𝑫𝒆𝒖𝒙 𝑽𝒊𝒔𝒂𝒈𝒆𝒔, 𝑼𝒏 𝑴𝒊𝒓𝒐𝒊𝒓

... Argh...

Haa... Il fait si chaud...

Urgh... Mon corps me brûle...

Ghh... J'étouffe...

Argh... AAHHH !!

Pourquoi... Il fait si sombre ? Et pourquoi...

Je ne distingue plus rien d'humain... ?

Pourquoi... Pourquoi suis-je devenu... Un monstre ?

꧁༺ ༻꧂

Je m'appelle Ajax. Je suis un jeune garçon de 14 ans passionné par le combat. Je vis à Morepesok, un petit village balnéaire à Snezhnaya, région du Grand Nord. Dans ma famille, il y a mes parents, et mes trois frères et sœur : Teucer, Anthon et Tonia. Je passe mes journées à apprendre comment manier mon épée en bois, à courir dans la forêt, à pêcher avec papa au lac... C'est super ! Surtout qu'ici, on n'est peut-être pas des célébrités mais au moins, on vit heureux.

Aujourd'hui, papa m'emmène pêcher ! C'est mon passe-temps favori d'ailleurs, car j'adore attraper de gros poissons, ce sont comme des trophées. Un jour, j'ai réussi à attraper un énorme poulpe, il faisait presque ma taille ! Papa m'a félicité, en me disant que c'était une très belle prise, et a immortalisé le moment en me prenant fièrement en photo. Depuis, elle est accrochée dans ma chambre, avec une petite punaise. Ahh... Que de beaux souvenirs...

Nous nous approchons du lac gelé. Papa me fait signe de rester derrière lui, ce que je fais. Il scie la glace très rapidement et arrive à y faire un trou, puis lance sa ligne dans le trou qu'il a fait. Je brandis à mon tour ma canne à pêche et m'assois à côté de lui pour pêcher à mon tour. On attend comme ça dans le froid pendant longtemps, très longtemps. Le bout de mon nez commence déjà à geler, mais je suis habitué. Mais après environ une heure, aucun poisson n'est venu mordre à l'hameçon, ce qui m'impatiente un peu.

- Hum... Papa, il y a pas de poisson... ! rétorquais-je.
- Sois patient, Ajax... me répondit posément papa. La prise peut se montrer très fructueuse. Pour attraper un gros poisson, il ne suffit pas d'être équipé comme il faut, mais de se montrer très patient. À ton avis, comment les grands héros sont-ils devenus aussi puissants ? Ils ne le sont pas devenus en une journée, mais après des années d'entraînement, en s'armant de bravoure, de patience et d'un courage à toute épreuve.

À ces mots, mon visage s'illumine. Quand papa commence à me dire ça, c'est qu'il va me raconter une histoire... Une histoire de héros.
Je m'approche alors de lui, impatient de ce qu'il va me raconter cette fois-ci.

- Connais-tu l'histoire d'Ajax, héros de Snezhnaya ?
- Hum... non... il est fort ? répondis-je, curieux.
- Oh que oui, il a accompli de nombreux exploits !
- Ohh vas-y, raconte !!

Papa s'éclaircit alors la gorge, puis commence son récit.

- Il y a fort longtemps, un héros nommé Ajax explorait Teyvat afin de trouver des ennemis toujours plus forts à combattre, pour aguerrir son art du combat mais également pour sauver les populations. Il était aimé de tous, fort et robuste, et d'une bravoure sans égal. Un jour, un grand monstre appelé l'Hydre de Givre terrorisa le village de Morepesok. Le vaillant Ajax, ayant entendu les plaintes des villageois sans défense, se décida alors de se confronter à la dangereuse créature. Arrivé dans son antre, il lui sauta dessus, son glaive bien aiguisé ; une attaque que l'Hydre esquiva bien facilement. Notre héros, plein de courage et déterminé à massacrer le monstre, tenta une nouvelle offensive.
Le combat fut d'une extrême violence, mais de courte durée. Ajax, ayant décapité la bête, lui trancha la tête d'un coup de lame ; sorti victorieux de son combat, le guerrier avait maintenant son trophée.
- Wouaahh trop fort !!! Il est trop génial Ajax !!

Je saute alors sur les jambes de papa en lui demandant des caresses. Il me caresse les cheveux, puis me regarde dans les yeux. Je le regarde à mon tour, un grand sourire aux lèvres.

- Alors... Le héros a été acclamé par les villageois ensuite ? Et il a été marié à une belle jeune fille en reconnaissance ?? demandais-je, absorbé par le récit.

Mais bizarrement, le regard de papa s'assombrit.

- ... L'histoire n'est pas aussi glorieuse qu'elle en a l'air. Ajax, voulant présenter la tête de l'Hydre à son peuple, passa d'abord une nuit dans la forêt. Mais le matin, il se rendit compte que son trophée avait disparu. Surpris, il se demanda qui lui avait dérobé son trésor, mais ne trouva aucune trace aux alentours. Déçu, il revint au village annoncer son exploit de la veille, mais s'aperçut que quelqu'un d'autre était acclamé à sa place, un autre guerrier qui lui était inconnu ! Mais le pire, c'est que l'homme tenait dans ses mains... la tête du monstre qu'on lui avait volé. Comment cet inconnu pouvait se prendre pour un héros en mentant sur son "exploit" d'avoir tué l'Hydre à la place d'Ajax ? Visiblement, le peuple y croyait. Ajax, sidéré, se jetta sur l'inconnu et lui cria qu'il était un voleur, un imposteur, non un héros ! Mais Ajax se fit rapidement rejetter par le reste de la population, et par vengeance, tua le voleur. Le peuple, horrifié qu'on ait tué leur sauveur, menacèrent alors Ajax de mort, en tentant de le poignarder ou de le décapiter. On le battit, on le blâma, on le réprimanda, on le tortura. Et ce durant de longues années, plus personne ne voulait voir Ajax sur cette Terre. Le héros, jusqu'alors aimé de tous puis battu depuis son assassinat, ne se résigna plus qu'à une chose : il courut vers son balcon et d'un coup, se donna la mort en se pendant.

À ces mots, mon sang se glace dans mes veines. P... Pourquoi... ? Pourquoi le héros connaît une fin aussi... triste... ?

- P... Papa... Ça s'est vraiment terminé comme ça... ? dis-je, horrifié.
- ... Malheureusement, oui. Le héros ne supportait plus ce monde injuste, alors a voulu abréger ses souffrances, me répondit papa, sans expression.
- ...

Après son histoire, je n'avais plus envie de pêcher. On ne ramena pas un gros poisson à la maison en plus. Il y avait une ambiance de funérailles pendant le dîner. Je n'aime pas quand personne ne parle pendant le repas, c'est pas très joyeux.

Le soir, je m'installe dans mon lit, et observe mon épée en bois posée sur la commode. Ajax le héros est mort, mais moi, le nouveau Ajax, est là pour le succéder. Je vais accomplir ce que ce héros n'a pas pu faire, oui, je vais reprendre le flambeau !! Je vais prouver au monde entier que ce monde est rempli d'injustice et de malheur ! Je serre mon poing en pensant cela, puis choisit ma voie : je bondis de mon lit, empoigne mon épée et cours furtivement hors de la maison.

Papa m'a dit un jour que je ne devais jamais sortir de nuit, car quand on reste seul dans la forêt, on n'en ressort pas vivant...

꧁༺ ༻꧂

La forêt est sombre et silencieuse. Je ne vois rien, et n'entends rien, si ce n'est que mes bruits de pas dans l'épaisse neige ayant garni le sol. Les feuilles mortes craquèlent sous mes pieds, et le hululement de la chouette dans mon dos me surprend. Maintenant bien mon arme en bois contre mon cœur battant à tout rompre, je marche dans la nuit noire. Accompagné seulement de cette épée et de mon sac de pain, je continue mon chemin. Pourquoi ai-je fui ? Pour m'émanciper, pour fuir cette monotonie régnant dans ma vie depuis maintenant trop longtemps. Je n'en peux plus de ne pas pouvoir agir, de vivre sans moi aussi me nourrir de combats comme les grands héros...

Jusqu'alors perdu dans mes pensées, j'entends un hurlement sinistre tout près de moi, me faisant sursauter. Alors que je recule de la source du bruit, je vois avec stupeur une meute entière de loups s'approcher de moi, le regard menaçant. Ces animaux se léchant les babines, je comprends immédiatement que je risque d'être leur casse-croûte pour la soirée. Épouvanté, je fuis à toute vitesse, courant vers un endroit que je ne connais sûrement pas, car je ne réfléchis pas. Je ne réfléchis plus. Une seule et unique chose m'importe à cet instant précis : fuir. Fuir si je veux survivre. Je cours de toute mes forces, aussi rapidement que je le peux, pour échapper aux prédateurs qui sont à mes trousses.

- AAAAHHHHH !!!!!!!!

Je me retourne, et je les vois me rattraper à toute vitesse. Instinctivement, je saute derrière l'arbre à côté de moi, mais plutôt que de les semer, je percute une grosse masse pataude à mes pieds. Qu-qu'est-ce que c'est ?!
Je retombe, terrorisé, et m'aperçoit avec épouvante qu'il s'agit d'un ours géant. Je pousse un hurlement atroce, mon cœur prêt à lâcher. Je sais que je vais mourir, et il ne me reste qu'une seule échappatoire : la mort.
...

Non.

Je refuse.

JE REFUSE DE MOURIR !!!

Voyant la meute de loups me rattraper et l'ours sortir ses griffes, je cours à en perdre haleine le plus loin possible. Mais alors que je m'éloigne, je vois l'ours me bondir dessus, la gueule grande ouverte.

- QUE- AU SECOURS !!!!!!!!

Mais d'un coup, je trébuche et tombe dans un fossé. Un très grand fossé. Alors que je crie à m'en rendre sourd, je sens juste mon corps tomber dans un trou sans fin. Au bout d'un moment, je ressens un choc violent à la tête, comme si mon crâne venait de s'éclater contre le sol. Cet impact me fit une douleur insupportable, si bien que je vis pendant une fraction de seconde le monde qui m'entoure de manière floue, et je m'évanouis.

꧁༺ ༻꧂

Gh... Aïe... Où... Où suis-je... ? Pourquoi... il fait si sombre... ? Quel est cet endroit... ?
Je fais un effort surhumain pour parvenir à me redresser. Ma tête est extrêmement lourde, tellement que j'en ai mal. Mes jambes tremblent, j'ai du mal à me tenir debout. J'ouvre lentement les yeux, et contemple avec stupeur le monde qui m'entoure.

Du vide.

Une infinité de vide.

Dans ce triste paysage dénué de forme de vie, je commence à prendre peur.

- Il... Il y a quelqu'un ?! criais-je.

Mais alors que la peur commence à m'envahir, je vois autour de moi des ombres, des silhouettes, des démons. Ils s'approchent de moi, comme pour m'effrayer encore plus. Pris de terreur, je recule en tremblant, les lèvres glacées. Mais d'un coup, je remarque mon épée en bois au sol. Cette épée qui m'a vaillamment accompagnée pendant des années. Je regarde autour de moi, puis vois les monstres vociférer à mes oreilles "PRENDS ! PRENDS... !!"...

Je regarde en tremblant mon épée en bois.

"PRENDS L'ARME... ! PRENDS-LA !!"

J'ai peur. Très peur. Je sens mon sang se glacer dans mes veines, mon cœur battant à tout rompre. Je m'approche de mon épée, qui pour la toute première fois, m'effraie. Je l'empoigne fermement, et d'un coup, sens une force me paralyser.

- Gh- AAAHHH !!!

J'en retombe au sol, la lame de bois se fracassant à mes pieds. Mais étrangement, mon épée devient brillante, émoussée mais luisante. Je me rends alors compte qu'elle est devenue en argent, et que désormais, elle ne sera plus jamais en bois.

- C'est bien, tu as pris l'épée... Alors comme ça, c'est le chemin que tu choisis ?

Je sursaute. Qu-qui est là... ?! Je me retourne vivement pour repérer la source de la voix, mais ne distingue rien du tout. Mais d'un coup, je vois une jeune femme devant moi. Elle a le regard froid, acéré, et ses cheveux retombant sur son visage ne m'inspirent rien de bon. Elle était pâle comme un mort, et son souffle glacial sur mon visage me fit prendre peur.

- QUI-QUI ÊTES VOUS ?! demandais-je, terrifié.
- Chuuut, me fit-elle en posant un doigt sur mes lèvres. Pauvre petit garçon, tu es bien tristement vêtu. Tu as parcouru un long chemin pour te retrouver ici, n'est-ce pas ? Pourquoi as-tu fui de chez toi ? Ce n'était pas bien, le logis familial ?
- Je... balbutiais-je.
- Ne t'en fais pas, me coupa-t-elle. Je t'apprendrai à manier ton arme, et à ne faire plus qu'un avec les démons. Désormais, tu vivras de combats et de passion.
- V... vraiment... ?
- Oui. Car ici, tu es dans les Abysses, ou devrais-je plutôt dire, l'entrée de l'Abîme.
- Les... "Abysses"... ? répétais-je, en la regardant.

Elle acquiesce, puis s'éloigne. Après avoir fait quelques pas, elle prononce ces mots, qui résonnent alors dans ma tête telles des incantations...

"Si tu veux devenir plus fort, suis-moi."

꧁༺ ༻꧂


Cela fait quelques temps que cette épéiste m'enseigne l'art du combat. C'est vrai que j'ai changé. Je n'ai plus peur de ce qui m'entoure, je ne sursaute plus pour un rien et j'ai maintenant de sacrés réflexes. Je suis capable de briser une nuque comme je brise une brindille, d'éclater un crâne comme j'éclate un œuf, d'arracher des entrailles comme on arrache des mauvaises herbes. Je suis d'accord que j'en ai bavé : j'ai saigné, crié, hurlé, souffert, je n'arrivais plus à me relever. Mais maintenant, je suis prêt.

Cette ambition brûlante et cette soif de puissance inassouvie faisant bouillonner mon cœur m'ont fait devenir ce que je suis aujourd'hui : un monstre de l'Abîme. Un être sans pitié, sans plus aucune part d'humanité. Mais l'épéiste qui m'enseigne m'a dit qu'elle m'apprendrai d'autres techniques, et ce quand j'aurai grandi. J'attends ce moment avec impatience, alors, marchant désormais avec fierté et confiance, je la salue une dernière fois et m'en vais de ces Abysses, un endroit que je ne vais sûrement pas oublier, et encore moins ne pas revisiter.

Je m'en vais, empoignant fermement mon épée d'argent, maintenant rouillée. Depuis le fossé, je vois qu'il fait jour dehors. Je me demande combien de temps il s'est écoulé... hum... quelques mois ? Je l'ignore. Mais alors que je continue d'avancer, j'ai l'impression que le monde autour de moi se dissout. Le paysage reprend ses couleurs, et les monstres abyssaux grogant autour de moi disparaissent. Quand je rouvre les yeux, je suis dans un fossé, mais beaucoup moins profond que celui dans lequel je suis tombé. En grimpant, je peux facilement en ressortir. Mais étrangement, j'entends des voix qui me sont familières m'appeler.

- Ajax ? Ajaaaaaaaaax où es-tu ?!
- Grand frèèèèèère !!! Où es-tuuuuu ?!
- Ajax ? Ajaaax !!

Ces voix... C'est maman ?! Avec... Tonia et les autres ?! Surpris de les entendre, je réponds à leur appel depuis mon trou.

- MAMAAANNN !!! TONIAAA !!! JE SUIS LÀÀÀÀÀÀ !!!! criais-je.
- A-AJAX ?! cria Tonia, dont je reconnus la voix.
- TONIAAA JE SUIS DANS UN TROU !!
- UN TROU ?!
- OUI UN TROU !!!

J'entends par dessus ma tête des bruits de pas, comme quelqu'un qui cherche désespérément quelqu'un chose. Quand je vois une silhouette féminine avec des tresses, je reconnais tout de suite Tonia.

- TONIA !! JE SUIS À TES PIEDS !! l'interpellais-je.
- HEIN ?!

Elle baisse alors la tête et me voit dans le trou, à lui faire de grands gestes de main.

- AJAX !!!! crie-t-elle de soulagement.

Elle tend alors sa main vers moi, que j'attrape avec force pour remonter. Maman, qui a entendu nos cris, vient aider Tonia à me tirer hors du fossé.

Une fois sorti, elle me prend fort dans ses bras, alors que Tonia se jette sur moi et pleure à chaudes larmes.

- ON ÉTAIT MORTS D'INQUIÉTUDE, À LA MAISON... !! TE RETROUVER INTACT APRÈS 3 JOURS EST UN SOULAGEMENT !!! cria Tonia, m'agrippant le vêtement.
- 3... 3 jours... ? répétais-je, sidéré.
- Oui, 3 jours !! Tu te rends compte ?! Un animal sauvage aurait pu te retrouver et te dévorer !!!
- Ah bon... dis-je avec indifférence.

Tonia fait alors de gros yeux et regarde maman, qui ne comprend pas pourquoi je ne suis même pas inquiet. Je ne pleure même pas avec elles, comme si ma vie ne m'importait même plus.

- Euh... Ajax, tu vas bien ? me dit Tonia, me prenant la joue.
- Pourquoi ça n'irait pas ? Je suis en bonne santé, c'est tout ce qui compte ! dis-je, presque en souriant.
- Oui, mais... s'inquiète Tonia.

C'est vrai... Pour moi, le plus bizarre, ce n'est pas d'être revenu intact, mais que seulement 3 jours se soient écoulés dans leur monde ! Attends... "dans leur monde"... ? Alors j'étais dans un autre monde ?

"Ici, tu es dans les Abysses, où devrais-je dire l'entrée de l'Abîme."

Ça... c'est ce que l'épéiste m'a dit, quand j'étais dans ce monde distordu, où la lumière du jour ne passait même pas...
Tonia, toujours inquiète, me sort de mes pensées et me prend les joues, comme pour regarder si j'ai un truc sur le visage.

- Ajax... Tes yeux... dit-elle en tremblant.
- Hum ? demandais-je.
- Je ne sais pas si ce n'est qu'une impression, mais... Ils n'ont plus aucun éclat...
- Ah bon ? dis-je, légèrement surpris.
- Oui... ça fait peur.

À ces mots, je sursaute. Je fais... peur ? Visiblement, car elle s'éloigne de moi et prend la main de maman. Je reste figé, dans le froid, alors que des flocons de neige commencent à tomber sur le bout de mon nez.

- Ajax, viens. On rentre à la maison, dit alors maman, me tendant sa main.

Je la regarde, puis avance, sans lui prendre la main, pour retourner à la maison.
Maman le remarque, et me jette un regard déçu, de regret. Elle est très perspicace, et sait que j'ai changé.

Je retourne donc à la maison, me remémorant ce voyage dans les Abysses.

Mon tout premier voyage.

꧁༺ ༻꧂

Le temps est passé très vite. J'ai grandi, et suis devenu plus téméraire, plus frivole, plus rebelle. À chaque fois qu'il y avait une légère dispute entre deux personnes dans le village, plutôt que d'essayer de l'arranger, je fonçais dans le tas pour ajouter de l'huile sur le feu. De grandes bagarres avaient donc lieu, dont j'en étais avec réjouissance la source, impliquant alors des dizaines de personnes. J'étais de plus en plus craint à Morepesok, car j'étais vu comme "l'annonceur des pires calamités" ; un être au cœur de la tempête.

Depuis mon voyage dans les Abysses, je reviens à la maison toujours égratigné. Je ne souris plus de la même façon, d'après mes frères et sœur : avant, je sourais quand j'étais heureux, certes, mais maintenant, je ne suis plus heureux pour les mêmes choses. Je me suis légèrement désintéressé de l'amour que je portais pour autrui, car maintenant, seuls les combats hauts en couleurs et en sensations attisent mon excitation.
Mon père le sait : selon lui, j'ai changé, mais pas du bon côté. Je suis toujours celui qui met le feu aux poudres, qui empire les conflits et les rend plus corsés. Il le regrette, car il m'a clairement dit que "je devais me calmer". Selon lui, j'avais changé pour le pire, causant disputes et ravages partout où je passais, ce qui n'était pas pour me déplaire.

Un jour, je vis une dispute entre deux marins sur le port. Un sourire satisfait aux lèvres, je m'approche des deux hommes, déchargeant des cargaisons d'un bateau. Ils se disputaient parce que l'un avait oublié une marchandise dans un autre port, et qu'y retourner prendrait trop de temps. Alors l'autre n'est pas content et lui demande de se dépêcher.

- Bonjour, messieurs ! dis-je. Que vous arrive-t-il ? Laissez-moi vous aider !

Je prends alors une lourde marchandise entre mes mains, et va l'apporter là où ils avaient l'air de les déposer. Les deux marins me regardent avec effarement, ne comprenant pas ce que je fabriquais.

- Que fais-tu, gamin ? me dit l'un.
- Hep hep hep, je ne suis pas un gamin, ripostais-je d'un coup. Depuis quand à 16 ans on est un gamin ? Parce que vous êtes vieux, c'est ça ? Oups, permettez-moi de m'excuser. Enfin bon, un peu de politesse, je suis en train de vous aider.
- Je te trouve bien insolent, petit. Vas jouer ailleurs, on est occupés.
- Je ne fais que vous aider, si vous ne comprenez pas.

Un peu agacé par leur comportement, je repose un peu violemment la cargaison que je portais, la brisant sans le vouloir. Allons bon...

- L-la marchandise... !! dit le deuxième marin, visiblement plus craintif.
- Tss, alors comme ça on endommage nos marchandises ? Déguerpis, gamin ! Tu nous fous plus le bordel qu'autre chose !! me rétorqua sèchement le marin aigri.
- Oups, je crois que j'ai en effet endommagé votre petite marchandise, dis-je d'un air narquois. Mais ne serait-ce pas plutôt votre punition pour me parler sur ce ton ? ~
- FOUS LE CAMP, SALE GOSSE !!

Le marin me prend par le col, ce que je réponds vicieusement par un coup de pied bien placé dans sa partie sensible. Il en retombe d'un coup, douloureux, en m'insultant de tous les noms.

Les autres villageois, voyant que j'ai frappé le marin, viennent vers moi et commencent à m'agripper le haut aussi. Non mais c'est quoi, leur problème ? Ils me font alors des remarques, ce que je réponds par un autre coup de poing aussi. Cette fois, la foule, effarée, commence à me frapper de n'importe où. Super, tout le monde s'y met ! Nan mais regardez moi ces idiots... Avec amusement, je frappe à tort et à travers, que les autres répondent par des coups également. Lorsque l'un frappe sur un autre sans le faire exprès, il y réagit très vite en lui foutant un pain à son tour. Et c'est comme ça que ça dégénère... Tout le monde se jette sur moi, mais également les uns sur les autres. Hahahahahaha !!! Que j'aime cette ambiance !! Chacun pour soi, allez allez !! Que la baston commence, ça devient intéressant !!!

Une violente baston générale éclate donc entre tous les marins, passants et autres marchands. Bien évidemment, c'est moi qui est au cœur de ce conflit, mais je m'en moque ! Je me fais lyncher par la foule, mon arcade sourcilière s'ouvre, mon nez en saigne, mais peu importe, tant qu'on s'amuse !
Alors que je donne une ruée de coup à mes assaillants, je vois au loin une personne courir à toute vitesse en ma direction : c'est mon père.

- AJAX !!! MAIS QU'EST-CE QUE TU FAIS ?! me crie-t-il, mort d'inquiétude.
- T'INQUIÈTE, 'PA ! JE M'AMUSE !!!

Mon père arrive alors, accompagné de quelques marchands voulant arrêter la dispute.
Il se jette sur moi, et me prend les deux épaules.

- Mais, fiston... TU ES MALADE ?! QU'EST-CE QUE TU VIENS DE FAIRE ?!
- Arrête de psychoter, je te dis... répondis- je avec indifférence, en croisant les bras. J'ai juste provoqué une petite baston, c'est tout...
- T-TU APPELLES ÇA "PETITE" ?! MAIS REGARDE-MOI CE DÉSASTRE !!!!
- HEY, LAISSEZ-MOI BUTER CE GAMIN !!! hurla un homme dans la foule, certainement un passant que j'ai frappé pour je ne sais même pas quelle raison.
- E... Excusez-le... il est juste... en pleine crise d'adolescence... répondit timidement mon père, ne sachant quoi dire.
- QUOI ?! criais-je, ahuri. MAIS... N'IMPORTE QUOI !!
- AJAX, TAIS-TOI !! ON RENTRE, MAINTENANT !!
- MAIS... NAN !!!

Mon père me gifla violemment. J'en retombe à terre, abasourdi. Que... Qu'est-ce qu'il vient de se passer... ?

Je me tiens alors la joue, en faisant mes yeux de poisson frit. Mon père arrive avec quelques hommes vers la foule et tente de calmer tout ce remue-ménage.

Finalement, on rentre à la maison, avec mon père me tenant furieusement la peau du cou. Une fois arrivés, ma mère sursaute en voyant mon visage taché de sang.

- Ajax, mon Dieu !! Que diable t'est-il arrivé ?! crie ma mère, inquiète.
- Cet imbécile s'est bastonné avec toute la foule, rétorque mon père, désespéré.
- Quoi ?! Encore ?! s'étonne ma mère.

Mon père acquiesce, puis me demande de rester dans ma chambre. D'après lui, il veut entretenir une discussion importante avec ma mère, et il ne veut pas que je vienne les interrompre. Bon...

Je m'enferme donc dans ma chambre et reste alors dans mon lit, en restant torse-nu. Je tâte un peu mon corps, et passe mes doigts sur mes abdominaux. Je sens qu'il y a des muscles en dessous, ce qui me fait sourire. Je regarde la fenêtre de ma chambre, et me relève pour refermer les rideaux.

Je me réinstalle dans mon lit et cette fois, observe les cicatrices sur mes bras. Personnellement, je les aime beaucoup, car elles sont les traces de combats ardus et passionnés. Les garder est comme une récompense pour moi, la trace de ce que j'ai affronté jusqu'à présent.

Je continue mon exploration, quand cette fois mes doigts glissent sous mon pantalon. Oh...
Je commence à palper ce membre dont je n'ai jamais vraiment prêté attention. Plus je le referme ma main dessus, plus je sens quelque chose d'étrange en moi. Une sensation nouvelle... Une chose qui n'est pas désagréable. Alors que j'en titille le bout avec mon doigt, je sursaute de plaisir.

- Hm !! ~

C'était quoi ça ? Je continue donc, me demandant qu'est-ce que c'était que cette drôle de sensation. Si quelqu'un me faisait ça... je pense que j'éprouverais vraiment du plaisir. Mais personne ne m'aimera, car je suis un monstre. Je ne peux pas éprouver ce genre de sensation, puisque je ne suis plus humain. Alors... si ce n'était pas du plaisir, qu'est-ce que c'était ? C'était vraiment autre chose... ?
Curieux de savoir, je continue mes mouvements de main, ne comprenant pas pourquoi ce geste me plaisait tant. Je retire donc mon bas, le trouvant dérangeant.

Alors que je commence à gémir à longs soupirs de plaisir, la porte de ma chambre s'ouvre brutalement. Je vois mon père me regarder, sidéré, avec de gros yeux ronds. Extrêmement gêné de ce que je venais de faire, je prends ma couette pour cacher ma partie intime.

- Qu-qu'est-ce tu fais... ? me demande mon père, ayant très bien vu ce que je faisais.
- Je- Aucune importance !! répondis-je, mort de honte.
- Juste Ciel... allez viens. Habille-toi, on sort.
- On... On sort ? La nuit ? Mais où ?!
- Habille-toi, c'est tout ce que je te demande.
- Roh...

Mon père descend alors, m'attendant à l'entrée. Pas que j'ai peur de sortir la nuit, loin de là, mais seulement que ça m'étonne que mon père veuille que je sorte en pleine nuit, il ne le fait jamais.
Habillé, je le rejoins, puis il m'emmène dehors, vers une destination que je ne connais sans doute pas.

Après environ une heure de marche, nous voilà devant un grand palais luxueux. Mon père regarde le lieu, puis baisse les yeux. Mais... je reconnais cet endroit... Le Palais de l'impératrice de Glace ?! Mais pourquoi mon père m'emmène là ?!

- Entre, me dit mon père.
- Euh... ok...

J'entre donc dans le grand palais, accueilli par les Fatuis.

- Bonjour, jeune homme, me dit un Fatui en s'inclinant rapidement. À la demande de votre père, nous allons vous faire suivre notre strict entraînement militaire.
- Mais... Pourquoi ? demandais-je, ne comprenant pas.
- Pour te remettre dans le droit chemin, me répond mon père. J'aimerais que ton tempérament téméraire te serve à quelque chose, autre qu'à attirer des ennuis. Je fais ça pour ton bien, sache-le. Je le regrette, mais je n'ai plus le choix.

À ces mots, mon père s'éloigne. Je tente de le rattraper, me demandant par quelle folie il avait eu l'idée de m'abandonner ici, mais le Fatui me retient.

- Je- PAPA !! NE M'EMFERME PAS ICI !!! criais-je, mon cœur battant fort dans ma poitrine.
- Désolé, Ajax...
- PAPA !!!!!

La grand porte se referme donc devant moi, me laissant seul avec le Fatui. Ça faisait bien longtemps que je n'avais pas appelé mon père "papa". Quand je l'appelle comme ça, c'est que je recherche de l'attention de sa part... Alors comme ça, je vais rester ici ? P... papa...

- Venez, jeune homme. Votre entraînement va commencer.

꧁༺ ༻꧂

Le Fatui m'a ensuite emmené dans une salle d'entraînement, où j'eus le droit à une épée. D'autres Fatuis arrivèrent et me mirent au défi de les battre. J'ai donc accepté, et à la surprise générale, je réussis à tous les vaincre, et ce avec une aisance assez étonnante. Alors que je fis un sourire triomphant, je vois un homme sortir de l'ombre. Un homme... que je n'ai jamais vu.


- Très intéressant... Ton style de combat est redoutable, je dois l'admettre... me dit l'homme.

- Qui êtes-vous... ? demandais-je.
- Mon nom est Pulcinella, et je suis le Cinquième Exécuteur des Fatuis. Sache que ton don pour le combat, malgré ton jeune âge, est surprenant.
- Oh, euh, je vois...
- Quel est ton nom ?
- Oh euh... Ajax...
- Je vois. Ton père nous a confié que tu étais toujours celui qui déclenchait les pires calamités. Être au centre des disputes, je dois t'avouer que ce n'est pas commun.
- ... Où voulez-vous en venir... ?
- Je vais te garder chez les Fatuis. Tu es vraiment un être intéressant, Ajax...
- ?!

Au début, j'ai cru que ce moustachu plaisantait. Mais il m'a réellement emmené voir la Tsarine en personne... Attends quoi ? LA TSARINE ?! MAIS POURQUOI ?! Pulcinella me prend le bras et m'emmène devant elle.

- Oh, fait-elle simplement.

Déstabilisé, je tente de m'incliner, pour la saluer. Alors que je ne sais quoi dire, Pulcinella prend la parole.

- Ce jeune Ajax est une personne ayant attiré ma curiosité, votre Majesté, dit-il en posant un genou à terre. Je suggère donc, si vous me le permettez, de vous le remettre, pour qu'il puisse vous servir.

Je me retourne vers Pulcinella, ne comprenant pas pourquoi il disait ça. S... Servir l'Impératrice de Glace en personne ?! Moi, un simple garçon sans importance ? J'ouvre la bouche devant le Cinquième Exécuteur pour tenter de prononcer un mot, mais aucun son n'en sort. La Tsarine me regarde alors, plongeant ses yeux d'un bleu givré dans les miens. Elle inspire un souffle glacé, puis prend à son tour la parole.

- "Ajax" hm ? Si Pulcinella en personne te recommande, c'est que tu as du potentiel.

Elle se lève de son trône de glace et s'approche de moi, me prenant le menton. Étrangement, il n'y a aucune agressivité dans son geste. Elle me retient juste de ses doigts glacés.

- Pauvre garçon... Je lis à travers tes yeux de la souffrance. Tu n'as jamais été traité comme tu le souhaites, toi qui a toujours soif de sang et de combats. Tu aimerais qu'on te considère comme tu le mérites, qu'on puisse te louer, t'admirer, t'aimer. Ton regard est bien triste, et j'en lis une profonde désolation à travers. Toi qui vis pour te battre et devenir toujours plus fort, viens à mon service, et tu pourras enfin vivre ton rêve, éphémère certes, mais bien réel.

Ses paroles illuminent alors mon visage pourtant assombri. L'Impératrice en personne me tend la main : elle est donc prête à réaliser mon rêve ? Moi qui suis rejeté de tous, j'ai le droit d'être reconnu comme humain ? C'est bien la première personne qui me considère à ma juste valeur... Comment pourrais-je refuser ?

- C'est entendu, votre Majesté, dis-je humblement en posant ma main sur le cœur. Je suis prêt à donner ma vie pour vous, si vous réalisez mon rêve... J'en fais le serment.
- Oh, voilà qui est bien parlé, me répond-elle en me souriant avec bienveillance. C'est d'accord, je t'offre mes ailes pour que tu deviennes celui que tu désires. Mais en échange... Tu me dois une reconnaissance éternelle. Tu dois être prêt à tout sacrifier pour me servir.
- Entendu, votre Majesté.
- Parfait. Désormais, tu t'appelleras Tartaglia. En tant que noble Fatui, il est en ton devoir de porter fièrement ce nom !
- Oui, votre Majesté !

Je sens, malgré mon assurance, mon sang se refroidir dans mes veines. Mon but ultime va enfin se réaliser, mais... ma vie appartient désormais à sa Majesté ? Hum... Peu importe. Ce n'est pas la mort qui va me faire peur. Après tout, qui va pleurer pour moi le jour où je quitterai ce triste monde ? Personne.
Mais donc... Ajax n'existe plus ? Tartaglia le remplace ? Décidément, je ne deviens plus du tout le même...

- Suis-moi, Tartaglia. Je vais t'apprendre à utiliser la force à bon escient, me dit Pulcinella, me faisant sortir de mes pensées.
- Oh, euh, j'arrive.

꧁༺ ༻꧂

Gh... AAARGH !!! BORDEL, ÇA FAIT UN MAL DE CHIEN !!!!! J'entends mes os craquer, me faisant alors me tordre de douleur. Argh... La douleur est insoutenable... AAHH... AAHHH !!!! Mes muscles se contractent, et raidissent. P... Pourquoi ?! Je souffre le martyr, et hurle de douleur.

- Ben voyons... Sa Majesté a eu l'honneur de te confier un Œil Maléfique, et tu n'es même pas fichu de savoir t'en servir ? me vocifère Arlecchino. Crétin, va !
- Bhahaha !! Quelle petite nature !! ricane Scaramouche.
- Taisez... vous... argh... répondis-je, la douleur me relançant.
- Désolée pour toi, mais pas très crédible, venant d'une victime à terre... me dit Columbina en inclinant la tête.

Effectivement, j'étais à terre. Rongé par la douleur, je ne pouvais plus faire un geste, mes muscles traumatisés et paralysés.

Depuis que je fais partie des Fatuis, Pulcinella a demandé à sa Majesté de me donner le rang d'Exécuteur ; je suis aujourd'hui le Onzième, donc le dernier, mais également le plus jeune. J'ai appris plus tard que les Exécuteurs étaient classés selon leur force : me retrouver dernier m'a bien frustré honnêtement, mais Pulcinella m'a dit que ça me forçait à "commencer en bas de l'échelle". Bon, s'il y tient tant...

Maintenant Exécuteur, la Tsarine m'a remis un Œil Maléfique. Qu'est-ce que c'est ? Un objet très convoité par les jeunes novices parmi nous : l'essence même de notre force à nous. Il s'agit d'un Œil Divin, mais aux avantages différents. En plus du mien, quu est Hydro, mon Œil Maléfique qui est Électro me laisse donc une utilisation à volonté des deux. De plus, mon Œil Électro me permet de me transformer en un véritable... Monstre de l'Abîme. C'est cette même épéiste que j'ai rencontré il y a quelques ans qui m'a enseigné l'art du Foul Legacy, la bête abyssale qui sommeille désormais en moi. Quand je prends cette forme, ma taille, mon poids, mon envergure, et bien évidemment ma force, augmentent considérablement. Je deviens un démon, une vraie bête : plus rien sur mon chemin ne peut me résister. Mais... l'utilisation de cette force abyssale n'est pas sans contrecoup : à chaque fois que je la déploie, elle me déchire l'intérieur, et me brûle le corps entier d'une douleur lancinante. Elle me draine mon énergie vitale, donc je ne peux pas me permettre d'employer cette force à tout va, où j'en périrai très vite.

Mais alors que j'essaie de me concentrer pour canaliser cette force explosive en moi, sous le regard menaçant et moqueur des autres Exécuteurs, me voilà en train de hurler de douleur. Je ne m'entends plus, je ne vois plus rien autour de moi, et cette violente douleur pulsatile me compressant la cage thoracique me fait cracher par flots un sang rouge écarlate. Mon monde entier s'écroule, et c'est alors que je tombe dans un triste environnement de désolation...

... le même monde que lorsque je suis tombé dans les Abysses pour la première fois.

Je suis dans le noir, et ne distingue rien. Perdu dans cet océan de vide m'étant pourtant si familier, une odeur âcre que j'apprécie tout particulièrement vient soudainement me prendre le nez : celle du sang. Mais contrairement à d'habitude, cette odeur me fait frissonner ; non de plaisir, mais de peur. Des ombres difformes et menaçantes se jettent brutalement sur moi, comme pour me dévorer. Je fais un pas en arrière pour esquiver, mais elles me retiennent désormais, sentant à leur contact ma peau me brûler. Je commence à gémir de douleur, et à ce moment là, des démons abyssaux s'approchent de moi en vociférerant "MEURS, HUMAIN !!! TU N'AS PAS TA PLACE EN CE MONDE !!!!"...

- Gh... A... ARRÊTEZ !! criais-je, tentant d'échapper à leur étreinte.

Une silhouette transparente vient alors me transpercer le ventre d'un coup sec, et fouiller dans mes entrailles. Je hurle, la souffrance se faisant alors ressentir au plus profond de mon être. J'ai l'impression de trembler, de vibrer de fièvre, de ne plus être moi-même. Alors que les ombres autour de moi, menaçantes, m'arrachent les boyaux devant mes yeux, je n'ai qu'une envie : les anéantir, les faire disparaître pour de bon. Ces cauchemars me hantant jour et nuit ne vont donc... jamais cesser... ?!

- D... DÉGAGEZ !!!!

D'un violent coup de poing, je tente de repousser mes attaquants ; mais... je ne l'ai pas atteint... ? Mes attaques ne lui font rien !! Les ombres continuent, cette fois m'arrachant les membres. À la vue de mon bras s'arracher avec force, je crie, l'hémoglobine coulant à flots sur le sol. On me tire le bras, les tendons, on m'ouvre l'artère, on me scie l'os... !!

"MEURS, HUMAIN !! MEURS !!!!"

Là, je ne peux plus résister. Je déploie avec les forces qu'il me reste Foul Legacy. Mais dans un éclat de lumière, je vis une scène presque imaginaire ; je ne sais moi-même d'où elle vient. Je vois juste, au milieu de cadavres ensanglantés et de mares de sang, un miroir.

Un miroir.

Pourquoi... ? Je m'approche alors, et vois à travers la glace mon visage quand j'étais enfant. Je suis souriant, et ne comporte aucune tache de sang sur moi.

- ... !!

Je ne sais pourquoi, mais cette image me fait verser une larme. Je regarde le miroir et ma silhouette, puis passe ma main dessus, comme pour effacer ce souvenir trop lointain maintenant. Je vois alors mon reflet, mais pas tout à fait celui que je suis maintenant... Le Ajax aux yeux d'un éclat luisant, bleu océan, et au grand sourire. Puis j'ai le moi d'aujourd'hui qui se révèle dans le miroir : mon visage a pâli, mes yeux se sont assombris et sont devenus ternes, mon regard est devenu sans vie, et mon visage dénué d'expression. J'ai l'air d'être déjà mort.

"Ajax, tes yeux... Ça fait peur."

Gh... Pourquoi les paroles de Tonia me reviennent en tête... ? Je fais peur... ?

J'ai mal...

M... MAIS OUI, JE LE SAIS !!! JE SAIS QUE JE FAIS PEUR !!! ARRÊTE DE ME REGARDER AVEC CES YEUX-LÀ !!!!

J'ai mal... Très mal !!

TAIS-TOI, IDIOT !!! JE SAIS QUE J'AI MAL !!! LA FERME, MAINTENANT !!!!

Quelle cruauté... Tu ne penses même plus à moi... ?

Quoi ?

Je regarde à nouveau le miroir, et m'aperçois que depuis le début, c'était mon reflet dans le miroir qui parlait. Pourquoi... ? Pourquoi mon reflet parle ?

Mais derrière la glace, j'aperçois ce reflet se faire transpercer le torse, avant de s'effondrer à terre, ensanglanté.

- Q... QUOI ?!

Je tente de rattraper mon reflet à travers le miroir, mais ne peux pas passer en travers. Qu'est-ce qu'il s'est passé... ?

- C'est toi qui l'a laissé mourir, je te rappelle.


... ?! Qui parle ?! On dirait ma voix... Mais je n'ai rien dit !! Alors qui est là... ? Je vois une ombre apparaître à travers le miroir, prenant place du moi assassiné : un moi habillé en noir, aux yeux ternes et violets, taché de sang de toutes parts. L'élément Électro a l'air de converger autour de lui... Mon Œil Maléfique ?

- Qui es-tu ?! demandais-je en regardant ce double avec effarement.
- Hein ? Je suis Tartaglia, quelle question ! Tu ne sais même plus qui tu es ? me répond la silhouette avec indifférence.
- P... Pourquoi tu as tué Ajax ?! Réponds !!
- Ce n'est pas moi qui l'ai tué, mais bien toi.
- Mais ce n'était qu'un reflet !! Je ne peux pas tuer quelqu'un à travers un miroir !!
- Normal, le Ajax que tu as tué était ce qu'il restait de toi. Ta part d'humanité.
- Qu... quoi ? Attends, je ne te suis plus...
- Maintenant qu'Ajax est mort, la part de vie qu'il restait en toi est morte aussi. Tu n'es désormais qu'un monstre abyssal, sans plus aucune émotion humaine. Tu m'entends ? Tes yeux ont perdu à jamais leur éclat... Ils ne brilleront plus. Ajax est mort. Tu es mort.

Ces mots, prononcés comme une sentence inévitable, me compriment alors le cœur avec force. Je commence à enfin comprendre...

- Ça y est, tu as enfin capté ? me rétorque mon reflet aux teintes violettes. Je suis Tartaglia, toi. Ce que tu es devenu.

Je relève alors violemment la tête, voulant regarder mon reflet obscur. Je le vois donc sortir du miroir, puis me prendre dans ses bras. Je tremble, puis il disparaît. Alors que je rouvre les bras, je m'aperçois que j'ai changé : j'ai le même visage que le reflet. Mes yeux sont violacés, et le sang sur mes vêtements pénètre chaque parcelle de mon corps froid.

Ça y est... Ajax est mort.

Tartaglia... a pris sa place.

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ÇA Y EST. J'AI ENFIN FINI CET OS. AAAAHHHH !!!!!!
J'ai juste 13 jours de retard, mais à part ça, je n'ai pas l'air de m'inquiéter-

Oui, je participe au PAAvril2023, un concours de fanfics de ReikaBlossom, mais j'ai rendu mon OS en retard à cause de mes épreuves de brevet (brevet blanc en plus T_T) à passer et mon oral blanc à préparer également ! Au secours j'avais trop de boulot, maintenant je suis vannée mais comme pas possible...

Je pense que vous vous en apercevez, en ce moment je poste plus la suite de mes fanfics. Je vous promets que je reprendrai bientôt du poil de la bête pour sortir la suite de mes fanfics !! T^T

Sinon, pour vous chers lecteurs, j'espère que cet OS, décrivant le passé de Tartaglia, ou devrais-je dire Ajax, vous a plu ! Je ne sais pas ce que vous pensez de la fin, peut-être est-elle un peu cafouillis... ;-;

Alors, bonne nouvelle : cet OS aura une suite ! Mais ce sera une fanfic, donc avec plusieurs chapitres, et dans une nouvelle histoire. On peut considérer cet OS comme un Flash-Back de la future fanfic... XD

Pour ceux qui veulent le savoir, la vidéo que j'ai inclus dans le début du chapitre est "I got no time", de Kokone Akita sur YouTube. Pourquoi ce choix ? Tout simplement parce qu'avec les paroles de la musique (que j'adore honnêtement), cette animation rend Tarta vraiment touchant, je ne sais pas comment l'exprimer... Mettez les sous-titres si vous ne comprenez pas les paroles, et vous découvrirez le lien avec cet OS. ;)
Le fanart de fin est d'Azuma !

Voilà voilà, je ne vais pas vous embêter plus longtemps... J'espère sincèrement que cet OS vous aura plu, et qu'il reste quoiqu'il en soit plutôt fidèle à la véritable histoire de Tarta. ^^

À bientôt ! ~

(6980 mots)

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