Chapitre 21 : les nobles
Quand Alphonse, Mark, Olivier, Gérard, Sage, Fred, Gloria et tous les serviteurs du château les virent sortir du bureau, ils applaudirent. Placidia et Rodrigue, qui étaient les premiers à être sortis, furent surpris de tomber sur autant de monde. Leurs neveux, Max, Isaac et Foulque étaient derrière eux et remercièrent la foule avec quelques sourires gênés avant qu'Alphonse ne la calme. La reine Lora était la dernière à être sortie et semblait changée. Elle donnait l'air d'être plus jeune, soulagée, et d'avoir un poids en moins sur les épaules.
-Merci à toutes et à tous de nous avoir aidés, dit-elle à la foule. Le roi est mort, le pays est libéré. Mais la menace est encore lourde. En effet, les drows ne sont pas encore neutralisés et leur chef est presque invinsible. Seuls son frère et sa cousine peuvent le tuer. De plus, cette dernière et la reine Aria des elfes ont disparus à la poursuite du roi des trolls. Nous devons les retrouver. Enfin, des nobles et des soldats à la botte de Vlorgue sont toujours dans le château ou en train de combattre. La plupart d'entre eux n'ont jamais eu le choix et on obéit à Vlorgue pour rester libre et assurer la protection de leur famille. Je vous demanderais donc de ne pas être violents avec eux. Les nobles qui ont poussé Vlorgue dans ses projets seront jugés. Les soldats, eux, n'ont fait qu'obéir aux ordres. Ils ne sont donc pas fautifs.
Elle balaya du regard la foule, puis reprit :
-Je vous pris de nous aider à retrouver Ismène, Aria et le roi des trolls. Ismène, Isaac, Diana et quelques autres personnes pouvant se montrer utiles partiront ensuite aussitôt en Flores au pied de la montagne des drows où l'armée de Flores et la sorcière d'Humalia les attendent déjà, près à exécuter le plan.
-Nous allons tout de suite les chercher, assura Sage. Tout le monde ! En avant !
Les valets et les servantes partirent dans toutes les directions et disparurent.
-Des valets gardent la salle où sont enfermés les nobles, dit Alphonse en s'approchant de la reine.
-Très bien, fit celle-ci. Placidia, va donc envoyer des lettres aux soldats royaux pour leur dire d'arrêter de se battre contre les rebelles. Je veux qu'ils soient ici dans une semaine dernier délai. Avertis les nobles des différentes régions que nous avons gagnées. Même ceux des régions ennemis et le Wartou qui est resté neutre. Rodrigue, Foulque et Alphonse, trouvez les soldats royaux qui sont en ville et avertissez les que le roi est mort. Les enfants, vous venez avec moi pour avertir les nobles qui sont dans la salle. Nous parlerons tous ensemble après.
Tout le monde obéit à ses ordres et les adolescents la suivirent jusqu'à la grande salle, mais pas sans avoir jeté avant un coup d'œil à Rodrigue. Les valets qui montaient la garde s'inclinèrent et les saluèrent avec de grands sourires sincères, que la reine leur rendit.
-Veillez à ce qu'on aille me chercher le coffret qui devrait se trouver sous le lit du roi. Mettez-le dans le bureau royale, je m'en occuperai après, leur dit-elle avant d'entrer.
Tous les nobles et leurs enfants se tournèrent vers les nouveaux arrivants avec étonnement.
-Qui êtes-vous ? demanda un jeune baron de Romèc. Où est le roi ? Pourquoi met-il autant de temps à arriver ? Vous êtes de nouveaux arrivants pour prêter serment de loyauté à la couronne ?
-Tais-toi ! s'exclama un homme qui devait être son père, même long nez et cheveux gras. C'est la reine Lora !
Les nobles qui connaissaient la reine regardèrent autour d'eux, se doutant qu'il se passait quelque chose, avec des yeux affolés et mécontents. Quant à ceux qui ne l'avaient jamais vu mais qui en avaient entendu parler, ils se tournèrent les uns vers les autres pour échanger des commentaires et des questions en jetant des coups d'œil à la reine, se sentant menacés. Les enfants ne savaient pas vraiment ce qu'il se passait, alors ils regardaient la reine et la troupe d'adolescents qui la suivait avec curiosité. Les femmes qui avaient participé aux nombreuses fêtes de la reine parurent troublées de la revoir, et celles qui la voyaient pour la première fois regardèrent leurs maris pour savoir ce qu'il fallait penser de cette apparition.
Parmi la foule, Adeline, Ameline et Donan virent Vanille qui les regardait, les yeux vides de toutes expressions. Elle prit la main d'une de ses nombreuses sœurs et la serra simplement.
-Que faites-vous ici ? demanda le duc de Romèc en avançant vers la reine, l'air menaçant. Comment se fait-il que les gardes ne vous aient pas arrêtés !
-Eh bien c'est simple : nous avons détourné leur attention ! fit la reine Lora en lui adressant un sourire moqueur.
-Où est le roi ? s'exclama le père de Vanille.
-Le roi ? fit la reine en braquant son regard sur lui. Un roi ? Quel roi ? Nous avons un roi ?
Elle se retourna vers les adolescents qui la suivaient, comme si elle cherchait vraiment quelqu'un qui pourrait répondre à sa question.
-Ne fais pas l'idiote, Lora ! dit le duc de Romèc.
-Hum, premièrement, je suis la reine alors ne m'appelle pas par mon nom ! fit la reine en croisant les bras, l'air mécontente. Je mérite autant de respect que tu en adresses à Vlorgue. Deuxièmement, qui t'as autorisé à me tutoyer ? Je suis de rang supérieur au tien ! Troisièmement, je ne te permets pas de m'insulter. Et puis, je suis ta reine donc tu me dois obéissance.
-J'obéis au roi ! Et le roi t'as exilée !
-Tu obéis à la couronne, comme les autres nobles. Or, je suis la couronne ! s'exclama-t-elle. Il se trouve que Vlorgue est mort. Voilà pourquoi nous sommes ici, bande de crétins !
-Faux ! Sale menteuse, vous n'êtes qu'une traîtresse ! s'écria un comte.
-Insulte-moi si ça te fait plaisir de me donner une mauvaise impression de toi, dit Lora, mais ça ne changera rien. Nous venons de tuer le roi.
-Impossible, un diable et un troll le protègent ! dit le duc de Romèc.
-Le diable est mort, le troll n'est plus un problème.
Elle monta sur l'estrade, suivie par les adolescents, et prit un air sérieux :
-Je ne suis pas là pour répondre à vos questions idiotes. Je suis la reine et je vais remettre le royaume sur pieds en commençant par destituer de ses fonctions tous nobles partageant les idées de Vlorgue. Ceux qui souhaitent se racheter, venez vous agenouiller devant moi !
-Nous voulons voir Vlorgue ! s'exclama le duc de Romèc, suivi par la plupart des nobles.
-Vraiment ? fit la reine. Malheureusement Diana a brûlé son cadavre avant de venir.
-Nous ne nous abaisserons jamais à te croire !
Mais quelques personnes, notamment de vieux nobles qui occupaient déjà leur fonction avant la naissance de Vlorgue, avancèrent avec leur famille et vinrent s'agenouiller devant la reine avec respect.
-Traitres ! les insulta le duc de Romèc.
Quelques enfants et leur mère sortirent de l'ombre de leur mari ou père, et vinrent se poster devant la reine, Vanille et la majorité de ses sœurs présentes en faisaient partie. En voyant cela, les nobles opposants les huèrent et leur ordonnèrent de revenir immédiatement, sans succès. Le père de Vanille faillit faire une crise cardiaque, lui qui avait toujours eu pour peur de voir ses filles porter la honte sur sa personne.
-Lily, chuchota une sœur de Vanille à la seule sœur encore au côté de leur père. Viens !
Le vicomte attrapa le bras de la petite brune en lui lançant un regard d'avertissement. Mais en voyant la haine dans ses yeux, la dénommée Lily parut préférer rejoindre ses sœurs que rester avec son père qui la méprisait, ce qu'on pouvait comprendre. Elle se dégagea du bras du vicomte et courut s'asseoir à côté de Vanille alors qu'il lui ordonnait de revenir.
-Bizarrement, je savais exactement qui allaient rester fidèles à Vlorgue, dit la reine Lora. C'est facile à deviner : les plus idiots et ceux qui lui faisaient le plus de lèches-bottes !
-Ne la laissons pas faire ! s'exclama le duc de Romèc. Gardes !
Il tenta d'ouvrir la porte, mais elle resta fermée.
-Alors occupons-nous d'elle nous-même ! dit-il en sortant son épée.
Les fidèles de Vlorgue l'imitèrent et se précipitèrent vers la reine et ses alliés. Mais des lianes surgirent du sol et empêchèrent une partie d'avancer d'avantage. Les têtes de morts qui décoraient la pièce furent projetées sur d'autres nobles, les enterrant presque. Alix et Conan ordonnèrent à tous de s'arrêter. Et Diana fit barrage à ceux qui avaient échappés aux pouvoirs des autres.
Il n'en restait plus que six : le duc de Romèc, un baron, trois vicomtes dont le père de Vanille, et un jeune comte. Diana vola par-dessus les nobles qui s'étaient ralliés à la reine et atterrit devant les six derniers adversaires non-neutralisés.
-Moi, Diana, incarnation de la Guerre, vous conseille de baisser les armes immédiatement car vous n'avez aucune chance contre moi.
-Tu crois vraiment qu'on va avoir peur de toi ? fit le duc.
-Non...fit Diana avec regret. Vous êtes idiots et les idiots me sous-estiment toujours.
Le duc l'attaqua tandis que les cinq autres tentaient de la contourner. Diana évita l'attaque du duc, le désarma, assomma deux vicomtes, jeta l'arme du comte à plus de dix mètres, fit tomber par terre le père de Vanille, et mit son épée sur la gorge du baron. Puis elle lui arracha son épée, l'expédia plus loin, et rassembla les six nobles en les poussant les uns sur les autres.
-In-car-na-tion-de-la-Guerre ! répéta Diana, l'air las, en détachant les syllabes. Je ne peux pas être battue ! Pourquoi est-ce que vous vous entêtez tous à ignorer ce que je dis ?
Luna s'avança et des lianes vinrent ligoter les nobles. La reine se mordillait le pouce droit, comme si elle ne se souvenait plus exactement du comportement à avoir pour la suite des évènements.
-Vous, dit-elle aux nobles agenouillés devant elle, je vous convoque demain pour parler de tout ça. Vous pouvez rejoindre vos chambres, Airy va vous accompagner pour qu'aucun valet ne vous arrête.
Airy, tout content de se voir confier une mission, se détacha du groupe d'adolescents et fit signe de le suivre. Quand ils furent partis, la reine se tourna vers les nobles qui restaient, ceux qui avaient refusé de la rejoindre.
-Quant à vous, je vous retire vos titres et fonctions. Vous serez jugés plus tard. En attendant, vous irez séjourner dans la magnifique prison que Vlorgue avait construite pour ses prisonniers. Conan, à toi de jouer...
-Nobles ! s'exclama Conan en mettant le plus de magie dans ses paroles. Venez avec moi sans montrer le moindre signe de résistance ! Se battre ne sert plus à rien !
Les lianes libérèrent les nobles qui se redressèrent et suivirent Conan à l'extérieur de la salle.
La reine s'adossa au mur et soupira de soulagement. Puis elle regarda la salle et grimaça :
-Il faudra refaire la décoration...
-C'est sûr, fit Luna. Je peux m'en charger, si vous voulez !
Mais la reine n'eut même pas le temps de répondre que la jeune fille avait déjà claqué des doigts. Tous les crânes s'envolèrent et se désintégrèrent. Les murs se recouvrirent d'herbes et des rosiers grimpants s'enroulèrent autour des piliers. Des fleurs poussèrent sur les lustres, deux grands arbres poussèrent de part et d'autre de la porte d'entrée, les rideaux prirent une couleur verte, et les trônes furent recouverts d'un beau bois où des motifs de fleurs et d'animaux étaient sculptés.
-Tadaaaam ! fit Luna en ouvrant grands les bras.
Tout le monde la regardait avec de grands yeux, mais la jeune fille avait l'air trop contente d'elle-même pour s'apercevoir qu'ils étaient tous étonnés.
-Pas mal, hein ? dit-elle.
-C'est sûr que c'est beaucoup plus joli, d'un coup...fit Lora. Mais ça va demander de l'entretient...
-Mais non ! assura Luna. Ce sont mes plantes, elles sont magiques. Elles ne bougeront pas et vivront en tirant l'eau dont elles ont besoin directement de l'air !
-Ça existe ? s'étonna Dacien.
-La magie peut tout faire, que veux-tu... fit Max.
La reine se laissa tomber sur son trône et suivit la courbe d'un pétale sculpté du bout du doigt. Au même moment, Sage, Gloria, Fred, Alphonse, Ismène, Aria et quelques valets entrèrent.
-Vous voilà ! s'exclama Isaac en se précipitant vers sa cousine pour la serrer dans ses bras. Alors ?
-Le troll fuit vers les grandes plaines, dit Aria. Nous l'avons laissé s'échapper après l'avoir blessé suffisamment. Je me suis dit qu'il ne fallait pas que je le tue aujourd'hui...
-Pourquoi ? demanda Dacien.
-Car, il y a deux mois, j'ai vu un présage dans le vol de Misti qui signifiait qu'un monarque allait mourir aujourd'hui. Seulement un, pas deux. Je voulais éviter que le troll meure et que Vlorgue s'en sorte. J'ai ordonné à l'un de mes elfes de suivre le troll pour le tuer demain, ou le capturer.
-Bonne décision, dit la reine.
-Jolie décoration, souffla Ismène en regardant autour d'elle.
-Luna vient de laisser libre cours à sa créativité, lui expliqua son cousin.
-Je me disais aussi que Vlorgue ne pouvait pas aimer ce style.
-Nous sommes prêts pour aller combattre Diego, dit Diana. Nous y allons ?
-Non, pas encore, répondit Lora. Nous venons tous de combattre Vlorgue et son diable. Nous devons nous reposer au moins quelques heures. Ensuite, Aria t'emmènera avec Ismène, Isaac, Adeline, Luna, Max, Dacien, Donan et Placidia chez les drows.
Elle parut hésiter, puis ajouta :
-Rodrigue viendra aussi.
-Pouvons-nous y aller aussi ? demanda Gloria en avançant de quelques pas. La sorcière d'Humalia est de notre famille.
-Je confirme, dit Alphonse. C'est mon arrière-grand-mère et l'arrière-arrière-grand-mère de mes neveux, ces trois petits.
Gloria rougit légèrement. Alphonse était leur protecteur mais les nommait rarement comme étant ses neveux, les enfants de sa sœur. Pour elle, c'était un grand compliment de la part de son oncle de rappeler leur lien de parenté.
-Eh bien, ils peuvent y aller, dit la reine. Mais j'ai besoin de toi, Alphonse.
-Pas de problème. Si j'ai bien compris ce que Placidia m'a dit, vous lui avez promis de lui donner une place au château si elle vous aidé. Je la rencontrerai donc bien assez tôt.
La reine Lora sourit et leur fit signe de la suivre. Elle demanda à des valets de donner une chambre à tous ceux qui n'en avaient pas, et de les réveiller dans quatre heures.
Puis tout le monde partit dans sa chambre respective pour dormir, sauf la reine qui devait régler le changement de couronne.
-Tout est bientôt terminée... s'encouragea-t-elle en entrant dans le bureau. Tout va bien se passer...
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