Chapitre 4

Changbin sentit le sourire de Chan fleurir contre son cou, avant d'être soudain soulever au-dessus du sol, ventre sur l'épaule du brun. Il faillit gémir quand une tape sur les fesses fut frappée, mais se retint de justesse, préférant reporter son attention sur le sol qui se déplaçait sous ses yeux. Il se mit à râler en frappant son dos, presque honteux de sa posture et de s'être fait porter avec autant de facilité, et Chan jugea bon d'ajouter sur un ton amusé :

« Je t'emmène dans ma chambre, c'est plus confortable sur un lit que dans la cuisine. Même si des deux, ce serait bien plus sexy de te sauter pendant que tu fais la vaisselle~

— Pose-moi tout de suite ! Je sais marcher, je te signale ! »

Aussitôt dit, aussitôt fait. Changbin fut déposé presque avec douceur dans le lit douillet de la chambre d'amis, et son chemisier, son short et son caleçon volèrent pour atterrir dans un coin de la pièce. Face à lui, Chan le dominait de sa hauteur, une lueur luxurieuse luisant dans ses yeux. Il se pencha au-dessus de lui en écartant doucement ses jambes, et plongea son regard dans le sien.

— Changbin, je veux que tu me dises absolument tout, d'accord ? Si tu as mal, si ça te fait du bien, ou même si tu veux arrêter.

— Je sais, t'inquiète...

— Non, c'est important. Si tu me dis stop, j'arrête tout immédiatement.

Le noiraud, surpris de son sérieux, se contenta de hocher la tête en une moue compréhensive, signe que le message était passé. Il n'avait pas l'habitude de verbaliser ses émotions, mais il comprenait qu'en cet instant, c'était plus que nécessaire.

Chan se releva pour aller prendre quelque chose dans son sac, et revint avec un sachet carré en plastique et une petite bouteille transparente. Face à son regard interrogateur, le brun sourit légèrement et montra ses possessions :

— Ce truc, c'est un préservatif. C'est pour te protéger d'une quelconque maladie sexuellement transmissible. Être clean ne signifie pas qu'on ne peut rien avoir, et ça permet aussi d'empêcher le sperme de rentrer en toi ou même de déborder. Et ça, c'est du lubrifiant, pour faciliter la pénétration. Sans ça, tu risques une déchirure, ou même d'avoir mal, et moi aussi.

— Oh... c'est toi le connaisseur, je te laisse faire. »

Changbin le vit déposer une bonne dose de lubrifiant sur ses doigts, les frottant quelque peu, avant d'amener sa main vers son postérieur. Après ses indications, il se fit violence pour se détendre et posa sa tête contre un coussin.

Il sentit un doigt tournoyer autour de son anus, avant de s'enfoncer doucement après avoir été prévenu. Il inspira profondément, son corps cherchant à ne pas rejeter ce doigt qui plongeait et qui remuait en lui.

« Comment tu te sens ? Demanda Chan en venant voler un baiser sur ses lèvres.

— C'est... bizarre. J'aime pas, mais je déteste pas non plus.

Changbin avait du mal à concevoir que se faire pénétrer l'anus comptait parmi les nombreuses stimulations sexuelles existantes.

Encore plus lorsqu'un second doigt vint rejoindre le premier. Là, il se mit à se crisper malgré lui, bien que l'autre main libre de Chan tentât de faire passer la douleur en le masturbant. Le problème était qu'il ressentait le plaisir dans un côté de son corps, pas de l'autre.

— Et maintenant ?

Maintenant ? Changbin était sûr et certain qu'il n'aimait pas du tout la pénétration à présent. La sensation d'avoir quelque chose d'inconnu pile dans cet endroit le dérangeait plus qu'autre chose, surtout si cette chose faisait de son mieux pour l'écarter et l'ouvrir plus que nécessaire...

— Tu veux que j'arrête ?

Il sursauta en regardant son aîné, sans comprendre.

Oh, il venait de penser à voix haute.

Il faillit acquiescer à l'oral, mais un son bien plus aigüe sortit à la place, l'immense vague de plaisir l'ayant figé soudainement. Là, à cet instant, les doigts du brun venaient de toucher quelque part dans les tréfonds de son anus qui l'avaient pris aux tripes.

Bon sang, c'était quoi, ça ?!

Sa tête vint brutalement se pencher pour observer vers le bas, là où les doigts de Chan s'affairaient à le pénétrer, puis reposa son regard sur lui.

— Je– où est-ce que tu viens de toucher, là ? Demanda-t-il, hésitant.

Le brun sourit perversement, et recommença son geste, faisant gémir Changbin une nouvelle fois. Okay, il venait de toucher un point très sensible.

— Je ne m'attendais pas à le trouver si vite, s'amusa Chan en appuyant à nouveau sur ce fameux point. Mais c'est là que se trouve ta prostate, l'un des nerfs les plus sensibles du corps masculin, et qui se trouve uniquement chez les hommes d'ailleurs.

Plus Chan appuyait dessus, plus Changbin se sentait partir dans les nimbes du plaisir.

Oh~ Oui~ Enc– Oui~

Il n'écoutait même plus ses explications, il se concentrait uniquement sur cette sensation croissante qui poussait en lui encore et encore. À tel point qu'il ne sut contrôler ce qu'il disait :

— Mets ton sexe dedans.

— Quoi ?! Je croyais que tu n'aimais pas. Tu veux vraiment aller plus–

— Oui !

La réponse surprit les deux hommes, mais Changbin n'en avait que faire, il voulait juste qu'il continue de toucher cet endroit si agréable. Un troisième doigt fut rajouté, le faisant se crisper encore plus, pourtant, il se détendit presque lorsque sa boule de nerf fut caressée à nouveau.

Ah~ Plus~

Si Changbin pouvait dédoubler son esprit pour s'observer d'un regard extérieur, il aurait eu clairement honte de lui-même. Cette pensée lui effleura l'esprit pendant à peine vingt secondes de lucidité, le temps suffisant pour Chan de retirer ses doigts, enfiler son sachet de plastique étrange sur le pénis et de se positionner correctement devant son entrée dûment préparée.

Changbin lui-même n'était pas sûr que ça rentrerait, mais bon, il avait confiance en Chan, il savait qu'il n'allait pas faire n'importe quoi.

— Prêt ? Ça va faire extrêmement mal la première fois, aussi, n'hésite pas à m'arrêter si jamais c'est trop pour toi, d'accord ? »

Avec appréhension, le noiraud hocha la tête en écartant ses jambes au maximum, peu certain d'être prêt à accueillir un si gros engin. Le gland fut posé contre les parois, le faisant soupirer, désireux de pouvoir être à nouveau stimulé par la prostate.

Chan se pencha au-dessus de lui, une main posée sur sa joue, l'autre sur son sexe, et vint l'embrasser avec toute la douceur dont il pouvait faire preuve. Rien que ce geste fit fondre Changbin, ça faisait beaucoup trop longtemps qu'il n'avait plus reçu de geste d'affection de la sorte. Il répondit au baiser en enfouissant une de ses mains dans ses cheveux bruns, appréciant leur texture soyeuse. Et enfin, Chan le pénétra avec lenteur.

Seul le gland était rentré en lui, pourtant, c'était suffisant pour faire crier Changbin qui stoppa net le baiser en griffant le dos de son aîné. Et plus il insérait son sexe en lui, plus ça faisait mal et plus il voulait le faire sortir de là. Être stimulé ailleurs ou même entendre ses mots doux ne semblait même plus fonctionner, il ne ressentait absolument aucun plaisir, bien au contraire.

« A–att– Chan, ça fait mal !! Je–

À peine dit, Chan stoppa tout mouvement, bien en équilibre au-dessus de lui, semblant peser le pour et le contre de ce qu'il comptait faire. Le cadet devait avouer qu'en cette posture, il était vraiment attirant, mine de rien...

— Je me retire.

Ce n'était pas une question. Avec douceur, Chan vint l'entourer en une étreinte chaleureuse en le rassurant tout autant, tandis qu'il faisait la manœuvre pour se retirer de lui. Et ce fut comme une libération pour Changbin lorsque le vide revint combler son orifice.

À la place, les doigts du brun revinrent plonger en lui pour titiller à nouveau ce point si caractéristique, lui faisant reprendre du poil de la bête.

Encore~ Anh~ Encore~ Encore~ !

Le plaisir l'envahissait de nouveau, c'était certain. Mais en regardant plus bas, Changbin vit à quel point le sexe de Chan était tendu. Pourtant, à bien regarder son visage, il n'arrivait pas à lire en lui, mais il était certain qu'il devait être extrêmement frustré de ne pas avoir pu faire ce qu'il voulait.

Ses paroles précédentes lui revinrent en mémoire : les deux parties devaient prendre du plaisir. Ce n'était ni l'un, ni l'autre, mais les deux.

Et si le plaisir de Chan de vouloir le pénétrer pouvait aller de pair avec son propre plaisir d'être touché de la prostate ?

— Je– attends...

Sans comprendre, ce dernier cessa ses mouvements de doigts pour poser son regard sur son cadet.

Bon sang, comment pouvait-il être aussi adorable dans un moment pareil ?!

Changbin se racla la gorge pour reprendre contenance, et finit par lui avouer d'une voix mal assurée :

— Tu peux... euh... me pénétrer... enfin, réessayer...

Chan cligna des yeux sans comprendre, et s'enquit soudain :

— Tu es vraiment sûr ? T'avais vraiment mal tout à l'heure, je ne veux pas–

— C'est bon !! Je veux vraiment essayer jusqu'au bout... Et puis, euh... tu ne t'es toujours pas fait plaisir depuis... enfin...

— Oh Changbin, t'es vraiment mignon ! Mais t'inquiète pas pour ça, pour l'instant, je veux juste te faire découvrir, sans plus.

— Okay alors fais-moi découvrir en... comment tu dis, déjà ? Ah oui, en me retournant... Et dépêche-toi avant que je change d'avis !!

Oui, Changbin avait honte de ce qu'il venait de formuler. Son visage cramoisi tentait d'éviter à tout prix le regard attendri de Chan, mais c'était peine perdue puisqu'il vint faire pivoter sa tête pour l'embrasser furtivement.

— Concentre-toi uniquement sur moi, pas en bas ni sur la douleur, conseilla-t-il.

À peine eut-il prononcé ces mots que le bout de son sexe revint là où il était parti avant. Changbin le sentit à peine rentrer en lui, trop occupé à embrasser Chan langoureusement. En revanche, il sentit bien les douleurs refaire surface quand plus d'un tiers de son sexe se trouvait déjà en lui, les deux autres tiers forçant le passage pour s'introduire encore plus.

Et malgré tout, il voulait bien faire et aller jusqu'au bout. C'était Chan qui était excité avant lui à la base, alors il fallait bien qu'il prenne un peu de plaisir lui aussi.

Ses baisers se firent un peu plus audacieux mais tout aussi doux, le brun faisait en sorte de ne jamais le brusquer. À tel point que Changbin ne se rendit pas compte que Chan ne bougeait plus son bassin.

Celui-ci sépara leurs lèvres à contrecœur pour reprendre sa respiration, mais surtout pour avoir une vue d'ensemble sur le visage de Changbin. Il était transpirant et haletant, et semblait dans un état second.

Le noiraud baissa furtivement le regard, remarquant enfin l'engin de Chan en lui. Et malgré la douleur, il bougea légèrement, simplement pour évaluer la place que prenait son pénis dans son anus.

Verdict : c'était gros. Très gros.

En guise de compensation pour la douleur, il sentit sa boule de nerf être appuyée en permanence. Il ne s'attendait pas à ce que ce soit aussi gros pour atteindre directement sa prostate.

— Tu– tu peux bouger... je crois...

— Vaut mieux que tu sois sûr de toi, se moqua gentiment le brun. J'essaie un coup et tu me dis, ça te va ?

— ... okay mais pas trop fort.

Sur ces mots, Chan acquiesça, et recula lentement son bassin. Changbin sentit le sexe en lui se retirer de quelques centimètres, frottant par inadvertance sa prostate, avant de revenir avec autant de langueur.

Aaaah~

— Recommence !

— À vos ordres, chef.

Aussitôt dit, le brun recommença sa manœuvre, mais avec un peu plus de force que précédemment. Puis il recommença encore, et encore, accélérant progressivement sans pouvoir s'en empêcher.

Ah ! Oui ! Continue !

Heureusement que les gémissements de Changbin le guidaient. Lui-même s'était mis à gémir à son tour, prenant trop son pied pour pouvoir s'arrêter – même s'il savait qu'un seul mot de sa part et son cerveau rebasculerait en mode manuel.

Anh~ Plus ! Je t'en– Anh~

Changbin n'était plus qu'une bombe à retardement, le plaisir pétillant si fort dans tout son être qu'il menaçait d'exploser à tout moment. Ses yeux roulaient et convulsaient, son corps tressautait et tremblait sans cesse, sa gorge n'avait pas fini de délivrer toutes ses ressources. Il se sentait à la fois si proche et si loin du point de non-retour. C'était frustrant et beaucoup trop à la fois.

Oh oui ! Encore ! Chan~

Et ce n'était pas grâce à la pénétration, loin de là. Son corps semblait s'être à peu près habitué à la sensation, mais il n'aimait toujours pas avoir quelque chose en lui. Ce qui le faisait hurler autant, c'était sa prostate malmenée à chaque coup. Chaque frottement l'envoyait voir les étoiles. Doublé des gémissements, voire des hurlements de Chan, il s'approchait à chaque seconde de la fin. Et il la sentait arriver, cette fin.

Cramponné à lui, Changbin se déversa sur son ventre en criant, sa jouissance arrivant à son apogée. Et visiblement, ses cris avaient fait de l'effet à Chan puisqu'il gémit à son tour en jouissant, ralentissant progressivement ses coups.

Changbin baignait dans un bien-être immense, encore plus grand que lorsqu'il avait goûté au plaisir sur la plage. Et presque aussitôt, l'envie de piquer un somme l'attira comme un aimant.

Mais cette envie partie bien vite lorsqu'il sentit un liquide brûlant au fond de son anus, et il savait très bien ce que c'était.

— Merci pour ce moment particulièrement agréable, mais bordel, retire ton liquide gluant de mon cul ! J'aime déjà pas avoir ton sexe en moi, alors ton liquide là, non merci !

Chan, essoufflé, se redressa lentement, le temps de faire remuer les paroles en lui. Et soudain, son visage se décomposa.

— Merde, merde, merde !

Il se retira avec toute la douceur du monde, laissant Changbin avec un grand vide en lui. Celui-ci souffla de soulagement, râlant comme toujours en sentant avec dégoût ce liquide couler de son anus.

— Je– je suis désolé, paniqua Chan en s'activant pour retirer et jeter le préservatif déchiré. La capote a craqué, ça devait pas arriver, et...

— C'est bon, tant que tu me retires ce que t'as foutu en moi, grogna le noiraud sur un ton plus grognon que bourru.

Chan se leva et porta Changbin sur son dos, ignorant ses plaintes de pouvoir marcher par lui-même, l'emmenant dans la salle de bain. L'eau chaude fut allumée assez brutalement, et il retourna le plus petit avec aisance, se baissant pour enfouir de nouveau ses doigts dans son anus, le faisant glapir.

— Eh, il est pas question de recommen–

— La ferme et laisse-toi faire. Je retire mon sperme de toi.

Changbin se tut face au ton soudainement glacial de Chan. D'ailleurs, à bien y regarder, il semblait énervé. Alors il se laissa faire docilement, ne cherchant pas à masquer son visage dégoûté face à la quantité de sperme présent en lui.

Dix minutes plus tard, son anus était propre comme tout. Changbin marmonna un semblant de remerciement, s'attendant à ce qu'il vienne l'enlacer comme le matin même pour qu'ils finissent leur douche ensemble. Il savait quand même savourer les choses à leur juste valeur, tout de même !

Oh oui, ces petits moments de pur bonheur, il voulait les chérir le plus longtemps possible, même si c'était avec–

— Je vais changer mes draps. »

Changbin eut à peine le temps de se retourner que la porte de la salle de bain claqua, le laissant seul sous l'eau. De l'incompréhension vint poindre dans son esprit, ne comprenant pas l'attitude soudainement distante de Chan.

Jusqu'à ce jour, il avait été des plus doux et adorables avec lui. Alors pourquoi maintenant, il se détachait aussi brutalement ?

Changbin ne le comprenait pas, en revanche, il sentait bien la douleur dans son cœur le piquer par petits coups, et la déception vint lui nouer l'estomac.

Oui, il était déçu de Chan.

Décidé à comprendre son attitude, Changbin finit sa douche rapidement et fit un passage dans sa chambre pour se rhabiller et prendre de nouveaux draps, avant de se pointer dans celle de Chan sans frapper, non sans souffrir du bassin.

Ce dernier fit volteface en sursautant, une main sur le cœur, alors que les draps sales n'avaient pas bougé d'un pouce. En prime, il semblait s'être servi en habits chez le noiraud, vu son haut un poil trop petit et son short un peu serré.

« Tu m'as fait peur ! Tu pourrais frapper avant d'entrer !

— C'est chez moi, je fais ce que je veux. Et c'est con, t'as oublié tout ça.

Changbin lui montra les draps propres dans sa main. Chan le fixa un instant, puis bredouilla en tendant les mains :

— Ah... merci... j'avais complètement zappé...

Mais au dernier moment, le propriétaire des lieux recula les draps en faisant un pas en arrière, refermant au passage la porte derrière lui. Ridicule alors qu'il n'y avait qu'eux deux dans la maison.

— Bon, dis-moi ce qui se passe, ordonna-t-il en prenant une voix autoritaire. Je vois bien que ça ne va pas.

Le brun cligna des yeux, déglutit, et secoua la tête, l'air de rien :

— Rien, tout va bien. Je ne vois pas de quoi tu parles.

Pourtant, ses mains tremblotantes et son regard fuyant le trahissaient. À priori, il semblait aller vraiment mal.

Changbin jeta presque avec violence les draps soigneusement pliés sur une chaise qui traînait là, et s'enquit avec une colère destinée à on ne savait qui :

— Je suis peut-être pas le mieux placé pour dire ça, mais je sais aussi être humain quand il le faut ! Je n'en ai peut-être pas l'air, mais je sais écouter les gens, et là, je vois bien que t'as besoin de vider ton sac. Alors accouche ou je vais vraiment m'énerver.

Bon, il aurait peut-être dû doser ses mots, ou son ton – ou les deux ? – parce qu'il semblerait que Chan allait s'effondrer à tout moment après ses paroles. Le problème, c'est qu'il fallait le secouer un petit peu, et heureusement que Changbin savait s'y faire pour secouer les gens.

Le plus grand baissa le regard et s'assit au bord de son lit en soufflant du nez. De toute façon, Changbin ne comptait pas le laisser fuir tant qu'il n'aurait eu aucune explication.

— Je suis désolé pour tout. Vraiment. Je me suis chargé de t'apprendre tout ce que le gouvernement nous cachait, notamment le sexe et la procréation, et je devais te protéger, du moins, m'assurer de ta sécurité. Mais à cause de moi et de mon égoïsme, tu as eu mal, t'as été dégoûté, t'as fait des trucs que tu voulais pas forcément faire, et je suis presque sûr que tu regrettes d'être devenu un Déviant. Si... si vraiment je te fais chier à ce point, je partirais et je t'embêterais plus jamais. Si c'est vraiment ce que tu souhaites, un seul mot de ta part et je ne reviendrais plus dans ta vie.

C'était donc ça. Bang Chan manquait cruellement de confiance en lui, et passer le besoin des autres avant le sien était son dicton pour tenter de trouver le bonheur. Comme c'est touchant.

— C'est bon, t'as fini ?

Avec surprise, Chan releva subitement la tête. Bras croisés, Changbin le toisa d'un regard noir et fit de son mieux pour contrôler son ton déjà trop dur à son goût :

— Déjà, si tu me faisais vraiment chier, je t'aurais jeté de chez moi depuis belle lurette. Ensuite, oui je râle souvent, mais c'est souvent pour la forme, rien de plus. Et pour ce qui est du sexe, c'est moi qui ai commencé à te bombarder de questions, c'est moi qui t'ai surpris en train de te masturber, et c'est moi qui ai pris la responsabilité de devenir un Déviant parce que je voulais assouvir ma curiosité, merde ! Arrête de te donner du tort pour des trucs dont tu n'es pas responsable ! Si vraiment je t'en voulais, ça ferait longtemps que je t'aurais dégagé, et tu le sais ça !

— Alors dis-moi ce que je dois faire, toi qui connais tout sur tout ?! Répliqua Chan en se levant soudainement. Tu refuses qu'on soit amis, tu n'as eu aucune considération pour moi jusqu'à maintenant, et tu me considères comme ta définition de Déviant, à savoir un mec inhumain constamment en chaleur, comment tu veux que je sache si tu es d'accord ou pas sur ce que je te fais ?

— Putain mais t'es con, ma parole ! Chan, si je–

Ne m'appelle pas Chan quand ça t'arrange ! La seule et unique fois que tu m'appelles comme ça, c'est quand tu veux avoir raison, jamais hormis pendant le sexe tu ne m'as appelé par mon nom ! Toujours c'était Déviant de merde, ou tu m'appelles pas tout court, pourquoi faudrait que ça change le seul moment où tu veux que ça aille dans ton sens ?! Si tu avais un minimum de considération pour moi, t'aurais pu aller faire tes fameux tests avec ton âme-sœur, il est à deux pas d'ici, de tout façon !

— Mais j'en ai rien à foutre de ce chien ! Âme-sœur ou pas, c'est avec toi que j'ai décidé de faire ces tests !

— Alors arrête de me traiter comme tu traites Kim ! Traite-moi au moins comme un humain, même si tu ne veux pas qu'on soit proche l'un de l'autre ! Je– je m'en fous que tu me détestes ou pas, mais aies un peu plus de respect envers ma personne et mes sentiments, juste ça– !!

Tous les deux se turent subitement face aux propos du brun. L'un choqué par ses propres mots, l'autre surpris par ce qu'il venait d'apprendre.

Et tout tomba comme une évidence pour Changbin : ses gestes affectueux, ses mots doux, son regard, ce n'était jamais par hasard. Il savait reconnaître quand une femme tombait sous son charme, et manifestement, les signes étaient similaires entre hommes et femmes puisqu'il avait reconnu Chan dans toutes ses interrogations silencieuses.

La colère s'étant évaporée comme neige au soleil, le plus petit lâcha un rictus mesquin, ne manquant pas d'envoyer une pique pour être sûr de ce qu'il avançait :

— Je rêve ou tu viens de me faire une déclaration subtile ?

— Cette discussion s'arrête là. »

La voix ferme de Chan claqua entre les quatre murs tandis qu'il se retournait pour arracher sèchement les draps au matelas. N'importe qui aurait fui face à son ton glacial.

Sauf que Changbin n'était pas n'importe qui.

Et il ne se gêna pas pour sourire davantage, se délectant de voir Chan au pied du mur. Même de dos, il pouvait voir le bout de ses oreilles aussi rouges que le tapis.

« Putain, si je m'y attendais à celle-là ! Sans rire, Chan, ça me touche vraiment, hein !

— Va-t-en si tu n'as rien de constructif à me dire. De toute façon, je sais que je n'ai aucune chance puisque t'as déjà rencontré ton âme-sœur. »

Changbin cessa soudain ses plaisanteries, observant son invité changer activement les draps de son lit. Chacun de ses gestes était sec, sans douceur. C'était la première fois qu'il le voyait dans cet état, et il sentait que jouer avec son humeur n'était pas la solution en cet instant.

Le problème, c'est qu'il avait rarement été celui qui réconfortait les gens, du moins à part Lia. Sauf qu'avant, il avait un tempérament machiste, et c'était presque la seule personne à qui il avait montré un côté plus doux de lui-même malgré ses propos. Et en plus de ça, son caractère bien trempé et son côté Lion faisaient toujours ressortir ses émotions les plus vives, ce qui ne l'aidait pas du tout dans ce genre de situation. Et comme si ce n'était pas suffisant, le problème actuel venait de lui et Chan. Et idéalement Kim... Brrr, rien que d'y penser, ça lui donnait des frissons. 

Maintenant, il avait un peu évolué sur sa vision des choses, il était un peu plus ouvert d'esprit par rapport à certains sujets, donc il ne pouvait pas ignorer ce fait.

Mais t'es con, Changbin ! T'as toujours agi sans réfléchir, pourquoi tu ne le fais pas maintenant ?!

Cette réalisation le frappa aussi fort qu'un coup de poêle en pleine tête. À bien y repenser, jamais Seo Changbin ne se serait pris la tête pour ça ! C'était tout bonnement ridicule, depuis quand il réfléchissait avant d'agir ?...

Après, théoriquement, c'est en agissant ainsi qu'il en était arrivé à une telle situation. Surtout qu'initialement, Bang Chan était un inconnu pour lui, un Déviant par-dessus tout, qu'il avait accueilli et hébergé. Mais ça, c'était avant de devenir lui-même un Déviant.

Il soupira en se tenant le crâne, il n'aimait vraiment pas réfléchir autant, encore moins quand c'était précipité et forcé. Il devait beaucoup à Chan tout comme il ne lui devait rien du tout. Maintenant, il devait trouver un équilibre entre ce qu'il voulait et ce qu'il devait faire, et il lui fallait un regard extérieur sur ça...

Et là voilà la solution ! Han Jisung ! Qu'aurait fait son frère, s'il était à sa place ? Qu'aurait-il dit ? Qu'aurait-il fait ?

Et il sut. Tout ce qu'il allait dire globalement, il sut très bien ce qu'il allait déballer. Certes il fallait qu'il se mette littéralement à nu sur ses sentiments, mais il n'avait pas le choix, c'était un risque à prendre, surtout s'il ne voulait pas détériorer sa relation avec lui.

« Chan.

— Quoi encore ?!

Ce dernier se tourna vers lui avec véhémence. Il lui en voulait, c'était certain. Mais peu importe, Changbin décida de continuer sur sa lancée, il n'était plus à ça près, de toute manière.

—  De toutes les personnes sur Terre, il a fallu que mon âme-sœur soit le connard par excellence. Je ne suis pas innocent dans mes actes, je l'avoue, et j'agis très souvent comme un con. Mais je sais reconnaître la valeur des choses et des personnes. À choisir entre lui et toi, je te prendrais toi sans hésiter. Toi, au moins, tu es parfait, tu as des qualités et des défauts appréciables, tu as toujours été là alors que... ouais, je t'ai quand même traité comme un moins que rien... et je m'excuse pour ça, sincèrement... Lui, même ses qualités sont plus que détestables, avec ses airs de Monsieur Parfait alors qu'il n'est rien en réalité.

— Je ne suis pas parfait non plus, tu sais...

— T'es déjà plus parfait que cet imbécile. Bref, franchement, j'aurais préféré que ce soit toi mon âme-sœur. Et... désolé pour tout ce que je t'ai dit avant... t'es vraiment l'humain le plus parfait que j'ai rencontré jusqu'à présent, c'est juste que je n'arrivais pas à concevoir que tu sois vraiment un Déviant...

Ses mains dans son dos ne cessaient de se triturer, Changbin n'avait vraiment pas l'habitude de s'excuser en temps normal. D'ailleurs, quand ça arrivait, c'était toujours parce que la personne en face de lui comptait énormément pour lui.

Bang Chan comptait pour lui ?

Une part de lui ne cessait de songer qu'il était ridicule d'y penser, l'autre part l'insultait d'être aussi bête pour le nier. Et Changbin détestait plus que tout quand les deux parts de son cerveau n'étaient pas d'accord.

— C'est vrai ?

La petite voix de Chan le fit revenir sur terre. Celui-ci avait arrêté sa tâche pour se tourner complètement vers lui. Il semblait déjà bien moins remonté que quelques minutes auparavant. Changbin croisa les bras et tourna la tête, marmonnant sur un ton grognon :

— Je n'aime pas répéter ce que je dis ! T'as très bien entendu !

Évidemment, personne ne pouvait louper le bout de ses oreilles légèrement rosées. Encore moins Chan.

Ce dernier lui sourit doucement, heureux d'apprendre une telle nouvelle.

— Alors, ça te dit qu'on–

— Je t'arrête tout de suite avant que tu ne dises une connerie, mais je ne veux pas d'une relation avec toi ni avec quiconque pour le moment. Et je ne suis pas sûr de partager tes sentiments, alors...

Le brun hocha la tête, compréhensif. Et il ne comptait pas insister, puisqu'il savait que Changbin avait déjà beaucoup pris sur lui pour lui dire tout ça.

Alors il retourna à son changement de draps, faisant ainsi régner le silence dans la pièce. Dos à lui, il ne vit pas Changbin se gratter la nuque, la jambe tressautant. Par contre, il entendit bien sa voix rauque prononcer avec hésitation :

— Après, rien ne dit que je refuserais une potentielle relation avec toi dans le futur. »

Chan n'eut à peine le temps de se retourner avec surprise que Changbin s'était déjà volatilisé précipitamment.

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