Chapitre XIX
Quelques heures plus tard, me voici enfin devant la demeure d'Angelo. Même s'il a insisté pour m'envoyer un taxi pour m'emmener chez lui, j'ai refusé. Enzo a une multitude de voitures sur le parking, donc je me suis fait plaisir à prendre la voiture qui me semblait la plus chère.
J'entre dans la propriété du mafieux et je m'attendais à une soirée du genre comme celle de son club en ville bondée de gens mais... j'ai l'impression qu'on est à cinquante personnes ou voire un petit peu plus ?
La musique est très calme me donnant l'impression que j'assiste à un gala de charité.
J'aperçois enfin Enzo au fond du salon, accompagné de sa petite-amie et vivement je me joins à eux.
— Eh bien, c'est sympa de m'avoir prévenu qu'il y aurait une soirée chez Angelo, je m'exclame une fois arrivée à lui.
Il me fait un sourire désolé et pose sa main sur mon épaule.
— Je pensais que tu avais besoin de repos avec ton voyage, m'avoue-t-il.
Je lève les yeux au ciel et m'apprête à lui raconter la visite d'Elina mais la présence de sa petite-amie m'en empêche. Comme si Enzo a lu dans mes pensées, il hoche la tête signifiant qu'il a enfin tout révélé à Bianca.
Même si cela ne me plaît pas vraiment, je ne veux pas être la cause de leur séparation, si un jour ils décident de se séparer. Bianca et Enzo se connaissent depuis si longtemps, ça serait dommage qu'une longue relation s'arrête à cause d'un mensonge.
— Elina est passée me voir et tu t'en rappelles de la lettre que tu m'as transmise ? Sache que ton nom était marqué sur la liste, je lui confie.
Un serveur arrive dans notre direction avec des flûtes de champagne. Nous en prenons tous un silencieusement et une fois que le serveur s'éloigne de nous, nous recommençons nos messes basses.
— Liste ? Pourquoi je figurais sur cette liste ?demande Enzo en sourcillant.
— C'est une death liste et il s'avère que tu faisais partie des personnes que j'étais censée tuer. J'ai brûlé la lettre sans prendre la peine de la lire.
Amèrement, je bois ma boisson en regardant à l'horizon. Je remarque Camille de loin, vêtue d'une robe similaire à un tapis oriental que j'ai dans le salon de ma maison. Je détourne mes yeux, horrifiée de cette scène.
— Cet enfoiré ! J'étais sûr qu'il fallait refuser sa demande d'aide, peste Enzo en serrant sa flûte de champagne dans sa main.
— Crois-moi, Enzo, si cela est bien vrai, Carlos et Santos vont terriblement regretter. Imagine qu'ils nous ont menti depuis le début, alors peut-être que...
Je garde le silence, agacée de cette situation.
— Peut-être qu'Angelo a raison sur cette alliance. Peut-être que Carlos a bien tué... Cristian Romano. Je commence à devenir méfiante envers eux.
Le visage d'Enzo prend une autre mine et on dirait qu'il va péter les plomb d'une minute à l'autre. Je termine difficilement mon champagne. Enzo commence à dire des trucs incompréhensibles, faisant retourner quelques invités dans notre direction. Bianca serre sa main sur son épaule en lui adressant un lourd regard et l'homme arrive à se calmer un peu.
— Mais qui est-ce Elina ? demande-t-elle, confuse.
— Ma chère belle-sœur.
— Celle que tu aimais pas ? demande Enzo.
Je hoche la tête et pousse un soupir.
Cette histoire commence à me fatiguer et finalement, cette soirée va sûrement me changer les idées.
— Matteo et Fabio sont à ta recherche, m'informe Enzo d'une voix grave. S'ils savent que tu es ici...
— Alors on va tous mourir, je le coupe vivement avec un sourire forcé. Je gère la situation. Toi et ta petite-copine aurez le temps de fuir l'Italie si un jour on découvre qui je suis réellement.
Je sens un regard intense sur moi et je lève ma tête vers l'étage avant de croiser le regard brun d'Angelo m'épier depuis l'étage. Toujours vêtu d'une tenue sombre et chic, il boit son verre de whisky ne coupant pas le contact des yeux. J'esquisse un sourire et me tourne vers Enzo et Bianca qui n'ont pas manqué une miette de la scène.
— Si vous voulez bien m'excusez. Ce soir est une soirée où je peux enfin me reposer et mettre de côté cette mission.
Je les quitte pour rejoindre Angelo à l'étage mais à ma grande surprise, il n'est plus là. Je pars dans la direction de son bureau et à peine j'appuie sur la poignée de la porte, j'entends deux voix graves discuter dans le bureau et je reconnais entre mille Angelo et Matteo.
Ma conscience me dit de partir mais j'ai failli oublier que Matteo fait des recherches sur ma personne et il a sûrement découvert une autre chose me concernant.
Je penche mon oreille et plisse mes yeux en essayant de comprendre leur discussion mais malheureusement, je ne comprends aucun mot qu'ils disent.
Je pousse un soupir et toque à la porte avant d'entrer carrément dans la pièce. Les deux hommes s'arrêtent de parler et se tournent dans ma direction.
— On en parlera plus tard, Matteo, annonce Angelo d'une voix presque colérique.
Le jeune homme hoche la tête et tourne les talons. Quand il passe à côté de moi, il me sourit mais ça se voit directement que c'était forcé. Une fois la porte fermée, je m'approche de mafieux et il fait de même avant de prendre mes mains dans les siennes. Je regarde pendant quelques instants nos mains entrelacées avec un sourire en coin avant de me concentrer sur lui.
— C'est ta soirée et tu restes encore à ton bureau ? je demande avec amusement.
— Je t'attendais justement.
Il pointe avec son menton un jeu d'échecs disposé sur une petite table et ça me rappelle notre première fois quand on s'est rencontrés.
— Tu aimes ce jeu à quel point ? Je m'attendais à ce qu'on allait passer le temps avec les autres.
Il pose une main sur le bas de mon dos et nous dirige vers l'espace salon.
— Hmm, laisse-moi réfléchir. J'ai commencé à aimer ce jeu depuis la première fois qu'on s'est rencontré . Alors si tu veux bien jouer avec moi.
Je ris et m'assois en face de lui puis je pose un pion sur l'échiquier.
— Angelo, je ne voulais pas te déranger avec Matteo. On dirait que vous étiez concentrés dans votre conversation, dis-je.
Il lève son regard brun dans ma direction.
— C'était par rapport à sa mission, souffle-t-il. Ce n'était pas grand-chose, on n'était pas d'accord sur un sujet et enfin bref. Parfois, je veux juste m'éloigner de Sicile et m'installer sur une île paradisiaque. Mon rôle me demande trop de temps et trop de travail. Mon père m'en a demandé trop avant sa mort.
Il passe une main nerveuse dans ses cheveux et les décoiffe. Puis, il détache sa cravate et déboutonne les premiers boutons de sa chemise blanche, comme s'il était crevé de sa journée.
Je m'adosse contre le canapé, curieuse.
— Et qu'est-ce qu'il t'a demandé ?
— Prendre son relais, fonder une famille sans oublier qu'il préfère avoir des petits-fils que des petites-filles, répond-t-il avec un sourire sans vie.
Je souris, nostalgique. Ma mère était comme son père. Elle voulait que je me marie avec un homme riche et capable de me rendre heureuse. Elle voulait voir ses petits-enfants et leur donner des leçons de vie comme elle a fait pour Santos et moi. Un souhait qui n'a jamais exaucé. Ma mère est morte beaucoup trop tôt...
— Et c'est ce que tu veux ?
Après mon tour, il continue de jouer et garde le silence qui dure une éternité.
— Quelle femme voudrait de moi, Daniela ? Je ne suis pas une bonne personne. L'autre fois, j'ai envoyé des soldats pour attaquer une famille et j'ai des remords, chuchote-t-il en faisant une grimace comme s'il avait du mal à le dire.
— Mais tu as changé maintenant. Tu as fait la «paix » avec la ME, je précise en faisant les guillemets.
— Et c'est grâce à toi. Tu m'as changé, un peu.
Je lui souris sincèrement et mets fin à la partie de jeu étant donné que j'ai encore gagné. Angelo pousse un grognement de frustration et je me contente de crier un petit « yes ! » pour le faire rager davantage.
— Comment fais-tu pour gagner à chaque fois ? Cette fois-ci, j'étais concentré, râle-t-il comme un enfant.
Je me lève du canapé, toujours victorieuse.
— Parce que je joue pour gagner contrairement à toi, qui joue pour ne pas perdre. Il faut juste changer sa vision de voir les choses.
Oui, j'ai toujours été philosophe dans l'âme et cela grâce à maman...
Mon téléphone émet un son et c'est Enzo qui me demande où je suis passée. Je lui réponds brièvement et lorsque je m'apprête à ranger mon écran dans ma poche arrière de mon pantalon, je sens un torse au bout de mes doigts. Je me retourne vivement et remarque Angelo penché sur mon épaule, en train de lire mes messages.
Dieu merci, avec Enzo on ne parle pas de mission par texto.
— Enzo a toujours été un frère protecteur avec Emilia mais avec toi, c'est pire.
C'est vrai qu'Enzo se considère réellement comme mon frère mais en version plus cool. Avec Santos, il était trop envahissant surtout quand je parlais avec des garçons.
Enzo est un type cool et je me sens coupable de l'avoir embarqué dans cette mission suicidaire. Parce que, si un jour on me chope, lui ainsi que sa petite famille vont périr avec moi.
Mes mauvaises pensées disparaissent lorsque le mafieux pose sa main rugueuse sur ma joue. Avec son pouce, il retrace la ligne de ma mâchoire dans un geste agréable et romantique. Ses yeux bruns ont le don de me déstabiliser mais j'arrive à garder le contact et oh mon Dieu ! Angelo va m'embrasser ? Là ? Maintenant ?
Il approche son visage de plus en plus vers le mien avant que ses lèvres douces ne retrouvent les miennes. Contrairement au premier baiser de la veille, celle-ci est beaucoup plus intime, douce et agréable. Je parviens à ressentir d'étranges sensations qui me chatouillent le ventre et mon cœur prend une allure soudainement plus vite. Ma conscience me dit que je commence à entrer dans un mauvais jeu mais ce baiser est tellement agréable que je laisse échapper un gémissement entre mes lèvres.
On s'éloigne quelquefois pour reprendre nos respirations. Notre baiser devient plus fougueux et je m'accroche aux épaules d'Angelo. Comprenant, peu à peu à la situation, je pose une main sur sa poitrine pour le repousser et tourne la tête vers ma droite.
Ma conscience a raison, je ne dois pas entrer dans ce jeu où je risque de perdre.
— Daniela, je suis désolé si---
— Pas la peine de t'excuser... c'est juste que... ça part beaucoup trop vite, je bredouille avec les joues écarlates.
Un silence presque gênant plane entre nous et je m'éloigne de plus en plus de lui comme si sa présence m'enflammait.
— Honnêtement, Angelo, je ne sais pas ce qu'il se passe mais je ne veux pas être comme Mila et Paula. Je n'ai pas envie qu'on me brise... le cœur.
Je croise son regard ténébreux et son visage devient soudainement froid. Il reste silencieux et je pince les lèvres avant de le laisser seul dans son bureau.
Bordel, Sara ! Dans quel merde es-tu en train de poser les pieds ! Pourquoi je l'ai embrassé et... et ça ne faisait pas partie de mon plan d'embrasser Angelo Canzano !
Je pose mes deux mains sur mes joues pour me ressaisir et décide de rejoindre Enzo entouré de Bianca et d'une jeune femme qui ressemble vaguement à l'homme.
Je m'assois près d'eux, toujours dans les nuages et cela attise la curiosité de mon coéquipier.
— Ça va, Daniela ? On dirait que tu as vu un fantôme, avoue-t-il avec les sourcils froncés.
J'hoche frénétiquement la tête jusqu'à la jeune femme à côté de lui se met à crier :
— Ahhh ! Voici ma nouvelle sœur !
— Emilia ! gronde Enzo sous les rires de Bianca.
Emilia se déplace pour me prendre dans ses bras. J'échange un regard avec Enzo et tapote sur son dos avant de la repousser gentiment.
Eh bien, une chose est sûre, elle est très différente de son grand frère.
Je l'examine de la tête aux pieds et je conclus qu'elle est très grande pour une jeune femme, elle doit faire certainement la même taille que son frère et surtout, elle est très belle. Plus belle ce que Camille m'a laissé imaginer.
— Daniela, je suis contente de te rencontrer. Je ne savais pas que j'avais une grande sœur, s'exclame-t-elle suivit d'un clin d'œil maladroit.
Et elle sait pour moi.
Je me tourne vivement vers Enzo et le réprimande du regard.
Eh bien, bientôt tout le monde saura pour la mission !
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