Chapitre 20 : la mort de Vlorgue
En entendant le nom de leur oncle, la fratrie de cœur poussa un cri de surprise, avant de reprendre à toute allure leurs encouragements en voyant Diana frémir. Luna, sans s'arrêter de puiser dans l'énergie de la reine Lora pour la transmettre à sa sœur, tourna la tête vers celui qui était censé être mort avant sa naissance, tué par le roi pour faire souffrir Placidia.
Apparemment, la voyante avait été plus maline que le roi, restait à savoir comment elle avait fait pour le tromper...
-Co...co...comment ? bredouilla Vlorgue.
-Traitre ! fut la seule réponse de Rodrigue qui bondit pour aller se planter devant lui.
Il le dépassait d'une bonne tête et le roi sembla soudainement bien plus petit, plus faible et insignifiant. Rodrigue le prit par le col et le souleva pour le plaquer contre le mur.
-Traitre ! répéta-t-il.
-C'est pas ce que tu crois, fit le roi qui commençait à manquer d'oxygène sous la poigne de Rodrigue.
-Ben voyons, souffla Placidia en recommençant à attaquer le diable maintenant que le roi était trop occupé pour les attaquer.
-Ah ouais ? fit Rodrigue. Ce n'est pas ce que je crois ? Alors explique-moi comment tu ne peux pas être un traitre après avoir voulu me balancer du haut d'une falaise pour ensuite me faire piétiner par mes propres chevaux ! Tu as voulu me tuer après quarante-sept ans d'amitié !
-Hum, l'amitié c'était juste trente ans, précisa Vlorgue avec une grimace en tentant de desserrer la poigne de Rodrigue. Ça n'a plus jamais été pareil après que tu te sois marié avec cette voyante ridicule ! C'est toi qui t'es laissé embobiner par elle et tu m'as ainsi trahi en premier.
Rodrigue le décolla du mur et le balança sur le bureau. Conan, qui avait récupéré un peu plus tôt le jeu d'échec, le posa plus loin.
-Premièrement, fit Rodrigue en s'avançant vers Vlorgue, Placidia n'est pas une voyante ridicule. Deuxièmement, tu viens de me rappeler quelque chose : Nous n'avons eu que vingt-sept ans d'amitié. Ça n'a plus jamais été pareil après TON mariage et les meurtres qui ont suivis que tu avais programmé ! Ce n'était pas MON mariage le problème ! Tu avais déjà trahi ma confiance quand tu as monté ce plan pour devenir le seul souverain d'Imline. Si Lora n'avais pas eu son pouvoir, tu l'aurais tué le même jour que les autres ! Placidia n'a rien à voir avec tout ça, elle n'a rien fait pour m'influencer afin que je m'éloigne de toi. Ce sont tes agissements qui ont tout fait ! Pourtant, je pensais que tu gardais toujours de la sympathie envers moi. On a quand même été élevé ensemble et nous n'étions jamais l'un sans l'autre. Et non ! Tu m'as sacrifié juste pour porter un coup dur à Placidia. C'est vraiment immature, Vlorgue, le sais-tu ? A cause de toi, j'ai dû rester caché durant DIX-SEPT ans sous ma forme de cheval ! Sais-tu comment c'est agaçant de devoir dormir dans de la paille et faire semblant d'être un gentil petit cheval juste un peu plus intelligent que les autres ?
Vlorgue tenta de reculer mais il était trop faible. Il tenta de lancer un éclair vers Rodrigue, mais n'y parvint pas. Son ancien ami le souleva dans les airs et le roi resta suspendu, soulevé par la magie de Rodrigue.
De leur côté Placidia, Isaac et Max affaiblissaient toujours le diable. Le retour de la voyante et de sa puissance dans le combat réduisait de plus en plus sa concentration. Diana, elle, le ressentait très bien. Le diable devait repousser d'avantages d'attaques extérieurs, en plus de celles intérieurs de Diana. Il ne prenait même plus la peine d'attaquer la jeune fille car la défense lui demandait déjà trop de force.
-Donnez le plus de forces possible à Diana quand je vous le dirais, dit Foulque à Luna et à la reine. Oh ! Et j'ai oublié quelque chose dans le plan. Luna, Diana pourra le contrôler pour l'empêcher de bouger, ainsi que lui demander de se tuer lui-même. Mais elle aura besoin de toi et de Max car un diable est beaucoup trop fort, même pour une personne comme elle. Tu devras lui retirer la vie au moment où Diana lui ordonnera de se tuer. Max, lui, devra aspirer les cendres du diable pour les jeter dans le vide afin qu'il ne puisse pas se reconstruire. Les enfants ! ajouta-t-il à la fratrie de cœur. Mettez toute votre magie en œuvre au même signal. C'est le moment d'en finir une bonne fois pour toutes.
Tout le monde approuva et Foulque commença à guetter le meilleur moment.
-J'ai une question... fit Luna à la reine. Vlorgue, tante Placidia, Rodrigue et vous, vous avez quel âge ?
-J'en ai cinquante-huit. Eux, ils en ont soixante-quatre.
-Mais pourtant vous semblez tous être dans la quarantaine à peine !
-C'est parce que nous avons des pouvoirs magiques, ou une force mentale puissante pour Vlorgue. Cela ralenti notre vieillissement. Foulque aurait pu être comme nous, mais son pouvoir est la sagesse, et les sages sont souvent vieux. De plus, il n'a jamais souhaité rester jeune.
-Ah, d'accord...
-Maintenant ! cria Foulque.
Alors que Luna puisait toute l'énergie de la reine Lora pour la projeter sur Diana, la fratrie de cœur utilisa toute la magie dont elle était capable et hurla en chœur :
-DETRUIS CE DIABLE !
Diana ressentit aussitôt l'effet de la magie sur elle. Son esprit se replia sur lui-même, puis balança le plus gros coup qu'elle put porter au diable. L'esprit de son adversaire vacilla sous l'effet de la surprise et Diana en profita pour rentrer à l'intérieur et s'en emparer. Le diable tenta de la repousser mais elle tint bon. Elle utilisa alors ses dernières forces pour lancer une attaque qu'elle gardait pour ce moment :
« Laisse-toi faire et meurt ! » ordonna-t-elle.
Au même moment, Luna utilisa ses pouvoirs pour affaiblir le diable en lui créant de larges blessures et, en même temps, attira à elle sa vie pour la lui retirer. La magie des deux sœurs combinées ne laissa aucune chance au diable. Il poussa un cri de rage et de terreur mais ne put bouger : Diana contrôlait son esprit.
Il se désintégra, laissant un nuage de cendres derrière lui. Max fit apparaitre une ouverture sur le vide juste au-dessus et, dès qu'elles furent aspirées, il la referma. Diana, dont la lutte mentale contre le diable et la peur de se faire détruire avant de réussir à le contrôler l'avaient épuisée, tomba en arrière et Donan la rattrapa avant qu'elle ne touche le sol. Dacien vint aussitôt l'aider et ils l'assirent contre le mur. Luna se précipita vers elle et la serra dans ses bras, lui donnant de l'énergie au passage. Tout le monde applaudit.
-Echec au roi... murmura Conan en se penchant sur l'échiquier.
Il enleva la reine et mit tous les pions blancs autour du roi noir. Tous, sauf le fou qui représentait Aria. Ce fou-là, il le mit à côté de l'échiquier, face à un fou noir représentant le troll.
Vlorgue lança un regard noir à Diana, puis à Placidia et à la reine qui s'approchaient de lui. Il tenta de bouger, mais la magie de Rodrigue le retenait toujours en l'air.
-Je t'avais dit que je gagnerais, fit la reine Lora.
Puis elle le gifla :
-Ca, c'est pour mes parents. Et celle-là, de la part d'Aria pour ce que tu as fait aux elfes ! ajouta-t-elle en lui en donnant une deuxième.
Placidia s'approcha à son tour et le roi gémit.
-Si tu pouvais plutôt me gifler sur l'autre joue, cette fois, dit-il.
Mais Placidia ne l'écouta pas et lui mit une baffe toujours sur la même joue qui commençait à devenir très rouge.
-Celle-là, c'est pour tes parents et ta sœur.
Puis elle lui en mit une autre :
-Et celle-ci, pour tous les gens que tu as fait souffrir par n'importe lequel de tes actes !
-Vipère ! cracha Vlorgue. Tu as toujours tout fait pour me pourrir la vie !
Il tenta de lui donner un coup de pied, mais elle esquiva.
-Tu en as fait de même pour ma vie, lui fit remarquer Placidia. Tu n'as jamais accepté qu'une voyante habite au château et soit toujours avec ta sœur. J'étais la seule personne plus puissante que toi. Avant, tu étais le seul à avoir une force mentale puissante et ça te démarquait. Tu ne savais pas que Rodrigue était un equo-garou, donc j'ai été la seule visée par tes insultes et tes mauvais tours. A neuf ans, tu n'étais peut-être pas mauvais, mais tu aimais déjà par-dessus tout qu'on te vénère et qu'on t'obéisse. En grandissant, ça n'a fait qu'empirer. Quand tu as tué ta famille et celle de Lora, tu crois que je n'avais pas remarqué que tu avais mis du poison dans mon verre au banquet ? Mes pouvoirs l'ont neutralisé mais tu avais dépassé les limites.
Elle reprit sa respiration et le regarda droit dans les yeux, ce qui le fit trembler.
-A ton avis, pourquoi c'est à ce moment-là que j'ai commencé à jouer à ton petit jeu, moi aussi, et à faire tout pour t'énerver ? continua la voyante. Donc, oui, c'est moi qui détournais l'argent des impôts. Oui, c'est moi qui envoyais des lettres aux nobles qui te servaient où « tu » leur disais que tu leur promettais une fortune s'il t'envoyait des chats par centaines. En effet, je savais que tu en étais affreusement allergique et ça a été très marrant de te voir aussi malade durant l'année qui a suivie. Ensuite, oui, c'est moi qui remplaçais des fusils de chasses par des pétards à confettis. Oui, c'est moi qui annulais tes rendez-vous important. Oui, c'est moi qui m'amusais à mettre des sangsues dans ton vin. Oui, c'est moi qui avais lâché un sanglier enragé dans ta chambre, un soir de printemps, qui avait presque faillit te tuer. Oui, c'est moi qui organisais dans le secret des fêtes bruyantes juste en-dessous de tes fenêtres au milieu de la nuit pour t'empêcher de dormir alors que tu recevais des gens importants le lendemain. Oui, c'est moi qui ai fait encore toutes les autres choses, qui seraient trop longues à citer, pour t'énerver, te faire tourner en bourrique et te mettre dans des situations ridicules. Donc oui, j'ai tout fait pour te pourrir la vie, mais seulement parce que tu avais pourri et me pourrissait toujours ma propre vie depuis trop longtemps pour que je reste patiente et tranquille. Tout ce qui est arrivé est ta faute, Vlorgue. Tout ce que les gens ont fait contre toi est la conséquence de tes agissements. Tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même.
Elle s'arrêta et inspira un bon coup, puis expira lentement. Elle s'était déchargée de sa colère, depuis le temps qu'elle attendait ça... Et même si elle n'avait pas tout dit, ça l'avait calmé.
-Tu regretteras de m'avoir fait face ! lui dit Vlorgue en tentant de lui cracher dessus.
Rodrigue, qui s'était accoudé au mur pour regarder sa femme crier sur le roi, observa le cracha tomber ridiculement par terre. Il grimaça et se retint d'aller secouer son ancien ami pour lui apprendre à bien se comporter et à respecter les gens, surtout Placidia. Il vit du coin de l'œil ses neveux observer la scène avec curiosité. Diana, Luna et Max se tenaient côte à côté et regardaient Vlorgue avec mépris. Isaac et Foulque étaient assis contre le mur et attendaient que viennent le coup de grâce. Les autres observaient leur tante avec admiration, tout en lançant des coups d'œil à Rodrigue.
-Non, je ne vais rien regretter, fit Placidia. C'est fini pour toi, Vlorgue.
-Je te haïs ! hurla le roi qui devenait de plus en plus dément, en tentant de se défaire de l'entrave qui le retenait en l'air.
-Si ça peut te rassurer, c'est réciproque, dit Placidia en sortant de sa robe une longue dague.
La reine regarda l'arme avec dégout, mais eut un sourire complice.
-Pas cette dague ! s'écria le roi qui était de plus en plus affolé. Non, pas cette dague !
-Oh que si, fit la reine Lora. Tu as tué avec elle ma famille et la tienne. Meurs donc par la lame dont tu t'es servi pour arriver sur le trône d'Imline ! Placidia, à toi l'honneur...
-Echec et mat ! s'exclama la voyante en lançant la dague sur le roi.
La lame se planta dans son cœur. Vlorgue poussa un cri d'agonie et Rodrigue lâcha son emprise sur lui. Le roi tomba et s'écrasa par terre, où il expira dans un dernier souffle.
Sur l'échiquier, Conan déplaça la reine blanche et faucha avec elle le roi noir. Les blancs avaient gagné, les noirs avaient perdus. Le camp de la reine Lora gagnait, le camp du roi Vlorgue perdait.
-Le roi est mort... commença Rodrigue.
-Vive la reine, termina Placidia.
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