33. J'accepte.

Je me réveillai en sursaut, le cœur battant. Aussitôt, la panique m'envahit. Je ne sentais plus Louise dans mes bras. Précipitamment, j'allumai la bougie, qui diffusa une faible lueur dans la pièce. Et, en me tournant, j'aperçus ma fille qui dormait paisiblement à côté de moi. Je m'étais inquiétée pour rien.

En soufflant de soulagement, je la pris avec précaution dans mes bras, et m'adossai aux oreillers. Je caressai doucement ses cheveux noirs, apaisée par sa présence. Louise dormait comme dormaient les enfants, son petit poing serré près de sa bouche. Je me penchais pour embrasser son crâne quand j'entendis soudain un craquement.

Aussitôt, je la serrai contre moi en laissant mon regard examiner la pièce. Mais à part quelques zones d'ombre près de l'armoire en face de mon lit, à côté de la fenêtre et près de la porte, il n'y avait rien. Alors, je me détendis. Dès que j'avais Louise dans mes bras, je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter pour le moindre bruit. Un sourire amusé m'échappa.

Mais il y eut un autre craquement. Alors je resserrai mon étreinte autour de ma fille et demandai d'une voix mal-assurée :

« - Que... Y a-t-il quelqu'un ? »

Normalement, personne n'aurait dû me répondre. Mais je vis du mouvement en face de moi. Et une personne sortit de l'ombre.

Stupéfaite, j'écarquillai les yeux en reconnaissant Louis. Ses traits étaient tirés, comme s'il n'avait pas dormi depuis un moment. Et il me fixait d'un regard douloureux. Immobile, je ne pouvais réagir. J'étais trop secouée de le voir là, en pleine nuit, dans ma chambre. Lentement, comme je ne réagissais pas, Louis s'avança vers moi, jusqu'à se planter devant mon lit. Et il souffla :

« - Charlotte, je t'en prie... »

Ce fut comme si je récupérais la maîtrise de mon corps.

Je me reculai le plus loin de lui en serrant Louise contre moi, et sifflai d'un ton agressif :

« - Va-t-en ! Je t'ai dit que je ne voulais plus te voir !

- Charlotte, écoute-moi... »

Même sa voix semblait lasse, épuisée. Son regard fatigué se porta sur Louise, et, l'espace d'un instant, ses prunelles s'éclairèrent :

« - Elle est si belle...

- Que veux-tu ? »

Ma question claqua, sèche. Il était hors de question que je me laisse de nouveau avoir par mon cœur.

Lentement, Louis baissa le visage, avant de tomber à genoux devant moi. Sous mes yeux stupéfaits, il écarta lentement les bras :

« - Tu as gagné, Charlotte. Je suis à genoux devant toi. »

Ebahie, je restai immobile. Le roi du plus puissant pays d'Europe était à genoux devant moi. Ma respiration se coupa tandis qu'il continuait, son regard gris dans le mien :

« - Je suis incapable de vivre sans toi, Charlotte. J'aurais dû le comprendre bien avant, mais j'ai été trop stupide. J'ai cru que... Que je pourrais faire taire cette inclinaison en moi, mais... J'aurais dû savoir que je n'y arriverais jamais. »

Louis soupira, avant de ployer l'échine devant moi :

« - Je t'aime, Charlotte. Je t'aime éperdument. Je t'aime comme je n'ai aimé aucune femme avant toi. Je supporte de moins en moins cette distance entre nous, distance instaurée par ma stupidité et ma bêtise. Je sais que je t'ai dit des choses horribles, et je le regrette terriblement. J'étais énervé, et mes mots ont dépassé ma pensée. »

J'étais incapable de réagir. Je savais que j'aurais dû répliquer ou le renvoyer, mais le voir ainsi m'en empêchait. Il s'était incliné devant moi, le roi s'était incliné devant moi.

Louis releva ses yeux vers moi, et son regard se posa sur Louise :

« - A cause de mon comportement puéril, ridicule et indigne, je n'ai jamais pu tenir notre enfant dans mes bras. Je n'ai jamais pu te dire à quel point j'ai été soulagé en apprenant que c'était une fille. Je n'ai jamais pu te dire à quel point j'étais fier de toi, et combien de t'aimais davantage chaque jour. »

Il se redressa, avant de se relever pour se rapprocher de moi. De nouveau, il s'agenouilla à côté de ma couche, avant de tendre une main hésitante vers Louise. Sans hésiter, je la lui tendis. Et aussitôt, un immense sourire étira ses lèvres. Il prit notre fille dans ses bras, avant de s'asseoir au bord du lit. Avec des gestes lents, je vins à côté de lui, et fus subjuguée par la tendresse que je lisais dans ses prunelles grises.

Louis berçait doucement notre fille, un sourire aux lèvres. Il se pencha pour embrasser son front, avant de souffler :

« - Elle te ressemble tellement... Comment s'appelle-t-elle ?

- Louise, comme ma mère. »

Il acquiesça, avant de tourner la tête pour embrasser ma tempe :

« - C'est un très beau prénom. Même si pour suivre les coutumes, elle aurait dû s'appeler Louise-Charlotte. »

Je m'empressai de secouer la tête. Je ne voulais pas donner mon prénom à ma fille, c'était tellement prétentieux ! Je répliquai :

« - Non, elle s'appellera Louise. Il est hors de question que ma fille porte mon prénom.

- Très bien, Charlotte. Nous ferons comme tu veux. »

De nouveau, ses lèvres se glissèrent sur ma tempe. Et un frisson d'aise me parcourut. Combien j'étais bien dans ses bras...

A mon oreille, Louis soupira :

« - Pourquoi est-ce que je fais toujours tout de travers avec toi, ma Charlotte... »

Je haussai les épaules, avant de poser la tête de son épaule. Il était vrai qu'à chaque fois, Louis agissait toujours de travers. Avant de revenir.

Il enlaça ma taille d'une main, gardant de l'autre Louise nichée au creux de son bras. Je caressai doucement la joue de ma fille, avant de murmurer :

« - Peut-être que tu as peur...

- Et de quoi aurais-je peur ?

- De toi-même. »

Il baissa le visage vers moi, les sourcils froncés :

« - Pourquoi aurais-je peur de moi ?

- Tu as dit toi-même que... Que tu as essayé de... De combattre ton inclination pour moi. Alors peut-être que tu avais peur d'y succomber ? »

Il eut un rire silencieux, avant d'embrasser mon nez :

« - Mais j'y ai succombé, Charlotte. Il y a bien longtemps. Dès l'instant, je crois, où je t'ai embrassée pour la première fois. »

Je ne répondis pas, me contentant de fermer les yeux pour apprécier cette sensation de plénitude. Il n'y avait que dans le silence où j'étais sûre que tout se passerait bien.

Soudain, Louis me demanda :

« - Et si tu revenais à la Cour ? Vivre avec moi ? »

Aussitôt, je relevai la tête pour le regarder :

« - Moi ? Mais... Pourquoi ? »

Louis déposa notre fille sur les oreillers, avant de prendre mes mains dans les siennes :

« - Charlotte, je... Je te veux près de moi. Je ne veux plus jamais que tu sois loin de Versailles. »

Les yeux écarquillés, j'essayais d'assimiler sa demande. Il voulait que je revienne. Embrassant mes doigts, il murmura :

« - Tu manques terriblement aux enfants, et... Tu me manques. Charlotte... Alors je t'en prie... Deviens ma favorite. Officiellement. »

Stupéfaite, je cherchai son regard, le cœur battant :

« - Ta favorite officielle ? Mais... Et Athénaïs ?

- Athénaïs ? Oh, voyons... »

Louis eut un léger sourire :

« - Elle n'est plus rien pour moi, Charlotte. C'est toi que j'aime, et toi que je veux à mes côtés. »

Une vague de panique me frappa, mais Louis prit aussitôt mon visage entre mes mains :

« - Je t'en prie, ne panique pas. Ne pense pas aux courtisans, pense juste à toi, à moi, et à Louise. Nous serions réunis.

- Je pourrais la voir à tout moment ?

- Bien sûr. Elle ne te sera pas enlevée. »

Je portai mon regard sur Louise. Serais-je prête à revenir à la Cour ? A être aux côtés de Louis, à la vue de tous ?

Il me fit soudain basculer sur le lit, et se pressa entre mes jambes en m'embrassant fougueusement. Aussitôt, mon corps réagit. Je l'enlaçai vivement en répondant à ses baisers. Et tout contre mes lèvres, Louis me supplia de nouveau, sa voix rendue rauque par le désir :

« - Charlotte, je t'en prie... Accepte. Je ne peux m'éloigner longtemps de Versailles, mais être loin de toi me tue. Je t'en prie, reviens. Reviens à mes côtés. »

Ses prunelles grises étaient intenses. Mais je ne pus m'empêcher de demander :

« - Mais et si tu ne veux plus de moi ? »

Aussitôt, Louis secoua la tête :

« - C'est impossible, Charlotte. Jamais je n'ai plus aimé une femme que toi ! Jamais je ne pourrais me lasser de toi ! »

Mon regard plongé dans le sien, j'étais tiraillée entre deux envies. Peut-être qu'en revenant à la Cour, tout irait mieux ? Louis et Louise seraient à mes côtés. Et je reverrais Geoffroy et Gabriel. Mais si jamais mon nouveau statut me portait préjudice ? Si j'étais incapable d'en assumer les responsabilités ?

Je me mordis la lèvre, avant de souffler :

« - Mais si je ne suis pas à la hauteur...

- Charlotte, regarde-moi. »

Louis prit mon visage entre ses mains pour coller son front au mien :

« - Tu seras à la hauteur. Je le sais. Parce que je t'aime. Et tu dois ne te soucier que de cela. Ne pense pas aux autres. Il y aura toujours des personnes qui, peu importe tes actions, trouveront quelque chose à te reprocher. Pense plutôt à ceux qui t'aiment, comme les enfants, Geoffroy, ou... Ou moi. »

De nouveau, il captura mes lèvres, avant d'avouer :

« - Je t'aime comme un fou Charlotte. Et pour être honnête, je ne repartirai pas d'ici sans toi. Je te veux à mes côtés. Et je veux notre fille à mes côtés. »

Son regard gris était sincère. Je posai mes mains sur les siennes, et lui demandai encore :

« - Et... Qu'aurai-je à faire ?

- Être toi-même, ma Charlotte. C'est comme cela que je t'aime. Tu ne cherches pas à plaire, tu es sincère, modeste, mais terriblement parfaite à mes yeux. Et c'est tout ce qui compte. »

Je reçus ses compliments avec un sourire gêné. Je n'avais pas l'habitude d'être aussi adulée. D'ordinaire, les personnes me comparaient à Athénaïs, et j'en sortais perdante. Mais Louis... Louis m'aimait.

Alors, poussée par un courage que je ne soupçonnais pas, je l'embrassai, avant d'acquiescer contre sa bouche :

« - J'accepte. »



**************
Hey !

Ce chapitre sonne la fin du deuxième tome de cette saga ! Mais rassurez-vous, les aventures de Charlotte (et accessoirement de Louis) ne sont pas finies pour autant ! Le premier chapitre du tome 3 sortira dans 10 jours ^^

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top