Chapitre XL

Deux mois plus tard...

Mon chauffeur s'arrête à notre repère et il m'ouvre vivement la portière. Il baisse la tête en signe de respect et je sors lentement de la voiture avant de redresser ma veste blanche.

À travers ma paire de lunettes, j'observe les arbres qui nous entourent et j'entends des oiseaux chanter. Nous sommes loin de la civilisation, personne ne saura ce qui se passera ici...

Je remarque un homme courir dans ma direction et il baisse la tête pour me saluer.

— Sara, tu es arrivée ! Je croyais que tu étais au nord de l'Espagne ! s'exclame Diego, surpris de mon arrivée inattendue.

J'esquisse un sourire froid.

— J'ai fini ma mission, alors j'ai décidé de venir vous voir. Ils sont toujours à l'intérieur ?

Diego est mon conseiller et aussi celui d'America. Il a fait ses preuves très tôt et j'ai décidé de l'embaucher.

— Ouais, Gonzalez est en train de passer un sale quart d'heure avec Sebastian.

Je hausse simplement un sourcil et sans attendre, j'entre dans ce vieux bâtiment. Un cri déchirant me fait arrêter sur place et je distingue un de mes sous-boss tabasser jusqu'au sang notre traître qui est suspendu dans le vide. Il supplie Sebastian d'arrêter mais celui-ci continue à passer sa colère sur ce pauvre homme...

pauvre homme... il le mérite.

J'ôte mes lunettes et m'approche de mon sous-boss.

— Sebatian arrête !

Une fois qu'il entend mon ordre, il se stoppe et se tourne dans ma direction. Il me salue et s'éloigne de Gonzalez.

Maintenant, à mon tour.

J'enlève ma veste et Diego le prend avant de me tendre un dossier. Je fais les cents pas en feuilletant les feuilles. Mes talons claquent contre l'asphalte et j'entends la respiration sifflante de Gonzalez. Il est apeuré.

— Alvaro Gonzalez, tu étais un sous-fifre de Carlos Lira. Tu étais à la tête d'un trafic de prostitution sur mon territoire. Tu as détourné aussi plus qu'une dix millions d'euros et... tu as voulu m'empoisonner ? je lis, avec un sourire amusé.

J'adresse un regard froid à Gonzalez et celui-ci ferme les yeux. Je laisse franchir un rire froid entre mes lèvres.

Ce mec a toujours était du côté de Carlos. Même si ce connard est mort, il y a toujours des personnes qui ne souhaitent pas me voir au pouvoir. J'ai beau faire des efforts, les gens sont toujours hésitants à me voir remplacer mon frère.

Mais ce qu'ils n'ont pas compris, c'est mon héritage. C'est moi qui décide.

Ils peuvent toujours me défier, c'est moi qui gagne.

Le jour où Gonzalez a voulu m'empoisonner, il était très simple pour moi de reconnaître que mon thé contenait du poison. J'ai eu un enseignement sur les poisons quand j'étais au Japon et puis, il y avait un petit filet de poudre blanche sur le bord de la tasse.

J'ai dû tabasser à mort le serveur et il m'a enfin avoué que c'était l'œuvre de ce fils de pute de Gonzalez.

— Vous ne voulez pas me voir comme votre cheffe ? Parce que je suis une femme et que je ne suis pas capable ce qu'un homme peut faire ? Diego, apporte-moi la famille de Gonzalez, j'ordonne avec une voix catégorique.

Diego sort de l'entrepôt tandis que certains soldats chuchotent entre eux, confus de la situation. Je reste sur place en croisant les bras et Diego revient avec une petite fille et une femme qui sont aussi dans un piteux état. La petite pleure et cache son visage dans la veste de sa mère qui pleurniche aussi.

Je roule des yeux, déjà ennuyée par la situation.

— Sara, vous ne pouvez pas faire ça ! Elles n'ont rien avoir avec ma connerie ! hurle Gonzalez, apeuré.

Je rigole franchement.

Diego pousse les deux prisonnières devant nous et la femme me supplie de les laisser tranquille. Je fais la sourde oreille et me focalise sur la pourriture de Gonzalez.

— Il fallait réfléchir, Gonzalez. Tu as aidé Carlos pour l'élaboration de l'assassinat de ma mère et je rends la pareille. Tu verras ta famille mourir sous tes yeux, comme moi j'ai vu la mienne périr à cause des plans tordus de Carlos.

Gonzalez me supplie de le pardonner et je fais signe à Sebastian. Il acquiesce, sort son arme et appuie sur la gâchette. La balle transperce la tête de l'épouse de Gonzalez et les pleurs de la petite fille se mêlent aux cris de son père. Sebastian tire une nouvelle fois et le corps de la petite fille tombe lourdement au sol sous mes yeux qui ne reflètent aucun sentiment.

Je n'ai pas de culpabilité, rien. Je ne ressens rien.

Les cris de Gonzalez résonnent dans la pièce et je dégaine mon arme avant de tirer une balle dans sa direction. Elle touche son cœur et sa tête s'affaisse.

Une personne de plus.

Le sang coule sur le sol et je balance mon dossier sur la dépouille de Gonzalez.

Je suis toujours cette tradition que ma famille a inventée. Ma mère est morte prématurément et j'ai l'intention de traquer chaque enfoirés qui ont suivit Carlos. Le sang répondra par le sang.

— Ce soir, il y aura une réunion. Diego, informe à tous les sous-boss et Sebastian à 15h, tu viendras me voir. J'ai une mission pour toi, je leur informe.

Les deux hommes obéissent et je quitte le lieu sous les regards effarés des soldats. J'entre dans la voiture et le chauffeur m'emmène enfin à la maison.

Je pose ma tête contre la vitre et me laisse bercer par le silence. Je n'ai pas réussi à bien dormir durant ces derniers mois car je pensais trop à lui. Le chauffeur me fait réveiller et je remarque que nous sommes déjà arrivés.

Je sors de la voiture et entre à l'intérieur de la maison qui est en travaux. Des ouvriers me saluent tandis qu'une femme élégante s'approche de moi avec un sourire chaleureux.

— Sara ! Tu es enfin revenue !

— Je suis partie pendant deux heures, dis-je avant qu'Elina me prenne dans ses bras.

Je la serre aussi et soupire quand elle m'examine de la tête aux pieds. J'ai l'impression d'être devant ma mère.

— C'est quoi ces tâches de sang ? Tu as encore tué une personne ?

Je roule des yeux avant de continuer mon chemin jusqu'au nouveau salon. Le salon qui était autrefois vieillot et sombre est beaucoup plus éclairé et moderne. J'en avais marre de la décoration obscure de la villa alors j'ai décidé de la rénover.

Tout ça fait partie de notre nouveau chapitre.

Avec Elina, il était temps qu'on termine notre deuil de mon frère. On doit passer à autre chose, ensemble.

— J'ai buté un des gars qui ont participé au meurtre de maman mais je vais bien.

On s'arrête devant les cadres photos. Là aussi, on a décidé d'en remplacer quelques uns. Certains ont gardé leur place mais d'autres sont désormais dans le grenier. Une photo attire ma curiosité et je la pointe du doigt.

— C'est toi qui l'as mise ici ?

— Oui. Je ne sais pas qui sont ces gens mais tu semblais heureuse, m'avoue ma belle-sœur.

Je souffle, nostalgique.

Sur la photo, je devais sûrement avoir quinze ans et je déteste ma tête. On peut voir mon appareil dentaire.

— Ce sont mes cousins et cousines. On a à peu près le même âge, je l'explique. Sorcha est la plus âgée, le garçon qui se la pète est mon cousin Rael et à côté de lui c'est notre cousine Farren. On s'est perdus de vue après... tu sais quoi.

Elina hoche lentement la tête avec un sourire triste.

La seule cousine avec qui je suis encore en contact est Sorcha mais maintenant elle a une vie de famille, elle est une mère. Elle n'a pas vraiment de temps pour moi. Quant aux deux autres cons, je crois que Rael s'est donné le challenge de baiser toutes les américaines et Farren, je ne sais pas si elle est toujours vivante ou pas.

Après l'assassinat de notre mère, mes oncles et tantes se sont éloignés de moi.

— Mais je suis toujours là. D'ailleurs, pourquoi ne pas les inviter à l'anniversaire d'Hortensia ? Tu pourrais les revoir.

Je rigole tristement et tourne le dos aux cadres photos.

— Elina, tu n'as toujours pas compris. Notre famille est brisée en mille morceaux comme un putain de vase. Tout le monde fait sa vie de son côté et puis Hortensia n'aura que toi et moi pour ses deux ans. Ça ne sert à rien, vraiment.

L'anniversaire de ma nièce tombe en même temps à une soirée que j'ai organisée avec mes associés qui viennent un peu partout dans le monde. Et si mes cousins acceptaient de venir me voir... non, ils n'en ont rien à foutre de moi.

Cependant, j'espère que mes oncles et tantes seront fiers de moi. J'ai réorganisé la mafia. J'ai renvoyé tous les anciens chefs et j'ai embauché des hommes et des femmes qui m'ont prouvé leur loyauté.

Quant à mon rôle, je l'ai divisé en deux. America et moi sommes à la tête de la mafia de la Moretti. Mais pour l'instant, je suis la seule qui gère toutes les affaires.

America a décidé de s'éloigner de l'Espagne pendant un petit moment. Il a besoin d'être seul pour entamer son deuil. Il a perdu son père... il a tué son père pour moi.

C'est mon meilleur ami et on a grandi ensemble. Je le connais comme lui il me connaît. J'espère que cet accident ne changera rien à notre relation.

Et j'ai beau essayé de mentir à moi-même mais Carlos était mon parrain. J'ai versé des larmes à la suite de sa disparition. Cet homme m'a élevé comme si j'étais sa fille. C'est lui qui m'a appris à faire du vélo, c'est lui qui m'a enseigné le monde des affaires. Cet homme que je considérais comme mon père m'a poignardé dans le dos. Comment a-t-il pu devenir un monstre ?

Après avoir mis un terme à ma conversation avec Elina, je décide de me réfugier dans la salle de musique. Je récupère mon étui de violon et l'ouvre. Cette fois-ci, je trouve un nouveau violon, tout neuf.

L'ancien était usé et regorgé de mauvais souvenirs. Je n'avais pas conscience que mon ancien violon était trop étroit pour moi contrairement à celui que j'ai acheté. Le nouveau est adapté à ma taille et il est beaucoup plus facile à jouer.

Mon regard tombe sur mon tatouage et je soupire avec un léger sourire. Quand on devient la Patrona, il faut graver dans sa chair le symbole de la mafia qui se transmet de génération en génération. J'ai sur mon avant-bras un tatouage d'un serpent qui enroule une rose. Le serpent est l'animal symbolique de notre mafia tandis que la rose est la fleur fétiche de ma mère. Ce tatouage prend la moitié de mon avant-bras et honnêtement, il est très beau. Le tatoueur avait intérêt à bien faire son taf aussi, je lui foutais une pression de fou sur ses épaules.

J'attrape le violon et le pose au-dessous de mon menton mais mon regard se fixe dans un coin de la pièce.

Angelo ?

Je ferme les yeux et secoue ma tête avant d'ouvrir à nouveau mes yeux.

Angelo n'est plus là.

C'était encore un mirage.

Je souris tristement et commence à jouer un nouveau morceau que j'ai appris récemment.

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