Trente-sixième Chapitre - Réécrit
Je gagne mon canapé et m'y affale en laissant tomber mon sac à dos, abasourdie. J'ai du mal à bien assimiler ce qu'il vient de se dérouler. Molly est donc une Bannie ? Il semblerait donc que ce soit la raison pour laquelle elle est ici.
Je soupire en fixant le plafond blanc au dessus de moi. Décidément, même une simple journée sur Terre doit se finir sur une surprise. J'espère que c'est la seule chose que j'aurais besoin d'encaisser ici. Si je suis revenue, ce n'est pas pour devoir de nouveau faire face aux problèmes que je connais déjà dans mon « autre vie ». Je suis venue sur Terre pour faire une pause, qui doit me permettre de faire le vide dans mon esprit, de le remettre en ordre, de réfléchir calmement sans être parasitée par tous les événements au dehors. J'ai enfin eu toutes les réponses aux questions que je me posais depuis toujours, je sais enfin qui je suis, pourquoi je suis ainsi, j'ai compris ce qui était spécial chez moi. Je dois juste l'accepter totalement, l'assimiler tranquillement. Me calmer, éclaircir mes idées et reposer mon esprit, afin que tout aille mieux par la suite, c'est mon but à cet instant. Alors je mets de côté la nature de Bannie de Molly, je mets de côté ce qui se déroule en ce moment à Érédia, et me concentre sur moi-même. Je pense en avoir le droit, je pense le mériter, en avoir besoin. Je ne sais pas combien de temps durera cette sorte de méditation, mais je ne me donne pas de limite. Je me permets un congé, jusqu'au moment où je devrais continuer ma vie et faire face à de nouvelles épreuves. Mais ce ne sera pas pour aujourd'hui, alors n'y pensons pas.
* * *
Cela fait à présent presque une semaine que je suis revenue sur Terre. J'ai beaucoup pensé, beaucoup réfléchi, imaginé ce qui allait suivre dans ma vie, admis enfin que j'avais vraiment changé, et que je devais me construire en tant que ce que je suis à présent. J'accepte peu à peu ma nouvelle condition, ce qui m'est arrivé, et je suis surprise de la manière dont je fais face à tout cela. Je ne me sens pas submergée, étouffée comme je l'étais auparavant. C'est une évolution sereine, qui ne me fait plus peur, et c'est assez étrange de me rendre compte de cela. Je suis vraiment certaine que l'acquisition complète de mes pouvoirs m'a rendue plus forte mentalement, comme plus imperméable à tout ce qui me noyait il n'y a pas si longtemps.
La magie m'habite maintenant complètement, je suis apparemment plus puissante que personne ne l'a jamais vu, un hybride entre le Silencieux de Sang Pur et le Sylphe, et ce qui me terrassait d'effroi et de dégoût pour moi-même, m'intrigue et m'impressionne aujourd'hui. J'ai décidé de ne pas rejeter ma nature, mais l'accepter, prendre le contrôle sur elle, et ne plus me laisser dépasser par ma propre identité. Je pense que c'est la bonne chose à faire si je veux vraiment vivre sans être angoissée à chaque instant. J'ai réussi à remettre mes pensées en place, à donner un peu de repos à mon esprit. Je me suis également calmée quant à l'ancien roi et ses actes. Évidemment, je le hais toujours comme je n'ai jamais haï personne, mais la rage qui m'habite est différente à présent, et semble me donner de la force, de la détermination, plutôt que de m'étouffer, et c'est quelque chose que j'apprécie.
J'ai mérité cette pause, et elle m'a été très bénéfique, alors je pense être prête à retourner à ma vraie vie, repartir à Érédia, enfin.
Actuellement, je suis assise à une table du même café , accompagnée de la personne que j'ai évité avec précaution toute la semaine, ne voulant pas me confronter à ce que j'avais compris. Molly est installée en face de moi, son gobelet à la main, depuis quelques minutes déjà. Elle a réussi à me trouver en sortant du lycée, et m'a forcé la main pour que je la suive, étant donné que, selon elle, « il faut qu'on rattrape une semaine ».
— Tu vas bien ? me demande-t-elle alors, l'air inquiet. T'as l'air un peu... pensive.
Je lève les yeux vers elle, et inspire profondément.
— Je peux te demander un truc ?
Elle fronce les sourcils, et penche la tête sur le côté, intriguée. Je prends une pause d'une seconde, puis je me lance.
— Est-ce que tu es une Bannie ?
Je vois son visage se décomposer à la seconde où je dis cela, et elle entrouvre la bouche. J'avais donc raison.
— Quoi ? Non, je... pourquoi tu penses ça ?
— J'ai vu la marque sur ton cou.
Elle baisse les yeux, et je vois ses lèvres trembler. Elle est prise au dépourvu.
— Hum, écoute Heaven...
— Pourquoi tu es là, sur Terre ? lâché-je, la voix ébranlée par l'incompréhension. Tu es avec les autres, vous allez faire la guerre à Érédia ?
— Hein ? Quoi ? Non ! balbutie-t-elle. J'ai juste décidé de venir sur Terre après mon bannissement, je préférais ça à la vie sur Nyplel en tant que rejetée. Mais de quelle guerre tu parles ?
Je déglutis. Je ne sais pas si elle fait semblant, où si elle ne sait vraiment rien. Elle paraît sincèrement troublée.
— La guerre qui se prépare entre les Bannis et les habitants d'Érédia, Molly, fais-je, le ton sérieux. Tu n'es vraiment pas au courant ou tu fais semblant ?
— Non, je ne suis vraiment pas au courant, Heaven, je te jure. Je... je n'ai plus de contact avec les gens qui sont restés sur Nyplel... Ça sera une vraie guerre ? Mais...
Elle a réellement l'air de ne pas comprendre, et me regarde d'un air ahuri. Je plisse les paupières, hésitante.
— Je ne sais pas trop quoi te dire...
— Je dois retourner là-bas, m'interrompt alors la jolie rousse. Sérieusement, Heaven, je connais des gens qui y sont encore, et on a enlevé la magie à mon pendentif quand j'ai été Bannie, je dois y aller. Si une guerre se prépare, je dois retourner auprès de mes proches.
Je secoue la tête, lui demandant de se taire d'un geste de la main.
— Attends, Molly, s'il te plaît. Je ne sais même pas si je peux te faire confiance. Tu es une Bannie, et...
— Et alors ? Tu crois qu'on est quoi ? s'offusque-t-elle alors brusquement. Des monstres ? Tu sais, si on a commis ces soi-disant crimes dont ils nous accusent - qui sont d'ailleurs, très, très rarement graves -, c'était dans des circonstances désespérées pour la plupart d'entre nous. Tu sais ce que j'ai fait ? J'ai sauvé la vie de ma meilleure amie qui était sur le point de mourir d'empoisonnement, en utilisant une potion interdite. Alors ne commence pas à jouer l'irréprochable, tu ne nous connais pas.
Elle a les larmes aux yeux et la voix tremblante. Je suis frappée par ses mots. Un frisson parcourt mon échine, et je ravale difficilement ma salive.
— Je...
— Avant de supposer, tu devrais peut-être éviter les préjugés, me coupe de nouveau Molly. Tous les Bannis ne sont pas des gens horribles et en soif de pouvoir. C'est juste des gens normaux, qui ont fait des choix jugés mauvais. Et je ne sais pas pourquoi ils font la guerre à ton peuple, mais ils doivent avoir une bonne raison.
— J'ai compris, Molly, lâché-je finalement. J'ai compris. Je suis désolée. C'est juste que... je connais tout ça depuis très peu de temps. Alors c'est vrai que j'ai écouté ce qu'on m'a dit, et à peine j'ai débarqué sur Nyplel, j'ai dû faire face à des attaques des Bannis et à plein de discours sur vous qui disaient que vous étiez des criminels et des traîtres. Je sais que ça ne justifie pas tout, mais voilà. Je suis désolée, répété-je. OK ?
L'Ondine lève le menton et inspire profondément.
— OK. Bon, j'y suis peut-être allée un peu fort, mais c'est j'aime pas tout ce jugement autour de nous.
Je hoche la tête, compréhensive. Elle a raison, je n'aurais pas dû m'imaginer que tous les Bannis étaient les mêmes, c'est totalement idiot. Je décide de poursuivre la conversation, d'un ton plus calme.
— Tu as dit que tu voulais retourner sur Nyplel, tu es sûre d'avoir le droit ?
— Oui. L'accord signé entre les Bannis et ton peuple stipule que nous avons le droit de circuler sur tout le territoire, mais nous avons interdiction de pénétrer dans les villes, et devons rester à minimum deux kilomètres de celles-ci, explique-t-elle. Alors, si je retourne là-bas, ça va être dur de revoir ma famille à Lustaj. Mais ce n'est pas grave, je dois au moins parler à mes amis parmi les Bannis, je dois comprendre ce qu'il se passe. Heaven, s'il te plait, tu dois me faire confiance. Tu peux me croire, je ne veux pas plus que toi que nos peuples s'affrontent si ça met tout le monde en danger.
Elle a les yeux brillants, et je sais qu'elle dit vrai.
— Tu dois m'aider à y retourner, s'il te plait...
— D'accord. Je... je vais retourner à Érédia aujourd'hui, mais je ne sais pas me téléporter seule encore, alors je demanderai à mon amie de t'emmener aussi, je promets que j'essaierai. Je... je te réponds plus tard, d'accord ?
L'Ondine hoche frénétiquement la tête, et je soupire calmement. J'espère que Joyce acceptera.
Après ce rendez-vous riche en émotions, je suis rentrée chez moi en traînant les pieds. J'ai promis à Molly d'essayer de l'aider à retourner chez elle. Je ne suis pas totalement certaine que ce soit le meilleur choix à faire, mais je pense devoir et pouvoir lui faire confiance. Je suis assise dans mon canapé, comme d'habitude, et fixe l'horloge au dessus de ma télé depuis quelques secondes. Je respire calmement, me répète à moi même ce que je vais dire, et finis par cliquer sur le nom de mon amie Kitsune dans mon répertoire en prenant une longue inspiration.
— Ah bah enfin, je pensais que tu n'allais plus jamais revenir ! s'exclame Joyce à l'autre bout du fil, après quelques secondes d'attente.
J'esquisse un sourire en imaginant l'air rieur sur son visage, et je suis encore plus convaincue que je dois et veux retourner à Érédia. J'ai besoin de la retrouver, de tous les retrouver.
— T'inquiète, je reviens, ris-je alors. Du coup, est-ce que tu peux venir me chercher dans pas trop longtemps, s'il te plait ?
— Oui bien sûr, aucun problème. Tu veux pas que ce soit Jake ? rit-elle ensuite.
J'entends l'intéressé râler derrière, et je ne peux réprimer un large sourire.
— Non, toi, insisté-je donc. Par contre, j'aurai un truc à te demander, mais je préfère t'en parler en face.
— Oulà, tu me fais peur, mais d'accord. Je suis là dans cinq minutes, à tout de suite !
J'acquiesce, et la salue avant de raccrocher. Je me pose des questions quant à la réaction qu'elle aura quand je lui demanderai de ramener une Bannie à Érédia. Elle rira sûrement.
Comme prévu, quelques instants plus tard, une Joyce joyeuse apparaît dans mon salon. Elle s'avance vers moi, et me serre rapidement dans ses bras.
— Ça fait du bien de te revoir, quand même, sourit-elle alors. Bon, qu'est-ce que tu voulais me demander ?
Je la fais s'asseoir près de moi, et finis par m'éclaircir la voix.
— Je t'avais parlé rapidement de Molly, la fille que j'avais rencontré au lycée ?
— Oui, celle qui n'était pas humaine selon toi ? hésite-t-elle, intriguée.
— Voilà. Eh bien j'avais raison, c'est une Ondine.
Elle arque les sourcils, surprise par cette révélation.
— Waouh, c'est quelque chose, une Ondine, finit elle par dire. Et donc ?
— C'est que le premier truc que j'ai appris sur elle. Le second, c'est que... c'est une Bannie.
Elle ne réagit pas et pendant une seconde, me fixe sans comprendre.
— Attends, pardon ? Une Bannie ? bafouille-t-elle. Mais...
Je place mes mains devant moi, et lui dévoile progressivement toute ma conversation avec Molly. Je lui transmets ses mots, essaie de lui faire comprendre mon point de vue, et lui expose la situation clairement. Elle finit par souffler longuement, et me regarde d'un air perplexe.
— Je ne sais pas, Heaven...
— Je t'assure qu'on peut lui faire confiance, répété-je. Je le sens.
— Je fais confiance à tes instincts, mais alors si elle nous fait un coup bas...
— Elle nous en fera pas.
La Kitsune prend une profonde inspiration, puis finis par secouer la tête. Pendant de longs instants de silence, elle semble réfléchir, et me fixe d'un air pensif.
— Bon, vas-y, dis lui que je veux bien l'emmener, finit-elle par annoncer.
— Merci.
Je m'empresse de prévenir la concernée en lui envoyant un rapide message, et il faut environ trente minutes à l'Ondine pour se retrouver à entrer dans mon appartement. Quand elle rentre d'un pas hésitant, je vois Joyce la toiser d'un air méfiant.
— Molly McCallister, se présente la première, d'un air timide que je lui vois pour la première fois.
— Joyce Webster. Tu fais plus que seize ans, remarque la Kitsune d'un air cordial.
Molly lui répond d'un léger sourire, et je soupire de soulagement intérieurement en voyant que tout se passe bien. Heureusement que Joyce est une fille adorable, et qu'elle a su accepter la situation. Et heureusement que Molly ne s'impose pas, et est tout aussi courtoise. Je suis ravie, mais reste sur mes gardes. Les deux ont des caractères bien trempés, espérons que rien ne dépasse.
Quelques minutes de mise au point plus tard, nous voilà toutes trois liées solidement par les mains.
— Bon, comme on est trois, mieux vaut que vous vous accrochiez solidement, prévient Joyce.
Molly et moi nous exécutons, et nous voilà enfin parties. Si j'avais imaginé une seule fois que la jeune fille que j'avais bousculée dans le couloir du lycée allait finalement me rejoindre à Érédia.
Nous atterrissons dans le salon de la maison de Zac, et je ne peux m'empêcher de sourire en apercevant cette pièce. Ça m'avait vraiment manqué, finalement.
Soudain, alors que nous nous lâchons les mains et que j'entends les pas des garçons arriver derrière nous, Molly pousse un cri aigu. Je me tourne vers elle, et vois qu'elle a les mains agrippées à son cou, et serre les paupières.
— Ça brûle, ça brûle ! crie-t-elle dans un souffle étranglé.
J'entrouvre les lèvres, sans savoir quoi faire, puis, les mains tremblantes, je décolle les siennes de son cou, qui dévoile la marque des Bannis, semblant à vif et brillant légèrement. Je me décide à essayer de l'aider, et dépose mes mains sur le cercle brûlant, en serrant les dents pour me concentrer difficilement. Rapidement, plus que d'habitude, je sens ma magie s'animer, et je frissonne, alors que je dirige mon énergie calmement vers la marque de Molly. Puis, en quelques secondes, je sens sa douleur s'apaiser, et l'Ondine se décrispe, me dévisageant tandis que je décolle mes mains de son cou. Elle caresse du bout des doigts le cercle, et fronce les sourcils.
— Merci... souffle-t-elle.
Elle paraît ne rien comprendre, et je vois que son regard est plongé dans le mien. Alors je ferme les yeux, et attends que je sente mes iris revenir à leur couleur initiale pour les rouvrir. Je ne sais pas s'ils étaient bleus, ou s'il y en avait un blanc. J'imagine que la deuxième hypothèse est la plus plausible, vu l'air ahuri que la Bannie en face de moi affiche. Je suis moi-même assez perturbée. C'était la première fois que j'utilisais mes pouvoirs depuis ma majorité, et je ne peux que remarquer l'amélioration. Tout était plus facile, plus automatique, plus naturel.
— Bonjour... résonne alors la voix de Zac derrière moi.
— Hé, salut, fais-je en me tournant brusquement.
Je fais face à mon mentor et à Jake, qui nous fixent, Joyce, moi, puis Molly, l'air complètement abasourdi. Ils ne comprennent absolument pas ce qu'il vient de se passer, ni qui est la rousse qui se tient à mes côtés.
— Alors, on peut tout expliquer, lance Joyce, un peu nerveuse.
— C'est une Bannie, fait Zac en s'approchant de Molly et ne quittant pas son regard. Vous avez intérêt à avoir une très, très bonne explication, parce qu'actuellement, on est tous en train de commettre un délit en la cachant ici.
Je ravale difficilement ma salive en comprenant cela. C'est la vérité, Molly a la formelle interdiction de se trouver ici. J'imagine que c'est pour ça que sa marque s'est ranimée, cela doit être une réaction au fait qu'elle ait violé l'accord. Pendant une seconde, j'en viens à me demander comment autres Bannis ont pu pénétrer à Érédia sans avoir cette réaction, puis j'oublie rapidement. Après tout, ils nous cachent sûrement beaucoup.
Nous nous installons tranquillement dans le salon, et Molly prend place dans un fauteuil et baisse la tête. En quelques minutes, Joyce et moi expliquons clairement ce qu'il se passe, du début à la fin, et nous avons le droit à une réaction plutôt agacée de Zac, bien que compréhensive.
— OK, je comprends, acquiesce le beau blond en passant une main sur son visage. D'accord. Bon, Molly, tu veux faire quoi ? Parce que je te dis, en ce moment comme tu l'as sûrement compris, ce n'est pas une bonne idée pour une Bannie de se balader ici.
La principale concernée lève les yeux vers lui, l'air anxieux. Elle n'a pas dit un mot depuis le début, et semble perdue.
— Je sais, finit-elle par déclarer en se redressant. J'aimerais voir ma famille, mais je ne pense pas pouvoir atteindre Lustaj sans me faire repérer, alors je pense que je vais juste aller rejoindre les autres Bannis dans la forêt. Je... je ne sais pas si je pourrai te recontacter, Heaven.
— Tu aurais pu nous donner des informations sur ce que prépare ton peuple, intervient alors Jake, qui était resté silencieux tout le long de la discussion.
Molly fronce les sourcils, et hausse les épaules.
— Je ne sais pas, sincèrement. Je dois comprendre pourquoi ils ont lancé une guerre, mais je vous suis redevable... Je suis un peu perdue, désolée.
— Écoute, interviens-je, on ne t'oblige à rien, mais nous aussi on voudrait comprendre ce qu'il se passe, c'est pour ça qu'on te dit ça. Après, si tu ne peux pas, tant pis. La seule chose que je te demande, c'est de...
— De ne pas parler de toi, devine-t-elle rapidement. Oui, j'avais compris ça en voyant...(elle désigne ses yeux). Je ne sais pas ce que tu es, mais je n'en parlerai pas. Promis.
J'avais donc très certainement raison quant à mes yeux, l'un était sûrement blanc. Je hoche lentement la tête, et quand l'Ondine se lève d'un coup, je l'imite.
— Merci beaucoup de m'avoir ramenée ici. Je... J'espère qu'on se reverra. Merci à vous aussi, adresse-t-elle à mes amis.
Ceux-ci se lèvent à leur tour, et acquiescent d'un même signe de tête cordial. Molly finit par se tourner vers moi, ses yeux bleus plus pétillants que jamais, et s'avance vers moi pour me serrer tendrement contre elle. Puis, elle se détache de moi et me remercie une dernière fois avant de se diriger vers la sortie de la maison.
— Attends, tu es sûre de ne pas vouloir qu'on t'accompagne jusqu'à la forêt ? proposé-je.
— Oui, oui, ne t'inquiète pas, sourit-elle.
Puis elle ouvre la porte. Seulement, alors qu'elle souhaite mettre un pied dehors, elle se heurte à une barrière invisible entre la maison et l'extérieur, et recule d'un air intrigué. Elle était à deux doigts de se prendre cette barrière. Je me rappelle alors soudainement que moi aussi, je m'étais pris le nez dans cette porte invisible lors de ma seconde venue à Érédia, quand j'ai rencontré le « véritable » Zachariah. « Protection, on ne sait jamais ce qui peut entrer », avait-il dit pour me narguer. J'imagine que c'est la même chose pour ce qui peut sortir.
— Désolé, c'est une protection contre les inconnus à la maison, explique alors l'intéressé en s'approchant de Molly et en effectuant un rapide mouvement de la main. Voilà, c'est bon.
La jolie rousse sourit d'un air gêné, puis le remercie rapidement avant de quitter définitivement la maison. Je reste plantée devant la porte d'entrée pendant quelques secondes, toujours troublée. Je n'aurais jamais imaginé une telle situation il y a quelques jours.
— Donc toi, parmi toutes les personnes que tu pourrais rencontrer au lycée, tu rencontres une Ondine bannie ? soupire mon mentor et penchant la tête vers moi.
Je baisse les yeux, et nous allons tous nous réinstaller dans le salon, comme à notre habitude.
— Bon, hésité-je, je sais que c'était pas forcément le moment opportun, mais elle pourrait nous être d'une grande aide.
— Oui, enfin, si elle le veut, corrige Jake. On te fait confiance sur ce coup là, mais on doit quand même se méfier, tu sais.
— Je sais, je sais, soufflé-je.
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