Chapitre XXX
PDV Angelo
Sous mes yeux, mes hommes de main enroulent la dépouille de Paola dans un film plastique pour l'emporter avec eux. Toujours avec mon verre d'alcool, je fixe la mare de sang qui tâche la moquette et je sens le regard aiguisé de mon bras droit sur ma personne.
Comme d'habitude, il doit se dire que je déconne, mais je fais avec.
— Veux-tu nettoyer la moquette ? Ça serait sympa, lui dis-je avant de lui tourner le dos.
Fabio étouffe un cri de surprise derrière sa main tandis que je prends place sur mon siège. Je m'affale dessus et déboutonne les premiers boutons de ma chemise avant de fermer les yeux et de les rouvrir à nouveau. Mon regard tombe sur ma berreta qui est posée sur le bureau. Je le range dans un tiroir avec un calme olympien.
Un calme olympien qui contraste fortement avec le tempérament de Fabio. Celui-ci est sur le point d'exploser.
— Angelo... Angelo, juste pourquoi avoir fait ça ?
— Elle a dit du mal sur Daniela. Selon elle, c'est Daniela qui a capturé Camille.
Je tournoie le liquide dans le verre en cristal avec un regard distrait.
— Putain, Angelo ! Il faut que tu l'oublies. Elle est partie et elle ne reviendra jamais ! Même Enzo ne sait pas grand-chose de son départ, gronde Fabio. Tu as des problèmes beaucoup plus importants à te préoccuper.
Je hausse les épaules et tout à coup, mon bras droit pose brusquement ses mains sur chaque extrémité du bureau. Je daigne enfin de l'observer et son visage est tordu par la colère. Je dois vraiment le désespérer, il fait tout pour m'aider mais je refuse. Je veux qu'on me laisse tranquille et Fabio n'est pas prêt à me lâcher.
— La mort de Santos Moretti va nous apporter des problèmes et sa petite sœur va croire que c'est nous qui avons tout orchestré et elle viendra t'ôter la vie. Alors, si tu pouvais...
— Je m'en fiche, Fabio. Dis lui de venir à moi. Je tirerai une balle entre ses yeux avant qu'elle ne m'aperçoive, je lui coupe vivement. Je m'en fiche des Moretti, je m'en fiche de tout ça.
— Il y a un truc qui cloche. Le jour où on a voulu discuter avec le survivant, il y a eu une bagarre chez Enzo et comme par hasard, le seul survivant de cette explosion est mort quelques heures plus tard. On a retrouvé des traces de cyanure dans ses tests sanguins. Quelqu'un dans la mafia connaissait nos plans et elle voulait nous empêcher de connaître la vérité. Cette personne est dans le camp des Moretti.
Je ferme les yeux et me masse les tempes tandis que Fabio continue son récit. Je l'écoute à peine et me laisse distraire par mes pensées avant qu'elles ne se focalisent sur une seule et unique personne. J'essaie de penser à autre chose mais je revois ce regard brun qui pétille chaque fois quand il me voit.
Je pousse un soupir frustré.
— Fabio, je n'ai pas la tête pour ça. Fais ce que tu veux. Après le départ de Daniela, j'ai l'impression qu'elle a emporté une partie de moi.
Le regard du blond s'adoucit et il opine.
J'ai passé ma frustration sur Paola et je ne regrette pas. Cette fille me pétait les couilles. Elle voulait remplacer Daniela. Elle voulait devenir elle.
J'ai supporté ses avances mais aujourd'hui, Paola a osé salir l'image de Daniela et il était impossible pour moi de passer outre. J'ai tiré sur elle, sans aucun once de regret. Sa mort n'intéressera personne.
Je me lève lourdement et quitte le bureau. La mine grave, j'erre dans les couloirs de ma maison avec cette maudite sensation de solitude. Avant l'arrivée de Daniela, j'étais seul, je vivais seul dans ce manoir mais une fois quand elle a réussi à s'intégrer dans mon petit cercle, cette fille a ce don de me faire sentir comme un homme nouveau. Pour la première fois depuis tant d'années, je ne me sentais plus seul. Non, je me sentais soutenu.
Daniela est mon pilier. Ma force vitale.
Mais un jour, elle est subitement partie . Sans m'avertir.
Je parle sûrement comme une femme, mais son départ m'a fait quelque chose.
Je me suis senti terriblement mal et terriblement seul. Puis, j'ai pris conscience que cette femme est vraiment importante pour moi. On se connait depuis deux mois mais pourtant, elle sait qui je suis réellement. Elle a vu la meilleure partie de mon âme. Cependant, je ne connais rien sur cette fille.
Et elle ne s'est jamais ouverte à moi.
*
Les jours passent et je reçois aujourd'hui les nouvelles d'Enzo. Il s'est installé dans son nouvel appartement. Il m'a envoyé une invitation pour cet après-midi et j'avoue que je reste un peu confus.
Enzo est mon ami mais... son invitation me surprend mais j'accepte quand même.
J'observe mon bureau qui se trouve dans un bazar. Des dossiers sont éparpillés ainsi que des livres et des bouteilles de whisky. Je quitte vivement mon bureau pour aller me préparer avant d'aller chez Enzo mais avant je fais une petite escale à un QG.
Je sors de ma voiture et rejoins les jumeaux au bar.
Je les retrouve près de quelques femmes qui exposent leurs attributs. Une blonde s'approche de moi et caresse sensuellement mon bras accompagné d'un regard aguicheur. J'attrape brutalement sa main et je tords ses doigts jusqu'à la faire couiner.
— Vas-y doucement, poto ! s'exclame Matteo. On ne veut pas qu'une seconde Paola meurt.
J'agresse la blonde avec un regard avant de la lâcher. Elle s'en fuit honteusement et j'approche des jumeaux.
— J'ai une nouvelle mission pour vous, je leur annonce en m'asseyant en face d'eux.
— Et moi qui voulais prendre des vacances, souffle Lukas. C'est quoi ta mission ?
— Kidnapper Isidro Hernandez.
— Isidro Hernandez ? répète Matteo, confus. Isidro Hernandez... Ah, ce Isidro Hernandez ! Mais tu ne penses pas que...
— Ça part à l'encontre du contrat ? Oui, réponds-je, las. Les Moretti ne veulent pas de ce contrat et j'ai été bien trop stupide pour continuer à espérer. Si cette Sara veut me voler mon bien, ma mafia, alors dites-lui de venir. J'aurai son père avec moi. En faisant cela, elle se montrera enfin.
Les jumeaux échangent un regard suspicieux avant de se focaliser sur moi.
— Bon d'accord. Par contre, j'espère que c'est la dernière mission que tu nous files avec les Moretti. Je ne veux plus faire affaire avec les assassins de notre grand frère, m'informe gravement Lukas.
Je sais que c'est dur pour eux mais ils sont les meilleurs espions et ils seront parfait pour cette mission.
Je reste encore quelques minutes avec eux pour éclaircir les consignes puis je pars en direction de chez Enzo.
Je me gare en face d'un immeuble moderne et j'ai presque oublié qu'Enzo adore les lofts avec une surprenante vue. Je lis à nouveau son message et me dirige vers l'ascenseur pour atteindre le dernier étage. J'ai dû attendre trois minutes dans l'ascenseur et une fois arrivé à l'étage, je prends mon temps à chercher le numéro de son appartement.
Numéro 28.
Une fois devant la porte, je sonne et attends impatiemment qu'on m'ouvre la porte. J'ajuste à nouveau mon costume et sonne encore et encore.
Mais personne n'ouvre.
— Enzo, t'es un putain d'enfoiré, je siffle en prenant mon téléphone.
Je m'apprête à lui envoyer un message mais une mélodie étouffée me fait arrêter dans mon geste. Je fronce mes sourcils et penche ma tête vers la porte où j'arrive à distinguer des notes de musique.
Quelqu'un joue du violon et ma pensée se penche sur Daniela. Sans attendre, j'ouvre la porte et entre à l'intérieur du loft et là, j'entends clairement le son. Une mélodie rapide et désespérée.
Je remarque Emilia arriver et quand ses yeux se portent sur moi, elle pousse un petit cri de stupéfaction.
– Angelo, qu'est-ce que tu fais ici ?
– C'est Daniela, non ? C'est elle qui joue du violon ?
Elle bredouille et je reçois clairement ma réponse. Daniela est là.
Un soulagement mêlé à de l'excitation m'emparent et je suis la mélodie en ignorant les avertissements d'Emilia. Je longe un long couloir lugubre où repose une atmosphère étouffante.
J'arrive devant une porte et l'ouvre lentement et mon cœur arrête de battre.
C'est vraiment Daniela. Dos à moi, elle joue du violon sur son lit. Ses cheveux qui ont l'habitude d'être brillant sont ternes et ils sont ramassés en un chignon décoiffé.
Mes pas se dirigent automatiquement vers elle et tout à coup, Daniela arrête de jouer et redresse son dos comme si elle avait senti ma présence.
— Daniela, tu m'as manqué.
Elle pivote lentement et croise mon regard.
— An... Angelo ? s'exclame-t-elle d'une voix faible.
Je m'attendais à lire de la joie ou encore de la surprise dans ses prunelles brunes. Mais à la place, j'ai l'impression qu'elle veut m'étriper sur place.
Quelque chose a changé chez elle. Je ne reconnais plus l' ancienne Daniela.
Quelque chose en elle s'est éteinte.
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