Cours, saute, évite...
Ces mots se répètent dans ma tête tandis que j'analyse ma situation.
Il fait nuit et je ne remarque presque pas ce qui m'entoure.
Mes pieds claquent sur le sol en béton et le bruit résonne dans les rues silencieuses. À cette heure, impossible de croiser quelqu'un dans la pénombre, sauf eux.

Je m'arrête un instant pour reprendre mon souffle et j'entends mes poursuivants se rapprocher peu à peu. Impossible de les distancer, il faudrait que je trouve un endroit sûr. Je tâte le mur et regarde autour de moi à la recherche d'une cachette improvisée avant de remarquer la petite bouche d'aération à moitié ouverte qui doit mener à l'intérieur de la gare.

J'utilise mes dernières forces pour faire passer mon corps ainsi que mon sac à dos dans le trou étroit.
Une fois à l'intérieur, je suis obligée de me contorsionner pour remettre la grille comme il faut…
Lorsque je m'apprête à partir un petit peu plus loin histoire d'être moins visible, j'entends une branche craquer tout près.
Mes gestes se suspendent et je n'ose plus respirer.
Mes oreilles aux aguets, je laisse mes yeux dériver vers l'océan de noirceur qui s'offre à moi.

Le combat contre eux est d'autant plus inégales que je n'ais pas de lunette de vision nocturne et je ne peux donc pas les repérer à plus de cinq mètres de distance.

Soudain, une voix grave s'élève dans la nuit et me fait sursauter.

" Je ne pense pas qu'on la trouvera ici, elle a du se perdre dans les ruelles un peu plus haut. Faisons demi-tour."

J'ai beau tendre l'oreille, je ne les entends pas s'éloigner et je me dis qu'il serait préférable de ne pas bouger tout de suite.
Mes bras chauffent et le manque d'oxygène ce fait ressentir.

" Dépêche toi, j'ai vu une ombre au coin de la rue ! "

Je me cogne la tête par surprise et me maudis intérieurement du bruit que je viens de faire.
Cela a dû alerter un de mes deux poursuivants qui s'arrête net dans sa course. Enfin, je l'imagine au bruit que font ses bottes sur le goudron.

" Attends, j'ai entendu un bruit là !"

Le stress remonte en flèche et je commence à reculer le plus loin possible en prenant toutes mes précautions.

" Sûrement un chat, grouille toi !"

La voix au loin presse l'homme qui se décide enfin à partir au pas de course.

Tout mes muscles se détendent et je m'écroule dans ce minuscule tuyau.

Une fois ma peur évacuée, je me faufile le long des couloirs en métal avant de tomber sur une plaque de sortie…
Je mets toutes mes forces pour la soulever mais n'y parviens pas alors je bascule tout mon poids dessus.
Elle finit par céder et je m'étale sur le sol lisse de la gare.

Une fois le choc passé, je me mets aux aguets au cas où le bruit aurait attiré un curieux et après plusieurs minutes, je suis heureuse de constater qu'il n'y a personne.

Je pourrais peut être enfin avoir une nuit calme.

Enfin c'est ce que je pensais avant qu'un bruit ne retentisse derrière moi.
Je me retrouve tétanisée tandis que les pas se rapprochent.
Une ombre se dessine et grandit.
Un courant d'air chatouille ma nuque.
Plus un bruit.
Mes muscles se bandent.
Qui que tu sois, un de nous devra y passer.
Et j'ai décidé que ce serait toi.