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16 avril

J'ai explosé la tête d'un zombie, puis ai sauté par la fenêtre pour atterrir dans la rue. Alice a juré et m'a crié de lui amener des soins car elle était blessée.

"Pas la peine de hurler, je suis à côté de toi."

Elle m'a donné un coup de coude et a attrapé des chips dans le bol devant nous.

"Putain Alice, tu vas salir mes manettes si tu continues à foutre tes mains grasses dessus !"

Thomas lui a arraché la manette des mains, et j'ai mis le jeu sur pause alors qu'un énième zombie s'occupait de manger l'avatar d'Alice.

"Tu lui as dit quoi, à Diane ?" m'a demandé Thomas.

J'ai soupiré. Personne n'allait me laisser tranquille avec cette histoire.

Ça faisait une petite semaine que j'avais parlé avec Bastien. Il m'avait conseillé d'en finir avec cette histoire, et Thomas et Alice étaient d'accord avec lui. Alors, je devais parler à Diane. Pour Sara. Pour moi aussi ; pour arrêter tous ces mensonges qui me pesaient de plus en plus sur la conscience, d'après Alice.

Le problème, c'était que j'étais incapable de parler avec Diane. J'avais été la voir la veille à son boulot ; mais à peine avais-je posé les yeux sur elle que j'avais envie de l'embrasser et surtout, je ne voulais pas ne plus la voir. Lui annoncer qu'elle et moi ne devions plus nous voir et surtout, comme me l'avait conseillé Thomas, sans dire pourquoi, m'était impossible. Je ne voulais pas lui mentir, à elle aussi.

"Je n'ai pas réussi à lui dire."

"Mais merde, Côme ! Il va bien falloir que tu dises la vérité, un jour, et c'est soit à Diane, soit à Sara."

"Il a raison, Côme" a renchéri Alice. "Surtout que ça te fait du mal, à toi aussi."

"C'est bon, je vais bien. Tout comme Diane et Sara. Et tant qu'elles seront heureuses toutes les deux, je ne ferais rien."

J'ai attrapé une canette de Coca sur la table basse et ai bu une gorgée. Thomas, lui, a pris mon téléphone, posé sur la même table, et a commencé à tapoter dessus.

"Qu'est-ce que tu fais ?"

"J'appelle Diane."

"Quoi ?" me suis-je exclamée.

Je me suis levé et me suis jeté sur lui pour l'en empêcher. Mais il s'est vite défait de mon emprise et a commencé à courir dans sa chambre, moi à ses trousses.

"Thomas, rends-moi ce téléphone !"

"Mon pote, je te connais depuis un bail et je peux les sentir, les merdes qui t'arrivent et que tu ne vois pas."

"Thomas !"

"Chut ! Ça sonne."

"Mais raccroche, connard !"

"Les garçons !"

On s'est tous les deux retourné vers Alice. Elle avait l'air furieuse.

"Vous allez arrêter vos conneries maintenant ! Mais vous avez quel âge ?"

"Alice, je..." ai-je commencé.

"Ferme bien ta gueule ! Tu ne vois pas qu'on essaye juste de t'aider ? Et Thomas, laisse-le, il a besoin de temps, et tu sais aussi bien que moi pourquoi."

"De quoi, pourquoi ?" ai-je voulu savoir.

Alice s'est pincée les lèvres, et au même moment, on a tous entendu Diane décrocher.

"Allô ?" a fait sa voix, rendue plus grave par le mode haut-parleurs de mon téléphone.

"Parle-lui, parle-lui !" a murmuré Thomas en me tendant mon portable à bout de bras.

"Non, tu te démerdes !" lui ai-je craché à la figure.

"Mais c'est ton plan cul je te signale !"

"Thomas, pour la dernière fois, ce n'est pas un..."

"Allô ?" a fait Diane, plus insistante. "Côme ?"

J'ai regardé Thomas, puis Alice, puis le téléphone.

"Merde..." ai-je murmuré en prenant mon téléphone. "Diane, salut..."

"Salut, tu vas bien ?"

J'ai désactivé le mode haut-parleurs et je suis monté dans les escaliers pour rejoindre le salon.

"Oui, désolé si je te dérange. C'est une fausse manip', je devais appeler... euh..."

"Ne te justifie pas, il n'y a pas de problème" me dit-elle en riant.

"Ah, c'est cool."

"C'est cool."

C'est cool.

"Je...." ai-je commencé.

Mais rien ne sortait. Bizarrement, je n'étais pas à l'aise, gêné. Je m'embrouillais les pinceaux et les idées qui me passaient par la tête ne voulaient pas sortir de ma bouche, elles-aussi incohérentes.

"Désolé de te déranger."

"Ça, tu l'as déjà dit" a remarqué Diane.

"Ah, oui. Oui, tu as raison, désolé, désolé."

Elle a ri. J'aimais son rire.

"Ne t'en fais pas, ça va. Tu es mignon quand tu t'embrouilles comme ça."

"Je suis mignon ?" ai-je répété.

"Du moins tu as l'air, je parie que tu es en train de te torturer les cheveux en ce moment, c'est ton truc quand t'es gêné."

"Non, pas du tout."

J'ai retiré ma main de mes cheveux.

"Oui, je te crois sur paroles" a-t-elle répondu, toujours en riant. "Ça te dirait de boire un verre ce soir ? Je connais un super bar dans le centre-ville."

"Euh, ouais, ouais, ça marche. Ce soir, on se retrouve à vingt-et-une heures ?"

"Au Rock Show, juste à côté de l'irlandais. À ce soir, Côme."

"À ce soir Diane."

Elle a raccroché. Je suis resté immobile pendant quelques minutes. Mais que m'était-il arrivé ? D'habitude, je n'étais pas si gêné de lui parler. Encore hier, quand j'étais allé la voir au magasin, et quand on avait fait l'amour dans sa voiture, je n'étais pas si mal à l'aise, j'étais même super à l'aise avec elle. Voire trop, peut-être.

Mais qu'est-ce qui se passe ?

"Eh."

Je me suis tourné vers Thomas, qui était debout dans les marches.

"Tu la vois ce soir ?"

"Je vais te tuer, Thomas."

"Je n'en doute pas une seconde."

Je l'ai regardé, longuement.

"Tu lui diras ce soir."

"Et si je n'en ai pas envie ?" ai-je répliqué.

"Alors c'est ton problème. Je suis là pour t'aider, mais si tu n'en fais qu'à ta tête..."

"Je n'ai jamais demandé ton aide" lui ai-je lâché sèchement.

Il a serré la mâchoire, et fourré ses mains dans les poches de son jean.

"Eh bien si je ne te suis d'aucune utilité, tu peux te casser."

Alors, je me suis cassé. J'ai claqué la porte d'entrée et suis rentré dans la voiture de Sara, furax. Face au volant, j'ai commencé à hurler, et j'ai donné un coup de poing dans volant.

"Merde !"

J'ai démarré la voiture.

J'ai monté les marches du métro quatre par quatre et j'ai couru dans la rue vers l'irlandais.

Quarante minutes de retard.

Fichu métro.

Tout en me disant que ce n'était pas si dramatique, j'ai ouvert la porte du Rock Show et j'ai cherché Diane des yeux, le cœur battant. Il fallait que je la vois.

Il y avait beaucoup de monde dans ce bar, et des gens dansaient. La musique électro-rock était à un volume démesurément trop fort et il régnait dans l'air une odeur de tabac, malgré que l'on soit à l'intérieur.

Et alors je l'ai vue. Diane. Elle était assise au bar, seule, et tournoyait une paille dans un verre, le regard ailleurs, habillée d'un élégant chemisier rouge. Elle était si belle, et paraissait intouchable, là, assise et calme au milieu de tous ces gens qui s'amusaient.

Elle avait l'air calme.

C'était la première fois que je la voyais comme ça. D'habitude souriante et éblouissante d'énergie, elle était dans les nuages, la tête soutenue par une main, plus humaine que jamais, elle qui semblait tout droit sortie d'un autre monde.

Plus que ça, elle semblait triste. Et c'était à cause de moi.

Je restais longtemps comme ça, planté au milieu de l'entrée. Un type m'a alors poussé et m'a sorti de mes pensées, et j'ai marché vers Diane.

Elle ne m'a même pas vu arriver sur le coup, trop loin mentalement pour remarquer toute présence autour d'elle.

"Salut" ai-je lancé.

Elle a sursauté et m'a regardé, paniquée.

"Oh mon Dieu, Côme, ça fait longtemps que tu es là ?"

"Non je viens juste d'arriver, tu..."

"Ah ! Tant mieux alors !" s'est-elle exclamée avec son sourire habituel, qui jusque là me paraissait naturel et omniprésent. "Tu veux boire quelque chose ? Leurs mojitos sont excellents, je me suis permise de commander sans toi... S'il vous plait !" a-t-elle appelé le barman.

Et moi, je la regardais faire. Son comportement, sa joie de vivre, tout ça... ce n'était donc qu'une façade ?

"Qui es-tu, Diane ?" lui ai-je demandé.

Elle m'a interrogé du regard, avec toujours son sourire amusé sur les lèvres. Le barman a posé mon mojito sur le comptoir.

"Qui je suis, eh bien je suis Diane, c'est tout" a-t-elle dit en riant.

Je voulais continuer, mais j'ai lâché l'affaire. Elle devait avoir eu un moment d'inattention, ou quelque chose dans le même genre. La Diane que je connaissais était une personne électrique, qui me forçait à boire cul-sec un mojito, qui m'emmenait au centre d'une piste de danse et qui m'embrassait à pleine bouche devant une trentaine de personnes, sans aucune gêne et le sourire aux lèvres.

NDA

Merci beaucoup pour tous vos votes, ça me fait plaisir de voir que cette histoire vous plait !

Aussi, et je pense que vous l'aviez peut-être remarqué, j'essaye de publier les chapitres régulièrement, soit un tous les weekends. Est-ce que ce mode de publication vous plait ? Dites-le moi dans les commentaires si vous pensez qu'il faudrait faire des changements, ou si vous avez quelconque remarque ou critique à faire sur l'histoire, chaque commentaire me sert pour évoluer dans l'écriture.

Merci encore !

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