Chapitre XXIII

Je joue avec la fiole de poison sous les yeux d'Enzo qui est resté silencieux après que je lui ai raconté ma journée d'hier et de mon entrevue avec ce crétin d'Adam.

— Et tu as l'intention de tuer Angelo avec... ça ? demande-t-il, hésitant.

Je lui adresse un regard, il devine ma réponse.

— Ce qui m'inquiète le plus c'est cette fichue death list. Ton prénom est marqué, celui de Fabio est bien d'autres. Adam n'est pas seul dans son coup mais j'ai bien l'intention de gâcher ses plans.

Je ris amèrement et secouant ma tête.

Carlos me fout un coup de pression. Je sais qu'il prépare quelque chose derrière mon dos et j'ai l'intention de me rebeller. Si Carlos veut jouer comme ça, alors ce n'est pas un problème.

Je me lève et me dirige vers l'évier pour verser tout le contenu du poison avant de jeter la fiole à la poubelle.

— Enzo, toi qui disais que la mission était un peu nulle, je pense qu'elle va changer de tournure.

Je me tourne vers lui et le brun hausse un sourcil, curieux. Je dégaine mon arme.

— Attends... ne dis pas que tu vas tuer toi-même Fabio ? demande-t-il, horrifié.

Je ferme les yeux un court instant, désespérée. Parfois, je me demande s'il a vraiment un cerveau.

— Adam fait partie de l'équipe de soldats que mon cher parrain a envoyé à Sicile. Ses hommes sont actuellement cachés dans une planque et je sais où elle se trouve. Carlos m'a dit au début de ma mission que si j'ai besoin d'aide, je les appellerai.

— Donc, tu vas les tuer... un par un. Mon Dieu, Daniela, ton sourire me fait peur.

Je souris machiavéliquement et remets mon arme à sa place.

Adam est actuellement infiltré dans les troupes d'Angelo, ce qui fait qu'il n'est pas à la planque. Cependant, les autres moutons y sont.

— J'ai mieux que ça et tu vas m'aider. Si on fait ça c'est pour nous protéger.

J'explique mon plan à Enzo et nous attendons le début de la nuit pour l'exécuter. Bianca et Emilia restent au loft et je les quitte pour rejoindre Enzo qui m'attend dans sa voiture. Il démarre la voiture sans rien dire et suit les instructions que je lui donne.

— T'es vraiment sûr qu'on ne risque rien ? me questionne-t-il une nouvelle fois.

Je décolle mon front contre la vitre pour l'observer.

— Enzo, mon plan est simple...

— Mais imagine que--

— Putain Enzo Aledosi ! Tu veux vivre ou crever ?! je demande, sèchement.

l'Italien déglutit avant d'hocher frénétiquement la tête.

Je pousse un soupir avant de reprendre mon activité, c'est-à-dire, contempler le paysage nocturne.

Un truc que j'ai compris avec ma mère, parfois les personnes qui sont dans notre camp peuvent nous tourner le dos. Adam a beau être dans mon camp mais c'est un être infâme. Il a osé me menacer en oubliant qui je suis réellement et ce que je m'apprête à faire est mon premier avertissement.

J'espère qu'après ça, il retournera en Espagne.

Je déteste quand on fout le nez dans mes affaires. J'ai pourtant dit à Carlos que je souhaite gérer cette mission... Maintenant, je ne sais plus si Carlos est dans mon camp ou pas. Je ne sais pas si cet homme est réellement mon parrain. Mon deuxième père.

Je ravale cette envie de pleurer et nous arrivons devant la planque des soldats de Carlos.

Je quitte la voiture et m'avance lentement vers cet immeuble abandonné.

Ce soir, je vais à nouveau ôter des vies. Même si cette idée ne m'enchante pas, je n'ai pas le choix.

Je fais ça pour Enzo et pour sa famille. Je fais ça aussi pour... Angelo.

Je prends une grande inspiration et sens une goutte d'eau tomber sur le haut de mon nez avant que d'autres gouttes d'eau atterrissent sur mon visage.

Et il ne manquait plus que la pluie...

Je lève les yeux au ciel et entre dans le bâtiment. Directement, je suis frappée par l'odeur de la cigarette. Je me bouche le nez et entends de loin des rires graves suivit de quelques coups de feu. Je longe un long couloir sombre et sinistre et les voix s'intensifient. Je reconnais entre mille ma langue natale. L'Espagnol.

Un homme appuyé contre un mur du couloir fume une cigarette et interpellé par le bruit de mes talons qui claquent contre le vieux parquet, il lève sa tête dans ma direction avant d'ouvrir grands les yeux.

— Oh putain, souffle-t-il en passant une main dans ses cheveux poisseux.

Je me retiens de grimacer et je le regarde de haut en bas. Cet homme doit avoir une quarantaine d'années et bordel, comment il est répugnant à voir !

On dirait qu'il n'a pas pris de douche depuis une décennie et son odeur corporelle cache presque l'odeur de la pisse qui émane de chaque mur de cet immeuble.

— Pa-patronne je-je...

— Emmène-moi où sont les autres, je lui ordonne d'une voix cinglante.

Il acquiesce, effrayé et court dans un autre couloir. Je le suis rapidement et il m'emmène dans une salle peuplée de mâle.

— Les gars, il y a la patronne junior ! vocifère le Cro-Magnon en attirant l'attention sur moi.

Chaque soldat se tourne dans ma direction et quelques chuchotements se font entendre. J'avance lentement dans la pièce ayant l'impression d'être dans une fosse à lions et un homme, faisant dans le deux mètres s'avance dans ma direction, une cigarette dans la bouche.

C'est sûrement lui le chef de ces pigeons.

— Que nous vaut la visite de miss Moretti ? s'exclame-t-il d'une voix extrêmement grave.

Il souffle la fumée de sa cigarette sur mon visage et je me retiens de balancer mon poing dans sa vilaine gueule. Je secoue ma main devant moi pour faire partir la fumée.

— Je veux que vos gars et vous partez d'ici. Je n'ai pas besoin de vous, lui dis-je en ancrant mes yeux dans les siens.

Un duel se fait entre nous mais voyant que je ne cligne plus des yeux, il fronce les sourcils et met sa foutue cigarette entre ses lèvres gercées.

— Miss, je ne peux pas. L'ordre vient de Carlos, pas de vous.

— Mais c'est moi la future patronne et c'est ma mission. Votre présence est inutile.

Je suis obligée de me taper la causette avec eux pour laisser le temps à Enzo de réaliser ce que je lui ai demandé.

— Mais vous ne l'êtes pas encore, miss, rit-il avant de cracher sa fumée dans ma direction. Et puis, je ne laisserai pas Adam seul. Nous resterons ici.

Je plisse mes yeux et reconnaît légèrement le visage de ce connard d'Adam sur la face de cet homme. Cet homme doit être son père... et il est aussi est un connard. Tel père, tel fils.

— Par contre, si vous avez besoin de nous, nous sommes là. N'est-ce pas les gars ?

Les hommes autour de nous se mettent à huer pour approuver les dires de leur chef.

— Sans façon, réponds-je avec un sourire faux. Je peux me débrouiller seule.

L'homme rigole encore une fois et agacée, j'attrape sa putain de cigarette avant de la jeter au sol.

Calme-toi Sara, encore quelques minutes. Encore quelques minutes et je pourrai partir.

— Vous savez miss, votre mère était comme vous. Je m'en rappelle encore quand elle était devenue la patronne. Elle disait tout le temps « je peux me débrouiller seule », avoue-t-il en imitant une voix féminine. Elle se prenait de haut mais sans l'aide de Carlos et de votre père, elle n'aurait jamais réussie.

Son regard s'attarde sur moi, en attendant une réaction démesurée de ma part mais je garde le sourire.

Mais à l'intérieur de moi, je bouillis de rage.

— Et la morale de l'histoire ? je demande en haussant un sourcil.

— La morale de l'histoire ? Une femme ne peut pas se débrouiller toute seule. Elle a besoin d'un homme, sans un homme elle n'est rien. J'ai toujours voulu que ça soit Carlos qui reprend le relais, je suis déçu que ça soit vous, miss.

Je serre les mâchoires et serre fortement mes poings.

Il a faux, ma mère a réussi sans l'aide d'un homme. Elle a réussi à élever Santos et moi sans l'aide de mon père. Aujourd'hui, les hommes croient que les femmes ne savent pas faire les mêmes choses qu'eux, mais c'est faux. Ma mère était une des plus grandes tueuses en Espagne et c'était elle qui réparait le vélo de mon frère. Maman était très forte et c'était une femme exemplaire.

Je brûle de rage à l'intérieur de moi. Cet enfoiré salit le visage de ma mère. Ma mère était tout sauf une bonne à rien. Elle pouvait vivre sans l'aide d'un homme.

— Mais heureusement pour vous, je ne suis pas comme ma mère sinon je vous aurai tiré une putain de balle entre vos yeux globuleux. Vous ne voulez pas partir ? Bien. On se retrouve aux enfers.

L'homme barbu rigole et je tourne les talons en grinçant des dents. Il va regretter ce qu'il a dit.

Alors une femme est une bonne à rien faire ? Une femme ne peut pas faire ce qu'un homme peut faire ?

Il va regretter dans quelques instants.

Je quitte les lieux avec cette rage assourdissante et rejoins Enzo qui est appuyé contre sa voiture. Il remarque la colère sur mon visage et ne pose pas de question.

— On se casse !

J'entre furieusement dans la voiture et Enzo la démarre sans plus attendre.

— J'ai déposé tous les explosifs et normalement, elles devront...

Un bruit sourd se fait attendre derrière nous. Je jette un coup d'œil dans le rétroviseur et éprouve une satisfaction en voyant des grandes flammes danser dans l'air.

Mon plan était d'exploser ce putain d'immeuble. Une morte lente et douloureuse. Ces hommes vont d'abord s'asphyxier avec la fumée avant de sentir leur sens les quitter peu à peu. Leurs poumons brûleront avant que le cœur s'arrête de battre sans oublier que leur peau va agréablement rôtir.

— Maintenant, dépose-moi chez Angelo. J'ai besoin de le voir.

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