Chapitre 65: Keryna.

A peine avais-je réussi à entrer en contact avec Demyan que je me précipitaisen dehors du palais. Suran, qui ne me lachai plus d'une semelle depuis qu'il m'avait ramené dans la chambre, tenta de m'arrêter. Mais mon bonheur me faisait pousser des ailes.

— Demyan est là! m'écriai-je en me dégageant, un rire s'échappant de ma gorge. 

Il leva les yeux au ciel, puis je me mis à courir comme rarement auparavant. Je traversai tout le chateau, les jardins ensuite, et je le vis. Son visage était caché sous une capuche mais je le reconnus immédiatement. Je m'arrêtai net, une main sur la bouche, les larmes débordant déjà sur mes joues. Il était là. Enfin. 

De nombreux Sans-Pouvoir étaient aux alentous et je ne voyais pas vraiment comment je pourrais le faire rentrer. Il me fallait de toute urgence l'aide de certains Scintillants. Tout d'abord, Yla, qui creera une brèche dans le dome, puis Hox, qui pourra paralyser les Sans-Pouvoir pendant que Demyan entrera. 

Alors malgré mon envie irrésistible de me précipiter vers lui, je rebroussai chemin afin d'aller les chercher. Hox patrouillait dans le jardin, le regard hagard, lorsque je le trouvis. 

— Reste-là, lui lançais-je. J'aurais besoin de toi  bientôt, je vais juste chercher Yla! 

Je repris ma course sans même me retourner vers lui. Yla, quant à elle, devait être auprès de Pol. J'eus un pincement au coeur en pensant à lui, mais je secouais la tête pour ne pas y penser. Ce n'était pas la peine que je m'obscurcisse davantage l'esprit pour l'instant. 

Arrivée dans la chambre, je vis ma tante assise à côté de lui, lui prenant la main. Mon entrée la fit sursauter, je n'avais même pas pris la peine de frapper. Elle fronça les sourcils. Je repris mon souffle quelques secondes, puis un sourire traversa mon visage. 

— Demyan est là, il est vivant, m'exclamai-je, ne pouvant contrôler ce bonheur plus longtemps. 

— Keryna, ma chérie... On en a déjà parler. 

— Il est juste derrière les jardins, je l'ai vu! 

Un instant, ses sourcils se relachèrent. Elle envisagea une seconde que je pouvais ne pas être folle. 

— Arrête de réflechir et suis moi, on doit le faire entrer. Si ce n'est pas vrai tu auras le droit de me traiter d'idiote autant que tu veux, mais là on doit y aller, crois-moi. 

Après un soupire, elle vint me prendre les deux mains, puis me fit un signe de tête qui signifiait que nous pouvions y aller. Je la remerciai d'un sourire puis me remit à courire, ne m'occupant à peine d'elle qui me suivait tant bien que mal. Arrivées aux jardins, Hox m'interrogea du regard. 

— Demyan est là, lui dis-je. Je n'ai pas le temps de t'expliquer pourquoi mais on doit aller le chercher. Je veux que tu paralyses tout ceux qui seront aux alentours, tandis qu'Yla ouvrera la glace. Compris?

— Non. C'est trop dangereux princesse, je peux pas te laisser faire des conneries pareil, répliqua-t-il. Ton petit copain, s'il est bien en vie, va s'occuper de se cacher en attendant que les choses se tassent. 

— Je t'emmerde Hox, je vais le faire entrer que tu le veuille ou non. 

— Ce n'est vraiment pas correcte comme langage pour une princesse... 

— Tu voudrais pas être sérieux pour une fois? 

Il soupira avec un rictus, visiblement satisfait de m'avoir mis en rogne. Il haussa ensuite les épaules. 

— Comme tu veux, tu pourras t'en prendre qu'à toi-même si ça dégénere. Ca fait dix-huit ans que je n'ai pas utilisé mes pouvoirs, je n'en ai plus la maîtrise totale, et tu le sais très bien. 

— Je prends le risque. 

Je n'avais pas le temps de parler plus longtemps, ma décision était prise. La seule chose que je voulais était de revoir Demyan. Alors sans un dernier regard pour Hox, je pris la direction de la sortie pour rejoindre les remparts. 

Lorsque que notre trio s'approcha du dôme de glace, des cris commencèrent à fuser. Les insultes, les menaces me parvenaient à peine, tellement j'étais heureuse d'apercevoir le doux visage de celui que j'aimais. Puis soudainement, je vis le visage de Pira à côté. 

La colère monta et irradia ma poitrine, tandis que je tentai de ne rien laisser paraître en serrant les poings. Comment osait-elle venir ici? Comment Demyan avait bien pu accepter cela?  C'était de sa faute s'ils avait failli mourir! 

Puis Demyan me sourit, et alors toute ma haine s'évanouit. Je ne pensais plus qu'à une chose: me blottir dans ses bras. Je déposai ma main contre la paroi et il fit de même. 

— On va te faire rentrer. Toi et seulement toi, lui dis-je sans un regard pour Pira.

Il acquieça, se doutant probablement que je n'aurai pour rien au monde laisser entrer sa Seconde. Je me tournai ensuite vers Hox et Yla. 

— Prêt? leur demandai-je. 

C'est alors que tous se figèrent autour de nous, puis la glace commença à fondre entre Demyan et moi. L'émotion s'empara de moi et les larmes se remirent à couler sans que je ne m'en rende compte. Et enfin, il traversa le dôme. 

Il se précipita sur moi et m'enveloppa de ses bras, tandis que je continuais de pleurer contre lui. Je ressentis en cet instant un excès de bonheur, une joie intense comme je n'en avais jamais ressentie. Je me sentais si légère. Je me rendais compte de la chance que j'avais, la chance d'être dans les bras de celui que j'aimais. Celui avec qui je me sentais entière. Celui avec qui je pouvais parler de mes doutes, de mes peines, de mes joies. Celui pour qui j'aurais pu donner ma vie. 

Je n'aurai pu dire combien de temps nous étions rester lovés l'un contre l'autre, sans bouger ni parler. Nous souriions tous deux, nous pleuriions tous deux, mais aucun n'aurait pu décrir avec précision ce bonheur intense dans lequel nous étions plongés. J'avais cru le perdre, j'avais cru ne jamais le revoir. Je ne pensais plus entendre sa voix, toucher sa peau, me blottir contre lui... Et là, en cet instant, nous n'étions plus que deux dans l'univers. Le reste n'existait plus. 

— Ca va aller, me dit-il en carressant mon dos. Tout va bien, je suis là maintenant, on va bien tous les deux. 

— Je t'ai cru mort, sanglotai-je en enfouissant ma tête contre son torse.

Il releva ma tête et vint déposer un baiser sur mes lèvres. Sa main carressa ma joue, essuyant les larmes au passage. 

— Je suis là maintenant, et je vais bien mon amour.

Ce surnom me fit rire autant qu'il me combla de bonheur. Je voulais que cet instant dure toujours, qu'il se prolonge jusqu'à l'infini... Mais il fut un moment où je crus tomber de fatigue. Nous avions vécu bien trop de choses en une seule journée, nous avions besoin de repos. 

— Allons dormir, lui soufflai-je. 

Il déposa un baiser sur mon front puis acquieça. Hox et Yla étaient déjà partis, et autour de nous les Sans-Pouvoir n'avaient pas repris connaissance après cette paralysie forcée. Demyan prit ma main et m'entraîna vers le palais. Nous traversions alors les jardins, toujours collés l'un à l'autre, puis nous arrivâmes dans sa chambre. 

Je me laissai tomber de fatigue sur son lit. Il vint me rejoindre quelques secondes plus tard et il passa son bras autour de ma taille, le visage contre ma nuque. Je me mis à sourire, plus qu'heureuse de le sentir de nouveau près de moi. Je n'aurais jamais pu supporter de le perdre. 

— Tu m'as vu dans l'autre monde? lui demandai-je dans le noir. 

— Oui, mais on parlera de tous ça demain. Dors maintenant. 

Et nous endormîmes l'un contre l'autre sans même nous en rendre compte. 


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