Part 9
Le jour de mon départ, je me réveillais le cœur gros. Ma mère aussi était très triste mais elle me souriait à chaque fois que nos regards se croisaient. J’appréhendais ce que j’allais trouver là bas même si j’y avais grandi. J’avais cette impression de reprendre ma vie à zéro et cet inconnu me faisait vraiment peur. Ma peur me donna pleins de conseils et je me mis à pleurer de chaudes larmes. J’étais la depuis presque un an et je n’ai jamais été aussi heureuse. Mais bon, il le fallait et je me promettais d’étudier rapidement et de revenir dès que j’aurais des vacances. Toute la maison m’accompagnait et cela me fit pleurer encore plus. Je m’accrochais à ma mère et le taxi brousse dut me menacer de me laisser sur place pour que j’accepte de me détacher. Je me cachais le visage pour ne plus la voir et ainsi avoir la force de partir. Le voyage comme à l’aller fut long et éprouvant.
Ibrahima vint me chercher au garage. Il avait pris un appartement dans un quartier très populeux. Il y avait 2 chambres et un salon. Il m’avait réservé une chambre et avait pris une autre avec un de ses amis qui tenait aussi une boutique dans les environs. Le salon aussi était transformé en chambre et il l’avait sous loué à d’autres compatriotes guinéens.
Les premiers jours j’étais un peu perdu et je restais à la maison. Ibrahima partait tôt le matin et ne s’occupait pas trop de moi. Il m’avait remis de l’argent et me demandais d’aller m’inscrire. Un matin j’appelais sur le numéro de mon portable et je tombais sur Fatou. Elle se mit à crier quand elle me reconnut et me posait pleins de questions. Finalement je lui promis de passer à la cité Claudel pour la voir. Elle avait des examens à reprendre et c’est pourquoi elle est revenu très tôt de ses vacances et révisait dans la chambre. Khady et Maty aussi était la bas et dès qu’elles me virent, elles m’enlacèrent toutes en criant et en sautant. Elles me faisaient rire et ne me laissèrent pas en placer une avec toutes leurs questions.
Elles disaient que j’avais un peu grossi, que j’étais devenu plus claire et que je ressemblais à une maure. Khady disait que je me mettais du « Dakh » sur le corps et c’est pourquoi j’avais ce teint. Je me contentais de rire et finalement je leur dis qu’elles m’avaient toutes manqué. Fatou me dit que Demba avait appelé tous les jours pendant des semaines et était même passé pour s’assurer que je n’étais effectivement pas la. Elle me dit qu’elle avait même pitié de lui, mais qu’avec le temps, il appelait juste pour demander si j’avais appelé pour donner des nouvelles. Comme je n’ai appelé qu’une fois Fatou, elle n’avait jamais d’information à lui donner, et finalement il a laissé tomber. Cette information me fit un pincement au cœur et je m’en voulus un peu.
Elles me disaient que les cours étaient vraiment difficiles et qu’elles devaient toutes reprendre des matières en octobre. Je leur expliquai que je voulais reprendre mes études mais que j’hésitais à faire la pharmacie car c’était long et que je voulais rapidement finir et rentrer chez moi. Elles me conseillèrent de m’inscrire dans une école privée, mais qu’il fallait que je paye.
Fatou voulut me rendre le portable, mais je refusais de prendre en lui disant que de toute façon je ne connaissais plus personne ici à part elle et que c’était plus facile qu’elle le garde.
Le soir je parlais à Ibrahima des cours dans une école privée et il me demandait d’aller me renseigner et que si c’est raisonnable, les affaires de mon père pouvaient les payer. Avant d’aller me renseigner, j’allais voir mon cousin Ibrahima et je trouvais l’homonyme de mon père tout beau. Je lui demandais le numéro de Rassoul et au lieu d’appeler, j’allais directement à l’hôpital. On me dit qu’il était en consultation et j’allais m’installer devant sa salle. Dès qu’il me vit, il écarquilla les yeux et me demandait de venir.
- Diouldé, c’est bien toi ?tu es la depuis quand ? dit-il en m’enlaçant
- je suis arrivée depuis une semaine. J’ai suivi tes conseils et je suis revenu pour reprendre mes études.
Je lui demandais pourquoi il n’avait plus appelé et il m’expliquait qu’il était rentré la semaine passée de son périple et était vraiment pris, mais comptait m’appeler. Il était vraiment content que je sois venue et me demandais ou je comptais m’inscrire. Je lui dis que je n’en avais aucune idée et il me conseilla des écoles en villes qui étaient très bien. Je promis d’aller me renseigner et il me demandait ou je logeais. Je lui expliquais notre maison et prit congé rapidement en lui disant que je ne voulais pas le retarder. Il me demandait si j’avais un portable ou il pourrait me joindre et je lui dis que non, mais lui donnait le numéro de mon frère. J’allais ensuite demander des renseignements dans quelques instituts mais ils étaient vraiment chers et finalement je rentrais complètement découragée.
Le soir même, alors que je m’apprêtais à me coucher, Rassoul arrivait avec mon frère. Il avait appelé ce dernier et était allé l'attendre dans sa boutique pour qu’il l’accompagne jusqu’à la maison. Il me remit un téléphone et je refusais de le prendre. Mais il insistait et avant de partir le laissa sur la table. Il a appelé une fois chez lui et je lui expliquais que je ne voulais pas de cadeaux. Il me dit de considérer cela comme un prêt, et que c’était juste pour que je sois joignable et que dès que j’en trouverai un, je pouvais le lui rendre. On discutait un moment et il me souhaita la bonne nuit.
J’étais encore perdue et ne savais pas trop quoi faire. Tout ce que j’avais envie de faire, c’était reprendre mes bagages et rentrer chez moi, auprès de ma mère.
Les jours suivants, je continuai ma recherche et les filières qui m’intéressaient étaient assez chères. Mais je décidais un jour d’en parler à Ibrahima pour qu’il me dise exactement jusqu’à quel niveau il pourrait assurer mes frais de scolarité. Je lui fis part des renseignements que j’ai eu et il les jugeait tous trop cher, car il devait aussi envoyer de l’argent à ma mère et payer les locations. Je ne voulais pas trop insister. Un jour alors que j’étais vraiment découragée, je discutais avec Rassoul en lui disant que je ne trouvais pas d’école convenable à bon prix et que j’avais décidé de m’inscrire dans une petite institution et suivre une petite formation en secrétariat. Il semblait choqué et me disait ne pas comprendre. Je lui dis qu’Ibrahima venait juste de reprendre en main les affaires de mon père et qu’il ne pouvait pas prendre en charge des frais de scolarité trop chère. Il ne dit rien et me demandait de continuer à chercher et surtout de ne pas faire cette foutue formation.
Rassoul était très présent depuis mon retour. Il m’appelait souvent et avec son travail n’avait pas trop de temps. Il était passionné par son travail et adorait en parler. Il avait suivi le cursus normal jusqu’à son doctorat et ensuite, il s’est spécialisé en anesthésie-réanimation. Il venait de finir une finir une formation pour devenir médecin urgentiste et c’est pour cette raison qu’il n’avait jamais le temps. Je me moquais de lui en lui disant qu’il aimait trop étudier et qu’a un moment, il faut qu’il se repose un peu. Mais il disait que la vie était toujours faite de challenge et il voulait que je persévère dans les études. Je ne pouvais définir ma relation avec lui à cette époque. Disons que c’était une amitié teintée d’un voile d’affection. A part de temps en temps des sous entendus que je n’essayais jamais de décoder, je le considérais comme un grand frère. Il n’a jamais rien tenté et c’était tant mieux pour moi car en venant j’avais décidé de ne plus faire confiance en personne. J’ai été assez éprouvée et la meilleure façon de se protéger, c’était de se construire une carapace. Donc Rassoul se contentais d’appeler et de discuter, et encore juste quand il avait le temps. A part la fois ou il est venu me remettre le téléphone, je ne voyais plus. Mais les coups de fils étaient réguliers et chaque soir, je lui faisais naturellement le point sur ma journée. Il était très calme, prenait son temps avant de répondre et parlais doucement. Il avait une grande capacité d’écoute et savait bien me conseiller surtout dans les moments de découragement.
J’avais appelé Coumba et malgré le petit froid entre nous, elle fut contente de savoir que j’étais revenu et que j’avais décidé de reprendre mes études. Elle aussi suivait sa formation tranquillement et me demandais des nouvelles de maman. Je lui expliquai que j’avais tourné cette page et lui annonçait le décès de mon père. Elle était vraiment désolé et me reprochais le fait de ne pas l’avoir prévenu plus tôt. Je lui communiquais mon nouveau numéro et elle promit de m’appeler. J’appelais aussi Moha mais sans succès. Le numéro d’Awa ne marchait plus, et je voulais quand même l’appeler pour la remercier pour tout ce qu’elle avait fait pour moi.
Ma vie prenait une autre tournure et j’étais bien décidé à réussir, même si je ne trouvais pas encore d’école. Après près de 3 semaines de recherche je ne trouvais pas la formation qui me convenait à bon prix et je commençais à me décourager. J’avais décidé de laisser tomber et d’aller m’inscrire dans un petit institut pour une petite formation car Ibrahima rejetait systématiquement les propositions que je lui faisais disant que c’était trop cher, et on se prenait souvent la tête pour ca. Un jour que Rassoul s’inquiétait du retard que j’accusais à trouver une école, je lui expliquais le problème et après m’avoir écouté silencieusement, il me demandait de ne pas me décourager et qu’Ibrahima reviendrait à de meilleures sentiments si je le lui demandais calmement. Il ne comprenait décidemment pas, mais je ne fis pas de commentaires et continuait à chercher. Un jour, quelle ne fut ma surprise de voir Ibrahima m’appeler et me dire que finalement, il pensait que les affaires marcheraient bien et que je pourrais aller m’inscrire dans l’école de mon choix. J’étais très contente et surprise de ce revirement en me dis qu’il y avait peut être la main de ma mère car je me plaignais souvent auprès d’elle. J’en fis part à Rassoul qui me conseilla vivement une université privée qui avait la cote, même si c’était assez cher. J’avais des scrupules à en parler à Ibrahima, mais Rassoul m’encourageais
- puisque tu dis que c’est Ibrahima qui t’a dit de choisir l’école de ton choix, pourquoi tu hésite. Et puis, c’est une bonne école, tu auras une belle carrière. Tu pourras rembourser, me dit-il un soir alors que je lui faisais part de mes craintes.
Il avait raison et le lendemain, Ibrahima fut d’accord et le soir même me remis l’argent de l’inscription. J’appelais ma mère pour lui dire que j’avais finalement trouvé une école et elle formulait pleins de prières pour moi. Quand j’arrivais à la joindre, je restais longtemps pour lui demander des nouvelles de toute la maison et m’enquérir de son état de santé. Elle me manquait vraiment et elle me rassurait en me disant que tout allait bien. Finalement, on se fixa un jour pour se parler au téléphone et comme ca je ne dépenserais pas des unités pour la faire appeler et patienter encore des heures.
J’allais également à la cité Claudel annoncer la bonne nouvelle à Fatou et Maty et récupérer mes papiers que j’avais confiés à Fatou quand je partais en guinée. J’en avais besoin pour mon dossier d’inscription mais je trouvais Fatou complètement abattue et Maty en train de la réconforter. Elle avait échoué à ses examens et n’arrêtait pas de pleurer. Et pourtant elle était très studieuse et persévérante et je ne comprenais pas. Maty avait quand à elle réussi, mais à cause de l’échec de Fatou, elle ne pouvait que la réconforter. Je restais avec elles toute la journée au lieu d’aller m’inscrire et rentrait tard à la maison, le temps que Fatou me remette mes papiers.
Je trouvais Ibrahima et Rassoul sur le pas de la porte en train de discuter et apparemment c’était Rassoul qui prenait congé. Quand je dis bonjour, je reçus un regard incendiaire de sa part
- Rassoul s’apprêtait à partir. Il est resté longtemps à t’attendre. Mais ou était tu ? demanda Ibrahima
- j’étais à Claudel avec mes amies répondis je simplement sans faire cas de l’attitude de Rassoul. Je ne savais pas qu’il devait venir.
- mais tu peux au moins prévenir quand tu rentres tard répondis Ibrahima.
- je ne pensais pas durer la bas…
On parlait en peul et Rassoul nous écoutait sans nous interrompre pour essayer de comprendre. Ibrahima était contrarié que je rentre tard et je lui expliquais qu’une de mes amies avait échoué et j’étais resté pour la réconforter. Il me reprocha quand même le fait d’être rentré tard sans prévenir et rentrait dans la maison après avoir dit au revoir à Rassoul. Il avait réussi à m’énerver surtout qu’il avait raison et il me laissait donc avec un Rassoul hermétique qui ne se décidait pas à desserrer les dents. Je ne l’avais pas vu depuis le jour ou il était venu me remettre le portable et il avait un peu maigri, mais toujours aussi beau. Il avait la boule à zéro et cette coupe lui allait merveilleusement bien. Il avait aussi le visage fermé et me regardait fixement. Le long silence me gênait et il ne semblait pas disposé à l’interrompre et moi je ne savais pas trop quoi dire. Il était vraiment têtu et finalement, c’est moi qui parlais en premier
- tu es la depuis longtemps ? Demandais-je finalement
- oui depuis plus d’une heure, répondit-il, le visage toujours fermé et me regardant sévèrement
Je lui expliquais que j’étais avec mes amies et que j’allais récupérer mes papiers de bac et que le portable était déchargé depuis le matin. Il ne répondit rien et fronçait les sourcils
- tu sais Diouldé, je n’aime pas ca. Je suis peut être trop compliqué, mais une femme ne doit pas être dans la rue jusqu'à certaines heures sans prévenir.
- mais…commençais-je,
Il ne me laissa pas continuer
- Non y’a pas de mais. Tu penses que c’est normal que ton frère ne sache même pas ou tu es à presque 22h du soir. Arrêtes ca. Quelque soit la raison, tu n’as pas prévenu tu ne rentres pas tard c’est simple.
- je n’ai pas de compte à rendre à Ibrahima, je ne faisais rien de mal. J’étais juste avec des amies. Je suis désolée que tu aie attendu longtemps mais je ne savais pas que tu étais ici. Mais vous n’allez pas tous me prendre la tête pour ca quand même. Je ne suis pas une enfant.
Je répondais d’un ton ferme et en criant presque et je voyais le visage de Rassoul se décomposer. Il ne dit rien et après m’avoir regardé fixement quelques secondes, il tourna les talons et partit. Je restais debout, toute bête et un peu honteuse de lui avoir répondu sur ce ton. Je ne pensais pas qu’il allait réagir comme ca et j’hésitais entre le rattraper et l’appeler plus tard. Je rentrais finalement dans la maison et Ibrahima me remit un sachet et me dit que c’était Rassoul qui l’avait ramené en venant. Il y avait pleins de cahiers, des feuilles mobiles, des classeurs, des stylos et pleins de fournitures. J’eus vraiment honte de moi et alla rapidement charger mon téléphone pour l’appeler. Il décrochait et me salua froidement. Après lui avoir demandé s’il était bien rentré et obtenu un grognement qui voulait surement dire oui, je le remerciais pour les fournitures :
- Ibrahima viens de me remettre tes cadeaux. C’est trop. Vraiment
- ce n’est rien dit-il sur un ton neutre et sans chaleur
- écoute je suis désolé pour tout à l’heure dis je finalement pour essayer de briser la glace, mais rien n’y fit
- ce n’est rien, répondit-il invariablement
La douche froide. Je ne savais plus quoi dire et je soupirais.
- bon, à la prochaine dit-il finalement avant de raccrocher.
J’étais vraiment mais alors la vraiment mal. Rassoul a toujours été très courtois avec moi et je ne sais pas ce qui m’a pris pour lui répondre comme ca. La nouvelle Diouldé en faisait vraiment trop. Je me dis que ca lui passerai et qu’on aura l’occasion d’en discuter. Mais ca c’était sans connaitre la facette têtue de Rassoul.
Le lendemain, après avoir fait des photocopies pour mon dossier, j’allais m’inscrire. La secrétaire me dit que les cours avaient commencé et que je pouvais débuter dès le lendemain. Les premiers jours j’étais vraiment intimidée. Les filles étaient toujours bien habillées, bien maquillées et toujours pimpantes. C’était de nouvelles bachelières et j’étais plus âgée qu’elles. Heureusement, je n’avais pas oublié les cours de coquetterie de Demba et même si je ne me maquillais pas pour aller en cours, j’essayais au maximum d’être très bien habillée. Je ne cherchais pas trop à les côtoyer car elles formaient des groupes et je ne voulais pas participer à ces guéguerres de clans surtout que j’étais déjà de nature très réservée. Il y avait également beaucoup d’étranger dans la classe et je trouvais une place de libre à coté de Fred, un gabonais très gentil et qui dès le premier jour essaya de me draguer en me faisant plein de compliments. Il me faisait rire mais se révélait être très sympathique et me refilais les cours que j’avais raté. Les premiers jours, il restait même avec moi dans la classe pour m’expliquer les concepts que je ne comprenais pas.
Rassoul, depuis notre petite prise de tête n’avait plus rappelé. Je ne comprenais plus son attitude et je devais avouer que ses coups de fils et ses conversations me manquaient. Je ne savais plus trop quoi faire. Parfois, je prenais le téléphone, composait son numéro et avant que ca ne sonne, je raccrochais le cœur battant. Je ne savais pas quoi lui dire car je savais qu’il m’en voulait pour mon attitude. J’avais exagéré et ce n’était vraiment pas mon genre d’être aussi irrespectueuse. Mais il avait complètement fermé les portes et je ne savais pas par ou passer pour lui parler. Un soir, une semaine après le début de mes cours, je lui ai envoyé un texto pour lui dire que ca faisait longtemps que je n’ais pas eu de ses nouvelles et que j’espérais qu’il allait bien. Je n’ai presque pas dormi de la nuit attendant une réponse ou un coup de fil de sa part mais rien. C’est le lendemain qu’il me répondit simplement qu’il allait bien, sans plus. Ceci me déprimait toute la journée, mais je me fis une raison et puis je décidais de me concentrer sur mes études. Je m’étais excusée et son attitude augmentait encore plus ma gêne.
Notre maison n’était pas vraiment un endroit pour étudier calmement. Il y avait toujours du monde et mes compatriotes ne comprenaient pas que j’avais besoin de calme. J’avais du mal et souvent je me plaignais à Ibrahima qui me disait qu’il n’y pouvait rien. Donc je fis avec et restait à l’école le plus longtemps possible pour étudier. Mais je pris l’habitude quand même de prévenir à chaque fois Ibrahima quand je devais venir tard.
Un soir, je n’y tins plus et appelais Rassoul. Il décrochait et me saluait un peu moins froidement que la dernière fois et ceci me donnait un peu d’espoir. Je venais juste de rentrer des cours et sans le vouloir, son attitude me dérangeait beaucoup. Je lui demandais comment il allait et il me demanda ou j’étais. Quand je lui répondis que j’étais à la maison, il me dit qu’il n’était pas loin et qu’il voulait me parler. Je l’attendais donc un peu stressée sans trop comprendre pourquoi. Je me pomponnais rapidement, me maquillais légèrement, me changeais et en me regardant dans la glace, me trouvais très jolie et devant la glace, je me demandais pourquoi je faisais tout ca. Je n’eus pas le temps d’y réfléchir quand j’ai entendu sa voix en train de saluer mes voisins. Mon cœur battait fort et j’appréhendais son attitude. Mais il restait au pied de ma chambre en me regardant avec un petit sourire en coin. Je le regardais aussi un peu intimidée et il me demanda si j’allais bien. Je me contentais de hocher la tête et il me demanda si on pouvait aller se promener un peu. Je lui dis qu’il fallait juste que je prévienne Ibrahima et il m’attendit le temps d’appeler ce dernier.
Finalement, on partit au restaurant les ambassades et comme c’était en semaine il n’y avait presque personne. Le chemin avait été silencieux et je ne savais pas trop quoi dire. Une fois à table, assis l’un en face de l’autre, je le regardais et lui demandais simplement
- tu es toujours fâché contre moi ?
Il sourit, et secoua la tête
- plus maintenant, mais oui, j’ai vraiment été fâché contre toi. Ta réaction m’a beaucoup surpris. Je ne pensais pas que tu puisses te comporter comme ca.
Je baissais la tête et toute gênée
- je me suis excusée mais tu ne voulais même pas écouter ou répondre.
Comme d’habitude, il prit encore son temps avant de répondre
- tu sais ma belle, je dois avoir 10 ans de plus que toi. Je n’ai donc plus l’âge de me faire rabrouer par une gamine comme un malpropre tout simplement parce que je lui donne des conseils.
J’aurais à cet instant voulu une petite fourmi pour entrer dans un trou tellement j’avais honte. Puis je l’entendis rire doucement. Je levais la tête et lui demandais pourquoi il riait. Il me répondit que j’avais les oreilles toutes rouges et que je devais être vraiment gênée. Cette remarque me fis penser à Rama et je me mis aussi à rire et lui dit que j’étai effectivement très triste que nous en soyons arrivé à ne plus nous parler. Je lui dis que je le considérais comme un grand frère et que son amitié me tenait à cœur. Il se contentait de sourire et finalement, me dit que la prochaine fois que j’ai ce genre de comportement avec lui, j’aurais droit à une bonne fessée. De toute façon je lui dis que j’avais compris la leçon et qu’il n’avait pas besoin de fessée. Il sourit et on parlait finalement d’autres choses.
Il me demandait comment se passait mes cours et comme une pie, je me mis à parler. Je ne parlais à personne et ca me faisait plaisir de pouvoir communiquer avec quelqu’un. Je lui parlais de Fred et il me dit qu’il n’appréciait pas trop que je fréquente des hommes.
- je ne fréquente pas les hommes, il m’aide pour mes cours c’est tout
- tu recommences, répondit-il
- chii à la fin, on ne se parlera plus tellement je ferai attention à tout ce que je dirais. On t’a déjà dit que tu n’avais pas le sens de l’humour ?
Il me regarda en souriant et secoua la tête sans rien dire. Après avoir mangé une bonne pizza, on sortait et marchait tranquillement en discutant. Pour la première fois il me parlait de sa famille. Ses parents habitaient les hlm et lui avait pris un petit studio dans les environs. Il disait qu’avec ses horaires impossibles, il en avait marre de réveiller ses parents à n’importe quel heure. Il était le seul garçon et n’avait que des sœurs qui la plupart n’était pas encore mariées. Ils formaient apparemment une famille très unie et me parlait de ses parents avec beaucoup d’amour. Il me dit que sa mère ne comprenait pas pourquoi il n’était toujours pas marié. Et moi aussi je lui posais cette question
- même moi j’avais toujours imaginé qu’à cet âge, j’aurais une petite famille, mais les années passent et je n’ai jamais eu beaucoup de chance en amour.
Je lui souris et lui demandais s’il était présentement en couple. Sans le faire exprès, mon cœur battait fort.
- Non, pas depuis un moment. Donc tu vois que ce n’est pas faute d’avoir essayé. Mais je dois être vraiment repoussant pour ne pas trouver la perle rare.
Je m’arrêtais de marcher car j’avais un fou rire. Il avait prononcé cette dernière phrase sur un ton tellement comique. Même lui me regardais en riant et me charriait en disant que je n’étais pas vraiment gentille. Finalement, je me calmais et lui dit qu’il trouverait bientôt la perle rare car c’était un homme vraiment bien et qu’il le méritait. Il me regardait et soupira en se rapprochant de moi.
- tu sais je crois que j’ai rencontré cette perle depuis bien longtemps. Au début elle était très jeune et je ne voulais pas trop passer pour un petit pervers.
Mon cœur battait fort et j’ai eu un petit pincement au cœur en pensant à cette personne. Comme je ne disais rien, il continuait
- après cela, le destin faisait qu’on se revoyait souvent et pas souvent dans des situations très plaisantes et à chaque fois, je ne pouvais m’empêcher de ressentir des sentiments forts pour cette personne. J’ai essayé de lui faire comprendre tout ca mais je me heurtais toujours à un mur qui pour moi était infranchissable donc parfois je baissais les bras. Mais comme le destin est têtu, il a crée des circonstances pour que je la retrouve et je crois que cette fois ci, si elle ne se décide pas, je vais définitivement comprendre que ca ne se fera plus.
Je restais silencieuse et eu une petite boule sans vraiment comprendre pourquoi.
- bah si tu tiens à elle, ne baisse pas les bras, répondis-je finalement en essayant de lui sourire.
- là tu te moques de moi n’est ce pas ?
- comment cela ?
A cet instant je ne comprenais vraiment pas et finalement, tout ce qu’il venait de me dire.
- je parle de toi Diouldé. C’est toi qui depuis 5 ans me perturbe. Je ne dis pas que je suis resté sagement à t’attendre, mais à chaque fois, je ne pouvais m’empêcher de ressentir ce que je ressens pour toi. Je ne sais pas parler peul mais tu sais comprendre que mêle si tu me considère comme ton grand frère, moi à mon niveau, mes sentiments dépassent largement le stade fraternel
Je le regardais et il fallut un certain moment pour que mon cerveau enregistre tout ce qu’il venait de dire. Je savais qu’il avait de l’affection pour moi et comme il ne disait rien, je me disais juste qu’il me considérait comme sa petite sœur. Je ne répondais rien et finalement, il me demandait de prendre un taxi pour qu’on rentre. Dans la voiture, j’étais plongée dans mes pensées et c’est devant chez moi, une fois sorti du taxi qu’il me dit, droit dans les yeux
- comme tu le sais, je n’ai pas le temps, et je ne veux pas me mettre à venir tout le temps et te perturber dans tes études car par-dessus tout je veux que tu te concentre dans tes études.
Je hochais la tête sans rien dire
- de toute façon on s’appelle et on en reparlera d’accord
- ca marche dis je finalement en souriant
Il se penchait et effleurait légèrement mes lèvres puis partit car le taxi l’attendait pour l’amener.
Une fois dans ma chambre, je me mis à réfléchir. Je ne songeais vraiment pas à m’engager dans une relation surtout avec Rassoul. Il était très gentil, très attentionné avec moi mais je ne faisais plus confiance en personne. J’avais eu tellement de déception que la perspective d’un engagement me faisait peur. Après y avoir bien réfléchis, je me promis de lui en parler dès que l’occasion se présenterait.
Les cours étaient très denses et les profs très exigeants. Au fil du temps, les autres étudiants se rapprochèrent timidement de moi et commencèrent à discuter avec moi. Finalement, je me pris d’amitié avec elles et à part quelques unes un peu trop hautaines, j’appris à les connaitre et à les apprécier. Les petits groupes étaient toujours présents, mais je ne faisais partie d’aucune et me contentais juste d’être sympa avec tout le monde. On s’entraidait pour les examens et révisait ensemble. Le mois de Décembre arriva rapidement et les examens étaient prévus avant les fêtes de Noel. Je me plongeais à fond dans les révisions et n’avait plus le temps de rien. Rassoul appelait souvent, mais n’avait vraiment pas le temps, même les weekends, il était de garde dans les cliniques ou remplaçait ses collègues qui le lui demandait. Il voulait certes venir me voir, mais comme j’avais aussi des choses à réviser, les weekends, j’allais à la cité Claudel pour réviser avec les filles. Un samedi, Fatou reçut un coup de fil sur son portable et sortit pour répondre et finalement me tendit le téléphone. Je ne comprenais pas et répondit sans savoir de qui il s’agissait. Quand je reconnus sa voix, mon cœur fut un bond et je fus troublée un moment
- Diouldé ? C’est bien toi ?
- oui répondis je doucement
Demba gardais le silence et je ne sus quoi lui dire.
- tu étais où tout ce temps ? Et pourquoi es tu parti sans prévenir, demandait-il avec un soupçon d’énervement dans la voix.
- j’étais rentrée chez moi en Guinée Demba. J’ai eu des problèmes ici et j’ai préféré partir.
- mais tu ne pouvais pas m’en parler cria t-il
- ne me crie pas dessus. J’ai essayé de t’appeler mais tu as dit à ta copine que tu n’avais pas le temps de répondre. Et puis Demba je n’ai pas d’explications à te donner. Tu m’avais dit que tu allais juste voir ta fille et je suis tombée sur une femme qui t’appelais chéri. Je n’avais plus besoin d’explications.
- mais tu es complètement folle. Qu’est ce que tu me raconte comme ca
Il criait encore au téléphone et finalement je raccrochais et éteignit le téléphone. Fatou me dit que je ne devais pas lui parler comme ca et qu’après mon départ, il a appelé plusieurs fois et ces temps ci il a recommencé à appeler et qu’elle a hésité à lui donner mon nouveau numéro. Je le lui déconseillais vivement en lui disant que si elle le faisait je ne lui adresserais plus la parole. Je restais encore un moment à étudier et comme il commençait à faire tard je pris mes bagages pour rentrer. A peine avais je franchis la porte de la cité que quelqu’un m’empoignait le bras. J’allais fuir, pensant avoir à faire à un agresseur quand je vis Demba en me retournant.
Il me relâcha doucement le bras et se mit à me regarder. Il n’avait pas trop changé et était toujours très beau avec ses beaux yeux marron. Il était en jean et teeshirt et tenait les clés de sa voiture.
- toujours aussi belle dit-il finalement
Je ne répondis rien et était toute timide devant lui. Mon cœur battait fort et j’avais même peur qu’il se rende compte de mon trouble.
- comment as-tu pu me faire ca Diouldé ? Comment as-tu pu du jour au lendemain partir sans rien me dire ? J’étais mort d’inquiétude. Ta maman m’a raconté une histoire incroyable et j’ai compris finalement pourquoi tu as préféré quitter le pays.
Je fronçais les sourcils en le regardant.
- et qu’est ce que maman t’as dit ?
- tu sais ce que tu as fait pourquoi tu me demandes ce qu’elle m’a dit ?
Il me regardait et l’expression de son visage me déplut au plus haut point. Apparemment il avait cru à tout ca et je ressentis une déception sans fin. Je baissais la tête et restais sans rien dire.
- et qu’est ce que tu fais la ? Lui demandais-je finalement. Pourquoi cherches-tu à me voir après tout ce qu’on t’a dit sur moi ?
Il ne répondit pas sur le champ et regardais par-dessus mon épaule comme s’il cherchait quelque chose.
- j’avais espéré que tu me donnerais une explication sur tout ca. Que je comprendrais ce qui s’est passé ? Je ne pouvais croire que tu me cachais tout ca.
- de toute façon tu as cru maman
- je n’ai eu que sa version et je ne sais pas quoi croire
- ce n’est pas l’impression que j’ai. Mais tu sais, crois ce que tu veux, je m’en fiche. Maintenant, je ne donne plus d’explications à personne.
Je tournais les talons après avoir dit cela et il me suivit sur quelques mètres. On allait du coté de la corniche quand mon téléphone sonna. C’était Rassoul qui me demandait ou j’étais. Je lui dis que j’étais en train de rentrer à la maison et il me dit qu’il m’appellerait plus tard. Demba était toujours sur mes talons et un moment, je m’arrêtais pour attendre un clando quand il vint se mettre devant moi pour me parler. Il disait qu’il espérait que j’avais vraiment des explications plausibles à lui donner sinon, c’est toute l’estime qu’il me portait qui risqueraient de s’effondrer.
- si je ne tenais pas à toi, je ne ferais plus tous ses efforts pour savoir la vérité.
Un moment j’hésitais. Il semblait sincère, mais le fait qu’il put douté de moi comme ca me faisait un peu mal. Et puis, je me souvins de mon dernier coup de fil et de la femme qui avait répondu et surtout du fait qu’il est resté des jours sans m’appeler malgré le fait qu’il me promettait de le faire. Un clando arrivait à cet instant et je montais en lui faisant un petit signe. J’étais très perturbé et une fois à la maison, je restais couché sur mon lit à réfléchir quand mon téléphone sonnait à nouveau. Je pensais que c’était Rassoul qui rappelait et je fus surprise d’entendre Demba. Je songeais tout de suite à Fatou et il me confirma qu’il a du être très persuasif avec Fatou pour qu’elle lui remette mon numéro de téléphone. Je mui demandais de me laisser mais il refusait disant que je lui devais des explications pour tout ce temps sans nouvelle. Je lui demandais qui était cette femme qui m’avait répondu et il hésitait un moment.
- je ne vais pas te mentir. C’était la maman de ma fille. J’ai trouvé ma fille un peu souffrante et elle est venue chez mes grands parents pour que je l’aide pour les soins. C’est tout.
Je ne le crus pas et me contentais de ne rien dire. Il y avait une complicité entre eux et ca j’en étais certaine. Il me demandait ce qui s’était passé avec maman et je refusais toujours de lui donner une quelconque explication. Finalement il me dit que puisqu’il avait mon numéro, il me fatiguera jusqu’ obtenir satisfaction. Je me surpris à rigoler avec lui et à lui lancer le défi de me faire parler. Avant de raccrocher, il me souffla qu’il m’aime toujours et que j’étais encore plus belle. Je ne répondis rien et raccrochais rapidement. Rassoul avait essayé de m’appeler à plusieurs reprises et quand je décrochais, je pensais qu’il allait me demander à qui je parlais et était un peu sur la défensive. Au lieu de ca, il me confiait qu’il venait de perdre un malade et était tout tristounet. J’eus pitié de lui et sentit même qu’il était sur le point de pleurer. Je lui demandais s’il s’attachait toujours comme ca à ses patients et il me dit que la perte d’un patient était toujours douloureuse pour lui. J’essayais de le réconforter et il me dit que je lui manquais vraiment. Il me dit qu’il avait cherché quelqu’un pour le remplacer le lendemain car il n’était pas bien et voulait qu’on aille quelque part pour déjeuner tranquillement. Je songeais à mes révisions et mes examens et je le lui dis. Finalement, il me proposait de venir chez lui comme ca, on pourrait être ensemble et je pourrais réviser et on tombait d’accord sur ca. Avant de raccrocher, il me demandait à qui je parlais quand il essayait de m’appeler et je bafouillais un peu pour finalement lui dire que c’était une copine de classe qui m’appelait. Il ne dit rien et raccrochais. Je ne voulais pas lui mentir mais je jugeais l’histoire de Demba sans importance, même si au fond de moi, j'étais dans le doute le plus total.
Le lendemain je me fis toute belle et mis un jean et un body. J’avais prévenu Ibrahima que je sortais avec Rassoul et il avait à peine répondu. Ces derniers temps, il m’en voulait un peu à cause des remarques que je faisais sur la tenue de la maison et le nombre de personne qui y séjournait. Il répondait que la plupart était originaire de notre village et que c’était normal qu’il les aide à se loger un temps. J’avais juste dit ce que je pensais et je trouvais dommage qu’il l’ait mal pris.
Rassoul arriva vers midi avec ce petit air tout triste. Il me parlait à nouveau de son patient décédé et me dit que ca allait lui passer. Je pris mes bagages et on partit chez lui. Il avait un petit studio très bien décoré et apparemment, il n’y était pas souvent. Tout avait l’air neuf et très bien entretenu. Il avait une chambre à coucher très moderne avec un lit bas et des oreillers pleins sur le lit et par terre. Il y avait des poufs sur un petit espace aménagé dans la chambre avec un tapis et pleins de livres. Le tout dans un ordre impeccable. Je m’installais sur la canapé du salon et posait mes affaires sur la table basse. Lui s‘installait sur un fauteuil en face de moi, allumait la télé et on se mit à discuter. Il me demandait des nouvelles de ma mère et de toute la famille. Il me parlait aussi de son travail, qu’il était parfois tellement pris qu’il ne voyait pas sa famille. On discutait tranquillement quand mon téléphone se mit à sonner. Je reconnus le numéro de Demba et jetais un rapide coup d’œil à Rassoul. Il regardait la télé et semblait vouloir me laisser répondre. Je décrochais et répondit aux salutations de Demba.
- ca te dis qu’on se pose quelque part pour parler, me demanda t-il
J’avais des sueurs froides et je voyais l’air intrigué de Rassoul.
- non je n’ai pas encore révisé cette partie, mais demain je peux te donner le cours, répondis je Demba me demandait à qui je parlais, mais avant qu’il ne termine, je complétais ma phrase
- pas de soucis Fred, à demain
J’entendais ses protestations mais je raccrochais rapidement, les mains un peu tremblantes et fis exprès de faire tomber le téléphone, qui s’éteignit car la batterie était sortie. Décidemment je préférais la vie sans cet foutu appareil. Rassoul me regardais avec un drôle d’air mais ne demandais rien. Finalement, j’ouvris mes cahiers et me plongeai dans mes cours. Un moment, Rassoul déposa sur la table du jus d’orange et je le remerciais d’un sourire. Ensuite il est allé s’étendre sur le canapé et a commencé à dormir. Vers 16h il se réveillait enfin, à mon plus grand bonheur car je commençais à avoir faim. J’avais fait un tour dans les toilettes et malgré le bruit, il ne bougeait même pas. Après avoir regardé sa montre et il sauta de surprise et me demanda pourquoi je ne l’avais pas réveillé. Ensuite, je l’entendis dans la cuisine remuer des bols et autres accessoires et je lui proposais de l’aider. De la cuisine, il me répondit que je n’avais qu’à continuer à étudier et qu’il s’occupait de tout. Quelques minutes plus tard, il est arrivé avec un plat de poulet et frites et pleins de crudités. Je me demandais ou il avait pu prendre le plat mais je ne demandais rien, et de toute façon j’avais tellement faim, que c’était le cadet de mes soucis. On mangeait ensemble en regardant la télé et en faisant des commentaires. C’était vraiment bon et il m’avouait que c’était sa maman qui lui faisait pleins de plats et lui envoyait cela. Comme il était rarement chez lui, parfois, il ramenait cela et sa mère se plaignait qu’il ne mangeait pas.
- ta maman s’occupe bien de toi on dirait
- oh oui. Ma maman, je suis son fils unique et elle ferait n’importe quoi pour moi.
Je le taquinais en disant que c’était un gros bébé et qu’il devait grandir un peu et se débrouiller seul. Après avoir fini, je me décidais à faire la vaisselle et il m’aida et on finit rapidement. J’étais fatiguée et j’avais le ventre rempli, je m’assis encore devant mes cours mais je baillais toutes les 5 secondes et finalement, Rassoul me proposait d’aller dormir dans sa chambre. Je me crispais un peu et lui dit que je n’avais pas si sommeil que ca. Ma réaction le fit rire et il se leva et m’aida à me lever et me guida jusqu’à la chambre et me poussa sur le lit. Je m’étendis et il s’assit en face de moi.
- tu ne pense quand même pas que je te ferais quelque chose ma chérie ? demanda t’il après m’avoir observé un moment
- bien sur que non, ce n’est pas ca… c’est juste que si je commence à dormir je risque de ne pas me réveiller de sitôt car j’ai des dettes de sommeil. Répondis-je rapidement pour cacher ma gêne.
- t’inquiète, je te réveillerais.
Il se pencha un déposa un léger baiser sur mes lèvres avant de reculer un peu la tête pour me regarder. Comme je ne faisais pas de mouvement, il se penchait à nouveau et cette fois le baiser se fit plus intense et plus long. J’en ressentais des frissons et je le repoussais doucement et me couchais. Il se coucha à coté de moi et m’enlaçais.
- j’aimerai rester comme cela toute ma vie dit-il en me déposant un bisou sur la joue.
Je lui souris et ne dit rien
- et je sais comment faire pour t’avoir toute ma vie, continua t-il en se soulevant et en s’appuyant de son coude pour mieux me regarder. Je crois que suffisamment couru derrière toi et maintenant que je t’ai il n’est plus question que je te laisse encore partir.
A cet instant mon cœur battait fort et je le regardais en écarquillant les yeux.
- Diouldé Diallo veux tu être mon épouse ? demanda t-il sur un ton comique en souriant
Je rigolais mais ne disait toujours rien. A cet instant, sans le vouloir, je pensais à Demba. L’avoir revu m’avait un peu perturbé et je me dis que tout ceci aurai peut être été plus simple si je ne l’avais pas vu. Et j’étais complètement déboussolé
- tu ne réponds rien Diouldé ? J’ose espérer que c’est juste l’effet de surprise qui te rend muette. C’est pas sur un coup de tête que je te demande de nous marier, c’est juste que depuis très longtemps, je suis convaincu que tu es celle qu’il me faut parce que je crois que je n’ai jamais ressenti pour une personne ce que je ressens pour toi. A chaque fois que je te voyais, j’avais toujours envie de te protéger, je te sentais tellement fragile et à chaque fois tu arrivais à m’émouvoir. Je t’aime ma belle et je veux concrétiser ca. J’ai dépassé l’âge de sortir avec une fille et chaque jour gérer des détails. Je veux faire ma vie avec toi.
Il parlait en me regardant et je sentais qu’il était vraiment sincère. Je continuai à le regarder et je me mis à sourire. Il a surement pris cela pour un oui, et s’est penché pour m’embrasser. Un baiser doux et très tendre ou il voulait montrer tout l’amour qu’il éprouvait pour moi. Je ne doutais pas de ses sentiments mais plutôt des miens. Je l’appréciais beaucoup car c’était un homme bien sur tout les plans et je savais et était même convaincu qu’il m’aimait.
Il détachait lentement ses lèvres et me regardait.
- te ne dis rien Diouldé ? Après tout le cinéma que je viens de te faire
- je ne sais pas quoi dire Rassoul. Tu m’as surpris et je ne m’attendais pas à ca.
Il me sourit
- mais la perspective de te marier avec moi ne te déplait pas ?
- non, pas du tout, répondis je avec une petite pointe d’incertitude qu’il ne remarquait même pas car il s’était encore penché pour m’embrasser.
Cette fois, il laissa courir ses doigts sur mon visage et me caressait le dos. Je me crispais et il s’écartait un peu.
- écoute, je te fatigue. Je te laisse dormir et je te réveille plus tard. Ca marche
Je hochais la tête et il me tourna le dos pour dit il dormir aussi. Je restai ainsi sans bouger et ne put dormir. Plein d’idées se bousculaient dans ma tête et je repensais aux paroles de ma mère qui disait qu’elle n’a connu mon père que le jour de leur mariage et pourtant ils s’aimaient. Je savais que j’avais des sentiments pour Rassoul, mais pas les même que j’avais pour Demba. Je m’en voulus un moment de penser à lui surtout après tout ce qui s’était passé et la manière dont il m’a demandé des explications sur l’histoire avec tonton Farah. J’étais convaincu qu’avec Rassoul, je serais à l’abri de tout et qu’il m’aimait vraiment. Je ne sus pas quand je m’endormis mais je fus réveillé en douceur par des bisous sur le cou. Je sursautai un peu trop violemment le cœur battant et me mis debout d’un coup. Rassoul surpris aussi m’attrapait les bras en me demandant de me calmer
- calme toi ma belle. Excuse-moi, je ne voulais pas te faire peur dit-il tout doucement
J’avais le cœur qui battait et je ne savais pas pourquoi j’avais eu aussi peur.
- tu es encore traumatisé par ce qui t’était arrivé dit il après que je me fus recouché sur le lit. Ca n’a pas du être facile pour toi. Tu veux qu’on en parle.
Je secouais la tête en lui disant que j’avais fait un mauvais cauchemard. Il se contenta de hocher la tête et se leva.
Il disparu dans les toilettes, d’où il ressorti pour faire ses prières. Ce geste me marquait particulièrement car maman disait toujours qu’il faut choisir des hommes pieux. C’était pourquoi l’histoire de Rama avec un blanc ne pouvait pas passer. Je souris à ce souvenir et un instant me demandait comment elle allait. Mais je repoussais rapidement cette pensée et me levais pour me débarbouiller et ranger mes affaires. Rassoul me demandait si je voulais prier car sa sœur venait souvent et laisse toujours un pagne et un voile, je lui dis que je ne pouvais pas prier et il comprit que j’avais mes règles.
- tu sais Diouldé, je tiens beaucoup à la prière. Je côtoie trop souvent la mort pour fermer les yeux sur la foi. Tôt ou tard, on répondra au bon Dieu et la prière est importante
Je souris en le rassurant que je faisais régulièrement mes prières. Il me demanda si j’étais prête pour qu’il me ramène. Il était juste 19h et il faisait déjà noir dehors. On sortait et un moment, il me demanda de le suivre. On marchait tranquillement et soudain j’entendis quelqu’un l’appeler. C’était une jeune fille de mon âge, qui ressemblait beaucoup à Rassoul. Elle s’approcha et nous salua
- Mooo, toi tu étais chez toi aujourd’hui ? je pensais que tu étais de garde. Maman essaie depuis tout à l’heure de t’appeler et n’arrive pas à te joindre
Elle parlait sans s’arrêter et me jetais de petits coup d’œil.
- ohh sokhouu tu parles trop, l’interrompit Rassoul. Je vais comme ca à la maison et je verrais maman. A plus
- héé tu ne me présente pas, demanda t-elle curieuse et cette fois elle me regardait.
- ha c’est Diouldé ? Diouldé, c’est ma petite sœur Sokhna Diop.
Elle me tendit la main en me faisant un grand sourire et je fis de même. Et on échangeait des civilités avant de prendre congé. Avant de s’éloigner, je l’entendis dire à son frère en chuchotant que j’étais jolie. Il sourit me prit la main.
- on va où Rassoul, demandais je
- chez moi.
Avant que je n’aie le temps de protester, il s’était déjà introduit dans une maison très joli et bien décoré. A l’entrée, on trouvait une femme sur sa natte de prière qui se leva dès qu’elle nous vit.
- Rassoul, mon fils, je ne t’ai pas entendu de la journée. Je commençais à m’inquiéter.
C’était une femme forte et assez petite. Elle était bien habillée et avait des stigmates de dépigmentation sur le corps. Elle avait le genre de visage qu’on ne trouve pas sympathique dès le premier abord. Elle s’arrêta devant nous et me regardais sans prendre la main que je lui tendais
- c’est qui ? demanda t-elle en me scrutant comme si elle avait des problèmes aux yeux.
- chii maman arrête. C’est elle Diouldé.
- hann Diouldé, dit-elle finalement en souriant et en prenant ma main pour la tirer vers le salon. Diouldé, Rassoul ne cesse de me parler de toi. Viens entre
On s’était introduit au salon et je m’étais assise sur un confortable fauteuil. Je n’étais pas très à l’aise et je lançais à Rassoul des regards incendiaires pour ne pas m’avoir prévenu avant de venir.
- diallo, diallo dit-elle
Je me rendis compte que je ne connaissais pas son nom de famille et je le lui demandais timidement
- c’est Fall
- Fall,
- Diallo
- Fall
- Diallo
- mais, vous allez arrêter oui, dit Rassoul en rigolant et en s’asseyant à coté de sa mère
- Diouldé, Rassoul m’a beaucoup parlé de toi. En bien
Puis se tournant vers son fils, elle lui lançait
- toi la jeune fille la est belle c’est pourquoi tu ne cesse d’en parler.
- oh oui, elle est belle ma chérie.
J’étais gênée et je baissais la tête en jouant avec un coin du fauteuil. Ensuite je dus passer à un interrogatoire en règle de la part de sa mère. Elle me demandait ou j’habitais à Dakar, avec qui, ce que je faisais. Je répondais timidement et espérait que Rassoul viendrait à mon secours. Elle me demandait aussi ma mère
- elle est en Guinée répondis je en la regardant
- Guiinnééee, dit elle comme si la guinée, était à l’autre bout de la terre. Et ton père ? j’espère que tu n’habite pas en Guinée
La, Rassoul l’interrompit à mon grand soulagement.
- maman arrête voyons. Laisse-la. Son père est décédé y’a pas très longtemps.
Elle compatit et s’excusait. Elle m’expliquait qu’elle avait aussi perdu ses parents et que c’était très dur. Sokhna était rentré et me trouvais au salon. Elle me saluait à nouveau et avait amené un plateau avec des verres et de la boisson. Je bus et 2 autres sœurs de Rassoul arrivèrent pour me dire bonjour. C’étaient des jumelles qui se ressemblaient comme deux gouttes d’eau. L’une est entré en premier, m’a salué et est parti et quelques secondes, l’autre est venu et comme elle ne portait plus la même tenue, j’avais froncé les sourcils. Rassoul qui m’observait s’est mis à rire en m’expliquant que c’était Awa, la jumelle d’Adama. Elles devaient avoir 17 ans et ressemblaient plus à leur mère. Sokhna s’était assise avec nous et comme sa mère me posait pleins de questions sur mes études. Finalement Rassoul se leva et leur dit que puisqu’elles jouaient au policier avec moi, il allait m’amener. Sa mère protestait en disant que je devais attendre le diner, mais il leur dit que j’avais cours demain et que je devais rentrer. Elles m’ont accompagné jusqu'à la rue en parlant sans s’écouter et j’entrais dans le taxi toute soulagée. Je restais silencieuse et Rassoul me prit la main
- je suis désolé de t’avoir fait subir ma famille, dit il finalement en souriant
- Non voyons, elles sont très gentilles, répondis-je en lui rendant son sourire. Et ou est ton père ?
Il me dit qu’il était à Thiès car il avait une autre épouse. Il m’expliquait que les 2 familles s’entendaient très bien et que sa maman était la première épouse. Arrivés à la maison, il me raccompagnait jusqu’à l’appartement. Comme d’habitude, il y avait beaucoup de monde à l’appartement et du bruit à gogo. Ibrahima se leva pour dire bonjour à Rassoul et ils restèrent quelques minutes à discuter tandis que j’allais dans ma chambre. Il vint me trouver quelques minutes plus tard et s’assit sur le lit.
- Diouldé, j’étais très sérieux quand je te parlais de mariage et je veux que ca se fasse rapidement. Je te donne le temps d’en parler à ta mère et moi de mon coté, j’aviserai mes parents
- mais et mes études, demandais je
- tes études tu les continueras bien sur. Tu ne penses quand même pas que je vais te demander de les laisser. Jamais je ne ferais ca. Tu va continuer à étudier ma chérie et tu réussiras. On va se marier et tu va sortir d’ici. Je n’aime pas te savoir au milieu de tous ses hommes dans cette maison.
Je lui souris et il déposa une bise sur la joue et je lui promis d’en parler à ma mère. Il partit en me promettant de m’appeler une fois chez lui. Dès qu’il partit, je me souvins que j’avais éteint mon portable et je le rallumais. Il y avait des tonnes de messages de Demba qui me disait de le rappeler et que c’était urgent, qu’il devait me parler. Je descendis chercher une carte de recharge et je l’appelais bien décidé à lui dire de ne plus m’appeler et de me laisser tranquille
- tu étais avec qui Diouldé ce matin pour que tu me répondes comme ca, demanda t-il après les salutations
- Ca ne te regarde pas Demba répondis je doucement
- pourquoi tu me fais ca Diouldé ?
Je ne savais pas quoi dire. Il semblait tellement triste que je regrettais de lui avoir parlé comme ca. Toute envie de dispute avait fondu.
- je ne te fais rien, c’est juste que j’essaie de faire ma vie tranquillement.
- sans moi. Et pourtant ce n’est pas ce qu’on c’était dit Diouldé
- je sais mais la vie est ainsi faite. On doit faire avec
J’avais presque les larmes aux yeux et toute cette situation me rendait vraiment triste. Je savais que j’avais encore des sentiments pour lui et j’aurai voulu tout effacer mais à cet instant tout revenait à la surface et j’avais juste envoie de le voir et de me blottir dans ses bras.
- tu sais que je t’aime. Et toi aussi je sais que tu ne peux pas me détester comme ca du jour au lendemain. Donnons nous encore une chance ma belle. Et cette fois on ne laissera rien ni personne se mettre entre nous
Après des secondes d’hésitation je lui dis finalement
- je suis désolé Demba, je suis avec quelqu’un maintenant
Je parlais doucement, et il me demanda de répéter. Ce que je fis et il y eut un silence pesant et j’entendais sa respiration à l’autre bout du fil.
- et c’est sérieux entre vous demanda t-il finalement
- oui
- ce n’est pas vrai. Tu ne l’aime pas. Pourquoi es tu avec lui ? Fatou m’a dit que tu fais une école privée. C’est lui qui paye. Demande lui c’est combien et je lui rembourse tout depuis le début et …
Je ne le laissais pas continuer et lui dit que ce n’est pas ca. Que c’est mon frère qui payes les cours et que c’était un homme bien.
- je veux qu’on se voie pour en parler
- non ce n’est pas la peine Demba. Je t’en prie respecte mon choix.
- je t’en supplie Diouldé. Accorde-moi ca au moins. Stp
Je ne sus quoi dire et finalement je lui promis de le contacter après mes examens. Il me souhaitait une bonne nuit et me dit qu’il m’aimait. Je raccrochais toute pensive et me dis que j’avais eu une journée bien mouvementée. Rassoul était très impliqué et j’étais convaincu que c’étai l’homme qu’il me fallait. Je serais en sécurité et il était sincère. Demba je l’aimais certes mais je ne pouvais lui faire confiance à nouveau et cette fois prendre le risque de perdre définitivement Rassoul qui avait tant fait pour moi.
Je n’eus pas le temps de trop y penser les jours suivants car j’étais en pleins dans mes examens. Je restais à l’école tard pour réviser et Rassoul appelait tous les soirs pour m’encourager. Demba se contentait de m’envoyer des messages ou il disait qu’il tenait à moi et je les effaçais sans jamais y répondre. J’étais de plus en plus convaincu que Rassoul était la personne qu’il me fallait.
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