Seizième Chapitre.

[Dimanche 23 Octobre. Heaven a réussi à passer une étape dans son développement psychique grâce à l'entraînement de Kali. Elle est maintenant prête à tout dans la guerre qui approche.]

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Lorsque nous arrivons au camp après un trajet dans le silence complet, je me sens étrangement revigorée. Retrouver cet endroit est une manière pour moi de me reconcentrer sur mes objectifs, de visualiser ce qui m'entourera lorsque je devrai faire face à l'épreuve la plus importante de ma vie.

Nous parcourons les allées sous les regards médusés de la plupart des Bannis dans les alentours, et je remarque tout de suite l'atmosphère pesante qui règne. La guerre approche, et plus les heures passent plus le camp se peint d'une ambiance qui ne dit rien qui vaille. Je me sens plus oppressée, plus tendue, sentant en moi l'impatience qui envahit le cœur de chacun.

Kali me mène à une rue plus fréquentée, où les gens se rassemblent avec exaltation.

— Il y a une réunion stratégique ce soir, m'indique Kali avant que je ne lui pose la question.

— Une réunion stratégique ?

— Oui, mise au point pour s'organiser. Il y en a tous les soirs, et cette fois, tu vas y assister aussi.

— Quel est le but ?

— Te préparer.

Son ton sec me convainc de ne pas tergiverser, et je déglutis en observant la foule de Bannis qui s'amassent vers le centre du camp. Lentement, j'emboîte le pas à Kali, cherchant malgré moi du regard une quelconque tête familière.

Et j'en trouve une. À quelques mètres de moi, je distingue la touffe flamboyante de Molly, qui vient elle aussi de m'apercevoir. Pendant une seconde, je reste immobile au milieu de la masse mouvante des Bannis, et croise le regard de mon amie. Son expression change alors brutalement, passant de la surprise à l'horreur, et elle secoue vivement la tête quand je fais mine de la rejoindre. Elle ne veut pas que j'approche. Je fronce les sourcils, et j'ai seulement le temps de la voir lever les mains avant de disparaître dans la foule. Je reste pantoise, un peu abasourdie. Mais la réflexion se fait rapidement. Jorah lui a sûrement interdit de m'adresser la parole, et l'a peut-être menacée de violence si jamais elle n'obéissait pas. Je masse mes tempes en jurant silencieusement, reprenant ma marche discrète derrière Kali. Cette situation met notre plan en péril. Je ne vais pas pouvoir la prévenir que c'est Kali qui contrôle la barrière magique du camp, et je ne pourrai pas lui expliquer que je vais par conséquent sûrement devoir la passer par la force car elle n'aura aucun moyen de la désactiver. Je ne sais même pas quand et où elle compte s'enfuir pour aller à Érédia. Je sens déjà ma tête me faire mal. Il va falloir que je trouve un moyen de la voir sans prendre le risque que Jorah s'en rende compte. Pourquoi faut-il toujours que les choses se compliquent ?

La masse autour de nous s'épaissit et je me retrouve vite sans aucun moyen de m'échapper. Je reste immobile, le regard vagabondant entre les gens qui commencent à s'agiter sous nos yeux et le visage étrangement serein de Kali.

Lorsque le brouhaha se calme, je tente de me concentrer sur ce que les Bannis annoncent. Ils sont en train de mettre au point ce que Kali m'a expliqué plus tôt, de tous se concerter sur l'organisation stratégique de leur attaque. Tout le monde semble profondément concentré, tendu, comme s'ils étaient prêts à se battre dans la seconde. Il faut que je retienne chaque détail de leur stratégie si je veux pouvoir assurer la victoire à mes alliés. Alors je dois ignorer mon envie de chercher Molly, et me focaliser sur les précieuses informations que me révèlent les Bannis.

Pendant de longues minutes, l'assemblée répète des points importants, se concertent, posent des questions et se rassurent. Ils montrent à quel point ils sont déterminés, organisés, prêts à tout. Et honnêtement, plus les minutes passent, plus j'observe cette montée en puissance de ceux qui sont restés tapis dans l'ombre trop longtemps, et plus j'angoisse quant à la suite des événements. Peut-être que ça ne sera pas aussi simple qu'on le pense... Je n'arrive pas à imaginer ce qui pourrait advenir si les Bannis n'acceptaient pas les négociations que hypothétiquement le roi d'Érédia leur proposerait. Si finalement, ils se sont convaincus eux même de vouloir regagner Érédia par la force et l'anéantissement, si finalement leurs propres idéaux ont dépassés ceux de Jorah et qu'ils agissent en pleine conscience et volonté... s'ils veulent tant la guerre qu'ils en ont oublié les autres solutions, on risque de ne pas pouvoir empêcher un affrontement fatal. Et alors, la guerre sera inévitable après tout et je devrai tuer pour le compte d'Érédia, sans me soucier de ce que j'ai compris des Bannis.

Je déglutis difficilement. Je ne veux pas avoir à envisager le pire. Mais il faut que je m'y prépare quand même. Je dois être prête à toute éventualité. Et faire face à n'importe quelle situation ne doit me poser aucun problème. Je me suis convaincue être prête à tout, et je ne compte pas trahir ma détermination.

Au bout d'un long moment, j'entends des éclats de voix vifs et sens la foule s'agiter. Lorsque je lance un regard intrigué à Kali, celle ci me fait signe de suivre le mouvement.

— On va dans la forêt. Excursion de mise en conditions, m'indique-t-elle.

En voyant que je fronce les sourcils, elle poursuit lentement.

— On va tous être à nos postes respectifs, pour voir si les choses fonctionnent comme prévu.

Je ravale ma salive. Alors on va être en conditions de combat. Je devrais me réjouir de pouvoir observer attentivement tout ce qu'ils comptent faire, mais j'ai cette boule dans la gorge qui m'empêche d'être parfaitement stoïque et concentrée.

Sans plus discuter, je suis le groupe dans les allées du camp. Je tente de paraître détendue, bataillant avec mon esprit qui veut me faire faillir. Je pense que me rendre compte que je ne pouvais pas communiquer avec Molly m'a plus perturbée que je ne voudrais l'avouer.

Je secoue la tête et serre les poings en grimaçant sous la brève douleur qui m'assaille. Je ne dois pas me laisser abattre. Je me débrouillerai. Notre plan fonctionnera. Tout ira bien. Tout ira bien.

C'est en me répétant ce mantra que je franchis la limite du camp en retenant ma respiration. Je garde les yeux rivés sur Kali pendant tout ce long instant durant lequel tous les Bannis passent de l'autre côté, et observe avec attention ses iris qui s'animent d'une énergie particulière. Elle est concentrée, pleine d'une puissance tranquille et en parfaite maîtrise de cette gigantesque barrière protectrice menaçante. En y réfléchissant, je me demande si je pourrais la traverser sans me mettre trop en danger. J'accepterai de mourir pour cette cause, mais pas aussi vite, pas sans avoir accompli ce que je devais accomplir.

Nous nous enfonçons dans la forêt, et je respire profondément. Je fais attention à la direction que chacun prend, tente d'imprimer la trajectoire dans mon esprit, essayant de créer une sorte de carte de la forêt en reproduisant les positions de tout le monde. Il faut que j'inscrive tous les détails de leur plan dans ma tête.

Je remarque tout de suite que l'atmosphère s'est nettement alourdie et que presque personne ne parle. La concentration semble avoir atteint son paroxysme au sein des Bannis qui gagnent leurs places respectives avec un sérieux déconcertant. Alors que tout le monde se disperse, je reste dans le même groupe que Kali, composé de certaines personnes dont elle m'a parlé plus tôt, réputées pour leur puissance. Deux elfes, une fée et une autre sorcière. Je reste en retrait, appréciant de ne pas être au centre de l'attention, et me place en observatrice de chacun de leur mouvement, voulant évaluer la menace qu'ils représentent. Sans les voir en action au combat, je ne peux pas parfaitement juger de leur pouvoir, mais je ne doute pas que s'ils sont aux côtés de Kali et de moi dans le bataillon qui doit attaquer en dernier, c'est qu'ils sont à prendre au sérieux. Je commence à mieux comprendre ce à quoi je vais faire face. Je vais sûrement devoir me battre avec chacun d'eux avant de pouvoir atteindre Jorah. Pour parvenir à le confronter, il va falloir que je les neutralise. Et je ne sais pas comment je fais pour être aussi confiante, mais cela ne me pose aucun problème. Il semblerait que je me sois véritablement résignée. J'anéantirai tout ce qui se mettra sur mon chemin.

— Jorah ne devait pas assister à cette réunion ? demande soudainement la fée.

— Il préfère se préparer seul, répond sèchement Kali. Il rentre dans sa phase d'entraînement psychique.

Je fronce les sourcils. Je ne sais pas s'il s'est isolé après les événements de ce midi ou si elle dit vrai, mais je doute qu'il se soucie vraiment de ce qu'il m'a fait. Alors Jorah lui aussi se met en condition... Il sera sûrement au paroxysme de sa puissance, mardi.

Je passe les mains sur mon visage en éloignant les pensées contradictoires qui jaillissent dans mon esprit, avant de reporter mon attention sur le groupe, qui vient de s'arrêter. Nous sommes sous les arbres, éclairés par le soleil de fin de journée qui perce à travers les feuilles et pose sur nous ses rayons chauds. La forêt est silencieuse, l'air étouffant, la pression à son comble. Et dans cette immobilité générale, je me dis que je pourrais parfaitement partir en courant pour rejoindre Érédia - qui ne doit pas être bien loin. Mais au fond de moi, je sais que c'est une idée aussi primitive qu'irréfléchie et dangereuse. Je risque beaucoup trop à faire quelque chose comme ça. Je dois rester tapie dans l'ombre, discrète, sage et subtile.

Les minutes passent, durant lesquelles nous restons tous silencieux, pliés en deux. Cachés dans les feuillages, la respiration calme et imperceptible, nous attendons. La tension monte en moi, comme si la situation était réelle. Je sens mon cœur s'affoler, et je me mets sans m'en rendre compte dans un état d'esprit guerrier. Je suis prête à bondir.

Finalement, un bruit strident nous fait nous redresser. Le sifflement s'arrête après trois secondes, et Kali se racle la gorge.

— Comme vous le savez, ce signal indiquera que la voie nous est ouverte. C'est à ce moment que chacun d'entre nous endossera son rôle.

Tous hochent la tête, et je fais alors bien attention à la position de chacun. Kali lève le menton et commence à indiquer les directions du doigt.

— Elias et Ciera, lance-t-elle alors aux deux elfes, vous partirez en premier. Unissez vos pouvoirs et neutralisez les premiers assaillants. Vous créerez ainsi une entrée pour ceux qui viendront ensuite. On attendra à chaque fois vingt secondes. Ça sera ensuite à toi, (Elle s'adresse à la fée.) Kaden, d'entrer en jeu. Une fois que tu auras utilisé ton pouvoir hypnotique, on arrivera.

Elle se tourne vers moi et l'autre sorcière, le regard brillant d'impétuosité.

— Heaven, tu seras tout devant. Ton boulot, tu le sais, c'est de nous assurer un chemin droit au château, peu importe les obstacles. Amar et moi seront à tes côtés, et Jorah derrière toi pour assurer tes arrières. À nous quatre, on devrait pouvoir vaincre n'importe qui. Les autres troupes assureront chacune leur poste respectifs, et Érédia sera alors encerclée et sous notre contrôle. Si tout se passe comme prévu, on devrait arriver au palais en moins de quinze minutes. Et à ce moment là, un combat entre Jorah et Elijah aura probablement lieu. Il ne faudra pas interférer, et nous aurons alors tous la mission de protéger les alentours en éliminant tout ennemi. Si nos calculs sont bons, à partir du moment où nous aurons brisé les protections du château, nous n'aurons plus à nous inquiéter. Parce que si on vainc les plus forts, on n'aura aucun problème à s'occuper des faibles.

Je déglutis de nouveau, le ventre noué. Tout a été incroyablement pensé, au millimètre et à la seconde près. Je ne voyais pas trop l'intérêt de se contenter de venir à l'endroit prévu sans bouger, mais je commence à saisir. Se mettre en condition nous force à adopter un état d'esprit presque instinctif et à nous habituer à des sensations qui seront décuplées le jour J. Voir l'environnement, percevoir chacun de ses aspects, sentir chaque souffle d'air et concentrer toute sa force dans l'attente de l'action. On se projette, on se positionne exactement comme on est censés être positionnés dans quarante-huit heures. On entend ce qu'on entendra, on voit ce qu'on verra, on sent ce qu'on sentira. Nous ne sommes pas ce que nous serons, mais ressentons une infime partie de ce qui emplira nos cœurs dans peu de temps. Et c'est bien plus important que je le pensais. Parce qu'ainsi, je sais exactement comment tout est censé se dérouler, au millimètre et à la seconde près. Et je vais pouvoir tout mettre en l'air. C'est en prenant conscience de chaque détail que je pourrai saccager leur plan.

Après quelques minutes d'explications quant aux modes d'actions des autres bataillons, nous finissons par quitter notre poste et rejoindre un point dans la forêt où tout le monde doit se réunir. Alors, je commence à apercevoir la foule qui s'était dispersée, débarquant de tous les recoins de la forêt. De ce point de vue, on a l'impression que les Bannis seront absolument partout, et auront la main sur chaque arbre, chaque angle. Ils semblent posséder la forêt et avoir réussi à en couvrir toutes les parts, c'en est presque effrayant. S'ils se mettent à leurs postes avant qu'Érédia arrive pour les neutraliser, tout pourrait se retourner contre nous, et ils seront en terre bien plus connue. Il faudra ne leur laisser aucune occasion de nous devancer. Tout va se jouer à très peu.

Je plisse les paupières en me plongeant de nouveau dans une réflexion intense, essayant d'imaginer toutes les possibles issues de l'affrontement de mardi. Et malheureusement, il y a très peu de chances que ça finisse bien.

Je reconnais le chemin vers le camp, et suis surprise de me rappeler parfaitement du trajet pour y accéder.

Soudain, une silhouette se distingue des autres dans la masse bruyante des Bannis, et je réprime une interpellation. Molly se tient à quelques mètres de moi, encore une fois.

— Ne l'appelle pas.

Je sursaute en entendant Kali me parler avec fermeté, et lève les yeux vers elle. La sorcière fixe Molly, l'air crispé.

— Pourquoi ? soufflé-je.

— Elle a interdiction de te parler.

Je serre la mâchoire. C'est bien ce que je pensais.

— Et il se passe quoi si elle me parle ? insisté-je, sans quitter mon amie des yeux.

— Tu ne préfères pas savoir.

Un frisson remonte le long de mon échine, et je me crispe sans répondre. Alors il faut définitivement que j'oublie toute idée de me concerter avec Molly avant le jour J.

Durant le reste du chemin, je reste silencieuse et concentrée sur le dos de l'Ondine. Je sens mon cœur bondir dans ma poitrine sous la pression qui m'assaille. On aurait dû se mettre d'accord sur un lieu et une heure, quel manque d'esprit...

En rentrant dans l'enceinte du camp, j'inspire profondément pour tenter de reprendre mes esprits. Il ne faut pas que je me laisse abattre par un petit imprévu. Si je ne peux pas rentrer en contact avec Molly, je me débrouillerai seule. Je les abandonnerai, elle, Thaniel et Jake, mais je suivrai le plan.

Ma gorge se noue douloureusement. Imaginer les laisser tous en proie aux conséquences que ma fuite aura m'angoisse à un point insupportable. Mais j'ai décidé de laisser ma raison me guider plutôt que mes émotions, et je sais qu'il faut que j'oublie ce qu'ils représentent pour moi, que je dois uniquement faire ce qui est prévu et non ce que l'inattendu veut me pousser à faire. Tout ira bien, je dois m'en persuader.

* * *

Je me laisse tomber dans mon lit avec un profond soupir. Les yeux rivés sur le plafond, je passe en revue tout ce que je viens d'apprendre pendant cette réunion stratégique dans la forêt. Je me crée une carte imaginaire et dessine, encore et encore, le plan que les Bannis ont élaboré. Voilà ce à quoi je m'efforcerai. Tout retenir pour mieux réussir.

Kali m'a abandonnée dans ma chambre sans rien dire de plus que « Sois prête pour demain. Ça ne rigolera plus. » Je n'ai pas réagi, mais honnêtement, je me demande comment les choses vont bien pouvoir se dérouler demain. Le dernier entraînement promet d'être intense, et après ce que j'ai vécu aujourd'hui, j'ai bien peur de devoir encore plus m'endurcir, sans quoi je n'y survivrai pas.

Les minutes passent, et je ne peux empêcher mon esprit de vagabonder. Cette journée a sans aucun doute été une des plus éprouvantes auxquelles j'ai dû faire face. Tant de choses se sont passées et en si peu de temps... J'en ai le tournis.

Je me redresse et m'assieds sur le côté du lit, les coudes sur les genoux. J'enferme mon visage entre mes mains gelées et fixe le sol, crispée. Je sais au fond de moi que quelque chose a changé. Quelque chose a changé et s'est déclenché, je peux le sentir dans chaque particule de mon corps. Je peux le sentir, ce feu qui brûle en moi, qui consume mes entrailles et grandit à chaque seconde. J'ai l'impression de ne plus être la même personne, et je ne sais pas encore si ça m'effraie ou me plaît. Peut-être un peu des deux...

Après une brève toilette, je me mets en pyjama, bien décidée à vite aller me coucher. Il est véritablement temps que cette journée se termine. Je n'en supporterai pas une minute de plus.

Je passe les mains sur mes joues en marmonnant, et entreprends d'aller éteindre la lumière.

Mais soudain, je suis interrompue par une violente douleur qui se répand dans la paume de ma main droite. Je pousse un petit cri de surprise et constate avec horreur qu'une partie de ma chair se calcine. D'abord alertée, je me précipite à la salle de bains pour rincer ma main. Mais je suis stoppée en plein geste quand je devine une lettre. Un mot est en train de s'écrire dans ma paume. Je ravale ma salive, la gorge sèche et la tête qui tourne. Mais qu'est-ce qui se passe ?

La brûlure s'étend et je dois serrer les dents pour ne pas tout de suite l'apaiser. Pendant quelques instants, je vois ma peau brûler et fumer, élevant dans l'air une écœurante odeur de grillé.

Puis la fumée s'estompe, et enfin, le message se révèle. Mon cœur rate alors un battement.

« Même endroit 8h
Confiance »

Je reste ébahie devant ma main, toute tremblante. Je ne mets pas longtemps à comprendre que le mot concerne le plan de fuite, et que quiconque me l'a fait parvenir est au courant. Même endroit... j'imagine que cela veut dire le même endroit que la dernière fois que je me suis échappée...

Je suis tentée de croire que c'est Molly qui a voulu me faire passer le message, mais la question du comment m'empêche de me laisser aller à cette idée. Si c'est un leurre et que j'y vais, je risque de retrouver Jorah prêt à me faire payer ma trahison définitivement. Mais je serais trop idiote de ne pas essayer après m'être autant triturée l'esprit à angoisser à propos de l'organisation de notre plan. Si c'est vraiment Molly qui m'a envoyé ce message, je la retrouverai mardi à huit heures, et elle pourra s'enfuir quand je créerai une brèche en passant à travers le portail. Peut-être même trouvera-t-elle un moyen de libérer Jake et Thaniel comme voulu. Non, décidément, je ne peux pas rater l'occasion. Elle vaut tous les risques. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, et la tension fait pulser mes tempes. Le plan se précise, l'échéance approche, je le sens, je le sais.

Alors que je ne quitte pas des yeux le message, je le vois disparaître en quelques secondes, et j'entrouvre les lèvres sous la stupeur.

En respirant calmement, je passe ma main sous l'eau pour la soulager, et continue de la fixer, toujours abasourdie. Je me demande bien comment Molly a pu s'y prendre...

J'agrippe les rebords du lavabo et lève la tête en soupirant pour reprendre mes esprits. Je fixe alors mon reflet dans le miroir, les yeux plongés dans mon propre regard. Sur mon visage, je peux retracer toute la dure épreuve que j'ai surmonté aujourd'hui. Et dans mes iris brille une nouvelle étincelle. Une étincelle de rage, de satisfaction, de ce pouvoir enfoui qui crépite au cœur de mon être. Mes prunelles expriment par eux même cette nouvelle facette de ma puissance, disent en un seul instant ce que je ne saurais expliquer. Il est bien loin, mon regard sombre et vide. Le noir qui habite à présent mes yeux est aussi obscur qu'il est incandescent, et expose toute la magie qui est née en moi. Je n'aurais jamais pensé voir un jour de telles lueurs se refléter sur mon âme. Je n'aurais jamais pensé pouvoir ressentir ma propre magie avec tant de sérénité, tant de maîtrise. Je n'aurais jamais pensé pouvoir un jour posséder ce qui m'effrayait tant. Et pourtant, j'y suis parvenue, et je sais que demain signera la fin de mon éveil. Quand mardi, Jorah atteindra lui même l'apogée de sa puissance, celle qui est tapie au fond de moi s'élèvera et le terrassera. Je dois continuer de me le répéter. Je serai plus puissante que quiconque, car c'est la seule solution.

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Voilà le chapitre 16 ! J'espère qu'il vous a plu !

Je sais que j'ai mis du temps, je m'en excuse, j'ai un peu de mal à tout concilier je l'avoue ahah

En tout cas j'espère que ce chapitre, même s'il est assez "calme" vous aura convaincus, il est tout de même important et montre qu'on s'approche sérieusement du conflit ;)

A bientôt pour la suite, bisouus ♥

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