Chapitre XVII : Ce qu'il reste du brasier



Éva vit Rita le jour du départ de Violette. Ce jour-là et le suivant.

Elles déambulèrent dans les rues à la nuit tombée accompagnées des enfants ou seules sans beaucoup se parler. Rita entraîna Éva dans les rues du vieux souk sous un fallacieux prétexte d'achats urgents à effectuer, Éva ne fut pas dupe, mais elle se garda bien d'en faire la remarque.

Rita désirait profiter une fois encore de la liberté et du plaisir de se promener avec elle main dans la main. Anouar ne pourrait pas le lui reprocher. Elle ne trahissait pas sa promesse de ne plus avoir de rapports sentimentaux avec Éva.

Si ?

Non.

En mêlant ses doigts à ceux de la jeune Française, elle sentit l'anneau d'Éva meurtrir les chairs de son annulaire et de son majeur. Elle leva leurs mains à la hauteur de ses yeux. Son regard s'alluma d'une joie malicieuse.

— Une alliance ?

— Mouais, répondit Éva à mi-voix.

— Pour moi ? demanda Rita déjà flattée de l'intention qu'elle devinait à son égard.

Éva fuit son regard et se mordit un coin de la lèvre inférieure.

— L'alliance, Éva, insista Rita. C'est pour moi ? Comme si nous étions mariées ?

Rita rayonnait littéralement de joie et fierté narquoise. Éva lui passa la joie, mais la fierté narquoise l'énerva. Rita continua à la taquiner en riant :

— Tu me seras fidèle à jamais ? Comme Tristan avec la bague qu'Yseult lui avait offerte ? se glorifia-t-elle ravie.

Éva n'aurait pas dû lui raconter cette histoire. En tout cas, pas dans ses moindres détails. Elle regarda un instant l'alliance passée à l'annulaire de sa main gauche. Si en plus Rita savait que...

— Tu l'as fait graver ? Ici on grave souvent les alliances. On a dû te le proposer, non ? Tu as accepté ?

Zut !

— Euh... balbutia Éva d'un air coupable.

— Tu l'as fait ! s'écria-t-elle. Qu'est ce que tu as fait gravé ?

— Rien de spécial, bougonna Éva.

— Menteuse.

Maintenant qu'Éva y pensait... la gravure qu'elle avait trouvée anodine, le devenait soudain beaucoup moins. Elle avait acheté l'anneau pour se préserver des demandes déplacées. C'était vrai. Elle avait voulu garder un souvenir d'Alep, d'où la gravure. C'était vrai aussi. Comme elle l'avait fait pour un sceau en jade en Chine. Mais le sceau chinois ne portait que le nom d'un lieu, son prénom et l'année de son séjour. Un mois était gravé sur la face intérieur de l'anneau. Pourquoi un mois ?

Pourquoi ce mois ?

Rita s'impatienta :

— Éva, qu'est-ce que tu as fait gravé ?

— Ben... balbutia Éva qui se sentait tout à coup complètement stupide.

— Montre ! exigea Rita. Retire ton alliance et montre-la-moi.

Éva s'exécuta sans même protester. Il faisait sombre, Rita entraîna la jeune Française dans une boutique qui vendait des accessoires de beauté pour bénéficier de la lumière crue des néons. Elle examina la gravure et sa joie menaça d'embraser le magasin tout entier. Elle s'esclaffa :

— J'avais raison, jubila-t-elle.

— Rita, protesta Éva.

— Pourquoi tu n'as pas fait graver mon prénom ? Tu as eu honte ? Tu n'en avais pas envie ? Tu as eu peur ?

— Tu es vraiment chiante, grommela Éva.

— Nissan, hein ?

Le mois d'avril. Le bijoutier avait gravé, si on traduisait l'inscription en français : Alep, avril 2004.

— Rends-moi ça, fit Éva en tentant de reprendre son alliance des mains de Rita.

— Tu es mariée, Éva, rit Rita en empêchant Éva de récupérer sa bague.

— Pff... souffla la jeune Française.

Elle affichait une mine tellement déconfite que Rita rit de plus belle.

— Rita... la menaça Éva.

— Si tu la veux, donne-moi ta main.

Éva fronça les sourcils.

— Éva, donne-moi ta main.

Éva tendit la main. La main droite.

— La gauche, Éva. On porte son alliance à gauche en France.

Éva leva la main gauche. Rita lui passa l'anneau au doigt.

— Mariée, Éva... Tu vois, même à toi, ça a fini par arriver. Il suffisait que tu trouves la bonne personne.

Éva lui avait confié qu'elle abhorrait le mariage. Que personne, de toute façon, n'aurait jamais sérieusement penser à l'épouser en sachant qui elle était vraiment et que, même si par miracle, cela n'avait pas fait fuir un amoureux, jamais Éva n'aurait consenti à l'épouser. Elle releva les yeux sur Rita. Croisa son regard. Sa fierté débordait de partout. Éva se sentit rougir.

— Je suis très fière de toi ! clama Rita au sommet de sa joie.

Elle allait surtout éclater de vanité si elle continuait à se rengorger ainsi. Pourtant, Éva ne protesta pas. Elle laissa Rita lui crocheter le bras, puis la ramener à l'ombre des rues couvertes du souk, entrelacer ses doigts aux siens. Entretenir leur lien. Attiser et exacerber les sentiments qu'éprouvait Éva à son égard.

Son désir.

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Éva partait dans deux jours.

— On se voit demain ? proposa-t-elle pour la forme avant de refermer la porte du taxi sur Rita.

— Je ne sais pas, répondit Rita d'une voix neutre.

Le cœur d'Éva se glaça dans sa poitrine.

— Je pars après-demain, murmura-t-elle.

— Appelle-moi demain matin. On verra à ce moment-là.

Rita n'exprima aucune contrariété, comme si voir ou ne pas voir Éva une dernière fois l'indifférait. Éva claqua doucement la portière. Le taxi démarra. Il se confondit bientôt avec les autres véhicules. Disparut.

Éva resta immobile sur le trottoir. Incapable de se mouvoir. Rita savait qu'elle partait le 10. Que peut-être, sûrement, elles ne se reverraient jamais après cela. Elle eut soudain envie de pleurer. Elle serra les mâchoires, enfonça les mains dans les poches de son jeans et partit la tête basse et l'esprit en compote rejoindre d'un pas lent l'appartement de Violette. Elle se coucha en arrivant, après un bain, après avoir fini la bouteille d'arak, après avoir mangé un plat de pâtes et s'être brossé les dents. Elle voulait oublier. Ne plus penser à rien. Dormir.

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Le 9 juillet 2004,

Éva consulta sa montre. Il était peut-être encore un peu tôt pour l'appeler. Elle pouvait faire quelques courses, puis rentrer prendre un café et lire un ou deux chapitres de son livre en cours.

Elle s'acheta du coca syrien. Les marques américaines étaient prohibés dans le pays, mais de nombreuses variétés de boissons similaires existaient. Elle les avait toutes testées avant de jeter son dévolu sur l'une d'entre elle. Elle ajouta deux paquets de Gitane à son achat. Elle avait abandonné le petit vendeur de Slémanié et elle n'avait pas trouvé d'endroit où l'on vendît des cigarillos dans le quartier de Violette. D'ailleurs, à part la supérette en bas de chez elle, il n'y avait pas d'autre magasin dans les environs.

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Rita lui fixa rendez-vous dans le petit jardin public où elle avait l'habitude de conduire les enfants. Elle vint sans eux. Elle apprit à Éva qu'Anouar les avait emmenés chez ses parents.

Rita n'aimait pas sa belle-famille. Elle se sentait une étrangère parmi eux. Elle avait invité Éva à l'accompagner un soir leur rendre une visite de courtoisie. L'ambiance avait été pesante. Empruntée. Rita détonnait. Pas assez sophistiquée, trop intelligente. Les sœurs d'Anouar arboraient des mines compassées. Éva avait mieux compris le malaise dont faisait preuve Rita à chaque fois qu'elle devait les rencontrer. Mieux compris le mépris dont elle faisait preuve quand elle parlait d'eux. Rita n'appartenait pas à leur monde et tous les membres de la famille d'Anouar s'efforçaient qu'elle ne l'oublie pas. Avec beaucoup de condescendance.

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Elles cherchèrent un banc libre et s'assirent dessus. Éva évita de toucher Rita, et instaura une certaine distance entre leur deux corps.

— Éva ? l'appela Rita.

Éva se tenait à cinquante centimètres d'elle. Sombre, hostile. Fermée.

— Quoi ? répondit hargneusement la jeune Française.

— Pourquoi es-tu fâchée ? demanda Rita.

— Je pars demain, Rita.

— Et... ?

— Tu crois vraiment que j'ai envie de te dire au revoir comme ça ? Ici ? Dans un jardin public ? Sur un banc ?

— Anouar ne...

— Je me fous d'Anouar, Rita. Je te parle de nous. De moi. Mais...

Éva soupira, contrariée. Rita attendait la suite. Tranquillement. Éva s'assombrit encore.

— Mais tu t'en fous, l'accusa-t-elle.

— Non, Éva, non. Je t'aime, se récria Rita. Tu as changé ma vie, tu m'as beaucoup apporté.

— Qu'est-ce que je t'ai apporté, Rita ? Sois honnête. Je n'ai rien changé dans ta vie. Je suis passée et c'est tout. Demain, je pars et il ne restera rien de moi.

— Non, ce n'est pas vrai.

— Bien sûr que si, qu'est-ce qui a changé ? Tu peux me le dire ?

Rita ouvrit la bouche, Éva ne voulait pas l'entendre mentir, elle reprit la parole avant qu'elle parlât :

— Rien, Rita. Rien n'a changé dans ta vie. Je n'ai absolument rien changé dans ta vie.

— Si.

— Pff... d'accord, consentit Éva d'un ton si agressif que Rita appréhenda la suite. Mais mis à part le fait que maintenant tu dois utiliser du lubrifiant à chaque fois qu'Anouar veut te baiser, qu'est-ce qui a changer ? s'énerva Éva. Rien. Rien d'autre, martela-t-elle.

Rita se tut. Impressionnée par la colère d'Éva. Par sa vulgarité.

— Et c'est quoi ce rendez-vous de merde ?! continua Éva sur le même ton. Viens chez moi.

— Non, refusa Rita.

Son refus claqua comme une gifle.

— C'est nul, je me casse, salut, s'emporta définitivement Éva.

Elle se leva, furieuse. Furieuse contre Rita et ses principes, contre la soumission dont elle faisait preuve, contre son ingratitude, contre l'indifférence qu'elle manifestait. Furieuse et frustrée.

— Éva ! la rappela Rita.

La jeune Française ne se retourna pas. Rita la rattrapa en courant. Elle tenta d'ignorer les regards posés sur elles. Ceux des hommes qui traînaient leur indolence au soleil, ceux des femmes, des mères de familles. Consciente de s'offrir en spectacle à leurs yeux. Tant pis, elle ne pouvait pas quitter Éva ainsi. Elle lui attrapa la main et la retourna face à elle. Des nuages noirs et orageux assombrissaient le regard habituellement si bleu de la jeune Française.

— C'est d'accord, Éva.

Éva se rasséréna, sa colère tomba aussitôt et ses yeux retrouvèrent leur couleur naturelle.

— On va chez Violette ? demanda Éva.

Violette, pensa Rita contrariée.

— Oui, accepta-t-elle pourtant.

— Tu as du temps ?

— Oui. Les enfants restent dîner chez les parents d'Anouar.

— Okay. On prend un taxi.

— Tu ne veux pas marcher ? s'étonna Rita qui savait qu'Éva aimait beaucoup marcher.

— Non, on ira plus vite en taxi.

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Elles se retrouvèrent allongées sur le lit d'Éva. Discuter dans le salon n'aurait fait que déplacer le malaise d'Éva d'un banc public sur un canapé inconfortable. Rita savait que la jeune Française avait besoin de contacts et d'intimité. Quand Éva l'avait timidement tirée à sa suite dans sa chambre, Rita n'avait pas protesté, elle n'avait pas plaisanté non plus, ni pris une mine réjouie. Elle s'était allongée sans dire un mot, sur le dos. Éva s'était installée contre elle et elle avait niché la tête au creux de son épaule.

Mais même ainsi, la position laissa Éva insatisfaite. Un sourd malaise subsistait. Elle avait besoin d'être proche de Rita. De sentir sa peau contre la sienne. Rita portait une chemise en jeans à boutons pression. Éva tira dessus. Les pressions sautèrent une à une. Rita s'alarma :

— Éva, qu'est-ce que tu fais ?

— Je veux sentir ta peau contre la mienne.

Elle écarta la chemise, leva la tête, pour dégager l'épaule de Rita et se recoucha dessus. Elle soupira longuement quand sa joue prit contact avec la peau douce et chaude de l'épaule. Elle se frotta dessus. La main de Rita jusque-là inerte sur le matelas vint s'accrocher à l'épaule d'Éva.

— Éva, on ne peut pas...

Éva ne répondit pas. Elle resta simplement sans bouger.

Sa joue chaude. Sa main encore plus chaude posée sur son ventre... Rita serra les dents. Sa respiration devint laborieuse. La main d'Éva pesait sur elle, pesait sur sa chair. Elle s'allégea soudain. La sensation née de la main posée sur elle, devint plus terrible encore. Quatre contacts en remplacèrent un seul. Quatre doigts légers qui l'effleurèrent et se mirent lentement en mouvement. Ils lui caressèrent les côtes. Rita planta ses incisives dans sa lèvre inférieure. Peut-être se crispa-t-elle aussi légèrement malgré les efforts qu'elle déployait pour rester impassible. Les doigts s'envolèrent sur son abdomen. Ils dessinèrent tant d'arabesques que Rita n'arriva bientôt plus à suivre les courbes qui s'enroulaient et se déroulaient autour de son nombril. Ils s'aventurèrent régulièrement jusqu'à à la frontière qui séparait sa peau nue de la ceinture de son jeans. Rita se retint de creuser le ventre, d'inviter Éva à poursuivre son exploration, à glisser ses doigts plus bas sous son jeans. Elle tenta vainement de maîtriser sa respiration, d'exhaler un souffle léger et régulier.

Respirer lentement, empêcher son corps de réagir trop vivement aux stimulations. C'était trop. Éva ne pouvait être dupe. Elle connaissait trop bien son corps pour cela.

Les doigts remontèrent alors sur le sternum, doux, si doux. Éva était si douce. La pression diminua, seul le majeur poursuivit sa course au-delà du sternum, puis il disparut.

Rita s'arrêta de respirer. La main réapparut presque sous son aisselle, les doigts presque dans son dos, le poignet reposant sur le bombé de sa poitrine. Elle bascula la tête en arrière. Ravala un gémissement. La main repartit en arrière et gravit, toute en légèreté, le sein pris dans le soutien-gorge noir qu'arborait Rita. Elle passa le mamelon. S'effaça. Un majeur revint tester sa fermeté. La stimula doucement.

Le stoïcisme dont Rita avait fait preuve jusqu'à présent l'abandonna, ses résolutions sombrèrent à sa suite. Rita se arqua au-dessus du matelas et exhala un profond soupir de plaisir. Elle referma ses bras sur la tête d'Éva et ses mains s'enfoncèrent dans ses cheveux blonds.

Éva ne bougea pas, elle continua sa caresse. Passa sur l'autre sein, retourna sur le ventre un moment. La respiration de Rita s'accéléra. Ses mains quittèrent la tête d'Éva pour se refermer sur la chemise de la jeune Française et tirer fébrilement dessus. Elle voulait de la peau à caresser, à griffer. Éva bascula la tête pour l'embrasser dans le cou. Rita crocheta ses doigts dans la chair de son dos et ses ongles la griffèrent lentement, profondément. Éva gémit. De désir.

Elle se redressa sur un coude, sa main s'insinua sous le bonnet du soutient-gorge, retrouva le mamelon dur et contracté. Rita gémit, au bord de l'explosion. Ses ongles plongèrent un peu plus dans les chairs d'Éva, son autre main passa derrière sa nuque.

— Éva... souffla-t-elle.

La jeune Française se déplaça sur elle. Sa hanche s'enfonça entre ses jambes. La jeune Syrienne cria. Éva se pencha sur sa bouche. Rita leva la tête à sa rencontre. Avidement.

Éva la surplombait, le choix de brusquer ou pas leur désir lui appartenait. Elle voulait prendre son temps, profiter de Rita. Elle savait que celle-ci ne voulait pas finir nue contre elle, qu'elle rechignerait à partager les ébats passionnels qui, en avril, avaient repoussé au-delà leur conscience toute retenue, toute prudence et tous remords. Qu'elle y succomberait peut-être si Éva la forçait, si elle la déshabillait, si elle plongeait sa main, ses doigts, sa bouche et sa langue dans son intimité, si elle glissait en elle. Rita ne résisterait peut-être pas, mais Éva ne voulait pas courir le risque d'essuyer un rejet, de la quitter sur un refus ou une querelle.

Deux mois et demi plus tôt, Rita avait réussi à l'emmener vers la plus pure des extases en lui caressant la poitrine. Ce soir-là, elles n'avaient pas eu besoin d'être nues et allongées dans un lit pour satisfaire leur désirs et s'aimer. Éva s'était soumise à Rita, Rita s'était occupé d'elle et Éva garderait à jamais un troublant souvenir de ce moment qu'elle avait vécu comme l'expérience la plus érotique et la plus sensuelle qu'elle n'eût jamais vécue. Aujourd'hui, elles étaient allongées l'une sur l'autre, elles partiraient ensemble sur les chemins du plaisir. Éva la désirait trop pour ne pas se satisfaire de ce qu'elle savait pouvoir exiger de Rita, et Rita était déjà partie bien trop loin pour ne pas succomber à la tentation.

Éva se concentra sur le baiser. Les mains de Rita couraient sur son dos. Cherchait sa poitrine. La jeune Française rompait le baiser à chaque fois qu'elle soulevait le buste pour y donner accès à Rita. Incapable de gérer les deux stimulations en même temps. Elle alternait. Ouvrant ou fermant l'accès de sa poitrine à Rita. Abandonnant ou reprenant ses lèvres à chaque fois.

Elle modula caresses et effleurements, enchaîna les baisers doux du bout des lèvres avec des baisers plus voluptueux qu'elle appuyait d'un léger mouvement du bassin. Sans précipitation. Maintenant étroitement la bride à leur désir.

Rita s'accorda à suivre la même voie et elles alimentèrent lentement le feu de leur passion jusqu'à ce qu'elle les consuma entièrement.

Les mains, les doigts, la pression changeante qu'imprimait Éva sur le corps de Rita, sur ses lèvres, sur ses épaules, sur ses seins, sur son ventre, sur son entre-jambe.

Les pieds de Rita qui caressaient les siens, mais aussi les chevilles, les mollets, les jambes qui s'enroulaient autour de siennes.

Les baisers entre-coupés de gémissement, de soupirs. Les odeurs qui montaient de leurs corps impatients.

Rita craqua la première. Elle bascula le bassin contre la hanche d'Éva et remonta brusquement une cuisse entre les jambes de la jeune Française.

Elles crièrent de concert. Tendues à se rompre, l'une sur l'autre.

Éva se relâcha soudain et plongea la tête au creux du cou de Rita. Pour reprendre son souffle. Puis, le baiser reprit. Éva se cambra sur Rita, cherchant un angle plus adéquat contre sa cuisse. Elle gémit longuement quand elle le trouva. Rattrapa les lèvres de Rita entre les siennes. Leur corps s'entendirent à se mouvoir lentement l'un contre l'autre.

Elles jugulèrent leur impérieux besoin de jouir maintenant, tout de suite, et restèrent centrées sur leur baiser et sur leur mains. Sur leur ventres dénudés qui se caressaient l'un l'autre, sur leurs poitrines qui s'écrasaient ou s'effleuraient. Seules leur respiration témoignaient de l'intensité du désir qu'elles éprouvaient l'une pour l'autre, du plaisir qu'elles retiraient l'une de l'autre, qu'elle se donnaient l'une à l'autre.

Éva commença à flotter, emportée par la sensualité née de la lenteur de leurs ébats, elle bascula une première fois, sans vraiment y prendre garde, Rita aussi, mais leur échange continua.

Éva quitta la bouche pour le cou, la poitrine. Elle faillit mourir de plaisir quand ses lèvres se refermèrent sur les seins de Rita. Rita bascula quelques secondes plus tard en criant son nom. Éva ne lui accorda pas le temps de se reprendre, de respirer, elle se contenta de changer de sein, traçant son chemin entre les deux éminences avec sa langue. Rita accentua la pression de sa cuisse entre les jambes d'Éva et la jeune Française succomba une nouvelle fois alors qu'elle refermait délicatement ses dents sur le mamelon gourmand. La jeune Syrienne lui attrapa la tête, l'incitant à revenir l'embrasser.

Elle voulait boire la passion à sa bouche, ne jamais s'arrêter de l'aimer, de se faire aimer. Encore et encore. Éva lui accorda tout ce qu'elle voulut et obtint de Rita tout ce qu'elle désirait. Aucun vêtement ne les avait jamais empêché de s'embraser, de se consumer et de fusionner quand elles s'abandonnaient l'une à l'autre.

Enfin, Éva se relâcha sur Rita. La joue confortablement calée sur sa clavicule. Elle soulagea la jeune Syrienne de la pression de sa hanche. Rita l'enlaça mollement et se détendit sous elle. Repue, heureuse.

Éva.

Le prénom enfla, il s'insinua à l'intérieur de tout son être. Chaque fibre de son corps, de son âme et de son cœur résonna à son évocation, au son des deux syllabes répétées à l'infini.

— Tu es à moi, lui murmura Rita en la serrant plus étroitement entre ses bras.

Désir de possession absolu.

Éva gémit. Elle ne pensait plus à rien. Seule existait son corps en sueur et le corps sur lequel elle reposait. Un corps dont les odeurs mêlées de savon, de sueur, de sexe et de lessive la plongeait dans une douce béatitude. Elle glissa sur le côté pour soulager Rita de son poids, garda la tête sur elle, la main sur sa taille. Rita maintint ses bras étroitement refermés sur elle et elle pencha la tête pour que sa joue vint reposer sur le crâne d'Éva. Elles s'assoupirent doucement.

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Rita ouvrit les yeux. Elle surveilla la respiration d'Éva. Lente et profonde. Elle lui caressa doucement le front et se pinça les lèvres. Elle avait promis à Anouar qu'elle ne ferait plus jamais l'amour avec Éva. L'avait-elle trahi ?

Elle n'aurait jamais dû suivre Éva chez elle. Mais comment lui résister ? Et comment résister à ses caresses, à son désir ?

Elle soupira et puis soudain, un sourire lui étira le coin des lèvres. Il se déploya et découvrit ses dents. Elle n'avait pas trahi Anouar. Elles ne s'étaient pas déshabillées, elles n'avaient pas plongé leurs doigts dans l'humidité de leur désir. Un désir dont les effluves flottaient encore à travers la pièce. Elles ne s'étaient pas glissées en gémissant l'une à l'intérieur de l'autre. Elles s'étaient simplement embrassées. Leurs échanges avaient été innocents. Le plaisir qu'elles en avaient retiré n'avait aucune espèce d'importance parce que Rita n'avait pas besoin de toucher Éva pour éprouver du plaisir en sa présence et il lui avait parfois suffit du simple contact de ses lèvres sur les siennes pour basculer. Pour chuter vertigineusement.

La culpabilité et les remords qu'elle avait pu éprouvés dans un instant d'angoisse ou de lucidité, l'abandonnèrent définitivement. Elle serra Éva contre elle et l'embrassa sur le sommet du crâne. La jeune Française se réveilla. Elle leva la tête et l'embrassa.

Une dernière fois, pensa Rita.

Elle s'abandonna, musarda. Les baisers se succédèrent doux et gentils. Et puis Éva gémit. Rita lui posa la main sur l'épaule, exerça une pression. Éva releva la tête. Attentive.

— Il est tard, Éva, il faut que je parte.

— Okay.

Éva se leva, elle rajusta sa chemise et regarda Rita reboutonner la sienne.

Elles quittèrent l'appartement sans échanger un seul nouveau baiser, sans se toucher. Éva la conduisit jusqu'à l'avenue, elle héla un taxi, tint la porte à Rita et la referma doucement sur elle. Elle lui fit un signe de la main et le taxi démarra.

Elle ne revit jamais Rita.

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Le lendemain, elle rentrait en France. Elle lui téléphona deux fois. Jamais très sûre de ne pas tomber sur Anouar. Rita lui réitéra ses déclarations : Éva lui manquait, Anouar exigeait qu'elle se plie à ses désirs tous les jours, elle utilisait toujours du gel lubrifiant, et puis bien sûr, qu'elle l'aimait et qu'elles pourraient se retrouver et vivre ensemble dans vingt ans.

Éva ne fumait que très rarement quand elle posait son sac en France. Elle fit mentir cette habitude. Elle passa aussi beaucoup de temps seule, sombre, assise sous un arbre à ne rien faire qu'à fumer jusqu'à s'en rendre malade. Son départ imminent lui occupa l'esprit, elle dût monter à Paris pour son visa, établit sa liste d'affaires à emporter.

Un cousin en vacances passa dans la région. Il l'appela. Il était seul et sans voiture, coincé dans un camping. Il lui proposa de venir le chercher. Il avait les clefs de la maison de sa belle-mère, ils pourraient passer la soirée là-bas. Éva accepta.

Un soir d'ivresse, ils étaient tombés dans un lit les membres enchevêtrés. Éva crevait de désir, mais le cousin avait trop bu pour la satisfaire. Ils avaient ri de leur ébats brouillons et inefficaces, il s'était excusé, penaud, Éva l'avait rassuré et ils s'étaient endormis l'un à côté de l'autre. Ils s'étaient cherchés une autre fois, mais ne s'étaient pas trouvés.

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Ils passèrent une soirée sympathique, ils avaient surtout beaucoup parlé. L'un comme l'autre souffraient de la solitude. Ils avaient bu, mais sans excès. Il l'avait invitée à passer la nuit avec lui. Elle avait trop bu pour rentrer, les gendarmes veillaient souvent sur la route qu'elle devrait emprunter pour rentrer chez elle. Elle accepta.

Ils s'étaient couché l'un à côté de l'autre, innocemment. Au début. Et puis leurs mains s'étaient trouvées, leurs lèvres et enfin leurs corps. Étienne incarnait un fantasme, l'amant dont rêvait les princesses esseulées en mal d'affection et de plaisirs. Éva savait qu'il était accro au sexe. Qu'il multipliait les aventures. Que rien ne l'arrêtait jamais.

Elle le découvrit résistant, inventif, sensuel et vigoureux. Leurs ébats s'éternisèrent pendant une bonne partie de la nuit. Ils y trouvèrent aussi bien l'un que l'autre beaucoup de satisfaction. Éva n'avait rien à envier à Étienne quand on parlait de résistance, de sensualité et de vigueur, et, tout au long de la nuit, Étienne la trouva prête à accueillir ses assauts. Il lui en fit même compliment en gémissant de plaisir alors qu'elle s'empalait lentement sur lui, heureusement surpris de glisser si facilement en elle malgré les heures passées à la posséder sans qu'ils ne s'accordassent la moindre pause. Éva avait un corps prompt au désir, un corps qui ne se lassait jamais non plus des plaisirs. Tout comme Étienne.

Ils se quittèrent le matin comblés et bons amis.

Éva regretta qu'ils habitassent si loin l'un de l'autre. Elle apprécia l'emprunte qu'Étienne laissa en elle durant deux jours. Cette sensation qui prolongeait leurs ébats. La présence d'Étienne en elle entretenait sa satisfaction. Les hommes avaient le don de la soulager de ses peines d'amours avec les filles. Lui surtout avait été parfait et elle savait que la réciproque était aussi valable. Il l'avait appelée pour cette raison. Il savait qu'elle aimait les filles et il ne lui avait pas caché que les garçons ne l'indifféraient pas. Éva était la personne dont il avait eu besoin cette nuit-là et il n'avait pas manqué de lui prouver à de nombreuses reprises qu'il appréciait à leurs justes mesures les talents dont elle savait preuve en amour.

Dommage qu'ils n'eussent partagé qu'une nuit ensemble.

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À peine un mois après son départ d'Alep, Éva s'embarqua pour Bangkok.

Nouveau pays. Il y faisait chaud et humide.

Elle découvrit avec ravissement une université bucolique dont les bâtiments s'organisaient autour de petits étangs. Sur tout le campus, orchidées, magnolias et bougainvilliers s'épanouissaient avec exubérance, amoureusement dorlotés par une armée de jardinier chenus, et à chaque fois qu'Éva franchissait les portes de l'université, elle avait l'impression de pénétrer dans un jardin botanique.

Un collègue Français, heureux de son arrivée, devint vite son camarade de beuverie. Il l'encouragea à acheter une moto et à quitter le dortoir des profs où elle avait d'abord été logée.

— Les profs sont des coincés, tu vas t'ennuyer et en plus, ils passeront leur temps à te surveiller.

Éva perdit ses cheveux par poignées, il tapissait le sol de sa chambre le matin. La chaleur peut-être ou la nourriture.

À moins que ce ne fût le chagrin.

Chaque matin, avant d'acquérir sa moto, elle prenait le bus pour se rendre à l'université, et chaque matin, Éva pleurait durant le trajet.

En manque.

Elle ne savait pas trop de quoi. De Rita certes, mais de quoi d'autre exactement ? De sexe ? D'amour ? D'affection ? Elle ne savait pas. Elle pleurait tout simplement.

Elle déménagea. Acheta une moto. Habita près d'un petit marché de nuit où elle prenait ses dîners.

Au mois d'octobre, le premier semestre s'acheva. L'université ferma pour quinze jours.

Éva partit sur les routes de l'Issan du nord. À moto. Seule.

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Assise à une table sur une terrasse qui surplombait une vallée luxuriante, Éva dessinait. Elle s'accordait des pauses régulières. S'obligeait à s'arrêter pour ne pas avaler d'une traite les kilomètres et les étapes comme l'aurait fait un ogre affamé avec des enfants quitte à mourir ensuite d'une indigestion. Elle faisait halte dans une buvette ou dans un lieu qui offrait à ses yeux un paysage à contempler. Elle grillait deux ou trois clopes, buvait un coca et dessinait si l'endroit en valait la peine.

Elle donna deux coups de crayons, noircit des ombres et des reliefs, observa un moment son dessin. Elle le repasserait à l'encre de Chine plus tard. Elle referma son carnet. S'étira sur sa chaise, tendit la main vers son paquet de cigarettes. En sortit une, tapota le filtre sur la table pour tasser le tabac et battit le briquet. Elle gémit de bien-être en soufflant sa première bouffée de fumée vers le ciel.

Elle se figea soudain.

Elle se sentait bien, tellement bien. Elle fronça les sourcils. Pensa à Rita. À leur histoire, à la passion qui les avaient jetée l'une contre l'autre, à leur démence, à leur ridicules comportements d'adolescentes à peine pubères. À cette rocambolesque histoire d'adultère, aux rapports étranges qu'entretenaient Anouar et Rita.

Aux sentiments qu'avait pu éprouver Rita.

Éva n'avait jamais compris Rita. Maintenant encore, elle ne comprenait ni son attitude, ni ses réactions, ni sa relation avec Anouar. Elle s'interrogeait toujours sur ce que Rita avait pu éprouver à son égard. Éva ne savait pas même pas si elle avait véritablement aimé Rita ou si le désir seul avait piloté leur relation. Éva aurait voulu construire une amitié avec la jeune Syrienne, une amitié qui se serait déployée au-delà de leur passion. Qui l'aurait transcendée. Elles n'en avaient pas eu le temps. Rita ne l'avait peut-être jamais désiré non plus. Parce que cet aspect de leur relation n'avait peut-être jamais eu la moindre importance à ses yeux.

Jour après jour, l'absence de Rita l'avait torturée. Depuis fin avril. Avril... Éva compta les mois sur ses doigts. Six mois. Six mois de souffrance et de chagrin. Six mois de manque et de larmes. Elle avait supporté leur séparation tant qu'elle se trouvait encore à Alep. Voir Rita même épisodiquement avait apporté un baume à ses souffrances. Mais ensuite ? Rien ne l'avait plus soulagée.

Elle tira sur sa cigarette, inspira profondément, bascula la tête en arrière, ouvrit la bouche et laissa la fumée s'en échapper librement.

C'était fini.

La solitude, la distance, mais plus encore le voyage épuisant à moto, la traversée du plateau à travers des paysages exotiques, les grandes étendues désertes, luxuriantes ou brûlées par la sécheresse qui accablait parfois l'Issan, l'assurance qu'elle avait de ne pouvoir compter que sur elle-même, l'obligation qu'elle avait d'apprécier à chaque minute qui passait sa seule présence, l'avaient, sans qu'elle s'en aperçût, peu à peu guérie de son addiction.

Rita avait été sa drogue.

Le sevrage avait été long et douloureux.

Il ne restait rien de leur histoire. Rien de l'amour qu'elles avaient cru ou pas partager. De leur passion. Sinon la capacité d'Éva à jouir sans entrave quelque fût son partenaire si elle avait la chance d'en trouver un. De jouir tout court si elle n'en avait pas et qu'elle s'adonnait elle-même au plaisir.

Ça, elle le devait à Rita.

Et elle lui en serait à jamais reconnaissante.

Pour le reste, le souvenir de Rita comporterait toujours une part d'ombre. Leur histoire aussi. L'adultère avait tourmentée la jeune Française. Elle ne s'y était jamais complus. Pas à cause d'Anouar parce qu'elle ne pouvait s'empêcher de le mépriser, mais pour ce qu'il contenait de mensonge et de lâcheté. Éva n'avait pas cru un instant Rita quand elle avait semblé hésiter la suivre en France, encore moins quand elle lui avait fait miroiter l'espoir de se retrouver dans vingts ans quand ses enfants seraient assez grands pour qu'elle les abandonnât. Rita avait aussi associé le chagrin d'Éva à son âge et Éva avait pris cette déclaration comme une insulte..

— Tu as trente-quatre ans, c'est pour cela... lui avait-elle assuré d'un ton docte.

Comme si Éva était trop vieille, comme si Rita avait été sa derrière chance de trouver l'amour. Sa certitude avait froissé Éva, même si Rita n'en avait rien su.

.

Éva enterra Rita dans les tréfonds de sa mémoire. Personne ne sut jamais rien de la passion qui l'avait dévorée à Alep. Personne sauf Alexis qui l'avait encouragée à parler en découvrant sa peine. Éva avait pleuré sur son épaule. Alexis s'était doutée qu'un amour la tourmentait. Elle avait cru qu'Éva aimait Anouar. Éva l'avait détrompée. Alexis n'avait rien dit en apprenant qu'Éva aimait passionnément Rita. Parce qu'elle ne jugeait jamais personne. Peut-être aussi parce qu'elle avait aimée Éva, même si la jeune Française qu'elle adulait à cette époque n'avait jamais voulu répondre à ses avances, qu'elle lui avait préféré Suzanne.

La sainte Alexis se serait damnée par amour pour Éva.

.

C'était grâce à Alexis qu'Éva avait su que Rita avait quitté Alep.

Après s'être fait virer de l'université où elle travaillait parce qu'elle ne rentrait pas dans la case où voulait l'enfermer sa directrice de département, Éva était retournée au Liban. Elle avait confié à Alexis une marinière Armor Lux, un exemplaire de Tristan et Yseult dédicacé, une lettre et des photos de ses amies. Alexis les porterait à Rita quand elle se rendrait en Syrie.

Alexis lui rendit le paquet non ouvert trois ans plus tard. Personne, à Alep, ne savait ce qu'était devenue Rita.

C'était sans compter sur les miracles de Facebook. Des milliers de femmes portaient le prénom et le patronyme de Rita, Éva, un jour où la curiosité la tenaillait, fit des recherches et la retrouva grâce à Gibraïl. Le garçon, inscrit sous son propre nom, ne protégeait pas ses données.

Ils vivaient au Québec.

.

Quinze ans après le séjour d'Éva à Alep, Rita posta un message sur son mur. Un message illustré par une photo. Rita s'offrait radieuse et souriante devant l'objectif. Elle n'avait rien perdu de son charme. Derrière elle, on distinguait de la neige et un grand lac bordé par la forêt.

Le message portait la date du 4 avril 2019 :

.

« Quarante ans et toujours aussi heureuse. »

.

Alep était en ruine.

Rita était la seule de ses élèves dont le nom eut survécu à travers le temps et la guerre.

Antoine plastronnait en France, après avoir été viré du CCF, parce qu'il avait été filmé en train de tenir en public des propos indignes d'un représentant de l'État français.

Jérôme était mort. Il reposait en silence et en paix au cimetière du Père Lachaise.

Violette était professeur de français au Lycée Notre Dame du Mans. Comme si ses rêves de professeurs de Lettres classique s'étaient tous comptes faits réalisés.

Éva errait toujours.

Elle avait relégué Rita au rang de ses expériences passées, elle avait eu un enfant, seule, au détour d'un récif corallien, à la suite d'une déconvenue plus amicale qu'amoureuse.

.

En 2004, Rita avait balayé des scories qui les encombraient et les étouffaient les pensées et le cœur d'Éva.

En 2019, les pensées et le cœur d'Éva étaient toujours recouverts d'une épaisse couche de cendres qui subsistaient de son histoire avec Rita. Des cendres grises qui rappelaient sans cesse à sa mémoire le visage de la jeune Syrienne dont Éva n'avait jamais réussi à cerner la personnalité.

Rita.

Personne ne l'avait jamais remplacée depuis Alep. Éva n'avait jamais plus marché épaule contre épaule avec quelqu'un qu'elle aimât. Qui l'aimât. Qui le lui avouât.

.

Si jamais Rita l'avait un jour aimée.


***

FIN de Deux saisons à Alep

***

Pays d'Aunis, 14 mai 2019



NOTES DE FIN DE RÉCIT :

Je remercie les lecteurs qui sont allés au bout de ce petit récit. 

Je remercie aussi Scylamphre pour ses corrections.

En espérant, vous avoir donné des regrets de ne pas avoir connu la Syrie avant qu'elle ne sombre dans le chaos, et l'envie, dans un avenir plus radieux, de partir à la rencontre de ses habitants, de sa culture et de son patrimoine.

( Mais ne rêvez pas, Rita est bien partie au Canada et elle est toujours mariée à Anouar. Par contre, Suzanne et Alexis résident encore au Liban et le pays possède lui aussi bien des attraits).

***

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