Chapitre 59: Keryna.

Suran voulut me parler lorsque je sortis de la cellule, mais je l'arrêtai d'un geste. J'avais besoin de quelques secondes pour me remettre de mes émotions. J'observai mes pieds durant un temps, les mains sur les genoux. 

— Keryna? me demanda mon frère d'une voix peu assurée. On a un problème. 

Je relevais la tête avec les sourcils froncés. Je le vis triturer ses mains, puis une grimace traversa son visage. 

— C'est à peine croyable, il vaut mieux que tu viennes voir toi même... 

Je sentis l'angoisse monter en moi, ne sachant pas à quoi m'attendre. Suran tourna les talons lorsque je hochais la tête et je le suivais ensuite. Il m'emmena vers une cellule vide, qui à première vue paraissait identique à toutes celles qui s'étalaient le long du sous-sol. Mais je vis ensuite une trappe en bois sur le sol, agrémentée d'un loquet en acier. Je me demandais en cet instant dans quoi allait m'embarquer Suran. Une salle de torture? Un musée d'instrument de torture? Venant de Rioz, je ne m'attendais pas à moins pire.

— Je viens juste de découvrir cet endroit et je n'ai pas su quoi faire, c'est pour cette raison que je suis venu te voir. Je n'ai prévenu personne.

Mon angoisse empira à ses paroles, et je dis essuyer mes mains moites et troublantes sur le tissu de mon pantalon. Suran ouvrit la trappe et je vis des escaliers, éclairés par une lumière bleutée. Il passa avant moi. Je me décidais ensuite à entrer malgré mes craintes et je regrettais aussitôt. Devant moi se tenait l'Horreur avec un grand H.

— Oh mon dieu... ne pus-je m'empêcher de dire dans un murmure, la main plaquée sur ma bouche.

Des elfes étaient enfermés par dizaines, dans des cages en verre qui pouvaient à peine contenir leurs corps. La plupart étaient recroquevillés sur mêmes. Ils étaient pâle, maigre, à moitié nus, n'avaient plus leurs ailes, et la vie paraissait les avoir quitté. Un sanglot se coinça dans ma gorge et je détournais le regard. Voilà où avaient disparus les Elfes. Egna avait raison, c'était bien les Sans-Pouvoir qui les avaient enlevé. 

Lorsque je relevais la tête, je me mis à chercher la sœur d'Egna du regard. Les battements de mon cœur s'accélérèrent à sa vue.

— ***! m'exclamai-je tandis que les larmes brouillaient ma vue.

Je courais vers la cage dans laquelle elle était enfermée et cherchais par tous les moyens de l'ouvrir. Elle paraissait scellée. Je sortis alors ma dague puis commençai à essayer de la briser avec des gestes secs, en vain. Suran arriva vers moi lorsque j'allais m'écrouler de désespoir.

— Arrête de t'acharner, je crois qu'il y a un bouton pour les ouvrir dans le fond. 

J'observais l'endroit qu'il me désignait puis, après avoir séché mes larmes, j'avançais d'un pas déterminé. La salle était tout en longueur, éclairée seulement par les une lumière bleutée et le verre des cages qui étaient luminescent. J'arrivais ensuite devant un tableau avec deux boutons. L'un indiquait "ouverture des cages", l'autre "ouverture du laboratoires". Mon estomac se retourna lorsque je compris ce que nos alliés avaient enduré: des expérience scientifiques. Je ne voulus pas y penser plus longtemps, nous avions des malades et blessés à soigner. 

Sans réfléchir une seconde de plus, j'actionnais donc l'ouverture des cages. D'un coup, les elfes ouvrirent les yeux, comme s'ils avaient été plongé dans un coma artificiel durant ces dernières semaines. Certains commencèrent à pleurer, à hurler, et leur douleur se répercuta au plus profond de mon être. Je tremblais de tout mon corps et ne pouvais plus bouger.  J'imaginais leur douleur d'avoir été amputé de ce membre qui signifiait leur appartenance à leur espèce.

Une fois le choc passé, je me ruais vers ***. Elle était complètement hébétée. Elle avait les yeux dans le vague, la bouche entrouverte et la tête à moitié penchée sur le côté. J'effleurai sa joue, mais elle n'eut aucune réaction. Pendant ce temps, Suran était partit cherché du renfort.

— ***, tu me reconnais? demandai-je à la jeune elfe malgré ma gorge nouée.

Son âme paraissait avoir été arrachée à son corps. Je la pris alors dans mes bras, son corps frêle contre ma poitrine. Elle était tellement maigre que je sentis à peine son poids. Je me mis à traverser la salle, donnant des coups d'épaules aux Scintillants qui me barraient le passage. Je devais mettre *** en sécurité le plus vite possible. 

Lorsque j'arrivais dans la chambre où je m'étais moi même réveillée, je fus soulagée. Je voulais avoir le temps de prévenir Egna, je ne pouvais pas envisager qu'elle tombe sur nous ainsi, elle en aurait été traumatisée.

Je déposai alors *** sur le lit et l'observai. Elle n'avait plus que de la peau sur les os, comme la plupart des Elfes que l'on avait retrouvé. Qu'avait bien pu leur infliger Rioz? Et puis surtout, pourquoi? Je ne comprenais pas ce qui l'avait amené à faire cela. 

Je pris la main de *** et mes yeux me picotèrent de nouveau. Je regardais ailleurs pour m'empêcher de pleurer, j'avais déjà versé trop de larmes ces dernières heures. Après lui avoir adressé un regard, je déposai un baiser sur son front puis partis rejoindre les autres Scintillants. Ils avaient besoin de moi et il fallait prévenir les Elfes qui nous avaient accompagné lors de la bataille. 

Lorsque je revins dans la cellule où ils étaient enfermés, je sentis mon ventre se crisper. Heureusement, Suran arriva et mon soulagement fut grand.

— Comment ça va? me demanda-t-il en prenant mon visage entre ses mains.

— J'ai du mal à encaisser... Mais ça va aller, il faut que je retrouve Egna. 

Il hocha la tête puis me lâcha. Je l'embrassai alors sur la joue, et je partis ensuite retrouver mon amie. 

Je la trouvai dans la grande bibliothèque, perchée sur une échelle à trois mètres du sol. Malgré les circonstance, je ne pus m'empêcher d'admirer les lieux avec des yeux ronds. Des milliers de livres s'étalaient sur d'innombrables étagères. Tous étaient soigneusement rangés par couleurs, ce qui donnait un air d'arc en ciel à la bibliothéque. De plus, l'odeur des ouvrages emplissait la pièce, ce qui lui donnait toute sa magie.

— Oh, salut Keryna, me dit Egna en s'apercevant de ma présence, me coupant dans mon admiration. Comment va ton épaule? 

— C'est bon, je ne suis plus paralysée et elle ne me fait pas souffrir. Tu peux descendre s'il te plait, je dois te parler. D'ailleurs qu'est-ce que tu fais là? 

Elle soupira puis descendit sans me répondre. Une fois arrivée sur la moquette d'un rouge éclatant, elle eu un sourire triste et passa sa main dans ses cheveux noirs. 

— Je cherche ma sœur. Je suis certaine que les elfes sont ici, je ne vois pas ce qui aurait pu se passer sinon. 

J'ouvris la bouche pour lui annoncer que nous avions retrouvé ***, pourtant aucun son n'en sortit. Je me raclai alors la gorge.

— Elle était bien ici, lui dis-je d'une voix rauque. Elle est vivante mais ne réagit à rien pour l'instant.

Je vis ses yeux s'agrandirent et s'embuer de larmes, puis elle éclata en sanglot. 

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