Chapitre VI : Comme un sombre reflet.

Je me réveillai dans un lit, mes mains moites tenant fermement une couette épaisse. Ma vision, au départ trouble, se stabilisa peu à peu, mais les battements de mon cœur ne ralentirent pas pour autant. Je me redressai en tâtant mes bras, puis mon dos. La douleur avait disparu. Aucune blessure. Aucune trace du passage des épines aiguisées qui s'étaient enfoncées dans ma chair. Les murs couleur café au lait, une valise et les deux tableaux derrière moi m'indiquèrent que je me situais dans ma chambre, cependant, rien ne me disait quand et comment j'avais atterri ici.

Je n'avais pas rêvé. Je me souvenais parfaitement de l'instant où cette fille au rire de psychopathe avait décroché la rose noire de ses cheveux blonds et roses et que ses yeux avaient viré au rouge, une version plus écarlate des miens lorsqu'une forte colère s'emparait de moi. Et cette insoutenable douleur que m'avaient provoquées les épines de la tige extensible de sa fleur lorsqu'elles avaient pénétré ma chair... Comment les blessures auraient-elles pu disparaître en si peu de temps?

Je me rappelai ce que m'avait dit Nate sur les élèves qui organisaient des fêtes dans le cimetière. Des "pseudos gothiques", pour reprendre ses termes exacts. Il avait visiblement oublié de me mentionner que ces pseudos gothiques étaient en fait... Ils étaient...

"Je préfère le terme démon."

Cette phrase qu'avait prononcé ce garçon...qu'avait-il voulu dire? Peut-être avaient-ils simplement crée une sorte de secte nommée "les démons", ce qui expliquerait leur style plutôt sombre. Cela n'expliquerait pas en revanche, la rose, les plumes tranchantes ou encore les longues griffes noires. Une chose était sûre, ces gens n'étaient pas normaux. Mais qui me croirait si j'allais raconter ce qui s'était passé dans cette forêt où je n'étais pas supposée être allée?

- Mlle Greenstone?

Je sursautai à l'entente de cette voix et me cramponnai plus fort à la couette. Une femme vêtue d'une robe moulante noire se tenait sur une chaise près de mon lit, jambes croisées, mordillant un stylo bic tout en me détaillant d'un air observateur. Elle se dressa sur ses talons hauts, et ses longs cheveux d'un blond sans défauts basculèrent en arrière, comme frappés par un bref mais puissant coup de vent. Lorsqu'elle s'approcha de moi avec un grand sourire pour me tendre le verre d'eau posé sur ma table de chevet, je remarquai que ses yeux avaient une étrange mais magnifique teinte miel.

- Qui...

- Buvez votre verre, m'ordonna-t-elle calmement. Cela vous calmera.

Je ramenai nerveusement mes cheveux derrière mon oreille et m'exécutai, avant de recracher sur le côté. C'était dégoûtant!

La jeune femme me regardait en mordillant sa lèvre inférieure, maquillée d'un rouge à lèvres bordeaux.

- Je suis Mlle Smith, déclara-t-elle. L'infirmière. Et ça, c'est une préparation aux herbes. C'est principalement composé d'eau, mais cela à des vertus plus spécifiques. Apaisantes, pour être plus précise.

Elle marqua une pause, s'attendant sûrement à une quelconque réaction de ma part, mais je me contentai de sortir mon téléphone de la petite poche de ma jupe plissée.

Petit récapitulatif : il était midi et quart, et moi, Alice Greenstone, arrivée dans cette académie avec pour seul objectif de passer inaperçue, m'était évanouie dans la forêt après avoir eu affaire à des soit disant démons dans un cimetière. Et tout cela en moins de vingt-quatre heures. Je soupirai. Vive la normalité.

- Si tu veux savoir, c'est un des élèves qui t'a porté jusqu'à l'infirmerie, en disant que tu t'étais évanouie au beau milieu de la forêt. Je t'ai amené dans ta chambre, puis j'ai prévenue Mlle Pealsburry. Je vais d'ailleurs aller la chercher pour l'informer de ton réveil.

"Oh, oh", songeai-je en m'agitant nerveusement sur le lit.

- Je ne crois pas que ça soit...

Quelqu'un toqua à la porte. Mlle Smith me regarda brièvement en arquant un sourcil, puis se dirigea vers la porte.

- Rose, chuchota-t-elle. Tu arrives au bon moment, elle vient juste de se réveiller.

À l'instant même où je croisai le regard sévère et impassible de la proviseure adjointe, j'eus envie de creuser un trou sous terre, et de ne plus jamais en ressortir.

- C'est parfait, répondit cette dernière. Je m'en occupe. Merci Lisa.

Mlle Smith se retourna, m'adressa un grand sourire, puis sortit de la pièce tandis que Mlle Pealsburry refermait lentement la porte derrière elle.

Je regardai mes ongles, dont le vernis mauve commençait à s'écailler, afin d'éviter son regard.

- On dirait que la belle au bois dormant s'est enfin réveillé, commenta-t-elle en faisant le tour du lit pour s'asseoir sur la chaise où se trouvait l'infirmière une minute plus tôt.

Je sortis mes jambes de la couette et m'assis sur le bord du lit.

- Après s'être fait piquée dans la forêt, ajoutai-je.

Je mordillai le bas de ma lèvre inférieure, appréhendant ce qu'elle allait me dire. Dans son bureau, le proviseur avait clairement stipulé qu'il était interdit d'aller dans la forêt, et pourtant, j'avais -sans grand mal- escaladé le mur en brique pour y entrer. Mais dans ce cas, si c'était vraiment interdit, pourquoi les pseudos-gothiques s'y trouvaient-ils? Pourquoi Nate avaient-ils parlé de fêtes organisées dans le cimetière? Nate... S'il y avait quelqu'un à qui je pouvais poser des questions sur l'incident de la forêt, c'était certainement lui. Mlle Pealsburry, qui n'affichait aucune expression particulière, me tendit un petit carnet. En le saisissant, je reconnus tout de suite la couverture marron qui indiquait "Règles de l'Académie". Génial. Elle allait certainement me faire lire les règles, afin que je sache exactement lesquelles j'avais enfreint.

- Monsieur le...euh Ian a dit que je ne devais pas les lire, marmonnai-je. Pour le moment.

Elle soupira.

- Il ne pensait simplement pas que cela se passerait si vite, affirma-t-elle. Je l'avais prévenu. Tu es trop curieuse. Maintenant lis.

Je fronçai légèrement les sourcils, confuse. De quoi parlait-elle? Était-ce si difficile de dire les choses clairement?

- Je sais que je n'avais pas le droit d'aller dans la forêt, mais vous ne pensez pas que vous abusez un peu là?

Cette fois, elle roula des yeux.

- Il est interdit d'aller se promener dans la forêt après le couvre-feu. Soit tu n'écoutes décidément pas ce que l'on te dit, soit M. Milward n'en fait vraiment qu'à sa tête avec les règles. Maintenant, Alice, lis. Page 15. Règle n°28.

Dans un soupir à la fois de soulagement et d'exaspération, j'ouvris le petit carnet et commençai ma lecture :

- Règle n°28 : l'Académie Rose est un lieu de paix, où la sécurité des élèves doit être assurée. Les affrontements entre clans sont par conséquent strictement interdits. Sauf cas spéciaux et cas d'attaque dans lequel l'élève se retrouve en danger de mort, nul...

Je m'arrêtai immédiatement de lire et lui lançai un regard interrogateur. Elle me fit signe de continuer.

-...nul démon, nul ange gris, nul Néphilim appartenant à l'Académie Rose ne blessera ou ne causera la mort d'un individu....

Je m'arrêtai à nouveau, mais me forçai à reprendre, sans tenir compte des propos précédents.

- ...de l'extérieur comme de l'intérieur de l'Académie, quelque soit sa sa nature, sous peine de sanction s'étendant de la salle de retenue au passage au Tribunal. Le sort de l'élève concerné sera en ce dernier cas décidé par le Conseil, selon la gravité de l'acte lui-même. ( J'écarquillai les yeux.) Attendez, c'est quoi ce délire?

- Règles n°32 et 33, se contenta-t-elle de me répondre.

- Mais...

- Je répondrais à tes questions après, me coupa-t-elle.

Baignant dans la confusion, je baissai les yeux jusqu'à la règle n°32.

- Les sorties avant le couvre-feu et en fin de semaine sont autorisées, dans la mesure où les élèves Néphilim seront en possession d'un flacon de larmes de Lire et d'un Relieur afin d'assurer leur protection. Il est cependant impératif que le couvre-feu soit respecté par tout élève. Les membres de l'Elite dans le cadre de leurs fonctions de protecteurs de l'Académie et de la ville, est dispensée de cette règle. Règle n°33 : Il est strictement interdit à tout membre de l'Académie, de toute nature, d'utiliser ses dons en dehors de celle-ci et de révéler à toute personne extérieure les activités de celle-ci, sous peine de sanctions graves. La règle d'utilisation des dons exclus l'Élite dans le cadre de son travail, et n'est pas valable en cas d'attaque.

- Tu peux t'arrêter là, déclara Mlle Pealsburry.

- Oh que oui, je vais m'arrêter là. Autant dire clairement que vous vous fichez de moi!

- Tout ce que tu as lu...

- Est un ramassis de conneries écrit par un malade mental! m'exclamai-je. Vous êtes donc tous cinglés ici? D'abord je suis comme privée de sortie par le proviseur lui-même, ensuite je me fais traiter de Néphilim, alors que je n'ai aucune idée de ce que ça peut bien vouloir dire, puis je me fais transpercer la chair par le joujou d'une folle dingue, avant de me faire sauver par un autre cinglé qui clame être un démon... Oh, et pour finir la proviseure adjointe vient en personne me montrer le règlement qui comporte les mots ange, démon, clan, mort, et tribunal!

Je lâchai un rire nerveux, et regardai brièvement le ciel qui s'assombrissait par la fenêtre avant de m'exclamer :

- On n'est ni dans un film, ni dans un livre d'Emily Pierce. Alors expliquez-moi ce qui se passe réellement dans cette Académie au lieu de vous foutre de moi!

Au moment où je prononçai ces derniers mots, un coup de tonerre retentit, suivit de croassements de corbeaux qui formaient une grande masse noire dans le ciel et d'un torrent de pluie. Je détachai mon regard de la fenêtre, afin de le poser sur Mlle Pealsburry, qui me fixait silencieusement, l'air étrangement alarmé.

- C'est mauvais, dit-elle.

Mon premier réflexe fut de me diriger à toute vitesse vers mon grand miroir, près de la fenêtre.

C'était ce que je craignais.

Mes yeux commençaient à prendre la couleur du sang. Je me retournai immédiatement, et pris de grandes inspirations afin de me calmer. Les choses allaient de pire en pire, et avec ce qui venait de se passer dans les minutes précédentes, j'avais la conviction que cette académie était le pire endroit pour quelqu'un qui voulait paraître le plus normal possible. Pour quelqu'un comme moi.

Mlle Pealsburry apparut dans le miroir, derrière moi, et posa une main sur mon épaules. Je la retirai brusquement et m'écartai d'elle.

- Ne vous approchez pas de moi, lui conseillai-je. Je vais vous blesser.

Elle sourit d'un air amusé.

- Tu es une Néphilim, dit-elle. Même si tu étais vraiment très puissante, je n'aurais toujours rien à craindre de toi, en considérant mon statut de démon.

Je couvris mes oreilles de mes mains.

- Non! .

Un autre coup de tonnerre retentit, et les croassements des corbeaux se firent à nouveau entendre, comme pour émettre un avertissement.

- Vous êtes totalement cinglée! vociférai-je.

Mlle Pealsburry se rassit. Elle n'avait pas l'air paniquée, ou même énervée que je lui manque de respect.

- Si tu n'y crois pas, alors comment expliques-tu le fait que depuis tes six ans, tes yeux prennent cette couleur et que ta force se décuple quand tu es en colère? Cet élève, qui t'as ramené à l'infirmerie, et cette fille qui t'a attaqué, comment penses-tu qu'ils sont capable de faire ce que tu as vu?

Je me tus. Comment savait-elle cela? Et pourquoi mes parents lui auraient-ils parlé de mon problème? La rage restait bloquée dans ma poitrine, n'attendant plus qu'une ouverture pour exploser.

- Maintenant Alice, calme-toi, et assieds-toi.

Sa voix paraissait plus profonde et plus forte. Et ses yeux...Ils avaient à présent la même couleur écarlate que ceux d'Anna, très différente de la mienne.

- C'est un ordre, articula-t-elle clairement

Presque aussitôt mes muscles se mirent en marche tout seul, et sans quitter Mlle Pealsburry des yeux, je m'assis sur mon lit. Je me sentais comme si j'étais une simple marionnette dépourvue d'émotions ou de capacités cérébrales.

Vide. Comme si on avait arraché mon âme à mon corps.

Lorsque ses yeux retrouvèrent leur couleur normale, je pris une grande inspiration, comme si j'émergeai d'un profond océan. Je regardai autour de moi. À travers la fenêtre, les nuages s'écartaient, laissant place à un fin rayon de soleil, et les corbeaux volaient vers l'est. Je pris mon téléphone et ouvris l'appareil photo interne. Mes yeux étaient du même bleu turquoise qu'il l'avait toujours été à la base. Que s'était-il passé à l'instant? Et cette étrange sensation...qu'était-ce?

Mlle Pealsburry s'éclaircit la voix.

- Maintenant que tu es plus...disons, apte à m'écouter, je vais te raconter une petite histoire.

Elle se leva à nouveau de sa chaise, et se déplaça lentement et gracieusement à travers la pièce, sa longue robe noire traînant derrière elle. Bien qu'au fond de moi, je savais qu'elle était complètement folle, il fallait que je l'écoute. Il fallait que je l'écoute, puis que je décèle le vrai du faux.

- Je vous écoute, déclarai-je donc.

- Je t'épargnerai les détails ennuyeux et ferai court, sinon, tu risquerais de t'y perdre. Tu apprendras tout cela en cours, de toute manière. Sache que dans ce monde, ils existent plusieurs catégories de personnes. Les humains, les anges, les démons et les Néphilim principalement. Pour des raisons que tu apprendras plus tard, des établissements, tels que l'Académie Rose ont été crées afin que soient fixées des règles bien précises entre ces mêmes catégories, et que les choses...

Elle soupira, et se frotta le front, comme si un mauvais souvenir lui traversait l'esprit.

- Que les choses ne dégénèrent pas comme auparavant.

Très bon scénario de film.

- Tu as bien évidemment dû entendre parler d'une vie après la mort. Du fait que selon les actions qu'un homme a accomplies sur Terre, il va soit au Paradis, soit en Enfer.

Je haussai des épaules. Si j'en avais entendu parler? Oui. Si je m'y étais intéressée? Non.

- C'est la vérité, déclara-t-elle simplement. Lorsqu'un homme meurt, à moins que son cœur ne soit assez pur pour entrer directement au Paradis, il passe au purgatoire, afin d'expier toute les fautes commises sur Terre. Rares sont ceux qui deviennent des anges purs sans y passer.

Elle marqua une pause et son visage s'assombrit.

- Mais ça n'est pas accordé à tout le monde. Il y a alors l'autre option, qui est d'aller en enfer, et de connaître le tourment éternel. C'est ainsi qu'une multitude d'âmes subissent au moment où nous parlons les pires souffrances que tu ne puisses imaginer.

Un frisson me parcourut l'échine et je m'agitai nerveusement.

- Seulement, quand un ange s'oppose à Dieu ou commet une faute irréparable, il est banni du paradis et en chute, dans certains cas, après s'être fait couper les ailes. C'est alors un ange déchu, plus communément appelé un démon si de nouvelles ailes noires lui poussent dans le dos. S'il n'y a pas de repousse mais seulement une marque qui apparaît sur l'épaule, c'est un damné.

Était-elle vraiment en train de me confirmer ce que le garçon aux cheveux noirs avait dit avant que je ne m'évanouisse? Quand il avait justement parlé de démons, en sous-entendant que lui et sa clique de dérangés en étaient...

Alors, ils avaient tous chuté du paradis...

Non. Je ne pouvais définitivement pas croire à cela. Ne me sentant pas particulièrement concernée par la religion, les seules fois où j'avais entendu, ou plutôt lu les termes Paradis, Enfer, ange ou démon étaient par exemple dans un des livres d'Emily Pierce, parlant d'une histoire d'amour impossible entre ces créatures. Ou dans les films. Ou encore lorsque ma mère me forçait à aller à la messe du dimanche.

Comment voulait-elle que je puisse croire une histoire pareille? Comment en environ quatre heures que je me trouvais dans cette académie, pouvions-nous nous retrouver là, à parler de choses qui étaient tout sauf normales?

J'avais sérieusement l'impression de devenir folle à mon tour.

- Certains anges, après avoir désobéi ne se font pas couper les ailes, mais chutent quand même, poursuivit-elle. Cela signifie que leur erreur est considérée comme réparable, et qu'il leur reste une chance de se racheter sur Terre avant que leurs cœurs ne noircissent en même temps que leur ailes et qu'ils ne deviennent des démons à part entière. Ce sont des anges gris. Gris, car dans leur chute, leurs ailes prennent la couleur de la poussière.

Je me rappelai les colonnes à l'entrée de l'Académie. Une d'entre elles était surplombée d'ailes noires entièrement déployées et l'autre...d'ailes grises.

Je me levai brusquement du lit, et me mis à faire les cent pas dans la pièce, sur le point de m'arracher les cheveux un par un. Je ne pouvais pas croire ce qu'elle me disait. Peu importe les coïncidences, peu importe ce qu'il s'était passé dans la forêt, peu importe ce qu'il m'arrivait lorsque je m'énervais. C'était tout bonnement impossible. Peut-être y avait-il une vie après la mort, mais justement... cela ne devait-il pas rester après la mort? Pourquoi y aurait-il des démons et des anges sur Terre? Comment personne ne se serait-il rendu compte de leur existence, vu ce qu'ils étaient capables de faire?

- Chaque démon a son propre pouvoir particulier, expliqua-t-elle, en ignorant mon état de choc et en rejetant ses longs cheveux en arrière. Je sais qu'Anna a d'ailleurs jugé utile de t'en faire une démonstration. Je m'occuperai de son cas plus tard. Sinon, tu pourras remercier l'infirmière. C'est une Lire. C'est elle qui a soigné tes plaies. ( Elle m'inspecta du regard.) Ton uniforme est déjà troué et tâché de sang... quel gâchis. Peu importe, je disais donc que les anges gris quant à eux, gardent leur pouvoir d'ange, mais de manière limitée. Et enfin les Néphilim..

Je m'arrêtai net. Lorsque la bibliothécaire lui avait demandé ce que j'étais, Nate avait répondu Néphilim. Pourquoi lui, aurait-il dit cela, même si ce qu'elle me racontait était forcément faux ? De tous ceux que j'avais rencontré pour l'instant, c'était le seul qui ne me paraissait pas cinglé. Cela ne signifiait cependant pas que je pouvais me fier à ces propos.

- Les Néphilim sont des humains avec des dons surnaturels. Ils naissent humains, vivent humains, et meurent comme des simples humains qu'ils sont. Seuls les démons et anges gris sont immortels. Leurs dons peuvent être par exemple la télépathie, télékinésie, invisibilité, clairvoyance, clonage... force surhumaine.

Elle me lança un regard appuyé, mais je secouai la tête.

- C'est ce que tu es, Alice. Une Néphilim. Comme une la plus grande partie des élèves de l'Académie Rose. Un peu plus de 200, si ma mémoire est bonne. Tous dans le même cas que toi, avec des dons différents. Le reste sont des anges gris et des démons.

Il y eut un long silence.

Cette fois, j'étais bonne pour être enfermée. Moi qui me trouvais anormale, j'étais tombée au beau milieu de personnes pire que moi.

C'était une mauvaise blague. Il y avait forcément une autre explication à ce qui s'était passé dans la forêt. Une boule se forma dans mon ventre, et je déglutis, en me rendant compte que même si je le niais, je savais au fond de moi qu'elle ne mentait pas.

- Si tu voulais savoir pourquoi tu ne pouvais pas assister aux cours te voilà servie, commenta-t-elle. Tes parents adoptifs, qui n'ont pas l'air au courant ni pour les Néphilim, ni pour le reste, se sont contentés, de nous parler de ton problème en voulant t'inscrire ici, et automatiquement, nous avons compris que tu n'étais pas une simple humaine. Seulement, le directeur ne se voyait pas te révéler dès le premier jour quel type de personnes tu côtoyais, et quel type de personne tu étais toi même. Je précise tout de même que s'il m'avait écouté, tu aurais certainement évité de l'apprendre en te faisant attaquer par un démon. J'ai beau répéter à Anna de ne pas martyriser les nouveaux, cette fille est une vraie peste. Cela ne se reproduira pas.

Je restai bouche-bée. Incapable de bouger. Incapable de parler. J'essayai tant bien que mal de faire le tri dans ma tête. Démons, anges gris, Néphilim. Anges gris, Néphilim, démons.

Bon, sang! J'étais une Néphilim. Et il y en avait près de deux cents autre comme moi dans cet établissement...

J'étais une Néphilim.

Sentant que mes genoux allaient lâcher, je m'appuyai contre le mur.

- Pourquoi vous croirais-je ? demandai-je, à deux doigts de m'enfuir à toute vitesse.

Elle soupira longuement.

- Peut-être te faut-il une deuxième démonstration d'un pouvoir de démon pour être convaincue.

Elle s'approcha lentement de moi, d'un air fantomatique. Ses yeux virèrent progressivement au rouge et sa voix devint autoritaire... si envoûtante.

- À genou. C'est un ordre.

Mes genoux fléchirent et je tombai immédiatement à terre, agenouillée devant elle, ne pouvant la quitter des yeux. L'étrange sensation que j'avais ressentie un peu plus tôt me submergea à nouveau. Celle d'être une simple marionnette à la merci de cette femme, au regard envoûtant.

- Lève-toi et positionne-toi devant le miroir.

Je m'exécutai.

- Maintenant, gifle-toi.

Je me donnai une claque, qui résonna dans la pièce, mais ne me plaignait pas. pour autant

- Je t'avais pourtant dit que la curiosité était un vilain défaut, souffla-t-elle à mon oreille.

Dans la seconde qui suivis, je sortis de ma transe et portai ma main à ma joue brûlante.

- Aïe! m'exclamai-je. Mais comment...

Elle se dirigea vers la porte de ma chambre, et m'adressa un petit sourire en coin avant de sortir. Je remarquai presque en même temps qu'une feuille était posée sur mon lit, et me précipitai vers elle, toujours en état de choc.

Sur le haut de celle-ci était inscrit :

"Alice Greenstone. Emploi du temps, Classe 1-A.

Néphilim."

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