22. Comptais-tu me le dire ?

En grimaçant, je me levai de mon lit. Ces derniers temps, le moindre geste me causait une légère douleur dans le ventre. Mais j'en avais assez de rester allongée, surtout quand j'avais très faim. En marchant à petits pas, une main soutenant mon ventre arrondi, je sortis de ma chambre, m'aidant des murs pour avancer.

Mais parvenue en haut des escaliers, j'étais à bout de souffle. Agacée de ma propre faiblesse, je m'assis sur la première marche pour respirer. Cela ne faisait que trois mois que j'étais ici, mais j'avais parfois l'impression que cela faisait des années. Mes journées étaient désespérément vides, malgré les efforts de Lison pour m'occuper.

Me sentant de nouveau plus forte, je me relevai avec des gestes précautionneux. Comme toujours, je soutins mon ventre d'une main, et m'agrippai de l'autre à la rampe. Je mis un temps infini à descendre les marches, mais parvins finalement en bas. D'un pas lourd, je me dirigeai vers la salle à manger. Lison y laissait toujours de la nourriture quand elle n'était pas là, au cas où j'avais faim. Ainsi, un domestique avait juste à m'apporter à manger.

Alors que je venais tout juste de pénétrer dans la pièce, j'entendis des pas derrière moi. Je m'arrêtai aussitôt de marcher. C'était Lison, qui allait me disputer pour être sortie du lit. Une grimace sur le visage, je me retournai en soupirant :

« - Je suis désolée Lison, mais j'avais faim, et... »

Mais je me figeai.

En croisant ces prunelles grises qui m'avait tant manqué, ma gorge se noua douloureusement. Je crispai mes mains sur mon ventre, dans un espoir dérisoire de le dissimuler. Louis était là, devant moi. Ma respiration s'emballa lorsque je compris que ce n'était pas une hallucination. Il était bien là, planté de moi, et me fixait, comme stupéfait. Et son regard glissa sur mon ventre. Un étrange éclat brilla dans son regard, que je ne parvins pas à déchiffrer. Il était si beau, si majestueux, que je sentis une faiblesse m'envahir. Je m'appuyai brusquement contre le mur, sur le point de m'effondrer. Aussitôt, il me prit par la taille pour me soutenir :

« - Viens. Il faut t'asseoir. »

Sa voix était indéfinissable. Pouvais-je encore lui faire croire que l'enfant n'était pas de lui ? Car comment pouvais-je sortir indemne de la discussion qui s'annonçait ?

Louis me guida jusqu'au salon, où il m'aida à m'asseoir sur un fauteuil. Puis il s'agenouilla à mes pieds, me fixant en silence de ses prunelles inquisitrices. Honteuse, troublée, je crispai mes mains sur mon ventre en baissant les yeux. Sa voix me parvint :

« - Depuis combien de temps...

- Plus de cinq mois. »

Ses yeux s'écarquillèrent. Il avait compris. Louis ferma les yeux, me demandant dans un souffle :

« - Le savais-tu... Il reporta son attention sur moi. As-tu provoqué ton bannissement ? »

Je détournai le visage, la gorge nouée. Que pouvais-je bien lui dire ? Comment allait-il réagir en l'apprenant ?

Je l'entendis soupirer. Louis posa doucement sa main sur mon genou. Je sursautai, reportant craintivement mon attention sur lui. Je murmurai en croisant son regard :

« - Je suis navrée...

- Tais-toi. »

Son ton était, contre toute attente, doux. Il reprit, se passant une main sur la figure :

« - Tout est de ma faute. Je n'ai pas eu confiance en toi, et... »

Il baissa les yeux sur mon ventre. Son ton devint presque triste :

« - Pourquoi ne m'as-tu rien dit ? »

Je déglutis difficilement, puis répondis doucement :

« - J'ai eu peur que... Que tu ne penses que j'étais comme Athénaïs, ou... Ou que j'étais une intrigante. Et... Ma voix se mouilla de larmes. J'ai eu si peur que tu ne me renvoies, ou que tu ne m'abandonnes au profit d'une autre femme, et je ne l'aurais jamais supporté, alors... J'ai préféré partir. »

Un sanglot me noua la gorge. Enfin, je l'avais dit. J'avais dit ce qui me rongeait depuis des mois. Des larmes roulèrent sur mes joues. Louis s'empressa de les essuyer, le regard tendre. Il eut un léger sourire :

« - C'est la première fois qu'une femme me fuit alors qu'elle porte mon enfant... Mais c'est aussi la première fois que je me préoccupe autant d'une femme.

- Pourtant... »

Je m'arrêtai aussitôt, avant de dire des choses que j'aurais sûrement regrettées. Son regard se fit triste :

« - Je sais. Et Charlotte, je me reprocherai tout ma vie de m'être comporté comme un imbécile. Mais... J'ai été tellement jaloux, je n'ai pas réfléchi. Je t'imaginais dans les bras de cet homme, et... »

Il ferma les yeux, inspirant profondément. Je profitai de cet instant pour demander d'une voix tremblante :

« - M'en veux-tu de...

- De m'avoir abandonné alors que je t'avais humiliée et trahie ? Il rouvrit les yeux, les posant sur moi. Comment peux-tu oser demander cela ? »

Je fermai la bouche, le cœur serré. J'avais si peur de lui refaire confiance, et qu'il me brise encore une fois, comme il l'avait déjà fait tant de fois... Pourrais-je supporter encore de souffrir, dans mon état ? Je n'en étais pas si sûre.

Louis remonta doucement sa main jusqu'à mon ventre, le caressant doucement. Il me demanda :

« - Comptais-tu me le dire ? »

Son ton était rauque. Je baissai le visage pour fixer sa main, puis avouai à mi-voix :

« - Je n'en sais rien... Je ne pense pas. »

Sa main se crispa sur ma chemise. Et sans pouvoir me retenir, j'éclatai en sanglots, enfouissant mon visage dans mes mains. Aussitôt, je sentis Louis me prendre doucement dans ses bras. Je sanglotai :

« - Je suis tellement désolée, mais j'avais si peur de souffrir à nouveau, et Geoffroy m'a conseillé de tout t'avouer, mais j'avais peur que tu ne me rejettes, et je suis désolée, et...

- Charlotte, me coupa-t-il. Calme-toi, je t'en prie. »

Je m'agrippai à sa chemise, enfouissant mon visage dans son cou et humant son odeur qui m'avait tant manqué. Il me caressa les cheveux, murmurant à mon oreille :

« - Tout va bien. Je suis là.

- Mais tu vas partir, alors je vais me retrouver seule, et...

- Alors je resterai avec toi cette nuit. »

Je relevai un visage baigné de larmes vers lui. Je n'osai y croire. Louis essuya tendrement mes joues, puis embrassa mon nez :

« - Charlotte, tu n'as jamais quitté mon cœur. J'ai été stupide, je le sais. Mais je t'en prie, laisse-moi une chance. Laisse-moi prendre soin de toi, et... De notre enfant. »

Ses doigts sur mon visage m'empêchaient de respirer correctement, et de penser. J'avais tant envie de me blottir dans ses bras ! Je balbutiai :

« - Mais... Tu es le roi, et...

- Et je peux aussi décider de ce que je souhaite faire. Alors je décide de rester auprès de la femme que j'aime. »

Je sentis de nouvelles larmes d'émotion rouler sur mes joues. Aussitôt, Louis s'inquiéta :

« - Charlotte ? Qu'y a-t-il ? Qu'ai-je dit ? As-tu mal ? »

Je secouai la tête, balbutiant :

« - Non, je... Je suis tellement heureuse, parce que tu es là ! »

Son regard se fit tendre, comme autrefois. Un fin sourire étira ses lèvres :

« - Je suis aussi heureux Charlotte. Comme à chaque fois que je suis à tes côtés. Et je passerai toute ma vie à me faire pardonner. A faire pardonner ma stupidité. Je n'ai pas su voir que tu étais incapable d'une telle trahison. »

Il se pencha doucement vers moi pour m'embrasser. Lorsque sa bouche toucha la mienne, je sentis une chaleur exploser dans tout mon corps. Sans réfléchir, j'agrippai son foulard pour qu'il ne cesse de m'embrasser. Sa langue caressait doucement la mienne ; puis tout devint plus passionné. Je remontai mes bras pour en entourer son cou, le pressant contre moi. Ses mains vinrent se loger sur mes hanches. Il quitta mes lèvres pour parsemer mon visage de brûlants baisers, m'arrachant des souffles de contentement.

Soudain, je le sentis s'écarter. La panique m'envahit. Je rouvris les yeux, mais aussitôt, je sentis un contact sur mon ventre. Louis l'embrassait. Bouleversée, je passai mes mains dans ses cheveux bouclés, le cœur battant. Là, je me sentais parfaitement bien. Nous étions réunis. Je n'avais plus peur de m'abandonner. Il m'était revenu.

La bouche contre mon ventre, Louis déclara soudain :

« - Charlotte... Ma Charlotte... Epouse-moi. »



************

Hey !

Louis est de retour ! Eh oui, je ne pouvais l'effacer définitivement de l'histoire comme ça ! Et il revient avec une demande... Comment pensez-vous que va réagir notre Lottie ?


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top