Chapitre 58: Keryna

En arrivant dans la cellule de Rioz, je sentis mon corps se tendre. Il faisait froid dans les sous-terrains et l'odeur de renfermé me fit plisser le nez. Suran était toujours avec moi. Un garde m'ouvrit donc la porte puis j'entrais, tandis que mon frère m'attendait dehors. Cette cellule était la seule dotée d'une porte blindée, et elle était gardée par quelques Scintillants également par mesure de précaution. Même si je n'avais pas été là pour superviser les évènements, ils avaient tous suivi le plan à la lettre. Je leur en étais reconnaissante.

Lorsque j'entrai dans la cellule, je vis Rioz assis dans un coin, dans une position détendue. Je touchai instinctivement ma dague quand il croisa mon regard. Je cherchais une ressemblance avec Demyan, en vain. Rioz paraissait trop grand pour cet endroit si exigu. 

— A qui ai-je l'honneur? me demanda-t-il d'une voix sereine, comme si tout allait pour le mieux.

Je me contentais de lui sourire sans lui répondre. Puis pour la première fois, je tentais d'utiliser mon pouvoir sur lui, pensant à toutes les atrocités qu'il avait commise. Cela ne fonctionna pas. Je m'en doutais, mais j'eus tout de même un gout amer devant cet échec. Je n'étais pas patiente. J'aurais tellement aimé contrôler ma magie de suite, sans aucun effort. 

— Bon, ne faisons pas durer le suspense plus longtemps, déclarai-je avec un geste de la main. Je suis Keryna d'Ivraska, fille de Keret et de Liosa.

J'observais son visage en l'attente d'une réaction. Il se contenta pourtant d'inspecter ses ongles avec une moue intriguée. Il releva ensuite la tête en me souriant franchement, comme si je venais de lui annoncer une bonne nouvelle. Sa réaction me laissa perplexe. Demyan m'avait prévenu par rapport à son tempérament dédaigneux, mais je ne m'attendais tout de même pas à cela.

— Une petite princesse, rien que ça. Enchanté de vous rencontrer, jeune demoiselle, vraiment.

Je haussais les sourcil en serrant les mâchoires, tentant de ne pas m'énerver. 

— On ne joue pas Rioz. Et si vous le voulez vraiment, sachez que je vais vous apprendre la défaite. J'ai gagné la première bataille et ce ne sera pas la dernière.

Ma voix était assurée, je me félicitais de ne pas avoir flanché. Le roi eu un rire sans joie qui secoua son corps. 

— Qu'attends-tu de moi, petite?

Je serrais mon poing autour de ma dague pour me concentrer sur autre chose que les surnoms réducteurs qu'il venait de me donner.

— Je veux que vous capituliez. Vous n'aurez pas le choix, je vous assure, quelques heures de torture et vous me supplieriez de vous achever. 

— De la torture venant d'une si jolie femme? Vous sembler si innocente, vous me décevez, répliqua-t-il en riant. 

C'était un jeu pour lui. On se renvoyait la balle comme dans ces jeux stupides auxquels jouaient les jeunes ivraskiens. Il paraissait vraiment s'amuser, même si ce n'était pas mon cas. Cet homme me donnait envie de vomir, je ne voulais pas rester avec lui, pourtant je savais que je gagnerais. Rioz était un homme dur, qui ne laissait rien passer, mais je savais qu'il ne résisterait pas à la torture. Il avait trop peu d'estime pour son peuple. Et puis même s'il l'avait fait, cela n'aurait rien changé. Nous avions réussi à conquérir le palais et plus rien ne pourrait nous y déloger. Les rôles s'étaient enfin échangés.

— J'ai besoin de votre capitulation, votre peuple vous suivra, car vous êtes une personne incarnant le courage. Si vous n'avez pas résisté, ils sauront qu'eux non plus ne le pourront pas.

J'avais décidé de lui dire la vérité, il devait sans doute s'en douter, alors autant être franche avec lui. 

— Je vais vous expliquer ce que je vais faire, lui dis-je ensuite en le regardant de toute ma hauteur. Je ne contrôle pas encore mes pouvoirs, pour l'instant je ne sens rien, mais ça va bientôt venir. Je viendrais donc vous voir plusieurs fois par jour et tenterais cette nouvelle magie sur vous.

J'avais eu cette idée il y a quelques jours, ravie à l'idée de la peur qui se lirait dans ses yeux chaque fois que je viendrais. Je n'étais pas méchante en temps normal, je préférais éviter la violence, mais pour Rioz je ferais exception à la règle. Adieu la méthode douce, je voulais le voir souffrir. Pour les Scintillants. Pour Demyan. Que cet enfoiré paye pour tous les crimes qu'il avait commis, qu'il regrette d'avoir frappé son propre fils. 

Mais mon annonce n'avait pas eu l'air de lui faire peur. Il avait conservé son petit sourire et j'eu soudainement envie de le frapper. Je m'approchais de lui, dague en main, vérifiant d'un coup d'œil ses mains attachées derrière son dos.

— Je vais tellement te faire souffrir que tu en oublieras ton propre nom, murmurai-je à quelques centimètres de son visage. 

Enfin, son sourire disparu. J'en fus satisfaite. Je tournais donc les talons, puis sortais sans aucun regard en arrière. 

— C'était toi la sale campagnarde qui tournait autour de mon fils, non? m'interpela-il finalement lorsque j'atteignais la porte. Ce connard t'as aidé, c'est à cause de lui que je suis là, il a trahit son peuple.

Mon cœur bondit et je me retournais en même temps, me dirigeant d'un pas déterminé vers lui. Je mis ma dague contre sa gorge, puis toute arrogance disparut de son visage, je crus même le voir pâlir. 

— Ne redites plus un seul mot de travers sur lui ou je vous égorge. Il a sauvé son peuple du monstre que vous êtes, vous ne valez rien à côté de lui. Vous êtes une telle ordure.

Mon visage était crispé et mon souffle haché par la haine. Nous nous regardions quelques secondes dans les yeux, puis je retirais ma dague tandis qu'il déglutissait.

Cette fois-ci, je ne me retournai pas lorsque je voulus sortir. 

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