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Des nœuds et des sucettes

Parmi les très nombreuses possibilités de nouage, certains critères permettent d'évaluer quel nœud convient pour quel usage : la solidité, sa capacité à ne pas glisser, la possibilité de le défaire et la facilité de nouage. La matière avec lequel le nœud est fait, a aussi son importance.

C'est pour cela que Livi avait attrapé toute ce qui lui passait sous la main pour former des nœuds. Pour tout dire, elle avait fait les nœuds il y a plusieurs mois, quand elle avait lu sur le vamp'mag que les vampires étaient obligés de défaire chaque nœud qu'ils rencontraient. C'est d'ailleurs à cause d'eux que de nombreux savoir-faire tel que les nœuds de lacets, de cravate, de rideaux et les rubans n'existaient plus maintenant. À la place les humains devaient mettre des scratchs, ou des pinces. Les seuls nœuds qui subsistaient encore était ceux des cheveux emmêlés.

— À quel moment as-tu fais ces nœuds ?

— Longtemps.

Et c'était vrai, Livi attendait juste le bon moment pour les sortir. Sa réponse brève attisa davantage la curiosité du sénéchal qui la regarda suspicieusement. Il ne lui fit cependant aucune remarque. D'un sourire amusé, il s'accroupit et dénoua le premier nœud. Livi regarda faire en caressant les poils du chat confortablement installé sur ses cuisses.

Aucune parole ne fut échangée pendant que Lucan défaisait tous les nœuds, Livi sourire tout de même en le voyant grogner face à un nœud plutôt coriace. Lorsqu'ils furent tous défait, Lucan mis tous les morceaux de matières à la poubelle débordantes de mouchoirs et s'assit en tailleur face à elle. Surveillant ces gestes, la blonde le fit fouiller sa poche et en sortir une sucette qu'il fourra dans sa bouche. La première ne dura pas longtemps, la salle fut rythmée par les craquements du vampire qui, une fois le bâton vide, sorti une deuxième sucette de sa poche. Cette fois-ci il la lécha longuement, prenant soin d'apprécier le gout fraise-hibiscus.

Livi fut la première à craquer en toussant.

— Qu'est-ce que tu veux, fit-elle d'une voix enrouée.

Décidément ce rhume était plus coriace que ce qu'elle avait déjà connu. Cela faisait à moins de 20h qu'elle commençait à être malade et elle avait l'impression d'avoir déjà atteint les 40°C. Pour tout dire son nez était maintenant complètement bouchée et coulait sans cesse, quant à sa gorge, celle-ci semblait comme anesthésié bien qu'elle pouvait sentir cette démangeaison intérieure.

Livi avait espéré que par son état de dhampire, ce rhume ne soit qu'un lointain souvenir en quelques heures, mais elle c'était trompée. Non, elle n'avait pas hérité de la miraculeuse guérison vampirique. En même temps elle si attendait quelque part...

— Tu as pleuré ? Demanda Lucan.

— Tu bois les chutes du Niagara ?

Il pencha la tête sur les côtés. Non il n'avait jamais bu les chutes du Niagara... Quoique... Il y avait bu la tasse un jour alors est ce que ça comptait ?

—  C'édait l'édat de bes joues. Et de bon dez aussi.

Lucan rigola en entendant Livi parler avec son nez bouché. En même temps, il s'en était douté en l'entendant renifler et en voyant les mouchoirs qui emplissaient le fond de la poubelle. La période de rhume est un instant où les boîtes de mouchoirs, les médicament et les tisanes sont à leur summum de leur célébrité. C'est aussi là où les "ma", "va et "pas" deviennent "ba", les "non" et "ton" se transforme en "don". Bref, c'était drôle à entendre.

— Tu veux un câlin ? Plaisanta-t-il.

— Je beux une sucedde, renchérit-elle.

Il en sorti deux de sa poche.

— Sun berry ou Ice grille ?

Elle se serait bien laissé tenter par un Ice grille, mais vu son état une sucette plus chaleureuse serait la bienvenue.

— Sun Berry.

Il la lui tendit, elle ouvrit la bouche et il y posa la sucrerie.

— Ça va ? Demanda-t-il.

Livi confirma de la tête avant de lui pincer la joue.

Le contacte entre sa main et la peau du vampire le fit froncer des sourcils. Il posa alors sa main sur son front un peu trop chaud à son goût. Il retira la friandise de sa bouche.

— Tu es malade.

Elle opina.

— C'est à cause des petits ?

Elle acquiesça.

— Les paillettes aussi ?

Elle approuva.

— Je vois, articula-t-il avant de se lever du sol.

Livi lui attrapa durement son avant-bras. Elle se stoppa un moment en cligna plusieurs fois des cils. Elle avait l'impression que ce geste lui avait demandé un effort sur humain.

La jeune femme respira profondément avant d'adresser un lourd regard au blondinet. Elle savait pertinemment que s'il sortait d'ici, il allait revenir avec l'anguille royale.
Et elle ne voulait pas le voir. Pas maintenant.

— Tu sais que je n'ai pas le choix. Repose-toi ...

Elle secoua négativement la tête.

— Oh que si vous allez aller au lit "Bademoiselle", fit-il en l'imitant. S'il le faut je t'y attache, et si je ne le fais pas Jagger s'en chargera.

Il reprit un visage sérieux.

— Tu devrais vraiment te coucher. Tu n'es malade que depuis ce soir, et je te trouve particulièrement mal en point.

Il posa sa main sur son cou pour prendre sa température. Oui elle était bien trop chaude pour un début de rhume.

— Fais "ahhha".

Elle ouvrit la bouche et il sortit un stylo de lumière de la poche de son veston pour observer sa gorge. Elle la referma ensuite et souleva le menton pour lui donner accès à son cou qu'il tâta avant de prendre son pouls.

— Tu as besoin de te reposer. Ça me briserait les coquillettes si tu meurs simplement à cause d'un rhume.

— Bersonne ne beurt d'un simble rhube.

— Détrompe toi. Il n'y a pas vraiment d'épidémie de rhumes car il a plus de 150 formes de virus, et circulent pas vague. Différentes formes peuvent se côtoyer en même temps, contre lesquels l'homme ne possède pas d'immunité croisée. Une personne peut parfois enchaîner plusieurs rhumes à la suite sans le savoir, et oui même à notre époque, l'être humain peut toujours mourir d'un simple rhume. Il n'y a pas que le progrès qui évolue Li'.

Ces derniers temps ce petit surnom lui échappait souvent.

— Hum...

Elle approuva négligemment. Lucan le ressenti dans sa voix. Il secoua la main devant son nez, mais aucunes réactions se fit de sa part. Le regard de Lucan suivi celui de Livi, elle fixait un point sur le mur opposé. Il s'accroupit une nouvelle fois devant elle.

— Livi ?

Elle ne réagit pas.

Il se passait quelque chose d'étrange, d'anormale, et elle ne serait dire pourquoi. La jeune femme se sentait soudainement mal à l'aise, même plus, elle commençait à transpirer. Lucan comprit vite que quelque chose ne tournait pas rond.

Sa respiration se faisait plus lourde, un froid énigmatique s'empara d'elle et elle commença à frissonner puis à grelotter. Sans perdre de temps Lucan s'était emparé de sa couverture, l'enveloppa avec. Sa tête reposa sur le mur et elle se senti mieux quelque instant. Alors que son corps se réchauffait, le sénéchal s'accroupit de nouveau devant elle et posa sa main sur son épaule en la secouant légèrement.

— Livi tu m'entends ?

— Je ne me sens bas bien Lu'...

Elle n'en dit pas plus, puisque son corps lâcha en s'écroulant sur le chat qui grogna.

— Putain !

Ce fut les derniers mots qu'elle entendit.

Quand ses paupières s'ouvrirent la première chose qu'elle vu fut la figure de Lucan, Joris et Jagger, penchés au-dessus de sa tête. À quel moment étaient-ils arrivés au juste ?

— Qu'est-ce que bous fichez... bous boulez ma bhodo ou quoi ? Fit-elle en grimaçant

— Oui elle va bien, souffla Joris.

— Quoi ?

Livi ne comprenait rien.

— Que s'est-il passé ? fit Jagger.

— Elle s'est mise à frissonner puis elle a perdu connaissance pendant une fraction de seconde, juste le temps que tu arrives.

— D'accord, articula Jagger, je m'en occupe. Retourner à vos affaires, fit-il à l'intention de Joris dans la pièce et des jumelles qui espionnaient depuis le couloir. Lucan va voir Aldric, il me semble qu'il a besoin de toi, passe voir Rosario aussi.

Le sénéchal hocha la tête et la chambre retrouva son calme. Encore dans les vapes elle ne senti pas son bras se glisser sous ses jambes et dans son dos. Facilement, il la souleva et sorti de la bulle sous les regards des vampires qui chuchotèrent dès que la porte fut fermée.

Livi reprit pleinement connaissance lorsqu'ils franchirent le long couloir principal et gesticula entre ces bras. Jagger lui ordonna de se calmer.

— Lâche boi je beux barcher, grogna-t-elle.

— Très bien.

Fermement, le souverain stoppa sa marche et la posa au sol. Livi s'accrocha au mur et fit une dizaine de pas lents et tremblants avant de s'effondrer.

— Je croyais que tu tenais debout, rigola-t-il.

Son rire s'étrangla toute fois dans sa gorge en ne la voyant pas répondre. En fait la jeune femme ne bougeait plus du tout et maintenant il pouvait parfaitement entendre sa respiration lourde.

— Livi ?

Elle c'était de nouveau évanouie, juste quelque seconde, puis qu'elle sembla se réveiller lorsqu'il vint à sa rencontre. Ce n'était pas normal. Ses courts moments d'absence n'étaient pas normaux. Elle s'appuya contre le mur, mais Jagger en décida autrement.

En ignorant ses plaintes, elle passa le reste du trajet dans ces bras, jusqu'à ce qu'elle soit posée dans son lit. Il c'était ensuite mis à faire les cent pas dans la pièce. Il n'écouta pas ces mots, trop occupé à parler psychiquement avec Guiseppe, puis à donner des ordres aux autres vampires qui essayaient de le joindre depuis un moment.

Le médecin ne tarda pas à frapper à la porte et sous l'œil du roi, il s'afféra à sa tâche méticuleusement. Le vampire quitta la chambre avec un diagnostic certain : ce n'était qu'un rhume coriace que le nouveau corps de la blonde avait du mal à éliminer. Livi avait simplement besoin de repos maintenant, les médicaments feraient le reste.

Le roi resta silencieux jusqu'à la fin de ces mots où il hocha la tête avant de le congédier d'un mouvement de la main. Il revint ensuite s'assoir au bord du lit et resta là jusqu'à ce qu'elle s'endorme pour de bon. Il quitta alors la couche pour retrouver la chaise de son bureau en désordre. Il faut dire que le dossier qu'il traitait actuellement le donnait du fil à retordre. Jagger avait dû fouiller dans pas mal d'anciennes affaires classées, sans pour autant trouver ce qu'il cherchait. Il avait fini par se rendre dans les archives mais ce qu'il voulait trouver resta un mystère. Il n'avait pas avancé depuis deux jours, faisait du sur place, et cela l'irritait.

À la suite d'un grognement, il classa les feuilles éparpillées sur le bureau dans les bons dossiers, rendant ainsi le planché propre.

Il posa alors un coude sur celui-ci et observa la carte de surveillance. Le couple Del Lado se trouvait dans la salle n°7 et Lucan se trouvait avec eux. Guiseppe avait fait un détour par sa serre, les membres de l'équipe 1 entrainaient les membres de la garde dans la salle d'entrainement, Mike se trouvait sur la plateforme avec Otis, Vasco et Trevor était dans leur bureau, et Aldric lui venait juste de croiser Swam.

Oui juste croisé. Le prince d'Amérique avait tracé son chemin comme une flèche, sans même le saluer.

Ses pas fermes reflétaient sa colère, sa frustration et bien d'autre sentiments qui s'entremêlaient. Le sentiment de culpabilité est un aiguillon puissant, un sentiment de compassion à l'égard de la détresse et du malheur que l'on a causé. Néanmoins on lui avait toujours dit que si ses remords sont vrais, son cœur n'est plus coupable.

Swam n'avait rien fait, mais ça Livi l'ignorait. Aujourd'hui il n'avait plus à gagner son cœur simplement, non il devait véritablement se battre pour l'obtenir de nouveau. Il avait perdu la confiance de Livi tandis que Jagger lui le gagnait petit à petit.

Pourquoi ? Parce qu'elle croyait qu'il l'avait laissé tomber. Le souvenir de cette journée de Livi qu'il venait de voir, n'avait rien à voir avec le sien. De plus il avait vu quelque chose qu'elle ignorait.

La haine est la tristesse accompagnée de l'idée d'une cause extérieur. Ce jour-là, lors de ce souvenir, une ombre souriait dans l'obscurité, visiblement fière de son coup. Et ce n'était pas la première fois qu'il la voyait. Enfaite, il pensait même s'en être débarrassé à jamais. Pourtant cet être était de retour et avait gâché sa relation.

Ne dis ton pas que sur les ailes du temps, la tristesse s'envole ? C'est tout ce don Swam avait besoin, de temps. Ils avaient tous les deux été piégés et Livi, humaine à cet instant, ne s'en était pas aperçue.

L'amour rend incroyablement niais ; mais qu'est-ce que ça fait du bien...


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