir crier dessus
- Arrete Adja. Tout à l'heure c'était Babacar. Et maintenant toi ? Que voulez encore me dire ? Vous devriez être content maintenant. Moi et Demba, on n'est plus ensemble. Vous voulez quoi encore ?
J'étais énervée. Mais quand j'ai vu qu'elle avait les larmes aux yeux, j'ai eu pitié.
- tu te trompe Diouldé. Je ne voulais pas ça.
J'ai haussé les épaules.
- ce n'est pas grave Adja. Ecoute ce qui est fait est fait. Je n'ai plus envie d'en parler. S'il te plait. Laissez-moi tranquille.
Elle est partie toute triste et en regardant la mer j'essayais de me remonter le moral. Non, il ne fallait pas que je me remette à penser à lui. C'était une perte de temps. Il me faut me remettre de tout ça. Empêcher cette douleur de grandir, l'empêcher de m'oppresser la poitrine, lui tenir tête, ne pas pleurer. Je me sentais tellement seule, tellement désespérée, le cœur tellement vide. Je ne pouvais pas attendre patiemment que cette douleur s'en aille.
J'ai attendu l'arrivée d'Awa pour lui demander
- Dis donc Awa tu me présente quand ton cousin ?
-....
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