10. Il va s'en sortir, Lottie.
« - Lottie ! »
Je tournai la tête vers la porte, et reconnus Geoffroy. Aussitôt, je me relevai de mon lit pour me jeter dans ses bras en sanglotant :
« - Oh, Geoffroy ! Dis-moi que tu as de ses nouvelles ! »
Cela faisait deux jours que je n'avais aucune nouvelle de Louis, et je me consumais d'impatience. Et malgré mes efforts pour ne pas le montrer aux enfants, ils avaient compris que leur père était très malade.
Mon frère me serra contre lui en me caressant les cheveux :
« - Il est au plus mal. Les médecins lui ont déjà fait deux saignées, mais sans succès. Ils parlent même d'en faire une troisième.
- Deux saignées ?! »
Je m'effondrai dans ses bras. Si le malade ne réagissait pas à la deuxième... Il était le plus souvent perdu. Je sanglotai :
« - Je ne veux pas le perdre ! Je n'arrive même pas à vivre lorsqu'il m'ignore, alors s'il... Meure... »
Mes larmes redoublèrent, et je balbutiai :
« - Et les enfants ? Que vont-ils devenir sans leur père ?
- Lottie, calme-toi. Il n'est pas encore mort. Enfin... Pour certaines personnes, c'est comme s'il l'était. »
Je relevai vivement le visage vers lui, les sourcils froncés :
« - Que veux-tu dire ? »
Mon frère soupira, et essuya consciencieusement mes larmes, avant de répondre :
« - Athénaïs s'est précipitée auprès du frère de Louis, pour se faire bien voir. »
Une vague de rage m'envahit brusquement, si forte que je me raidis dans les bras de Geoffroy. Et je ne pus m'empêcher d'exploser :
« - Alors elle a tout détruit entre Louis et moi, elle a osé me manipuler et le manipuler, et elle l'abandonne dès qu'il est au plus mal ?! »
J'écumais de rage. Mais quelle... Quelle horrible garce ! Sans pouvoir me retenir, je frappai le torse de mon frère de mes poings :
« - Mais quelle horrible mégère ! Je la déteste ! Tout est de sa faute, tout le temps ! Je la hais ! C'est elle qui aurait dû être aussi malade ! Et qui est auprès de Louis ?! Qui ?!
- Le médecin, et des gardes. »
Je tapai du pied, pleine de rage et de rancœur envers Athénaïs. Elle avait tout détruit, et se permettait d'abandonner Louis ?! Sans réfléchir, je m'écriai :
« - Eh bien je vais aller le voir, moi ! Je vais le veiller, comme aurais dû le faire Athénaïs !
- Lottie, et les enfants ? »
Je fermai un instant les yeux, me sentant coupable d'avoir oublié les enfants. Mais presque aussitôt, je les rouvris :
« - Je sais que Louisette ne travaille plus beaucoup, et qu'elle est désœuvrée. Alors elle s'occupera d'eux. Je vais la prévenir tout de suite ! »
Je sortis précipitamment de la chambre, et me précipitai dans les cuisines.
Par une chance inouïe, j'y trouvai aussitôt Louisette. En me voyant débarquer ainsi, elle s'empressa de me demander :
« - Mademoiselle Charlotte, qu'est-ce qu'il se passe ?
- Louisette, peux-tu surveiller les enfants ? Je dois me rendre au chevet du roi ! »
Son visage prit une mine attristée :
« - Oh, vous voulez le veiller... Vous avez raison de le faire, parce que ce n'est pas votre sœur qui va s'y mettre ! »
Elle avait rapidement compris que j'étais folle amoureuse de Louis, et avait été ravie de voir que c'était partagé. Enfin, partagé... Je savais maintenant que Louis ne ressentait rien pour moi. Et, malgré cela, je ne pouvais m'empêcher d'accourir à son chevet. J'étais pathétique.
J'essuyai une larme qui avait roulé sur ma joue, avant de presser Louisette :
« - Alors ? Peux-tu les surveiller ? Je ne sais combien de temps je vais rester au château, mais...
- Bien sûr, mademoiselle ! Il a bien de la chance de vous avoir, le roi ! Allez, courrez à son chevet. Je m'occupe des enfants. »
Soudainement soulagée, je serrai un court instant la domestique dans mes bras, avant de courir dans la salle de jeu. Là, je m'empressai de réunir les enfants autour de moi, et essayai de prendre un ton neutre :
« - Je vais au château, prendre des nouvelles de votre père. Je ne sais combien de temps j'y resterai, alors Louisette s'occupera de vous. Soyez sages, je reviendrai le plus vite possible. »
Les petits me serrèrent dans leurs bras, et pour un instant, j'oubliai tout, pour ne me concentrer que sur leurs petits corps pressés contre le mien, et leur odeur rassurante d'enfants. Mais trop vite, je dus m'écarter d'eux. Je les embrassai tendrement, puis me relevai. Je leur adressai un dernier signe d'affection, avant de sortir de la pièce.
Je vis que Geoffroy m'attendait devant la porte. Je m'empressai de le rejoindre, le cœur serré. Et si Louis avait déjà succombé ? Je ne pourrais vivre sans lui ! Mon frère me prit par la main, comme quand nous étions enfants, et m'entraîna vers une calèche :
« - J'ai pensé à faire venir une calèche, pour que tu n'aies pas en plus à monter à cheval.
- Merci Geoffroy... »
Je ravalai l'immense boule de tristesse qui s'était formée dans ma gorge. Si Louis mourrait... Qu'allais-je devenir ?
Je me laissais entraîner dans la calèche sans réagir, envahie par la tristesse. Geoffroy m'assit, claqua la portière, et aussitôt, l'habitacle s'ébranla. Doucement, il prit mes mains dans les siennes, et les pressa :
« - Lottie, regarde-moi. »
Je relevai le visage vers lui, sentant des larmes rouler sur mes joues. En soupirant, mon frère me lâcha pour essuyer ma peau :
« - Il va s'en sortir, Lottie. Je te le promets. Tu vas le veiller, et il va se remettre. Il faut que tu aies confiance. »
Je me plongeai dans son regard, essayant de retrouver mon calme. Je devais écouter Geoffroy. Alors je me levai pour m'asseoir à côté de lui, et fermai les yeux. Il enserra ma taille d'un bras, et embrassa mon front :
« - Sois courageuse, ma Lottie.
- Aurais-je un jour le droit d'être heureuse ? »
Sa réponse fut immédiate :
« - Oui ! Oui, Lottie, tu seras heureuse ! Il ne faut pas que tu en doutes, sinon... Tu vas t'effondrer. Et je ne le permettrai pas.
- Heureusement que tu es là, Geoffroy... »
Je tournai doucement la tête pour embrasser sa joue. Il embrassa mon front en retour, avant de redevenir silencieux. Et la panique en profita pour grimper de nouveau en moi. Si Louis mourrait... Non, je ne préférais pas y penser.
Et la calèche s'arrêta soudain. Aussitôt, Geoffroy ouvrit la portière, sortir de l'habitacle, et me prit par la main pour m'aider à faire de même. Je m'accrochai à lui avec désespoir tandis qu'il m'entraînait vers le château. Il n'y avait personne dans les jardins.
Et alors que nous pénétrions dans le château, je remarquai que les couloirs étaient également vides. Comme si tous les courtisans étaient partis, ou qu'ils se pressaient, comme Athénaïs, auprès du frère de Louis. Je trouvais cela vraiment ignoble. Ils n'hésitaient pas à abandonner leur souverain alors qu'il était au plus mal, uniquement pour espérer entrer dans les bonnes grâces de l'hypothétique futur souverain.
Enfin, au détour d'un couloir, j'aperçus plusieurs gardes plantés devant une porte. C'était là. Aussitôt, j'eus l'impression que mon cœur remontait dans ma gorge. Une brusque nausée m'envahit. Je me laissai entraîner par Geoffroy, qui s'arrêta devant les gardes en demandant d'un ton sérieux :
« - Pouvons-nous voir Sa Majesté ?
- Personne ne peut le voir, monsieur. »
Quoi ? Je ne pouvais abandonner comme cela ! J'étais si près de voir Louis ! Alors je lâchai Geoffroy pour me planter devant l'un des hommes en déclarant d'un ton froid :
« - Je suis la sœur d'Athénaïs de Rochechouart de Mortemart, favorite officielle de Sa Majesté, et mère de ses enfants. Et je souhaite voir Sa Majesté. Voudriez-vous contrarier cette femme-là ? »
Je vis le visage de l'homme changer, se décomposant lentement. Et il déglutit difficilement, avant d'avoir un regard désespéré pour les autres gardes. L'un d'eux finit par s'avancer vers moi en s'inclinant :
« - Bien sûr, mademoiselle. Mais veillez à ne point trop fatiguer Sa Majesté. »
J'acquiesçai d'un mouvement hautain du menton, prenant exemple sur ma sœur. C'était la première fois que je me servais de son nom pour obtenir quelque chose, et j'espérais de tout cœur que ce soit la dernière.
Il ouvrit la porte, alors je me tournai vers Geoffroy pour embrasser sa joue :
« - Je préfère y aller seule. Je suis désolée, mais...
- Je le comprends. Je resterai près de sa chambre, au cas où.
- Merci, Geoffroy... »
Des larmes me montèrent aux yeux, alors je détournai le visage pour pénétrer dans la chambre.
************
Hey !
Evidemment, ce n'était pas Athénaïs qui aller veiller sur Louis...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top