Trente-sixième Chapitre.
[Mercredi 1 mars. Après les retrouvailles avec ses amis, Heaven a profité d'un moment de calme et sa mère est enfin revenue. Elle a alors accepté de ne pas se précipiter au château vers le roi, et se reposer auprès d'eux.]
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Je souris. Dans la cuisine, installée sur une chaise contre le mur près de la porte, je regarde Zac et Joyce se disputer la vaisselle. Nous venons enfin de partager un vrai repas, tous ensemble. Ma mère est passée en coup de vent et est sortie, sans trop nous parler. Je l'ai laissée sans la questionner, je comprends qu'elle ait besoin de temps et d'espace. J'ai réalisé son souhait de se libérer des limbes, mais je n'ai pas le contrôle sur sa vie ici.
— Je vais finir toute seule, c'est bon ! tonne Joyce, un brin agacée.
Je pouffe discrètement, et Jake fait de même de l'autre côté de la table. Nous échangeons un regard moqueur, alors que Zac se tourne vers nous en levant les mains.
— Je voulais juste l'aider, chuchote-t-il d'un air faussement innocent.
— Je t'entends, idiot, râle la Kitsune derrière lui.
Zac hausse les sourcils et va s'asseoir près de Jake.
— On va la laisser dans son coin, marmonne-t-il en se penchant vers nous. Alors Heaven, tu te sens un peu requinquée ?
— Oui, carrément, souris-je. C'est mieux que des chips.
Joyce glousse doucement. Elle pose une assiette sur le côté et se retourne, s'adossant au plan de travail en essuyant ses mains.
— Tu vois que c'était mieux que de te précipiter au château, note-t-elle.
Je hoche lentement la tête.
— Je suis trop pressée, je sais. J'ai dû être trop habituée à ne pas m'arrêter dans les limbes. Sans besoin de dormir ni de manger, forcément...
— Mais c'est ça qui me perturbe, lâche-t-elle. Comment tu fais pour être aussi normale ? Enfin, je veux dire, tu te sens pas complètement déconnectée ?
Je pince les lèvres et hausse les épaules.
— Je ne sais pas vraiment. Les limbes, c'est difficile à décrire, mais je n'avais pas l'impression de perdre la boule. Même, quand on voit Teresa, elle n'a pas l'air folle alors qu'elle y a passé dix-sept ans.
Je pousse un léger soupir.
— Je crois que je ne comprendrai jamais comment ça marche. Je suis juste bien contente de pouvoir savoir quel jour on est !
Mes amis me considèrent en silence. Ils sourient doucement, mais je perçois dans leurs yeux une tristesse muette. Je passe une main dans mes cheveux, et penche la tête.
— Je sais que vous vous inquiétez, mais je me sens vraiment bien, tenté-je de les rassurer.
— Tu dis toujours ça, fait Jake.
Je me tourne vers lui, surprise par son ton amer. Son visage est crispé, sombre. Et son regard...
— Et je le pense à chaque fois, réponds-je fermement. J'ai enchaîné plusieurs coups durs, OK. Mais je ne suis pas la seule ici à avoir vécu des trucs difficiles dernièrement. Et pourtant on est réunis, debout et vivants, non ?
Une lueur vive passe dans les yeux du loup-garou, et il baisse la tête. Je vois à son visage qu'il pense bien plus qu'il ne dit. Et malheureusement, je ne peux pas lire dans son esprit pour le comprendre.
— Tu as juste subi plein de traumatismes à la suite, hésite Joyce. Et tu restes toujours obstinée à enchaîner avec une autre épreuve, sans jamais vouloir exprimer ce que tu ressens vraiment. C'est normal qu'on s'inquiète...
Je secoue la tête.
— Et je comprends, d'accord. Mais je ne vais pas m'apitoyer sur mon sort. Encore moins face à vous. Vous, vous n'avez pas vécu plein de traumatismes à la suite, peut-être ?
Ils ne répondent rien, l'air perplexe. Alors je me lève, fulminant malgré moi.
— Jake a été enlevé et torturé par Jorah, Zac a failli perdre l'usage de ses jambes. Toi, Joyce, tu as dû te forcer à rester forte alors que tu as perdu des amis et a failli perdre l'amour de ta vie. Vous avez tous fait la guerre, vous avez tous souffert et vous avez en plus dû attendre que je ressuscite pendant quatre foutus mois avec mon cadavre à deux mètres de vous !
Ils restent bouche bée, immobiles.
— Et vous êtes là, à vous inquiétez pour moi alors que c'est en grande partie à cause de moi que vous avez souffert comme ça. J'en ai marre de vous voir me demander si ça va quand je suis sûre que vous allez encore moins bien que moi.
Ma voix tremblait bien plus que je l'aurais voulu. Mon cœur bat la chamade dans ma poitrine serrée par l'aveu que je viens de lâcher. Joyce a raison quand elle dit que je n'exprime jamais le fond de mes émotions. Parce que le faire me fait trop mal, et cela réveille en moi une profonde culpabilité que je m'efforce de guérir en vain.
— Je sais que vous avez peur que je n'ai pas les épaules pour gérer tout ça, soufflé-je, la tête alourdie. Et c'était vrai, avant. J'étais inexpérimentée et faible, j'encaissais des choses qui me dépassaient. Mais c'est différent, maintenant. Ça ne se voit peut-être pas mais j'ai changé. Jorah et les Bannis m'ont changée, la guerre m'a changée, les limbes m'ont changée. Je ne suis plus l'humaine débile que j'étais en vous rencontrant, alors arrêtez de croire que je vais m'effondrer. Je suis capable de gérer aussi bien que vous. J'ai appris à le faire.
— Si, ça se voit, intervient Zac, prenant enfin la parole.
Je fronce les sourcils. Les bras croisés, il m'observe, le regard brillant.
— Ton changement. Il est flagrant. Et c'est sûrement ce qui nous fait le plus peur, au fond.
Je sens ma gorge se nouer douloureusement. Les poings serrés, je m'efforce de repousser les énièmes larmes qui montent.
— Oui, peut-être, me contenté-je de répondre. Mais je ne peux rien y faire, désolée.
Ils ne disent rien. Je sens leurs yeux transpercer mon cœur. Je vois l'émotion dans chacun de leurs regards. Je vois tout ce qui réside en eux, je sens jusque dans mon âme la peur et la douleur qu'ils partagent, que je partage avec eux. Je comprends leur inquiétude, leur réticence face à ma manière de tout encaisser. Je sais qu'ils n'entendent pas la bataille perpétuelle en moi, qu'ils ne sont pas là, à l'intérieur, dans le noir de mon être. Je ne peux pas savoir ce qu'ils ressentent face à toutes mes mutations, face à tout ce que je prétends. Je vis tout à toute vitesse, avec une intensité difficile à supporter, et j'ai moi-même du mal à comprendre qui je suis parfois. Je suis sûre de ce que je leur dis, je sais que j'ai appris à force à réfléchir et supporter tout ce que ce monde nous fait endurer depuis que j'y ai mis les pieds. Je sais que je suis lancée dans un conflit interne qui ne finira jamais, que je me sentirai toujours coupable et responsable, que j'aurai toujours des moments de faiblesse, de regrets. Mais j'ai vu ma force, je l'ai ressentie dans chacun de ses aspects. Je ne suis plus naïve, ni inexpérimentée.
— Je vous ai dit que j'étais sortie des limbes à force de persévérer et grâce aux larmes de Molly, finis-je par déclarer. Mais j'ai omis quelques détails. Je pensais que vous alliez encore plus vous inquiéter, mais peut-être qu'en fait ça vous aidera à comprendre.
Ils froncent les sourcils. Je passe mes mains sur mon visage.
— J'avais un blocage parce que j'avais peur de ne pas vous revoir en revenant, en gros, commencé-je. Alors, je devais me défaire de ce blocage pour réussir. Et ça voulait dire accepter de ne peut-être pas vous retrouver.
Je vois Joyce se redresser pour aller entre Jake et Zac. Discrètement, ce dernier lie sa main à celle de sa petite-amie.
— Dans les limbes, on a la possibilité de retourner dans ses souvenirs, expliqué-je. Teresa m'a montré comment faire, alors j'ai revu toute ma vie. Le but était de me rendre compte de tout ce que j'avais vécu. Et de tout ce que vous m'aviez apporté, ajouté-je avec un sourire.
Je marque une pause, inspirant légèrement.
— J'ai pris conscience que je n'avais pas besoin d'avoir peur de ne plus vous revoir, parce que vous m'aviez déjà donné toutes les cartes pour m'en sortir. Vous m'aviez rendue plus heureuse que je ne l'avais jamais été, alors que tout ce qui se passait autour de nous aurait pu m'enlever toute once de bonheur. Mais grâce à vous, j'ai réussi à vivre vraiment, et en demander encore plus était un peu égoïste. Donc j'ai accepté de ne plus être aussi heureuse, mais de revenir quand même parce que c'était ce que j'avais promis. Si j'ai réussi à tenir et à ne pas m'effondrer comme vous en avez si peur, c'est parce que vous étiez là. Et j'étais même prête à vivre sans vous tellement vous m'avez rendue forte.
Leurs visages se figent dans un air indéchiffrable, exprimant plus que les mots ne pourraient décrire. Mes mains tremblent. Je n'ai sûrement jamais autant dit la vérité, autant avoué la réalité de ce qui m'habite.
— Mais heureusement que vous êtes là, quand même, finis-je en souriant, émue.
À peine ai-je terminé, je vois Joyce faire le tour de la table et s'élancer vers moi.
— Heaven, tu as dû te sentir tellement seule !
Elle me serre dans ses bras, fermement et avec une chaleur intense. Je souris, répondant à son étreinte en lâchant un long soupir de soulagement. Elle me serre un peu plus fort, me coupant presque la respiration. Ses cheveux couleur miel chatouillent ma joue alors que je pose ma tête sur son épaule. J'accorde un regard à Zac et Jake. Zac a posé les coudes sur la table, et me regarde sans cacher son émotion, un sourire mélancolique sur les lèvres. Ses yeux expriment tout l'amour fraternel qu'il a pour moi, toute la protection qu'il m'a toujours promise.
Le regard que Jake me lance à cet instant est aussi puissant qu'il me paraît dur. Dans les étincelles jaunes de ses iris, je ne perçois qu'une froideur trouble, rare chez lui. Ses poings sont serrés, et sa mâchoire contractée. Je pourrais penser qu'il est énervé, vexé que j'ai songé les oublier aussi vite. Mais je sais que ce n'est pas ça. Il a mal, et il est simplement incapable de le montrer tant cela doit le toucher. Sans doute a-t-il envie de pleurer. Et, quand j'ose l'esquisse d'un sourire vers lui, je vois enfin la douceur qu'il peine à retenir. Je le prendrai dans mes bras, tout à l'heure. Je l'embrasserai et je lui montrerai que je n'ai plus mal, que je ne l'ai pas oublié.
Je caresse le dos de Joyce et me détache un peu d'elle pour lui sourire.
— Je savais que tu étais forte mais là ! s'exclame-t-elle. Tu as vite oublié tout ça en nous voyant, j'espère !
J'acquiesce vivement, soutenant son regard, étincelant sur son visage joyeux. Comme toujours, elle illumine tout autour d'elle par sa simple présence.
— On sera toujours là, voyons, fait-elle en me reprenant dans ses bras. Plus jamais on se quittera, hein. (Elle soupire.) Je t'aime fort, tu sais.
Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Les yeux brièvement fermés, je me sens inondée de sa chaleur, de sa lumière.
— Moi aussi je t'aime fort, réponds-je à voix basse.
Nous nous décollons lentement. À cet instant, la porte d'entrée s'ouvre, nous faisant tous sursauter légèrement. Jake et Zac se lèvent, et ils nous rejoignent près de la porte. Joyce sort et Zac lui emboîte le pas. En passant à côté de moi, ce dernier passe sa main sur mon épaule puis dépose un léger baiser sur le haut de ma tête.
— Je suis fier de toi, me sourit-il doucement.
Je n'ai pas le temps de le regarder, il gagne le couloir. J'entends la voix de Teresa et m'apprête à les rejoindre quand je sens une main se refermer sur mon avant-bras. J'ai un mouvement de recul et me retourne vers Jake, qui ne me laisse pas le temps de l'interroger avant de passer sa main sur mon cou et m'attirer vers lui pour m'embrasser. Ma respiration se coupe quand ses lèvres se posent brutalement sur les miennes, et mon cœur s'emballe une énième fois. Désemparée, je ne bouge pas, puis je ferme les yeux. Jake serre mon poignet et presse sur ma nuque avec son autre main, faisant preuve d'une fermeté avide. Je ne réprime pas son contact ardent, frissonnant de plaisir sous les milliers de fourmillements parcourant mon corps. Je ne sais pas ce que signifie ce baiser, mais il est assez intense pour que je me doute qu'il en avait besoin. Et moi aussi. Alors, je m'y abandonne.
Je me défais de son emprise pour agripper sa nuque et le rapprocher un peu plus de moi, le sentant poser ses mains sur ma taille. Mes jambes flageolent. Je sens ma tête tourner, grisée par l'intensité de ce contact. À cet instant, je voudrais le plaquer sur le mur et l'embrasser scandaleusement.
Mais c'est impossible. Alors je me force à m'arracher à ses lèvres envoûtantes, reprenant difficilement mon souffle. Jake m'accorde un regard dans lequel je lis un désir réciproque. Il fait glisser sa main sur ma mâchoire, et le tracé de ses doigts me paraît parsemer ma peau de braises. Il me met dans un état indicible.
Je reviens brutalement à la réalité en voyant les silhouettes se dessiner derrière nous. Je me détache rapidement de Jake, quittant ses yeux incandescents, et me retrouve vite face à ma mère et les autres.
— Tu es revenue ! fais-je d'une voix sûrement trop aiguë.
Je quitte la cuisine encore bouillonnante, m'efforçant de ne pas paraître embarrassée. Il faut que je chasse toutes les pensées indécentes qui animent encore mon esprit. Ma mère fronce les sourcils et lance un regard éloquent à Jake, qui reste adossé à l'encadrement de la porte.
— Ça m'a fait du bien de revoir Érédia, répond Teresa.
Elle ne tente même pas de cacher sa nostalgie flagrante. Elle ne s'exprimera pas plus sur tout ce qu'elle a pu ressentir, je le sais. Mais je vois qu'elle n'est pas trop perturbée. Juste triste. Mais elle le sera sûrement toujours un peu...
— Et toi alors, tu t'es un peu calmée ? me fait-elle.
Je souris doucement, et hoche la tête.
— Je suis requinquée, et fin prête à aller voir le roi.
Ma réponse fait hausser les sourcils de tout le monde. Je souffle lentement.
— J'ai mangé et je me suis reposée. J'ai besoin de lui parler, c'est important. Je ne dis pas que je vais repartir en guerre, juste discuter avec lui.
L'air dubitatif de mes amis contraste avec celui de ma mère, qui ne montre pas vraiment de réticence. Elle a eu, au contraire d'eux, le droit au récit de tout ce que j'avais vécu lors de la guerre, et mon rapport au roi. Elle sait que j'ai besoin de lui parler parce qu'il m'a sauvé la vie. Ils n'étaient pas avec lui et Jorah dans le château. Moi oui.
Je me tourne lentement vers eux, penchant un peu la tête.
— Elle est d'accord, fais-je malicieusement en désignant ma mère. C'est elle qui décide, non ?
Zac ricane, puis hausse les épaules.
— Alors allons-y.
Quelques minutes plus tard, nous sommes dehors et prenons la direction du château. Je lève les yeux tout autour de moi, examinant plus que je devrais les changements qu'a subi la ville. Comme je l'avais aperçu, certains bâtiments ont disparu, d'autres sont encore en reconstruction. Dans certaines avenues, le voile noir du deuil recouvre le sol. Les rues sont toujours bondées, mais moins qu'avant. En plein après-midi, Érédia était avant une vraie fourmilière, bruyante mais étrangement rassurante. Actuellement, elle a beau être remplie de gens, l'ambiance générale est bien plus pesante. La plupart sont en tenue de combat, et semblent tous tendus. Érédia est une grande ville mais le centre est l'endroit qui a le plus souffert. J'imagine que chacun de ses habitants a perdu quelqu'un ou quelque chose. Des familles entières ont péri, certainement.
Les frissons ne cessent de courir dans mon dos, ma poitrine percée de glace à chaque pas. Parcourant ces rues, je suis replongée dans la cendre, la fumée, les ruines. Je les vois en feu, jonchée de corps. Je passe à côté de la grande fontaine de la place, où j'ai vu tant de cadavres entassés. Il y a quatre mois, son eau était écarlate. Dans une ruelle à droite, je me souviens avoir vu une enfant en larmes, agenouillée près du corps inanimé d'un adulte.
Et dans la rue qui s'étend face à nous, je suis morte.
Je me paralyse malgré moi, incapable de détacher mes yeux d'une scène qui n'existe pourtant plus. Soudain coupée de tout, je me revois face à Jorah, au centre du chaos. Je me revois le défier. Puis, je me souviens de la lame traversant mon ventre, du sang, de tous mes organes qui souffrent. Je me souviens m'être effondrée, du dernier souffle que j'ai lâché, du hurlement que Jorah a émis.
Des gens passent dans cette rue, et ils marchent sur mon corps sans le voir, imprégnant leurs chaussures de mon sang.
Instinctivement, ma main se pose sur mon abdomen, alors que j'ai l'impression que ma plaie se rouvre. Tous mes muscles se crispent, pris dans la tension qui ne devrait qu'être un souvenir au fond de mon esprit.
C'est Jake qui me délivre de ma torpeur en prenant mon autre main dans la sienne. Mon cœur bondit et je prends une profonde inspiration, sortant d'un état second. Je relève la tête vers le château qui se dessine à l'horizon, puis vers Jake. À mes côtés, il serre un peu plus fort ma main et pose sur moi un regard d'une chaleur inégalée. Je ferme mes doigts sur les siens puis tente l'esquisse d'un sourire. Il a compris. Et, à cet instant, la même question appuie sur mon cœur. Est-il celui qui m'a trouvée, ce jour là ?
— Désolée, finis-je par dire aux autres. On peut continuer.
Nous poursuivons notre marche vers le château, et arpentons cette rue sans un mot. En passant sur le lieu précis de ma mort, je m'ancre au contact de Jake pour ne pas m'arrêter. Puis, nous le dépassons. Je traverse le fantôme de ma mort, et je ne regarde pas en arrière.
Le château nous domine peu à peu, et je peux voir qu'il a l'air presque intact en extérieur. Je me rappelle que lors de la guerre, l'onde de choc provoquée par les deux frères rois avait détruit l'intérieur du château mais pas ses fondations. Le château se dressait, seul édifice intact au milieu d'une Érédia démolie. Éternel symbole de la ville, il semblait signifier qu'il y avait encore espoir. Et s'il s'était effondré, c'est probablement le royaume entier qui aurait abandonné.
Après avoir monté les marches jusqu'à la massive porte d'entrée, je me retourne brièvement pour regarder les rues que nous surplombons déjà. Un jour, j'espère ne plus craindre que ces rues soient détruites à tout jamais.
La grande porte se dresse dans mon dos, et je me retourne pour emboîter le pas à mes amis. Avant qu'elle ne s'ouvre, je regarde ma mère. Elle garde les yeux rivés devant elle, les poings serrés. Elle est crispée et tendue, et j'imagine bien ce qui se joue en elle. Elle sait qu'elle est sur le point de retrouver le lieu de ses pires souvenirs, et de regarder dans les yeux le complice de son pire supplice.
— Tu es sûre de vouloir rester avec nous ? osé-je demander en me penchant vers elle.
Elle n'hésite pas avant d'acquiescer.
— Bien sûr. Ne t'en fais pas pour moi.
Je le considère en silence, comprenant qu'elle n'admettra pas ses réticences. Alors je n'insiste pas et suis le groupe lorsque la porte s'ouvre lentement.
Nous passons entre les deux elfes gardes, et pénétrons enfin dans le château. Mes yeux s'ouvrent en grand face la reconstitution totale de l'intérieur. Toutes les colonnes en marbre ont réapparu, ainsi que les deux escaliers qui encadrent l'immense entrée. Au centre, là où le sol avait éclaté sous le poids d'Elijah, a été tracé un grand cercle étincelant de runes anciennes, comme si l'on avait voulu sacrer ce point précis. De longs voiles noirs tombent sur le sol depuis les colonnes, et les grandes fenêtres ont été remplacées par un arc entier de vitres, formant un demi-cercle laissant passer l'intense lumière du jour, accentuant l'architecture arrondie du fond du château. Des rideaux transparents légèrement dorés drapent la courbure de fenêtres, créant parfois des volutes miroitants. Plus loin, la salle du trône est habillée de marbre noir. Je ne sais pas trop à quoi je m'attendais, c'était évident que tout allait être reconstruit. Mais au fond de moi, j'imaginais que le château porterait en lui les derniers vestiges de la guerre. Ce dessin au sol en est un, dans un sens.
— Oh, ça a changé.
Je suis surprise d'entendre la voix de ma mère, et me tourne vers elle en cherchant son regard. Elle a les yeux levés, inspectant tout autour d'elle avec une expression bien particulière sur le visage. Je ne sais pas si elle a des souvenirs précis du château lors de son enlèvement, mais je vois dans ses yeux que dans ce lieu, reposent nombre des souvenirs de son ancienne vie. Je l'imagine à mon âge, allant à des bals avec mon père, écoutant les discours du roi Jorah, présentant son bébé au rituel de naissance. Je l'imagine lever des yeux jeunes et vifs sur les colonnes en marbre, danser avec mon père en imaginant le mariage dont ils rêvaient. Et je me demande si elle pense aux bonnes choses qu'elle a vécues ici plutôt qu'aux mauvaises. Encore une fois, la tristesse me prend aux tripes. Elle voulait revenir, mais se voit-elle rester ?
Elle parcourt toute l'entrée des yeux, et je suis son regard. Aujourd'hui, le château est peuplé, et nous n'arrivons pas dans un endroit vide et pesant. Les gens s'activent, et ne nous remarquent pas tout de suite. Puis, petit à petit, je vois des regards converger vers nous, quelques instants seulement mais assez pour que je le remarque.
— Ils savent qui on est, noté-je à voix basse.
— Oui, on n'a pas pensé à te mettre au courant, répond Zac. Le conseiller du roi a dû expliquer comment on s'en était sortis, donc il a parlé de toi, évidemment. Et comme on était les seuls à te connaître à ce moment, on a dû dire qui tu étais. Alors maintenant...
— Tout le monde est au courant que c'est une Silencieuse de Sang Pur qui a sauvé leur vie, poursuit Jake.
Ma poitrine s'alourdit, et je hoche lentement la tête. D'accord. Donc à présent, je n'ai plus à me cacher.
— Et maintenant qu'ils me voient avec vous, ils ont compris que c'était moi, soufflé-je, un peu désemparée. Vous auriez pu me prévenir, quand même.
Mon air ahuri les fait sourire, ils s'excusent innocemment. Je me racle la gorge et me décide enfin à avancer. Nous traversons l'entrée et arrivons entre les colonnes principales, soutenant les deux escaliers qui se dressent à nos côtés. Rapidement, je vois un homme arriver vers nous, un elfe à la peau légèrement bleutée et habillé d'un costume trois pièces. L'air strict, il nous balaie du regard et s'arrête face à nous.
— On vient de me prévenir de votre arrivée. Je vois que vous êtes de nouveau au complet, ajoute-t-il en posant ses yeux clairs sur moi. Enchanté de te rencontrer, Heaven. Je suis Stefen, le conseiller du roi Elijah.
— Enchantée.
Il se tourne vers ma mère, lui accordant un regard dubitatif.
— Et vous êtes...
— Teresa, se présente alors cette dernière. Sa mère.
L'éclat qui passe dans les yeux de l'elfe est flagrant. Mais il masque rapidement son trouble et acquiesce. Je ne l'avais jamais vu, ce qui est très surprenant. J'ai eu beau avoir eu affaire au roi de multiples fois, je n'ai jamais rencontré son conseiller.
— J'étais en déplacement, m'indique ce dernier comme s'il avait lu dans mes pensées. Ça répondra peut-être à tes questions.
Désarçonnée, je ne réponds rien.
— Est-ce que le roi est disposé à nous recevoir ? s'enquiert Zac.
Le conseiller plisse les yeux, avant d'opiner doucement. Il pivote alors et nous fait signe de le suivre, nous menant sans un mot aux appartements du roi. Je n'y suis pas allée depuis longtemps, mais je me souviens du bureau de Jorah, chez les Bannis, identique à celui de son frère. Je m'y sentais comme dans une réalité parallèle, où je n'avais pas en face de moi le bon roi. Je m'en rappelle très précisément. Comment cela pouvait-il être il y a plus de quatre mois ?
Alors que je sors lentement de mes pensées, le conseiller entre seul dans la pièce. Il en ressort quelques instants plus tard, laissant la porte entrouverte.
— Il ne veut voir que Heaven, nous indique-t-il.
— On veut tous lui parler, réponds-je, soutenue par les acquiescements de mes amis.
— C'est soit toi, soit personne.
Son ton cinglant me fait taire. Honnêtement, je m'y attendais. J'aurais préféré y aller avec eux, mais ça ne sera pas long.
Je sens la main de Jake serrer un peu plus fort la mienne, et tourne la tête vers lui. Mes yeux s'ancrent aux siens, plein d'émotions.
— Oblige le, demande-t-il.
Je secoue lentement la tête, désolée. Si le roi exige ma seule présence, c'est qu'il doit avoir une raison. Je ne peux pas me permettre d'insister alors que je lui suis encore redevable.
— Ça ne durera pas longtemps. Ça ira, t'inquiète.
Ses sourcils se froncent, et je peine à délier mes doigts des siens. Je suis tentée de me pencher vers lui pour l'embrasser, mais la présence de ma mère m'en dissuade. Alors, je tente de tout lui exprimer par un dernier regard. Dans le sien, je vois une détresse étrange. C'est comme si, en disparaissant derrière cette porte, je le replongeais dans l'attente. Mon cœur se serre. Je me force à me défaire de ses yeux, lui tournant le dos pour rejoindre le conseiller du roi d'un pas hésitant. Quand la porte se referme derrière moi, mon ventre se noue. Il ne voulait même pas lâcher ma main...
— Ça faisait longtemps.
La voix du roi me tire de mes songes. Je lève la tête, et aperçois ce dernier à son balcon, à quelques mètres de moi. Au début, je ne le vois pas très bien, puis il revient dans la pièce, un verre à la main. Il est habillé d'un costume plus classique que ceux qu'il porte habituellement, et ses cheveux ont poussé. Il a un peu maigri, aussi. Et lorsqu'il se tourne pour me faire face, c'est un autre détail qui me frappe. Sa manche a été retaillée en dessous de son épaule, laissant un espace vide là où il n'y en avait pas avant. Il n'a plus son bras gauche. Ma gorge se noue douloureusement alors que je sens mon cœur s'emballer.
— Vous... fais-je d'une voix étranglée.
— Ah, oui, ça, répond-il en baissant les yeux. Un petit souvenir que m'a laissé mon frère.
Mes oreilles bourdonnent. Son ton sarcastique me fait frissonner, alors que je pense à la violence de l'affrontement entre lui et Jorah. Ils s'entre-tuaient.
— Et vous avez survécu, soufflé-je.
— Oui, quand même. Je ne me laisse pas abattre aussi facilement. J'ai passé ces quelques mois à me rétablir, mais on dirait bien qu'on revient tous les deux sur le devant de la scène au même moment.
— C'est à cause de votre bras que vous ne sortez pas encore ?
Il penche la tête, laissant l'éclat du soleil cacher une partie de son visage.
— En partie. Si le peuple voit son roi mutilé, la panique va accroître.
— Mais moi, ça ne vous gêne pas que je vous voie comme ça ? osé-je demander.
— Oh, je pense qu'on a dépassé ce stade, tu ne crois pas ?
J'acquiesce, avouant d'un rictus qu'il a bien raison. Il finit d'une traite son verre et le pose sur son bureau, avant de s'approcher de moi. Ses yeux sont aussi blancs que dans mes souvenirs, aussi perçants. Aucun de ses traits n'exprime la souffrance de la guerre, il ne laisse rien paraître. Cela lui ressemble bien.
— Tes amis ont dit que tu étais dans le coma. C'est vrai ?
Je hausse les sourcils, puis secoue la tête.
— Non. J'étais morte. Dans les limbes.
Son visage est peint d'une expression particulière, et il acquiesce lentement, un léger sourire étirant le coin de ses lèvres.
— Je vois, se contente-t-il de répondre.
Il tourne la tête vers Stefen, son conseiller, adossé à un mur les bras croisés.
— Stefen est rentré à Érédia après la guerre pour prendre mon relais, m'indique le roi en se tournant vers l'elfe. Il était en mission diplomatique dans d'autres royaumes.
— Les Bannis d'Érédia ne sont pas les seuls à vouloir se rebeller, enchaîne Stefen. Je sais que tu avais dit à Elijah que d'autres camps pourraient se joindre au combat, tu sais lesquels ?
Je secoue la tête.
— Mais je sais qu'il y avait des inconnus pendant la bataille, affirmé-je. Ils étaient plus nombreux.
Stefen souffle du nez.
— Si Jorah a lancé une révolte générale, ça ne s'arrêtera pas après sa mort. Les Bannis pourraient se décourager, mais il a enclenché un vrai mouvement. Il faudra dans tous les cas...
— Changer la loi, finit le roi. Tout réformer. Le consensus qu'on avait proposé était pour contrer Jorah, mais si comme on le pense l'insurrection va au-delà d'Érédia, il va falloir répondre à leurs demandes. On ne peut plus se permettre de perdre des milliers de citoyens pour quelque chose qui peut être réglé à l'amiable.
Je hausse les sourcils.
— Vous êtes enfin ouverts à vraiment faire changer les choses, alors ?
Elijah soutient mon regard d'un air impassible, puis rit du nez.
— Ce n'est pas une décision facile à prendre, Heaven. J'y réfléchissais déjà quand tu m'en as parlé, mais Stefen m'a convaincu. Les lois sont comme ça depuis la nuit des temps, et les remettre en cause demande plus qu'une simple rébellion.
— Mais ce n'en est pas une, fais-je. Plus maintenant. Et si vous ne changez rien, plusieurs royaumes vont subir ce qu'Érédia a subi.
— Oui.
Il ne répond rien d'autre, me fusillant de ses yeux immaculés. Je redresse la tête.
— Vous allez leur rendre l'essence de leur magie ? osé-je demander.
— Je ne sais pas encore, Heaven. On y réfléchit, mais il faut d'abord qu'on s'occupe de mon frère.
Je serre les poings. L'entendre l'appeler ainsi me fait toujours un effet étrange.
— Vous savez où il est ?
— Non. Il est devenu fort pour se cacher.
Il soupire et pivote, faisant demi-tour vers son balcon surplombant Érédia. Instinctivement, je le suis. Je me penche sur la rambarde, regardant la ville s'étendre jusqu'à l'orée de l'immense forêt. Quelque part, tout près, Jorah se cache, les Bannis se cachent. Ils attendent, comme toujours, tapis dans l'ombre.
— Mais avec toi en vie, et moi remis de mes blessures, continue le roi, on peut s'assurer qu'il ne tardera pas à revenir.
— Peut-être qu'il n'est pas au courant.
Elijah laisse échapper un ricanement.
— Tu en doutes vraiment ?
Je détourne un peu le regard, secouant doucement la tête. Il soupire.
— Voilà, moi non plus. Je ne sais pas ce qu'il a prévu, mais il reviendra.
— Mais on ne peut pas juste l'attendre...
— Je sais bien, Heaven. Tu permettras, j'aimerais au moins remplacer le bras qu'il m'a arraché.
Ma gorge se noue, je baisse les yeux.
— Désolée.
— Je comprends que tu sois impatiente, répond-il d'une voix rauque. Et je sais que tu es venue ici en espérant des informations qui te permettraient de foncer directement dans la gueule du loup. Mais je n'ai rien de plus, ils sont très bien cachés et on ne peut pas être trop flagrants dans nos recherches pour ne pas risquer de perdre encore des guerriers. Pour l'instant, on est plus concentrés sur la guérison de la ville et des trente-cinq milles blessés. Je ne sais pas encore comment on va procéder, je dois en discuter avec Stefen. Mais ce qui est sûr, c'est que je ne ferai plus l'erreur d'attaquer sans avoir pris de vraies précautions. Ça nous a trop coûté.
Je ne dis rien, le regard perdu dans le vide. Ses mots résonnent en moi.
— On va gagner, cette fois, dis-je à mi-voix.
Le roi ne répond pas tout de suite, mais je sens ses yeux se poser sur moi.
— Cette fois, fait-il, avec toi et Stefen à mes côtés, j'ai plus confiance. Mais sans ton sacrifice, on serait sûrement tous morts. Rien n'est encore gagné.
— Mais on aura les ingrédients pour le tuer.
Il me lance un regard interloqué. Alors, j'attrape entre mes doigts le pendentif de Molly.
— Les dernières larmes d'une Ondine. Il ne manque plus que...
— Le sang d'un elfe de l'eau et une épée en verre.
J'acquiesce. Il relève le menton, accordant un bref coup d'oeil à son conseiller, resté un peu en retrait, hors du balcon.
— On n'aura le droit qu'à un coup, dit-il.
— Je sais. C'est pour ça qu'on le capturera avant. On le battra, puis on le tuera.
— Ça a l'air vraiment simple, à t'entendre, raille-t-il.
— La situation est différente. Aucun de nous deux ne sera seul face à lui. Un autre Sylphe, une hybride et une Silencieuse de Sang Pur contre un Sylphe et une sorcière. On peut réussir.
— Une hybride et une Silencieuse de Sang Pur ? relève-t-il, le front plissé.
J'entrouvre les lèvres. C'est vrai, je ne lui ai pas encore tout dit.
— Je ne suis pas revenue seule des limbes, fais-je alors.
Il lève le menton, intrigué. Je tourne la tête vers Stefen, qui ne dit rien mais indique à Elijah de le suivre. Je lui emboîte donc le pas suivie par le roi, et nous nous dirigeons vers la porte. Avant de l'ouvrir, Stefen prend une lourde cape en velours sur une chaise et la pose sur les épaules du roi, cachant ainsi l'absence de son bras gauche. Alors, j'en profite pour parler au roi.
— J'aimerais juste savoir. Qu'est-il arrivé à Derek après la guerre ?
Un voile sombre passe dans les yeux d'Elijah.
— Il est mort.
Mon cœur fait un violent bond dans ma poitrine, mais je tente de ne rien laisser paraître. Je devrais me réjouir de la mort d'un ennemi puissant. Mais ma gorge est sèche, mes tempes battent et mon ventre se serre. Je suis incapable de me réjouir. Parce que Derek n'était pas mauvais. Il était aveuglé, mais je crois que quelques instants avant sa mort, il avait ouvert les yeux. Il aurait été mon allié. Il aurait combattu avec moi les déviances de Jorah, il aurait redonné espoir à son peuple. Il aurait prouvé que tous les Bannis ne sont pas pervertis. J'aurais pu le sauver.
Ce jour là, Molly et Derek sont morts. Les deux Bannis qui avaient su me faire croire en leur cause, qui avaient réussi à atteindre malgré moi mon cœur, sont morts.
Perdue dans mes pensées, je n'avais pas remarqué que Stefen avait ouvert la porte, et découvert mes amis. Et ma mère. Je lève la tête, regardant alors le roi afficher pour la première fois un profond choc. Il l'a reconnue tout de suite. Teresa, le sujet 8.
En voyant l'expression de celle-ci, mon cœur se serre. Elle revoit sur le visage du roi les images de tout ce qu'elle a vécu, elle revoit le conseiller impuissant, l'aide qu'elle n'a pas eue. Dans ses yeux blancs, elle revoit son bourreau.
Sans un mot, le roi tend sa main, lentement, vers ma mère. Teresa fronce les sourcils et je la vois se crisper. Puis, elle soutient le regard d'Elijah et prend sa main, cachant à peine son tremblement. L'émotion qui me prend à la gorge à cet instant est difficile à expliquer, mais je frémis malgré moi. Comme au ralenti, je vois passer mille mots et mille émotions dans les yeux de ces anciens ennemis. Les iris gelés du roi me semblent se briser en morceaux de glace, éclatant d'honnêteté. Les yeux de ma mère se remplissent d'étincelles, et j'ai d'abord l'impression qu'elles sont celles de la peur et de la haine. Mais non. Sur son visage, je ne lis qu'une pure acceptation, qu'un pardon empli d'espoir. Dans le regard qu'elle lance au complice de son pire cauchemar, elle n'exprime que l'harmonie d'une sagesse trouvée après des d'années à errer. Et le roi le sent, alors il accepte, lui aussi, le souvenir du passé et le vœu d'un avenir meilleur. Tout se bouscule, dans un silence total pourtant retentissant. Je ne regarde qu'eux. Le sceau d'un engagement céleste. Je ne regarde que leurs mains liées, et la détermination dans leurs deux regards. En les observant, je vois une alliance inespérée, une promesse de respect, de paix. J'y vois l'espoir d'un monde nouveau.
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Voilà pour le chapitre 36 ! J'espère qu'il vous a plu !
Un très long chapitre (le plus long de ce tome pour l'instant !!) pour me faire pardonner de l'attente, et vous faire passer le temps pendant le confinement !
J'espère que tout va bien pour vous, que vous vous occupez pendant ce moment un peu dur !
Est-ce que l'histoire vous plaît toujours ? On repart peu à peu dans l'action, les choses se remettent en place, qu'est-ce que vous aimeriez voir prochainement ?
En tout cas, merci d'être toujours actifs et je vous souhaite bon courage !
À bientôt pour la suite, bisouus ♥
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