|La bouche|

Sa figure commençait et n'aboutissait pas,
Telle l'esquisse inachevée d'un artiste las.
Un morceau de tissu d'un bleu médical,
Lui conférait l'anonymat des carnavals.

Elle n'était plus vraiment ni femme ni humaine,
Avec ce visage dissimulé, scindé en deux,
Mais demeuraient ses sourcils et ses grands yeux,
Gris foncé, comme les larmes d'un ciel en peine.

Montagne au sommet caché par les nuages,
Elle riait sans dents, et souriait sans lèvres,
L'arête de son nez marquait la fin de son visage.

Quelques fois je songeais à la beauté de ce nez,
Était-il seulement, à ma vue dérobé
Fin, comme la pièce maîtresse d'un orfèvre ?

Alors je guettais les beaux jours, les jours clairs,
Où, étouffée par la chaleur de l'été,
Elle déshabillait ses joues et son grain de beauté,
Rendant son corps entier à la caresse de l'air.

Et le temps s'arrêtait, interdit,
Car quand elle laissait paraître son visage,
Un papillon rouge comme les flammes de midi,

Un coquelicot perdu dans un charmant paysage,
Surgissait, de manière brève et interrompue,
Éveillant dans mon corps des désirs inconnus.

Lisa Thelmar

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