Partie 22

J'avais du mal à comprendre, à réaliser. Pour l'instant, j'avais juste envie que cette douleur cesse. J'avais trop mal. Je ne fis pas trop attention à la réaction de mère Oussey qui a écarquillé les yeux et m'a regardé de façon bizarre. Elle est sortie sans rien demander de plus et la sage femme s'est tourné vers moi pour me demander si c'était mon mari qui était l'auteur de la grossesse. Mon air choqué a du la déstabiliser

- excusez-moi, mais c'est la procédure en cas d'avortement. On est obligé de poser des questions

J'avais trop mal. Je voulais juste qu'elle me soulage de cette douleur. Je lui ai répliqué fermement

- Madame mon mari est parti il y a deux mois. Je ne savais même pas que j'étais enceinte. Avoir un enfant est mon plus grand rêve, donc jamais je ne me permettrais d'avorter. Si vous pouvez faire quelque chose pour calmer ma douleur faites le, sinon, laissez moi partir.

Elle hésita un moment avant d'aller chercher une autre infirmière qui me posa une perfusion. Elle me dit juste que ça soulagerait la douleur et que puisque c'est une grossesse jeune, normalement, ça doit s'évacuer seul. Sinon, il fallait faire un curetage. J'avais l'esprit complètement vide. Je ne comprenais pas tout ce qui m'arrivait. Je devais peut être pleuré, mais je ne pouvais pas. Pleurer quoi ? Je ne savais même pas que j'étais enceinte. J'allais pleurer quelle perte ? J'étais surtout trop perdue. Il me fallait réaliser. J'allais le faire et je savais que ça allait être terrible. Mais maintenant, je songeais plutôt à ces maux de ventre terribles. J'avais l'impression qu'on remuait un couteau dans mon ventre. Terrible. J'en criais de douleur

Au bout d'une demi-heure, elles sont revenues pour changer la perfusion, mais les douleurs s'étaient déjà calmées. Cependant le sang commençait à couler et on avait mis une sorte de bassine sous mes fesses. Quand j'ai demandé mère Oussey, on m'a dit qu'elle était partie sans rien demander de plus. Je ne comprenais pas pourquoi elle était partie si rapidement. Je restais donc toute seule pendant presque toute la journée. Je n'avais pas mon téléphone et de temps en temps la douleur était tellement forte que je criais. Mais les infirmières venaient me dire que c'était l'utérus qui se contractait car ils avaient mis un médicament pour cela et c'est pour cette raison que j'avais des douleurs. Elles venaient parfois pour appuyer le ventre et le sang coulait encore plus. Un moment j'ai senti un gros caillot sortir et j'ai appelé. Elles ont regardé le bac et m'ont dit que le plus gros était peut être sorti. Vers 18 heures, comme les douleurs s'étaient calmées, la sage femme m'a demandé de me rhabiller et de rentrer car ce n'était pas la peine qu'ils me gardent toute la nuit, mais que je devais revenir le lendemain. Elle m'a prescrit des médicaments à prendre pour continuer le processus et d'autres pour calmer la douleur. Il n'y avait personne avec moi et elle a eu pitié et m'a proposé de me ramener. Elle s'appelait Tata madeleine et elle est allé me chercher des serviettes hygiéniques et m'a aidé à les mettre. C'est son attention qui m'a fait pleurer.

C'est venu d'un coup. J'ai éclaté en sanglot, des pleurs qui ne pouvaient s'arrêter. Je pleurais ce petit être qui ne voulait pas rester avec moi, cette solitude qui m'entourait. Je n'avais personne pour me ramener chez moi alors que je venais de faire une fausse couche. Tata Madeleine, m'a réconforté comme elle pouvait et on a pris un taxi jusqu'à la maison. Elle allait me remettre de l'argent, mais j'ai refusé. Je suis entrée et j'ai trouvé Pa Ablaye à l'entrée qui faisait les cent pas. Je l'ai salué et il m'a demandé comment j'allais avec empressement

- ma fille depuis ce matin je m'inquiète. Oussey est revenue en racontant du n'importe quoi, et sans me dire où tu étais.

J'étais trop lasse pour m'occuper de ce que mère Oussey avait dit.

- qu'est ce que tu as ma fille ?

- Oh pa Ablaye j'ai fais une fausse couche.

J'ai éclaté en pleur et il a essayé tant bien que mal de me réconforter. Finalement, je suis allée dans ma chambre. Quand je me suis calmée, j'ai appelé la bonne pour qu'elle m'achète mes médicaments et une carte de crédit. A son retour, j'étais encore pliée de douleur et j'ai vite pris mes médicaments pour calmer tout ça et j'ai appelé Rassoul

- allo diouldé, comment tu vas ?

Entendre sa voix me fit encore plus pleurer.

- maman m'a dit ce qui t'es arrivée. Calme-toi

Je pleurais encore plus. J'éprouvais aussi de la peine pour lui. Je pensais qu'il devait être comme moi.

- je suis désolée Rassoul...j'ai vraiment mal.

Il a gardé le silence un temps avant de dire qu'il allait me rappeler. Je ne voulais pas qu'il raccroche. Je me sentais seule, et j'avais envie de lui parler, de lui dire tout mon désarroi. Mais il n'était apparemment pas disposé à discuter et je suis restée pendant longtemps le téléphone collé à l'oreille. J'avais espéré qu'il rappellerait quand même, mais non. Je passais la nuit entre douleur et petite phase de sommeil.

Le lendemain, mère Oussey m'a réveillé pour me donner de la bouillie de mil, me demandant de manger. Elle ne m'a pas demandé si j'allais mieux. Je savais qu'elle était bizarre, mais ce niveau d'insensibilité me sidérait. Heureusement que Pa Ablaye était là. Il est venu dans ma chambre pour me remonter le moral. Les douleurs s'étaient calmées mais je devais changer de serviettes toutes les demi-heures car ça coulait vraiment. Il est resté avec moi un long moment avant de partir. Je suis resté toute la journée dans ma chambre et comme j'avais appelé Adja, elle a rappliqué sur le champ et est resté avec moi toute l'après midi. Elle voulait que j'appelle maman Fanta, mais je lui ai dit que je ne voulais pas l'inquiéter et que je me sentais mieux. Je ne voulais prévenir personne. Comme personne ne savait que j'étais enceinte, ce n'était pas la peine d'ameuter tout le monde. J'ai attendu toute la journée un coup de fil de Rassoul, mais rien et quand j'essayais de l'appeler, il était injoignable. Quand Adja est partie, Pa Ablaye est venue pour me forcer à manger un peu. Je n'avais pas faim, mais avec beaucoup de tact et de discussion, il a quand même réussi à me faire manger.

J'avais appelé Mme Seck pour lui dire que j'avais fait une fausse couche et elle m'a demandé de rester à la maison la semaine. Donc je restais dans ma chambre à ruminer des idées noires. J'allais mieux et je suis retournée au poste de santé ou tata Madeleine m'a fait faire une échographie et heureusement que les choses s'étaient évacués et donc je n'aurais pas besoin de curetage. Je l'ai remercié chaleureusement et même si elle voulait que je lui dise si j'avais des problèmes, je me contentais juste de dire que tout allait bien. Les écoulements ont été intenses pendant 2 jours mais après, ça s'est calmé et j'avais comme des règles. Rassoul quand à lui était bizarre avec moi. Il appelait juste les soirs et me demandait si j'allais mieux, si je me sentais mieux. Il semblait distant, mais je mettais cela sur le compte de la déception et je n'insistais pas. Avec Mère Oussey, comme je ne sortais que pour manger, je ne la croisais pas et comme elle ne me parlait pas, je ne disais rien. Kiné aussi avait le même comportement. C'était comme si on m'avait mis à l'écart. Une semaine après, un samedi, ma belle sœur Mariame est venue passer la journée à la maison avec sa fille. Ça m'a fait plaisir de les voir et elle est resté jusqu'au soir. Après l'avoir accompagnée, je me suis endormie pour me réveiller tenaillée par une soif terrible. Il faisait minuit passée et j'ai vu que Rassoul avait essayé de m'appeler plusieurs fois. Il faisait tard, mais j'ai essayé de le joindre, mais il était en communication. Comme j'avais soif, je me suis levée pour aller chercher de l'eau. La maison était calme et en sortant, j'ai entendu mère Oussey parler dans le salon

- je te dis qu'elle a avorté. La sage femme me l'a dit. Je peux même aller la voir pour te la passer. Et puis, la veille, quand je suis entré dans sa chambre, elle a caché des médicaments qu'elle tenait. Je t'avais prévenu, les peules sont comme ça. Elles ne sont pas fidèles. Elles se gardent jusqu'après leur mariage, elles cherchent à droite à gauche.

Mon cœur battait très fort. Si fort que j'avais l'impression qu'il allait sortir de ma poitrine. Mais qu'est ce qu'elle racontait. Il y eu un moment de silence ou elle devait écouter celui qui était au bout du fil

- non, ce n'est pas ça. Ne lui cherche pas d'excuses. Je t'ai dit qu'elle avait un amant. Ouvre les yeux Rassoul. Elle se moque de toi. Dès que tu rentres, il faut divorcer. Tu m'as compris.

Rassoul...elle parlait avec Rassoul. Je venais de comprendre pourquoi il ne m'avait pas appelé de la journée. Pourquoi la veille il avait été bref. Mon Dieu, j'avais l'impression que le ciel me tombait sur la tête. Elle n'a pas arrêté.

- quand elle est venue, elle n'arrêtait pas de parler à un certain Babacar. Maintenant, elle rentre tard, personne ne sait ce qu'elle fait....

A ce moment, j'ai vu rouge. J'avais le verre d'eau toujours à la main et je suis rentrée dans le salon et je me suis posée devant elle. Elle a relevé la tête et quand elle m'a vue, elle a un peu bafouillée. J'ai jeté avec violence le verre par terre à ses pieds et il s'est cassé. Je ne me contrôlais plus. Trop c'est trop

- espèce de menteuse. Tu n'as même pas honte de mentir comme ça à ton âge. Mais quel genre de personne tu es ??

Je criais fort sans le vouloir, mais j'étais surtout aveuglé par la colère.

- han han c'est à moi que tu parles ainsi. Rassoul tu entends, disait-elle en collant encore l'appareil à son oreille.

J'ai arraché le téléphone et je l'ai aussi jeté

- je m'en fous. Quand allez-vous arrêter de me fatiguer. Espèce de sale sorcière. Imbécile, faux cul. Oui, tu n'es qu'une imbécile qui n'a rien à faire que briser mon couple.

Elle s'est levée et j'ai pris un bol en verre qui ornait la table que j'ai aussi brandi comme arme, menaçant de la lui jeter à la figure et elle s'est assise. J'ai quand même écrasé le bol par terre avec colère. Les larmes coulaient sur mes joues

- Comment pouvez-vous penser que je puisse avorter ? Comment pouvez vous pensez que je trompe Rassoul. Je ne suis pas une pute.

- c'est toi qui le dit, cria t-elle

- les putes, il faut les chercher du côté de tes filles.

Je criais encore plus fort en lui disant qu'elle a passé tout son temps à me pourrir la vie et que cette histoire était la goutte d'eau. En parlant j'ai remarqué que le portable que j'avais jeté était encore allumé et que l'appel n'était pas encore coupé. Je l'ai pris et je l'ai jeté très fort contre le mur. Il s'est cassé

- comme cela, vous ne ferai plus votre sale besogne de menteuse.

Kiné et les jumelles étaient accourus, mais je les ai bousculés pour sortir et aller m'enfermer dans ma chambre. J'entendais les insultes de Kiné dehors. Mon téléphone sonnait et j'ai décroché. C'était Rassoul. Il criait au téléphone

- mais toi qu'est ce qui te prend de parler comme ça à ma mère.

J'avais juste envie de le tuer.

- et toi tu n'as pas entendu ce qu'elle disait sur moi, criais-je à mon tour

- c'est une raison pour l'insulter comme ça ?

Je n'en croyais pas mes oreilles. C'était trop pour moi. Plus que je ne pouvais en supporter.

- écoute Rassoul, je n'en peux plus. Je m'en vais.

Je parlais calmement en essuyant mes larmes et il soupira.

- et ça recommence. Tu penses qu'il vaut mieux partir...

Je l'ai interrompu

- je veux juste savoir si tu la crois. Si tu crois que je t'ai trompé et que j'ai avorté volontairement.

Il y eut un petit silence. Mais trop long pour moi. Beaucoup trop long, trop assourdissant, trop chargé de paroles non dites.

- non, là n'est pas la question,

Sans attendre la suite j'ai raccroché le téléphone lentement et j'ai sorti les quelques affaires que j'avais entreposé pour les mettre dans un petit sac. Le téléphone a sonné de nouveau mais je n'ai pas pris la peine de le prendre.

Pa Ablaye aussi avait accouru et était à la porte pour me demander d'ouvrir la porte. Comme il criait, j'ai déverrouillé et les autres voulaient entrer aussi, mais il leur a demandé fermement de rester dehors. Kiné continuait à proférer des insultes, mais j'étais encore toute retourné et je suis retourné m'assoir sur le lit pour ranger mes affaires

- Diouldé, qu'est ce qui se passe ?

Je lui expliquais que j'ai entendu mère Oussey dire que j'avais des amants et que j'avais avorté volontairement

- Elle a dit cela ?

- oui, mais c'est fini pa Ablaye, je n'en peux plus. je m'en vais.

Je pleurais sans pouvoir m'arrêter. Le visage entre les mains

- Non ma fille reste. Je vais aller lui parler. Elle ne dira plus cela. Je te le demande

J'éclatais e sanglots plus fort, et criant presque

- Non Pa, si ca n'était que toi, jamais je ne partirais. Mais cette fois je te le demande, je t'en supplie, laisse moi partir. Pour l'amour de Dieu, je n'en peux plus

Il était dépassé. J'étais dans un état second.

- mais il fait tard. Tu ne peux pas partir seule. Passe la nuit et demain, tu feras ce que tu as à faire.

J'avais essuyé mes larmes et je m'étais levée.

- non, je suis prête. Je vais trouver un taxi et aller chez moi.

- attend je t'accompagne

Il m'a prit la main et heureusement car Kiné et les jumelles semblaient prête à me taper. Sans un regard, je suis sortie et à la porte je lui ai demandé de retourner, car il risquait de se perdre. Il m'a demandé si j'avais parlé à Rassoul, mais je n'ai pas répondu. Il n'y avait personne dans la rue et après une dizaine de minutes, un taxi s'est arrêté. Je lui ai indiqué l'adresse de chez moi. Arrivée, je n'ai même pas eu la force de me déshabiller. Je me suis couchée comme tel et toute la nuit, je n'ai pas réussi à dormir. Je n'avais même plus envie de pleurer. J'étais juste sous le choc. Comment pouvait-on avoir l'esprit aussi tordu et véhiculer de telles idées. Tromper Rassoul ne m'a jamais effleuré l'esprit. Avorter encore moins. Malgré tout je savais ce que j'avais à faire. J'allais mettre fin à ce mariage car je venais de me rendre compte que ça ne marchera jamais. Et puis le comportement de Rassoul m'a tellement surpris. C'était incroyable. A quel moment a-t-il commencé à douter de moi ? Comment a-t-il pu imaginer que je sois capable d'une telle chose.

Je me suis endormi vers 4 heures du matin et comme je devais reprendre le stage, je me suis lavée et habillée comme une automate. Au bureau Mme Seck m'a bien accueillie et m'a demandé si j'allais mieux

- tu as mauvaise mine ma chérie, mais garde le moral. Moi j'ai fais deux fausses couches avant d'avoir des enfants. C'est des choses qui arrivent. Dès le retour de ton mari, il faut recommencer à travailler.

Je me contentais juste de sourire et de la rassurer. A la pause, j'ai appelé ma mère. Dès qu'elle m'a demandé si tout allait bien, j'ai recommencé à pleurer. Elle s'est inquiété et après m'être un peu calmé, je lui ai parlé de l'avortement, de la réaction de mère Oussey, de celle de Rassoul et aussi des commentaires. Je lui ai expliqué que je ne savais même pas que j'étais enceinte. Pour finir, je lui ai dit que j'avais quitté la maison et que cette fois ci, ma décision était irrévocable et je ne voulais pas que quelqu'un intervienne. Je voulais divorcer. Elle a tenté de me raisonner en disant que je devais au moins attendre le retour de Rassoul, mais j'ai dit niet.

- Néné, Rassoul est dans les mêmes dispositions que sa mère. Quand on en arrive à ne plus faire confiance à sa femme et à penser qu'elle a été enceinte d'une autre personne, le mariage n'a pas lieu d'être. Dès que je finis le travail, je vais aller voir mon oncle. Je suis encore chez Rassoul, mais je vais aller m'installer à Nord foire en attendant le retour de maman Fanta.

Elle a continué à essayer de me faire changer d'avis disant que c'était une incompréhension, mais mon crédit s'est épuisé et je ne l'ai pas rappelé. De toute façon, j'avais déjà dit ce que j'avais à lui dire.

J'ai encore cherché du crédit et j'ai appelé maman Fanta. Elle était choquée quand j'ai fini de parler. Elle s'est mise à crier au téléphone

- prends toutes tes affaires et va m'attendre à la maison. Toi tu es entrée dans une famille de crétins. Je rentre dans une semaine. Ne t'en fais pas. La bonne est là-bas.

Je lui promis d'y aller le soir même. Dès que j'ai raccroché, Rassoul a appelé.

- tu es ou Diouldé ?

- au bureau, répondis-je froidement

- pourquoi es tu parti de la maison ? demanda t-il sévèrement

- parceque ce n'est plus entre toi et moi. C'est fini. Allez-vous chercher une autre femme. Comme moi je suis une pute.

Plus doucement, il m'a interrompu

- ne dis pas ça. j'ai parlé avec mon père. Je crois que tout ça c'est une incompréhension. On va discuter

- Non Rassoul. Cette fois je ne veux pas qu'on parle. Je ne veux rien. Je te demande juste de me libérer. Je veux divorcer.

Il émit un petit rire comme pour dire que c'était encore de la rigolade

- tu es encore fachée, je vais te laisser le temps de réfléchir et après on va discuter.

Je lui ai lancé un Ok avant de raccrocher.

A la fin de la journée, je me suis rendue directement chez mon oncle. Je savais que ça n'allait pas être facile avec lui. Mais j'étais déterminée et prête à assumer les conséquences. Je le trouvais dans la cour en train de préparer la prière du crépuscule. Je fis la prière avec lui et quand il eut fini, je vins m'assoir à coté de lui pour tout lui expliquer. J'ai commencé depuis le commencement en parlant de mère Oussey et du fait qu'elle ne m'aimait pas. Ensuite j'ai parlé des talismans qu'on avait trouvés là bas pour enfin finir par le voyage de Rassoul et les derniers problèmes. En évoquant l'avortement, je n'ai pu m'empêcher de pleurer. Au fur et à mesure que je parlais, je le sentais s'énerver et il secouait nerveusement son chapelet.

- baba, je n'ai jamais trompé mon mari. Je n'y ai jamais songé. J'ai toujours fait ce qu'il me demandait. J'ai supporté sa mère et sa sœur malgré toutes les méchancetés qu'elles me faisaient vivre. Mais quand ça va jusqu'à m'accuser de tromper mon mari et d'essayer d'avorter, ça je ne peux plus supporter. J'ai quitté la maison et ma dignité ne me permet pas de retourner là bas. Elles m'ont atteinte dans ma chair. Donc je te demande, puisque c'est toi qui a scellé le mariage, je veux que tu viennes pour demander à Rassoul et à sa famille de me libérer.

Il a gardé le silence un long moment. Il avait plissé le front et semblait plongé dans ses pensées

- Diouldé, voilà tout ce que ne voulais pas quand je te disais de ne pas t'unir avec les wolof. Ce que tu me raconte me fait mal en tant que père. Mais ne pense tu pas qu'il vaut mieux attendre ton mari pour prendre une décision

- Non, je ne veux pas attendre. Je veux que vous alliez au moins voir sa famille et leur dire que j'ai décidé de partir. Personne ne peut me faire revenir sur ma décision baba. J'ai assez enduré avec ma belle famille.

Il essaya encore de me convaincre utilisant parfois la menace mais je demeurais ferme. Il me traita de tous les noms d'oiseaux, mais ça n'a rien changé. Finalement, il me dit qu'il allait en parler à d'autres membres de la famille et qu'il me rappellerait. Il était très tard et je passais la nuit à nouveau chez moi et j'en profitais pour ranger mes bagages. J'ai reçu un coup de fil de maman Fanta qui a duré très longtemps et où elle me demandait encore des éclaircissements. Elle me demandait si ces femmes là étaient humaines. Je ne trouvais pas de mots pour les qualifier. Je me suis couchée très tard, mais j'avais fini de tout ranger. J'avais vidé mon armoire et pris tous mes cours.

Le lendemain, j'ai invité Adja à déjeuner à la pause et je lui ai tout expliqué. Elle s'est mise à pleurer disant qu'elle n'avait jamais vu autant de méchanceté. je dus lui avouer que j'étais complètement vidée. Complètement détruite. Je ne pensais pas en arriver là avec mon mariage. J'ai toujours pensé que je pourrais gérer toutes les mesquineries de mère Oussey, mais là c'était trop. Et dans toute cette histoire, c'était l'attitude de Rassoul qui m'a le plus choqué. Je lui dis que jamais je ne lui pardonnerais. Jamais.

Le soir à la descente, elle m'a aidé à transporter mes bagages dans un taxi et nous sommes parties à Nord foire. On a trouvé la bonne et je me suis installé dans la chambre de Rama. Adja est restée avec moi mais comme il commençait à faire tard, elle est partie me laissant seule dans un total désarroi.

L'amertume. C'était le sentiment qui m'envahissait. En plus j'avais cette boule permanente à la gorge qui m'empêchait parfois de respirer, qui m'étouffait. Je manquais d'air, mon cœur s'accélérait, et malgré le ventilo, j'étais couverte de sueur. J'étais obligé de sortir pour respirer fort. J'ai compris plus tard que je faisais des crises d'angoisse et je les ai eu fréquemment durant cette période. Je travaillais difficilement j'étais toujours en train de planer, trop de problèmes, mais heureusement, Mme Seck a tout mis sur le compte de la fausse couche et me comprenait.

Avant la fin de la semaine, mon oncle m'a appelé pour me dire qu'ils comptaient aller rendre visite à la famille de Rassoul le lendemain. Ma mère m'a aussi appelé pour me dire qu'elle avait discuté avec mon oncle et qu'ils avaient convenu que l'affront était trop grave et qu'effectivement, il valait mieux pour moi que je quitte ce ménage. Elle me dit qu'elle avait été très touchée par ce qui m'arrivait et qu'à la moindre occasion, elle viendrait me rendre visite.

Quand à Rassoul, je ne prenais plus ses appels et le lendemain, je suis allé attendre mon oncle chez lui. Il est revenu tard, et m'a quand même dit qu'il a trouvé Pa Ablaye et sa mère. Il a exposé les faits et a dit toute son indignation. Il leur a précisé que je n'étais pas une fille de mœurs légères ramassée dans la rue et que j'avais été bien éduquée. Cependant, Pa Ablaye lui a demandé d'attendre le retour de son fils car il est le seul habilité à libérer sa femme du mariage. Mon oncle me fit savoir que Pa Ablaye a sincèrement regretté le comportement de sa femme et a présenté des excuses à la famille. Il a également demandé à mon oncle d'essayer de me faire revenir sur ma décision. Mon oncle n'a rien dit, lui demandant juste de transmettre le message à son fils.

Après m'avoir tout rapporté, je l'ai remercié et il a encore insisté sur le fait que je devais réfléchir à tout ca. Je lui ai répondu que c'était tout réfléchi et que je ne voulais en aucun cas revenir sur ma décision.

Avant d'arriver à la maison, Rassoul m'a appelé

- Diouldé, c'est quoi cette histoire de divorce ? Tu es allé dire à ton oncle de venir demander le divorce ? Mais que t'arrive-t-il Diouldé ?

- Rien Rassoul, écoute, après tout ce qui s'est passé, tu ose me demander ce qui m'arrive ?

- mais je t'ai demandé d'attendre que je revienne pour qu'on en parle.

- je ne veux pas attendre parce que ça ne changera rien. Ça ne marchera jamais. Vous êtes allé trop loin avec moi. Je peux tout supporter, mais des mensonges comme ça, je ne peux pas.

- ma chérie, on va discuter et tout arranger.

Je soupirais.

- tu ne comprends pas Rassoul. Ma décision est prise. Ma dignité, mon honneur, ne me permette plus de revenir avec toi. Tu peux me libérer maintenant, ou alors on attendra ton retour. C'est comme tu veux, l'essentiel, c'est que je ne serais plus ta femme et comme ça tu pourra faire ta vie avec ta mère.

Je raccrochais sans attendre sa réponse et j'ai éteint le téléphone. Non, je ne reculerais pas. Entre Rassoul, sa famille et moi, c'était fini.


Quelques jours après, maman Fanta est revenue de voyage. Le chauffeur est allé la chercher à l'aéroport et elle est arrivée très tard en compagnie de Malick. Il n'avait pas beaucoup changé, toujours aussi grand, noir et très charmant. Une petite barbe donnait un air de maturité à son visage et il était tout souriant. je l'ai salué en lui tendant la main qu'il a retenue un moment en me regardant fixement. J'ai soutenu son regard un moment, mais pas disposé à lui rendre son sourire. Je ne sais pas pourquoi je lui en voulais toujours pour le comportement qu'il a eu avec moi quand tonton Farah. Même si cela faisait longtemps, je ne lui pardonnais pas vraiment. Donc j'étais très crispée avec lui. Je lui ai demandé comment s'était passé son voyage et avec son accent il m'a répondu comme un petit français. Je l'ai taquiné un peu en lui disant qu'il parlait trop vite et entre ses dents et je n'avais pas compris ce qu'il avait dit. Ensuite, je suis allé accueillir maman Fanta qui trainait dehors à parler bagage au téléphone. Dès qu'elle m'a vue, elle a raccroché

- oh maman...

Les larmes commençaient déjà à pointer et je me suis blottie dans ses bras.

- ma Diouldé, massa... je suis vraiment désolé par tout ce qui t'arrive.

On est finalement allé s'installer au salon et j'avais le visage fourré dans les pans de son grand boubou sans pouvoir m'arreter de pleurer. Même Malick est venu s'assoir à côté et m'a touché l'épaule pour me demander de me calmer. Puis il m'a apporté un verre d'eau et je me suis un peu calmé. J'avais ce besoin de me libérer et j'ai commencé à parler. La présence de Mlaick m'importait peu.

- maman, c'était plus que je ne pouvais supporter. Elles ont dit tellement de méchanceté. je ne comprend pas mère Oussey. Je ne sais pas ce que je lui ai fait pour qu'elle me traite comme ça.

Maman Fanta m'a serré longtemps

- tu aimes toujours ton mari ? demanda t-e

- oui maman je l'aime. Mais lui je ne sais pas. Il est trop sous l'influence de sa mère. Tu te rends compte. J'étais souffrante après une fausse couche et il a cru sa mère au point de ne presque plus m'appeler. Au moment où j'avais le plus besoin de lui. Il a cru que je le trompais et que j'avais avorté. Non, je crois qu'une personne qui aime ne se comporte pas comme ça. Avec le temps je l'oublierais, mais s'il était le dernier homme sur cette terre, je ne retournerais plus jamais dans cette famille

Elle a gardé le silence un moment avant de commencer à me sermonner.

- tu as pris ta décision non ? Maintenant, tu compte te mettre à pleurer jusqu'à quand. Ressaisis toi ma fille. Ce n'est pas la fin du monde. Regarde comment tu es froissée, comment tu sembles triste et abattue. Tu aimerais que ta belle mère te voit dans cet état ?

Je secouais la tête

- dans ce cas, relève-toi. Fais toi belle, ahille toi bien. Garde le sourire et reprend ta vie en main. Tu n'es pas la seule à subir des misères dans la vie. D'autres vivent des histoires plus dures que tout ça. Regarde-moi. Les tantes de malick m'ont fait voir de toutes les couleurs. Quand mon mari est mort ils ont porté plainte, ils m'ont même accusé d'être une sorcière. Et puis toi ton mari t'aime. Moi tonton Farah a détruit ma vie, m'a mis en mal avec pleins de gens dont toi la première, a mis enceinte ma sœur, a pris mon argent avant de s'enfuir après avoir épousé une voisine. Donc moi qu'est ce que je dois faire ?

Je la regardais ébahie. Mon Dieu. Je savais que tonton Farah vil et sans cœur et qu'il était capable de tout. Elle me parlait de tout ça pour me remonter le moral et je devais admettre qu'effectivement chacun avait son lot de malheur dans la vie et que je ne devais pas me sentir particulière ou damnée. J'essuyais donc tranquillement mes larmes

- et puis si tu fais ça c'est comme si tu ne croyais pas en Dieu. Souviens-toi de l'histoire de Marie, mère de Jésus. Es tu mieux qu'elle pour qu'on ne te calomnie pas ?

- tu as raison maman. C'est juste que c'est un peu dur.

- et puis on est la pour toi, rajouta Malick

Je le regardais et il me sourit.

Finalement j'ai changé de sujet et j'ai demandé des nouvelles de Rama qui était enceinte. Elle devait accoucher bientôt et maman Fanta comptait y retourner pour l'assister. Il était tard et comme je devais aller travailler le lendemain, je suis allée me coucher.

Je me suis réveillée en retard et j'ai vite fait de partir. Rassoul essaya de m'appeler mais je ne prenais pas ses appels et finalement j'ai coupé mon téléphone. Le soir j'ai trouvé maman Fanta et tata Fatou au salon en train de discuter. Ah mes deux mamans...que ferais-je sans elle. Tata Fatou écoutait maman Fanta religieusement et quand je suis entrée, elle m'a demandé de m'assoir à ses côté pour tout lui dire parceque « nétali thi guémégnou borom ». Donc j'ai repris encore l'histoire. A la fin elle était ébahie en disant qu'elle n'a jamais vu autant de méchanceté. Je les ai laissé le temps d'aller me changer et prier et je les ai trouvé sur le pied de guerre. Walay, il ne manquait que les épées et les boucliers.

Elles étaient décidées à aller voir mère Oussey et à lui dire leurs quatre vérités. J'ai essayé de les dissuader, mais maman Fanta est monté sur ses grands chevaux

- Diouldé reste ne dehors de ça. Cette femme ne t'a rien fait, c'est moi qu'elle a offensé. Quand on profère de telles accusations, on indexe la mère et je me sens visée. Donc je vais aller laver l'affront. Elle va me dire ou elle t'a vu avec un autre homme et le nom de celui qui t'a mis enceinte.

J'étais dépassée. Je comptais sur tata Fatou pour la calmer, mais elle était décidée à l'accompagner. Quand j'essayais de parler, elles m'on toutes demandé de me taire. Elles se sont données rendez vous pour le lendemain samedi à mon plus grand désarroi.

Après le départ de tata Fatou, j'ai encore essayé de dissuader maman Fanta en lui disant qu'elles vont croire que nous sommes fâchées et aigries,

- oui, bien sur que nous sommes fâchées. Et elles vont s'en rendre compte demain. Bande de sorcières

Elle est finalement allée se coucher disant qu'elle avait besoin de force pour demain car si ça demandait qu'elle se batte avec ma belle mère elle le ferait. J'ai éclaté de rire à cause de son air sérieux. Je n'avais pas ri depuis bien longtemps. Comme je ne devais pas travailler le lendemain, je suis restée au salon à regarder la télé, quand Malick est sorti de sa chambre avec une fille. Décidemment, il avait fait vite. Il me l'a présenté comme une amie et il l'a raccompagné. A son retour, il est venu s'assoir à mes côté. Je me suis un peu décalé, mais il s'est encore approché.

- mais qu'est ce que tu fais comme ça, me suis-je écriée

- mais rien, je regarde juste la télé.

Je me suis alors levée pour changer de place et il s'est mis à me sourire.

- pourquoi tu me fuis comme ça ?

Je le regardais sévèrement avant de lui préciser

- écoute, je n'aime pas ça. Ne t'avise plus jamais de recommencer.

- mais tu n'es plus mariée non ?

- et alors ? Tu pense que je suis un ballon qu'on se passe comme ça. Quand l'un a fini, il passe à l'autre ? Mais ça ne vas pas.

J'étais énervé et cette amertume repris surface. Je me suis mise à crier.

- je ne suis le jouet de personne. Toi tu as été le premier à qui j'avais fait confiance et c'est toi le premier à me faire souffrir. C'est toi qui a osé dire des insanités sur moi quand tonton Farah m'accusait de n'importe quoi. Tu aurais pu me considérer comme ta petite sœur, mais tu ne l'as pas fait.

Il semblait dépassé par mon énervement

- calme-toi Diouldé

- non je ne me calme pas. Laisse-moi te dire ce que j'ai sur le cœur. Je n'aimerais pas jouer au hypocrites avec toi alors que j'en ai jusque là sur toi.

- ok parle je t'écoute

Je me suis un peu calmé et je l'ai regardé droit dans les yeux.

- je vais essayer d'être normale avec toi à cause de ta mère. Elle a tout fait pour moi et je suis sure qu'elle ne supporterait pas que je te montre toute la rancœur que je te porte. Mais saches que je t'en veux. A un point que tu ne peux pas imaginer. Pas pour ton mariage ou ce qui s'est passé entre nous, mais pour ton comportement à mon égard quand j'ai eu le problème avec tonton Farah. Tu as été méchant, sans cœur avec moi. Toute l'estime que j'avais pour toi s'est effondrée. Et puis tu n'a pas honte, à ton âge, tu raccompagne une fille et tu oses venir me raconter des insanités comme ça. Mais quel genre d'individus est tu ?

Il était un peu gêné et me regardait sans rien dire.

- ne t'avise plus de recommencer. Ne me touche plus. On peut être amis mais dans le respect.

Je me suis levée pour partir mais il m'a retenu par la main

- reste je t'en prie. Laisse-moi te parler

Je m'assis à contre cœur et j'ai attendu. Il a pris son temps avant de commencer à parler

- Diouldé, si tu savais à quel point je suis désolé pour ce qui s'est passé avec ce type. J'étais aveuglé par la jalousie c'est tout. Je ne supportais pas de te voir avec ce Demba, je ne supportais pas tout l'amour que tu semblais lui porter. Si je pouvais effacer une chose de ma vie ça serait cette épisode. Je te demande de me pardonner.

Je poussais un gros soupir et je le regardais

- je te pardonne Malik, mais je n'oublie pas.

- peut être qu'avec le temps...dit-il hésitant

Il avait toujours ma main et je l'ai retiré pour me lever à nouveau

- excuse moi aussi pour tout à l'heure. Je sais que tu as suffisamment de problèmes.

- ce n'est rien, répondis-je doucement.

Je suis allée me coucher le cœur lourd en repensais à mon histoire avec Malik. Et dire que je l'avais tellement idéalisé. Je crois que je n'étais pas faite pour ces histoires d'amour.

Le lendemain, maman Fanta n'avais pas changé d'avis et est allé chercher tata Fatou pour aller voir mère Oussey. J'aurais aimé être une petite fourmi pour voir ce qui s'y passait mais je suis allée faire des courses en ville pour me changer les idées accompagnée d'Adja. A notre retour, on les a trouvés encore en grande discussion en train de faire des commentaires.

- j'ai donné une bonne gifle à ta belle sœur. Indisciplinée. Une gamine ne me manque pas de respect.

J'étais horrifiée

- maman qu'est ce que tu as fait.

- ish...je parlais avec sa mère, quand elle s'est levée pour me crier dessus en disant qu'elles n'avaient aucune explication à donner et qu'elles attendaient le retour de Rassoul. Je lui ai donné une de ses baffes, ses oreilles doivent encore résonner en lui disant que je ne m'adressais pas à elle. Heureusement qu'on l'a retenu, sinon, j'allais m'envoyer à l'hôpital. Et je lui ai dit d'aller chercher son père

Adja est partie sur un fou rire. Elle ne pouvait pas s'arrêter disant que maman Fanta avait fait la seule chose qu'il fallait faire depuis des années. J'étais interdite et ne trouvais plus de mots. - pourquoi tu as dit ça maman ? Pa Ablaye n'est pas le père de Kiné ?

Elle a rit aux éclats

- si c'est son père, ah je suppose. Mais quand tu dis ce genre de choses à une personne elle va passer des nuits blanches à douter. Et sa mère sera dans le même état. Elles sont mauvaises langues, elles sauront que je suis plus mauvaise langue. C'est de ta faute. Il ne fallait pas te laisser faire. Celles là que j'ai vues sont de vraies peureuses. Si tu les avais bien bastonnées au début, elles allaient t'éviter comme la peste et n'oseraient jamais te calomnier.

Là, moi aussi je suis partie d'un rire nerveux au début qui est vite devenu très joyeux. Finalement c'était bien fait pour elle. Elles le méritaient largement. Elles sont encore restées à commenter pendant longtemps et je leur ai quand même demandé des nouvelles de Pa Ablaye et elles m'ont dit qu'il n'était pas à la maison et mère Oussey leur a dit qu'il était à Thiès. Il me manquait vraiment mon Pa Ablaye. Sokhna m'avait appelé aussi pour voir mon état de santé et se plaindre du comportement de sa mère. Elle aussi était vraiment adorable avec moi et surtout rien ne pouvait faire changer son comportement à mon égard, car j'étais persuadé qu'elle en entendait des tonnes à mon propos. Mais elle était toujours égale à elle-même.

Ce soir là Rassoul m'a appelé et j'ai décroché, car j'étais sure que sa mère l'avais prévenu de la visite de maman Fanta.

- enfin, tu me réponds, depuis des jours, tu refuses de me prendre Diouldé...tu penses que c'est raisonnable ce que tu fais là ?

- tu as raison, je ne voulais pas te parler. Parceque j'avais besoin de réfléchir sur tout ça.

- et ???

Je soupirais

- je n'ai pas changé d'avis Rassoul. Je veux toujours divorcer. Aujourd'hui plus qu'hier.

- Diouldé, je t'ai dit qu'il faut qu'on en parle. Ma mère a mal interpréter des faits et c'est un tord qu'on t'a causé. Mais l'erreur est humaine

- non Rassoul. Ce n'est pas une erreur. Ta mère et ta sœur font tout pour nous séparer. C'est toujours moi qui me suis battu, j'ai toujours tout porté sur moi. Mais là c'est allé trop loin.

- mais..

- Non Rassoul écoute moi. Tu es un homme bon, sans toi, je ne serais jamais arrivée là ou je suis maintenant, mais ça ne dépend plus de nous. Tu m'as toujours dit tu ne pourras jamais transgresser les paroles de ta mère à mon profit. Tu ne lui tourneras jamais le dos. Je ne te demanderais jamais une chose pareille. Et je ne peux plus cohabiter avec ta mère. Je ne supporte plus son influence sur toi.

- je t'ai toujours dit de laisser ma mère en dehors de ça. on ne va pas toujours revenir sur les même problème

La discussion commençait à m'énerver. Je voulais lui expliquer calmement les choses mais ça s'annonçait laborieux.

- justement, là c'est plus sérieux. Rassoul depuis qu'on s'est marié t'ai-je une seule fois montré des signes de frivolité ? avant notre mariage, ais je eu un comportement qui puisse te faire penser que je suis de mœurs légères ?

- non Diouldé, écoute...

- pourquoi quand ta mère t'a raconté ces énormités, tu as préféré la croire, pourquoi as-tu pensé une seule seconde que je puisse faire cela.

Je sentais les larmes qui montaient

- je ne sais pas si tu te rends compte Rassoul. Je venais de faire une fausse couche, j'étais seule à l'hôpital, c'est la sage femme qui m'a ramené. Tu n'as même pas daigné me dire un seul mot réconfortant. Toi et toute ta famille à l'exception de ton père, vous m'avez mis à l'écart

J'ai éclaté en sanglot et je ne pouvais plus parler.

- je suis désolé Diouldé. Mais j'étais perturbé. Imagine un peu dans quel état j'étais. Je ne savais pas que tu étais enceinte, c'est ma mère qui m'a appelé pour me dire que tu avais avorté et qu'elle pense que tu l'avais fait volontairement parceque...

Je l'ai interrompu.

- pourquoi tu ne m'as pas demandé, criais je au téléphone ? Je suis quoi pour toi ? Comment as-tu pu croire une énormité comme ça ? Tu me connais Rassoul.

J'ai raccroché sans attendre. Il a attendu quelques minutes pour rappeler.

- écoute Rassoul, je n'ai plus envie de parler de tout ça. Je ne reviendrais pas sur ma décision ? Je veux divorcer. Tu peux dire à ta mère et ta sœur qu'elles ont réussies.

- ne dis pas ça. Tu ne peux pas décider comme ça de mettre fin à notre mariage. Je t'aime Diouldé, tu le sais.

- oui mais parfois ça ne suffit pas, je suis désolé, mais je ne changerais pas d'avis

- réfléchis bien Diouldé. De toute façon, je ne prendrais aucune décision tant que je serais ici. Je reconnais l'erreur de ma mère et la mienne, mais je pourrais en dire autant de ta tante qui est aussi allé raconter du n'importe quoi à la maison

- prend le comme tu veux Rassoul. Elle a juste répondu à l'affront de ta mère.

Il resta un moment silencieux, puis plus doucement

- je t'aime Diouldé. Je te le répète. A mon retour, je suis sur qu'on trouvera un terrain d'entente.

Je n'ai pas répondu et finalement, on s'est quitté un peu froidement mais je n'avais aucune intention de revenir sur ma décision.

Les semaines suivantes, s'écoulèrent rapidement. Grâce aux menaces de maman Fanta, j'avais repris un peu du poil de la bête. Je me pomponnais comme un mannequin pour aller bosser. Mais ça me faisait du bien quand même. Avec Malick, les choses se sont un peu calmées. Il semblait engagé à fond dans sa relation avec cette fille. Mais un samedi, alors que j'étais en train de regarder la télé, il est rentré et s'est assis avec moi. On a discuté du temps et de l'ambiance et un moment il m'a regardé fixement

- tu sais Diouldé, je ne sais pas si c'est bien, mais je souhaite de tout mon cœur que ton mariage prenne fin

Je l'ai regardé en fronçant les sourcils.

- parceque je crois que de toutes mes relations, tu m'as le plus marquée. Je crois que je serais l'homme le plus heureux si tu acceptais de réfléchir sur nous deux. Pas maintenant, car je sais que c'est tôt, que ce n'est vraiment pas le moment, mais je veux savoir si...

-Malik, arrête, l'interrompis-je. Il n'y a rien à réfléchir sur tout ça. Entre toi et moi, il n'y a plus rien de possible. Absolument rien.

Il a continué à me regarder, puis a haussé les épaules.

- excuse-moi.

- ce n'est rien.

J'ai continué à regarder tranquillement la télé et au bout d'un moment, il est parti. Je pris encore plus mes distances avec lui, et vers la fin du mois de Septembre, il est rentré en France. Avant cela il a présenté officiellement sa copine Aicha à sa mère et apparemment, c'était du sérieux. J'étais content pour lui et je le lui dis un jour. Il m'a juste dit que ça aurait pu se passer autrement, mais j'ai vite fait de changer de sujet.

Un moment, la famille de Rassoul a été mis au courant du problème et ses tantes ont commencé à m'appeler et certaines ont même fait le déplacement jusqu'à la maison pour rencontrer maman Fanta et essayer d'arranger les choses. Elles disaient que j'étais une fille bien et que je ne devais pas laisser ma belle mère briser mon ménage. Je leur répondais invariablement que les choses avaient dépassé le cadre du supportable. Pa Ablaye aussi m'appelait souvent mais on parlait d'autres choses et je lui disais toujours qu'il me manquait. Mais il était hors de question que j'aille lui rendre visite au risque de croiser ses sorcières.

Une fois mon stage terminé, il a fallu me poser pour rédiger mon mémoire. J'allais souvent à l'école pour rencontrer mon encadreur et me faire corriger. Adja aussi rédigeait son mémoire et bien entendu me parlait de moins en moins de Demba et moi aussi je ne voulais rien demander. Elle était à fond sur Babacar et leur relation se faisait de plus en plus sérieuse. Coumba, bizarrement évitait de me parler de sa vie privée et moi aussi je ne voulais plus soulever le débat pour ne pas créer des problèmes entre nous. Adja semblait épanouie dans sa relation et avait même laissé tomber les petites à coté qu'elle avait. C'était étonnant. Je ne savais pas ce qu'elles trouvaient à Babacar, mais bon.

Moi malgré les apparences que je voulais bien montrer, je me sentais dévastée. Il suffisait que je me retrouve seule dans ma chambre pour sentir encore cette amertume monter et cette tristesse m'envahir. J'ai pleuré comme ça toutes les nuits pendant des semaines. Le matin, je me maquillais et me forçait à sourire à tout le monde et à discuter comme si de rien n'était. Mais mes crises d'angoisse persistaient, je stressais, je me demandais sérieusement ce que j'allais faire de ma vie sans Rassoul. Il a toujours été là pour moi. Toute ma vie tournait autour de lui. J'étais sure que je ne retournerais pas avec lui, mais je doutais. Je ne voyais pas le bout du tunnel. Ça serait un recommencement pour moi. Et je ne voulais plus d'homme dans ma vie. Ils étaient la source de tous mes problèmes.


Au début du mois d'octobre, j'ai pu soutenir mon mémoire rapidement. C'était juste une petite présentation de quelques minutes et toute la promotion est passée les uns après les autres. Beaucoup avaient décidé de continuer sur un master, mais moi je n'avais vraiment pas le cœur à étudier et j'avais un peu pris le virus du travail. Donc malgré l'insistance de Maman Fanta, j'ai décidé de chercher du travail. Mme Seck, m'avait demandé de laisser mon dossier et qu'elle m'appellerait dès qu'ils auraient besoin d'une stagiaire.

Bien entendu, le soir de ma soutenance, j'ai appelé Rassoul pour lui dire que j'avais soutenu et je l'ai remercié pour tout. Il a cru que j'avais changé d'avis sur le divorce.

- je savais que tu changerais d'avis sur nous. Nous nous aimons Diouldé. Nous aurons d'autres enfants.

Je l'ai interrompu.

- Rassoul, je t'appelais juste pour te remercier. Après tout depuis le début, tu as payé mes études, en plus tu as toujours été présents, toujours encouragée.

- c'est normal Diouldé. Si j'avais pu faire plus, je l'aurais fait. C'est dommage que je sois si loin de toi. Et puis tu me manque tellement. Je crois que je vais devenir fou sans toi. J'ai juste envie de tout laisser tomber et de venir te prendre et t'embrasser.

Je ne trouvais rien à lui dire. Moi aussi il me manquait, mais il fallait qu'il comprenne que c'est fini entre nous. Je le lui ai dit de différentes façon, mais il ne voulait même pas en parler

-Rassoul, s'il te plait, ne rends pas les choses difficiles.

- je sais ce que tu vas encore me dire, mais je te dis que nous deux ce n'est pas fini. Non Diouldé. Tu ne peux pas tourner la page comme ça.

J'ai essayé de lui expliquer encore que je ne changerais pas d'avais et finalement on s'est encore quitté lui boudant, et moi frustrée. J'étais persuadé que rien ne changerais avec lui.

Juste après le ramadan, Adja avait décidé d'organiser une petite fête chez elle pour fêter son anniversaire. Elle avait décidé de faire grand diner et voulait inviter toute la promotion. Je ne voulais pas trop y aller, mais je n'osais pas. Oui, elle risquait d'en faire toute une histoire. Donc après avoir averti Maman Fanta, j'y suis quand même allé. Je suis passé au salon pour raconter ma misérable vie à ma coiffeuse préférée. Elle disait que j'étais très courageuse d'être partie. Elle disait que je referais ma vie facilement mais je n'étais pas aussi optimiste qu'elle. Je me suis faite toute belle et j'avais mis une petite robe rouge. Je suis allé un peu tôt pour l'aider à se préparer et elle était tout simplement magnifique. Babacar était au Sénégal et devait venir à la fête et elle était très belle avec une robe moulant super courte.

- tu va me ravir la vedette, me dit -elle quand je suis arrivée. Tu es jolie. J'aime te voir comme ça.

- tu ne t'ais pas vu ou quoi ? Je n'aime pas Babacar, mais je crois qu'il va faire sa demande aujourdh'ui.

Elle leva les mains au ciel

- amine...que le Bon Dieu entende tes souhaits.

- ça ne te dérange pas d'être seconde épouse, lui demandais je en lui arrangeant sa coiffure

- si. J'aimerais ne pas avoir à partager mon homme, mais je ne vais pas lui demander de quitter sa femme aussi. Je l'aime et je préfère le partager plutôt que de le perdre.

Je ne comprenais pas. Je concevais ce genre de situation. Dans mon entendement, un amour est exclusif, unique et entre deux personnes. Donc non, je ne la comprenais pas. Et en plus je ne faisais pas confiance en Babacar. Je ne savais pas ou en était sa relation avec Coumba,

Les invités ont commencé à venir et il y avait surtout des élèves de la classe et des amis d'Adja. L'ambiance était bonne et le salon était rempli. J'étais assise dans un coin à côté de Fred, qui me racontait des blagues pourries. Un moment, je me suis sentie observée et quand j'ai relevé la tête, j'ai vu Demba qui me regardait fixement. Il parlait avec Babacar mais son regard était sur moi. J'ai soutenu un moment son regard avant de détourner les yeux et de continuer à discuter. Les filles assises à côté ont commencé à murmurer disant que le gars était vraiment beau et elles avaient raison. Demba était très beau avec sa peau métissée et ses grands yeux marrons. Il ne passait pas inaperçu .Je ne l'ai plus revue par la suite, ni lui ni Adja et j'ai supposé qu'il était de l'autre côté du salon. On a bien mangé et il commençait à faire tard. J'ai cherché Adja et je l'ai trouvé assise sur Babacar en train de discuter

- toi, tu abandonne tes invités...bonjour Babacar

Il s'est levé pour me faire la bise. Je faisais l'effort d'être un peu sympa avec lui à cause d'Adja.

- Adja je dois rentrer.

- Pourquoi ? Tu ne fais rien chez toi. Passe la nuit ici.

J'ai souri et j'ai quand même insisté pour partir. En sortant, comme il faisait noir, je suis tombé sur un homme qui téléphonait. J'allais tomber quand il m'a rattrapé. J'ai reconnu le parfum avant de relever la tête. Il me maintenait fermement contre lui pour m'éviter de tomber.

- excuse-moi, lui dis-je en me dégageant

Il tenait toujours mon avant bras et avait raccroché son téléphone. On s'est regardé un moment

- tu vas bien Diouldé, demandas t-il doucement

Le petit sourire en coin, les lèvres roses, les beaux yeux marrons...complètement troublée

- ca va. Et toi ?

Il haussa les épaules sans rien dire. J'ai tiré un peu pour libérer mon bras et il m'a lâché.

- tu rentrais ?

- oui je m'en vais. Il fait tard.

J'allais partir quand il m'a appelé

- Adja m'a dit que tu avait de petits soucis ces temps ci .

Je me suis retrouvé et je l'ai regardé. Décidemment, Adja ne peux pas tenir sa langue.

- Adja parle trop.

Il a continué à me fixer un moment.

- et toi pas du tout. Tu n'as pas trop changé alors. Toujours aussi secrète.

Il faisait sombre, c'était juste la lampe du couloir qui éclairait faiblement cette partie. Il parlait en s'approchant et est venu se placer juste devant moi. J'ai levée la tête pour le regarder, et il avait toujours ce petit sourire.

- non je n'ai pas changé

- c'est tant mieux.

Un silence, un long silence une seconde, une minute, une heure...je ne sais pas. Personne ne parlait et on était debout l'un devant l'autre. Je voulais partir, je devais partir.. J'ai subitement tourné les talons, quand il a tendu la main pour essayer de prendre la mienne. Mais il m'a encore rappelé.

- Diouldé ...

Je me suis encore arrêtée, puis retournée à nouveau. Mais j'étais au moins loin de lui

- oui

- tu es très belle.

J'avais perdu la voix. Je hochais juste la tête et suis partie presqu'en courant. J'avais l'impression d'avoir été pris en faute tellement j'étais troublée. J'étais comme un enfant pris en train de voler des bonbons. J'eus honte. Plus tard j'ai demandé à Adja ce qu'elle avait dit à Demba et innocemment, elle m'a dit qu'il lui avait expliqué brièvement que j'avais quitté le domicile conjugal, mais en m'assurant ne pas être entré dans les détails. Elle s'est excusée, mais a plaidé l'indulgence car elle dit que Demba ne cessait de lui demander de mes nouvelles. Je lui ai demandé d'arrêter de lui parler de moi et elle a promis de le faire.

Au début du mois de Décembre, j'ai commencé à déposer des dossiers pour trouver un emploi. J'en avais un peu marre de ne rien faire et de rester à la maison à tourner en rond. Parfois j'allais aider maman au magasin, mais je n'avais pas la fibre de vendeuse car dès qu'on insistait un peu je rabaissais le prix et finalement, maman m'a demander de ne plus marchander sinon elle allait directement en faillite. Rassoul continuait à m'envoyer de l'argent, mais je ne voulais pas le prendre. Il était toujours obligé de me rappeler pendant plusieurs jours d'aller le récupérer et je le faisais à contre cœur. Et toujours je remettais l'argent à maman Fanta qui me disait que je devais l'utiliser. Mais je payais juste la location de son appartement et la bonne. Le reste je n'y touchais presque pas. Je ne manquais de rien et j'avais le reste de mon argent du stage pour les petites courses. Ce n'était pas de l'orgueil, mais j'avais surtout des scrupules à prendre cet argent alors que je considérais qu'on était plus marié. Maman Fanta ne me comprenais pas disant que j'étais folleet que c'est elle qui allait prendre l'argent car elle me nourrit. De toute façon elle s'arrangeait toujours pour m'acheter de jolies chemisiers ou pantalons en disant qu'elle avait vu cela dans une boutique et qu'elle a pensé à moi.

Mais je cherchais quand même du travail. J'allais en entretien mais on ne me proposait souvent des stages non rémunérés. Je voulais avoir un travail mais avec un minimum d'argent au moins. Il y a eu aussi un cabinet d'étude ou j'avais commencé car au moins j'avais une petite indemnité de stage et une promesse de contrat. C'était le directeur lui-même qui m'avait reçu en entretien et le premier jour, je devais assister le chef comptable. Il était charmant mais un peu lourd avec toujours des sous entendus que je n'appréciais pas. Au bout de quelques jours, le directeur m'a fait appeler et je pensais que c'était pour un travail. Mais non, il s'est mis à discuter comme un vieux père avec moi car il devait avoir au moins la cinquantaine. Il m'a demandé ou était mon mari, ou j'habitais et je répondais machinallement. Je ne comprenais pas pourquoi autant d'attention. Au moment de prendre congé, il m'a remis de l'argent que j'ai refusé de prendre, mais il a insisté disant que j'étais sa fille et que c'était pour mon transport. J'ai finalement pris à contrecoeur et les jours suivant, la même scène se répétait souvent. Les gens commençaient à jaser et je lui ai fait remarquer que puisqu'il n'avait rien d'important à me dire, il valait mieux éviter que je rentre comme ça dans son bureau. Il m'a alors sans gêne proposé de nous retrouver dans un restaurant pour être plus tranquille. Je commençais un peu à le voir venir et je me doutais qu'il allait en arriver là. Je lui ai rappelé que j'étais mariée et que même si je ne l'étais pas, il n'était vraiment pas question que je parte au restaurant avec lui car je le voyais comme un père. Il a quand même continué à me faire des avances et à me proposer des sommes d'argent astronomique que je refusais toujours. Un jour il a poussé le bouchon jusqu'à me toucher la poitrine alors que j'étais dans son bureau pour une signature. Le jour même j'ai arrêtée sans demander mon reste et sans l'avertir. J'en ai parlé à maman Fanta qui s'est énervée et m'a demandé de ne plus y mettre les pieds. J'étais complètement découragée et j'ai décidé de rester à la maison en attendant de trouver autre chose.

On était en fin d'année et les fêtes de fin d'année s'annonçaient tristes. Coumba avait prévu de venir e n vacance mais finalement, elle a pu trouver un stage et a décidé de rester pour travailler. Elle me disait toujours que Rassoul l'appelait, mais il ne lui parlait jamais du problème. Je lui ai demandé de faire comme si elle ne savait rien. C'était quand même dommage car j'avais espéré qu'elle viendrait et j'aurais de la compagnie. Un jour je pris mon courage pour lui demander si elle avait des nouvelles de Babacar. Elle fut obligée de m'avouer que j'avais eu raison de la prévenir. Et que ce dernier malgré tout ce qu'elle a sacrifié pour lui, a reconnu entretenir une relation avec Adja. Cette fois, elle disait qu'elle avait tourné définitivement la page Babacar et je l'ai félicité. Adja ouvrira aussi bientôt les yeux, j'en étais convaincu.

Les fêtes de Noel arrivèrent rapidement et maman Fanta avait décidé d'aller réveillonner chez une de ses meilleures amies. Elle voulait que je vienne avec elle, mais les rencontres de grandes dames là, ça ne m'intéressait pas trop. Elles vont se mettre à commenter les cérémonies ou elles sont allées dernièrement. Je préférais me morfondre seule dans ma chambre. Adja était en mode love avec Babacar et j'ai donc passé la nuit à regarder la télé avec la bonne et le gardien. Finalement, je ne me suis pas trop ennuyé car Ouzin le gardien était en fait plein d'humour. Je trouvais dommage que les gens ne prennent pas trop le temps de parler à leur employé dans les maisons. Mais Ouzin était le plus grand comédien de tous les temps. J'ai rigolé aux larmes de ses blagues et Touti aussi n'était pas en reste. Elle s'est mise à me raconter ses petites amourettes au village et au final, j'ai passé une des meilleures soirées de ma vie, tranquillement installé sur un banc à l'entrée de la maison à boire du thé presque jusqu'au petit matin. Je ne voulais même pas aller dormir tellement je m'étais senti bien avec eux. Pour le 31 Décembre, malheureusement je n'ai pas eu la chance de les avoir. Ouzin a demander à rentrer et Touti aussi est partie. Maman Fanta était allé encore chez son amie et Adja devait sortir avec Babacar. Elle a voulu que je vienne, mais j'avais peur d'y retrouver Demba, donc j'ai décliné. J'ai passé la journée chez Ibrahima et Mariama avant de rentrer à Nord foire. Ibrahima en voulait beaucoup à Rassoul pour tout ce qui s'était passé et me demandait de ne plus retourner là bas. Vers 20h, tout le monde était parti et je me suis enfermé dans la maison, je me suis installé au salon et j'ai commencé à défaire mes tresses. Je recevais de temps en temps des coups de fil de la part des promotionnaires qui me souhaitaient en avance la bonne année. Je n'avais plus de nouvelles de Rassoul depuis un moment et comme la plupart du temps je ne prenais pas ses appels, je suppose qu'il s'est fâché.

J'attendais impatiemment le bébé de l'année car c'était la seule chose qui m'intéressait et j'avais entre temps fini avec mes cheveux quand on a sonné à la porte. Peureuse comme je suis-je n'ai pas voulu aller ouvrir et on a insisté. J'ai continué à faire la morte quand mon téléphone s'est mis à sonner. C'était le numéro de Rassoul du Sénégal et mon cœur s'est emballé. J'ai compris que c'est lui qui était à la porte. Sans prendre le temps de répondre, j'ai vérifié par la fenêtre et je l'ai vu debout à l'entrée. Instinctivement, je suis allé me regarder dans le miroir. J'avais les cheveux en bataille et comme ils étaient long ça ressemblait encore plus à du n'importe quoi. et ça n'était pas le pire. J'avais un pygama en fin de vie qui était trop grand pour moi et qui pendouillait de partout. Une demi heure n'aurait pas suffit à m'arranger et puis merde, c'était fini entre nous, ça ne valait pas la peine que je me fasse belle.

J'ai ouvert la porte le cœur battant. J'ai respiré de grands coups d'air, mais rien n'y fit. Je ne comprenais pas pourquoi j'étais dans cet état. J'ai ouvert et il m'a fait un grand sourire. Rassoul. Il avait pris un peu de poids et laissé pousser ses cheveux. Il était vraiment charmant. J'avais juste envie de lui sauter dessus, de l'embrasser, de lui dire qu'il m'avait manqué. Au lieu de ça, j'étais bêtement debout devant lui, habillé comme un épouvantail à le regarder sans mot dire.

- Rassoul ? tu es rentré quand ? je ne savais pas....

Il a continué à sourire en haussant les épaules

- je suis la depuis hier. Mais je tenais à te faire une surprise pour la fin de l'année

Je le regardais sans rien dire.

- tu me laisse au moins entrer. Il ne fait pas très chaud dehors

Je m'excusais et me poussa pour le laisser passer. Je l'ai devancé au salon avant de me retourner et de me retrouver devant lui. Il tenait un petit sac et il l'a déposé à l'entrée du salon. Sans rien attendre, il s'est avancé vers moi et m'a tiré à lui.

- laisse-moi Rassoul.

Avant que je ne puisse continuer, il m'avait enlacé et embrassé. Je l'ai laissé faire sans trop de résistance. J'en avais peut être besoin aussi. J'ai mis mes mains autour de sa taille et c'est quand il a voulu introduire ses mains sous le pull du pyjama, que je l'ai repoussé

- tu m'as tellement manqué ma chérie. Si tu savais.

Il allait recommencer, quand je me suis prestement écarté.

- Rassoul assied toi. Il faut qu'on parle

Il s'est a nouveau approché de moi

- non on parlera plus tard. Viens on va rentrer. J'ai trop envie de toi. 6 mois c'est trop long.

Je m'écartais à nouveau et finalement il a soupiré avant de s'installer sur un fauteuil. J'ai fais de même sur le canapé en face et j'ai commencé par lui demander comment c'était passé son voyage. C'était bizarre d'être là à parler de tout et de rien alors qu'on était resté tant de temps sans se voir. Il ne cessait de me regarder et finalement il mit les pieds dans le plat

- Diouldé, je ne suis pas venue ici pour parler du temps qu'il fait en France. Tu me manques et j'avais envie d'être avec toi

- ta mère sait elle que tu es ici avec moi

Il n'a rien dit et a soupiré

- combien de fois vais-je te demander de laisser ma mère en dehors de tout

ça.

Je commençais à m'énerver.

- je te demande simplement si tu lui as dit que tu es venue me voir

- mais je n'ai pas de compte à rendre à ma mère.

- justement dans ce contexte si. Je ne vois pas l'intérêt de te présence ici, si tu n'a pas le courage de dire à ta mère qui me prend pour une pute, que tu es là. Donc on va vivre en cachette.

Je l'ai senti aussi s'énerver

- Diouldé, arrête. Je te dis que je suis venu arranger les choses entre nous. Pour cela met à côté ma mère et parlons de nous.

J'ai secoué vivement la tête

- s'il n'y avait que nous, on n'aurait jamais de problèmes. Je sais que je t'aime suffisamment pour tout surmonter. Mais pas ça. Je ne veux pas passer toute ma vie à ma battre avec tout le monde. Ta mère et ta sœur sont d'une méchanceté gratuite avec moi et toi qui était sensé me soutenir, tu es la plupart du temps de leur côté.

- on revient à la case départ

La façon dont il avait de parler de cette histoire m'énervait. Il le prenait avec trop de légèreté, trop de désinvolture. Alors que moi cette histoire m'empêchait de dormir, me foutait des crises d'angoisse, me stressait. Ça me fendait le cœur de penser que mon propre mari ai pu croire qu'en l'espace de 3 mois, je puisse aller voir un autre homme, coucher avec lui, tomber enceinte, avorter. C'était terrible et j'ai essayé de lui dire assez calmement les moments que j'ai traversé, cette journée, seule dans une chambre d'un lugubre poste de santé a attendre que tout s'évacue, cette solitude, cette mise à l'écart de sa famille. Un moment, j'ai éclaté en sanglot. Il s'est alors levé et s'est mis à côté de moi pour essayer de me calmer.

- non tu ne peux pas imaginer. C'est allé trop loin Rassoul. Beaucoup trop loin. J'ai eu honte. Tellement honte qu'on puisse penser cela de moi. Et toi tu y a cru Rassoul. Si tu avais dément ta mère dès le premier jour, elle aurait arrêté et m'aurait traité normalement. Mais tu as préféré la croire elle. Et moi tu m'as jeté en pâture. J'ai sombré, j'ai cru devenir folle, j'ai pensé à me suicider, mais si je l'avais fait, ta mère aurait pu penser qu'elle avait raison. J'ai eu envie d'arracher mon cœur et de le piétiner tellement il me faisait mal. Et aujourd'hui tu veux que j'enterre tout ça parceque tu m'aimes.

A ce moment, il s'est tenu la tête en la secouant et en répétant mon nom. Je me suis levée pour aller me débarbouiller dans les toilettes. J'ai essuyé rageusement mes larmes qui continuaient encore à couler et je suis restée un bon moment pour me calmer. J'avais une tête de déterrée et après quelques jets d'eau froide, j'avais le visage encore plus rouge. Je l'ai trouvé en train de regarder la télé, le visage fermé et je me suis assise un peu à l'écart

On a gardé le silence pendant de longues minutes, regardant les images de la télé sans les voir, chacun plongé dans ses pensées. Au bout d'un long moment il m'a appelé et je me suis tournée vers lui.

- je te comprends. Je comprends que tu puisses être fâché et je reconnais avoir déconné sur ce coup. Nul n'est parfait Diouldé. J'étais loin, seul et tout ça me tombe comme ça sur la tête. et puis quand je t'ai eu au téléphone, tu n'arrêtais pas de pleurer.

Il s'est arrêté et a soufflé lourdement

- je suis désolé, pour tout.

Il s'était à nouveau déplacé pour venir se mettre à coté de moi et m'a pris dans ses bras. Je me suis laissé aller contre lui sans rien dire.

- tu n'a rien fait qui aurait pu me laisser penser tout ça. Désolé.

Il a continué à parler, et à s'excuser. Mais cela ne m'a pas apaisé. Je me suis un peu écarté avant de le regarder

- je t'en avais parlé et je n'ai pas changé de décision. Je veux divorcer. Tu avais demandé d'attendre ton retour. Tu es là. Je veux que ça soit officiel. Je veux que ta mère et ta sœur sachent qu'elles peuvent dormir tranquilles. Je ne retournerais jamais dans ta famille Rassoul. Ta mère ne m'aime pas mais moi aussi je la déteste encore plus

Il m'a regardé comme si j'avais dit une énormité.

- Diouldé, je viens de m'excuser. Qu'est ce que tu veux encore. Je suis désolé pour tout. Tu veux quoi ? La dernière fois c'était le déménagement, cette fois ça sera quoi ?

Il parlait doucement mais on sentait une petite pointe d'énervement

- rien. Je ne veux rien. Juste la tranquillité. Tu me connais Rassoul. Ma vie n'a jamais été facile. Il y a eu des moments difficiles et toi tu sais tout. Je ne compte pas passer le reste de ma vie à être malheureuse. Tu es un homme merveilleux, bon, généreux, je n'ai jamais manqué de rien depuis que je suis avec toi, mais ça ne suffit pas.

- mais c'est insensé ce que tu dis. On s'aime, mais on doit se séparer. C'est bien ça ?

- oui...prend le comme ça. Ta mère ne me supporte pas et elle continuera à avoir une influence sur toi. Aujourd'hui je suis une pute, demain elle inventera autre chose et on va finir par se détester toi et moi.

- ma mère n'a jamais dit que tu étais une p...

Il n'arrivait pas à le dire le mot

- avoir un amant, se faire enceinter et se faire avorter ça s'appelle comment ?

Il ne disait rien. Et comme il faisait vraiment tard, je lui ai demandé de rentrer car je voulais dormir.

- tu es seule ici ? me demanda-t-il

- non maman dort, mentis-je

Il s'est alors levé et s'est dirigé vers la sortie, moi sur ses talons. J'avais le cœur gros et des envies de pleurer. Il ma tendu le sac qu'il avait en venant

- c'est pour toi.

J'ai hésité à prendre, mais il m'a lancé un regard qui m'a fait prendre le sac et je l'ai remercié.

A la porte, il s'est a nouveau arrêté

- Diouldé, réfléchis bien. Si tu me quitte je ne m'en remettrais pas. Je t'aime plus que tu ne le pense et je te respecte. Je ne veux pas divorcer. Je veux qu'on trouve un terrain d'entente. Je t'en supplie, ne me fais pas ça.

- On n'en trouvera pas. Je vais te laisser vivre la vie que ta mère veut, sans moi. C'est plus simple.

Il y avait beaucoup d'émotion dans sa voix et je ne savais pas quoi dire. Quand il est parti, je suis encore allé me couchée complètement perturbée. C'était plus que je ne pouvais en supporter. Je l'aimais encore, mais je savais que ça ne marcherais jamais. Pas tant que sa mère sera entre nous.

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