2. Je sais qui a monté cette rumeur contre toi.

Doucement, j'allongeai Louise Marie Anne dans son lit. Elle s'était endormie dans mes bras alors que je la berçai. Attendrie, j'embrassai son front, puis tirai la couverture sur son petit corps. Elle était adorable. Je me relevai silencieusement, et après avoir vérifié que tous les petits dormaient, je sortis de la pièce. Je refermai la porte avec douceur, puis me retournai.

Je sursautai en voyant une personne devant moi, et me collai contre la porte en plaquant mes mains sur ma bouche pour étouffer une exclamation. Lentement, je relevai les yeux. C'était Louis. Sa tête baissée vers moi m'empêchait de voir ses traits de visage. Il devait sûrement me dévisager avec froideur, haine. Comme il l'avait fait durant ces quatre derniers jours.

« - Comptez-vous m'empêcher encore longtemps d'accéder à la chambre de mes enfants ? »

Son ton était lui aussi froid. Je pris conscience qu'en étant ainsi collée contre la porte... Je lui barrais le passage. Je déglutis difficilement, le cœur battant. Je devais lui parler ! Je devais lui faire comprendre que je n'étais certainement pas la maîtresse de cet homme ! Alors, je me redressai et murmurai :

« - Louis, je t'en prie...

- Vous ai-je autorisée à être ainsi familière ? Estimez-vous heureuse que je vous autorise encore à vous occuper de mes enfants. »

Chacun de ses mots était comme un poignard dans mon cœur déjà meurtri. Il ne voulait même pas m'écouter... Il me rejetait, sans sembler avoir d'état d'âme. Les larmes me montèrent aux yeux, encore une fois. Je me détournai brusquement, évitant son corps, et m'enfuis en direction de ma chambre. Je refermai brusquement la porte de la pièce, et me laissai glisser le long du battant. Pourquoi ne voulait-il pas m'écouter ?

Je déglutis pour ravaler mes larmes. J'en avais assez de pleurer à cause de lui. Il devait certainement ne rien ressentir de son côté ! Alors pourquoi devrais-je pleurer toutes les larmes de mon corps pour un homme qui semblait se ficher totalement de moi ? Je sentis une brusque détermination m'envahir. J'allais arrêter d'être faible, d'être... Comme avant. Je devais être forte. J'allais lui montrer que je n'étais plus la femme timide qu'il avait connue.

Je me relevai, me passai une main sur le visage, et me déshabillai. Le lendemain... J'allais agir comme lui. Je serais distante. Car c'était ce qu'il voulait, après tout.

..................................................................................................................

« - Debout, Lottie ! »

Plusieurs poids s'enfonçaient dans ma couche. En grommelant des paroles indistinctes, j'ouvris les yeux. Je plissai les paupières à cause de la lumière, et pus enfin distinguer les deux filles d'Athénaïs. En me voyant réveillée, elle se jetèrent dans mes bras en riant. Un sourire attendri aux lèvres, j'embrassai leurs fronts :

« - Avez-vous bien dormi ?

- Oui ! J'ai rêvé de toi ! répondit Louise Marie Anne.

- Vraiment ? »

En souriant, je me redressai dans mon lit pour mieux les serrer contre moi, et écoutai la réponse de la plus petite :

« - Oui, t'étais toute contente, comme maintenant. Et tu souriais. »

Sa petite mine s'attrista. Et alors, seulement, je pris conscience que pendant ces quelques dix jours, j'avais dû leur paraître bien triste et maussade. Mais ce temps était révolu.

Déterminée, j'embrassai son petit nez en souriant :

« - Alors je vais continuer à sourire. Comme ça... Ton rêve se réalisera. »

Je vis ses yeux s'écarquiller d'émerveillement, et elle se pressa contre moi en riant. Je serrai également Louise Françoise dans mes bras, et embrassai sa joue :

« - Allez, je dois m'habiller.

- Ton frère t'attend !

- Vraiment ? Merci de me prévenir, Louise Françoise. »

Je l'embrassai une dernière fois, avant de me libérer de leur étreinte pour me lever. Je passai mes jupons et ma jupe. Et alors que je laçai mon corset, j'entendis Louise Françoise me demander doucement :

« - Lottie ? Pourquoi père ne souris plus en te regardant ? »

Je me figeai. Lentement, je me retournai pour les regarder. Elles me fixaient toutes les deux, la mine triste. Je repoussai avec détermination la tristesse et la douleur dans un coin de mon cœur, et vins m'agenouiller devant elle :

« - Pourquoi dîtes-vous cela ?

- Quand mère était avec lui... Il ne t'a même pas regardée... »

Leurs visages étaient affligés. Je m'empressai de sourire :

« - Ce n'est rien, je vous assure... Votre père s'est simplement aperçu qu'il aimait plus votre mère que moi. »

J'avais parfaitement conscience de leur mentir. Ce n'était pas l'exacte raison. Mais c'était mieux de présenter les choses ainsi. C'était mieux pour elles.

Les petites froncèrent les sourcils, et, encore une fois, Louise Françoise insista :

« - Mais pourtant, il était heureux avec toi...

- Il l'est plus avec votre mère.

- Mais toi, Lottie, tu étais heureuse avec lui ? »

Je me retournai brusquement pour voir Louis César, appuyé contre le mur pour se tenir debout. Je m'empressai de venir le prendre dans mes bras, un sourire crispé aux lèvres :

« - Oui... Oui, j'étais heureuse. Mais... C'est votre père, le plus important. »

J'embrassai son front, essayant de ne pas leur montrer mon désarroi.

« - Charlotte ? Oh, tu es là.

- Geoffroy ! »

Les petites descendirent du lit et coururent se jeter dans ses bras. En riant, il les souleva, et les embrassa :

« - Mais vous ne faîtes que grandir ! Vous allez finir par me dépasser... »

Dans leurs rires, il les fit tournoyer, les reposa, puis se tourna vers moi. Depuis dix jours, le même éclat d'inquiétude brillait dans son regard. Il vint enlacer mes épaules, et embrassa Louis César. Puis il embrassa mon front :

« - Comment vas-tu ?

- Bien. »

Je déposai rapidement mes lèvres sur sa joue, avant de lui sourire :

« - Que fais-tu là ?

- J'avais à te parler. »

Son ton était sérieux. Je croisai son regard, et compris quel était le sujet. Louis. Ma gorge se noua, mais j'acquiesçai rapidement :

« - Très bien. Permets-moi juste de terminer de m'habiller.

- Bien sûr ! »

Il me prit Louis César des bras, et m'observa terminer de me vêtir. Je me coiffai rapidement, puis passai le collier qu'il m'avait offert pour mon anniversaire. J'avais depuis une semaine relégué les présents de Louis dans une petite bourse, sous mon lit. Je déglutis, puis pris Louise Marie Anne dans mes bras, et lui embrassai le front :

« - Allez, tous dans la salle de jeux ! »

Je sortis de ma chambre, vérifiant que Louise Françoise me suivait, et talonnée par mon frère.

Mais en pénétrant dans la pièce, j'aperçus aussitôt la haute stature de Louis. J'ignorai avec difficultés mon cœur qui se serrait, pour me redresser. Je déposai en souriant la petite par terre, et elle s'empressa de courir vers son père. Son père qui m'avait abandonnée.

Je tournai la tête vers Geoffroy, qui avait lui aussi déposé Louis César au sol. Son regard inquiet était posé sur moi. Je détournai le visage vers Louis. Il était toujours aussi beau... Mon cœur se serra, mais lorsqu'il leva le regard vers nous, je m'empressai d'effectuer une profonde révérence. J'allais réussir à être distante. Je le devais. Je sentis mon frère s'incliner à mes côtés. La voix froide du roi me parvint :

« - Relevez-vous. »

Ignorant mon cœur battant, je m'exécutai, et gardai le visage baissé. Comme lorsque j'étais encore innocente, et que je n'étais pas devenue sa maîtresse officieuse. J'aurais presque pu rougir, et l'illusion aurait été parfaite.

« - Laissez-moi.

- Bien, Majesté. »

J'avais prononcé doucement cette phrase, certaine qu'il l'entendrait quand même. Je relevai le visage, et croisai son regard gris. La douleur devenue habituelle grimpa en moi, mais je trouvai la force de soutenir son regard. Je voulais lui montrer que je n'étais pas faible. Je lisais dans son regard de la douleur, de la colère, et de la surprise. Il était surpris que je ne m'effondre pas en larmes. Je sentis de la rage m'envahir. Pourquoi est-ce que tous s'obstinaient à penser que j'étais faible ?!

J'entendis mon frère me murmurer :

« - Charlotte... »

Je devais m'incliner. Je le fis, la mâchoire serrée, puis m'empressai de sortir de la pièce. Je pris tout de même le temps de sourire aux enfants, avant de fermer la porte.

Aussitôt, Geoffroy me prit par le poignet pour m'entraîner dehors. Je le suivis, la respiration saccadée. Être indifférente était bien plus difficile que je ne le pensais ! Mais j'avais réussi. Je n'avais pas pleuré, je ne m'étais pas enfuie. Je murmurai à mon frère tandis qu'il nous dirigeait vers un banc :

« - Peux-tu me prendre dans tes bras ? »

Il s'arrêta aussitôt de marcher, et me serra contre lui. Il me caressa les cheveux en soufflant :

« - Tu t'en es bien sortie...

- De quoi voulais-tu me parler ? »

Il releva mon visage vers le sien, la mine désolée, et soupira :

« - Je sais qui a monté cette rumeur contre toi.

- Qui ? »

Qui pouvait me détester au point de me briser ainsi ? J'écarquillai les yeux. Il n'y avait qu'une seule personne. Je cherchai le regard de Geoffroy. Son regard noir me le confirma. Je balbutiai, comme foudroyée :

« - Athénaïs... »



********************

Hey !

Est-ce une grosse révélation, que l'implication d'Athénaïs dans tout cela ? ^^


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top