Chapitre XI
PDV Angelo
Nous voilà enfin dans ma voiture. Daniela ne s'est pas vraiment cassée la tête pour se préparer. Elle a juste opté pour un chemisier noir et un jean trouée aux genoux tandis que ses cheveux sont attachées en une-queue-de-cheval basse. J'adore son petit côté de « j'ai rien à foutre des autres, je m'habille comme je veux ». Ce soir nous partons à un concert d'orchestre où la majorité des invités sont des personnes âgées friquées jusqu'au cul et surtout bien sapées, mais visiblement, Daniela n'a rien à cirer.
On se connaît à peine, voire peut-être pas, mais je sais que ce que je lui ai proposé l'autre jour ne lui a pas plu. Elle a sûrement arrêté sa passion pour une raison et je n'ai pas le droit de lui imposer. Je veux juste savoir pourquoi elle a arrêté le violon et même si cette femme est maligne et très drôle, je sais qu'elle méfiante envers moi.
Après, le désastre commis au port et au combat de boxe auquel j'avais participé, j'étais tellement désorienté. Daniela était présente durant toute la journée et j'avais oublié que j'étais un mafieux, j'avais oublié mon rôle et c'était agréable.
— J'espère que je n'ai pas dérangé Enzo en capturant une nouvelle fois sa sœur.
Elle esquisse un simple sourire et secoue sa tête.
— Non au contraire ! Il en avait marre de me voir à rien au loft. Et puis, ce soir il part chez Camille.
— Tu as déjà assisté à quelques concerts ?
Elle se crispe et garde le silence pendant quelques secondes avant de se décider à me répondre :
— Juste une fois. Et ça, c'est quand j'ai supplié ma mère.
Son sourire s'estompe peu à peu et je comprends que son arrêt à la musique a un lien avec sa mère. Le père d'Enzo était un ami proche du mien et il nous a jamais évoqué qu'il avait une autre femme. Je croyais que cet homme était un type bien mais décidément, j'ai eu faux ; il a trompé la mère d'Enzo et il a surtout abandonné une de ses enfants dans un trou paumé en Europe de l'Est. Je n'aime pas les enfants mais comment un homme, un père, peut faire une telle chose à sa fille ? Pendant qu'Enzo et sa petite sœur vivaient bien auprès de leurs proches, Daniela... Daniela était obligée de se cacher et vivre une vie misérable.
— Tu étais sans doute proche de ta mère, non ?
Daniela pivote sa tête dans ma direction et avec surprise, je remarque qu'elle est triste. Elle qui ne montre jamais ses émotions...
— Très, même. Elle m'a appris tellement de choses mais elle est morte si prématurément. On l'a égorgé dans son propre lit, m'explique-t-elle en me regardant intensément.
Je déglutis et hoche lentement la tête. Je ne sais pas quoi dire dans ce genre de situation, ma mère est partie si tôt et je comprends ce qu'elle ressent. Sans réfléchir, je pose une main affective sur sa joue rosie et elle se tend, les yeux dans les yeux, ne croyant pas du tout ce que je viens de faire.
J'esquisse un sourire taquin.
— Es-tu déstabilisée, Daniela ? Je te fais déjà de l'effet ?
Elle rigole et enlève ma main sur sa joue.
– Monsieur Canzano, vous pouvez toujours rêver !
Je rigole aussi et quelques minutes après, nous arrivons enfin à ce fameux concert.
**
Le lendemain
PDV Sara
Comme la plupart des matinées, je suis seule dans cet appartement. Enzo est toujours à son travail et je commence même à penser que la présence de sa petite-amie n'était pas si terrible que ça... mais non. Je ne la supporte pas et elle est peut-être un danger pour moi. Je n'ai toujours pas parlé à Enzo que sa Bianca me pète les couilles et je sais d'avance que cela ne va pas lui plaire. Il a tellement confiance en sa petite-amie mais moi non et encore moins à cette française de Camille.
Enzo semble être très proche d'elle, Camille doit être une de ses amis proches.
Je repense à la soirée d'hier et bizarrement, je me mets à sourire. Cette soirée était... fantastique et Angelo était... comment dire... adorable ? Je ne pense pas que c'est le bon mot pour le qualifier mais on va faire avec. Je n'aurai jamais cru que ce mafieux avait aussi bon goût et même si j'étais concentrée au concert, je n'ai pas pu ignorer son regard de braise sur moi.
Je ne sais pas mais son regard est tellement étrange.... Surtout quand il me regarde.
Je dépose brutalement ma tasse de café en prenant conscience pour pourquoi je suis ici.
— Sara, c'est pour ta mission. Rien n'est vrai, Angelo est ton ennemi, je chuchote à moi-même.
Je n'arrive pas à y croire que je commence à sympathiser avec Angelo. Il est le fils du monstre qui a égorgé ma mère. J'allais me cacher derrière le prétexte que c'est pour la mission, mais pour être franche avec moi-même, c'est la Sara qui l'apprécie. On a tellement de points en commun et... non, il faut arrêter.
J'avale amèrement mon café en traversant le salon avant de m'affaler sur le canapé.
Je dois raccourcir cette mission. Je dois tuer Angelo Canzano le plus rapidement possible.
Après une demi-heure, je décide d'aller au bar qu'Enzo m'a présenté quelques jours plus tôt. C'est comme une sorte de repère pour la mafia d'Angelo. Je ne sais pas ce qu'il me pousse d'y aller dans ce trou de merde mais j'en ai marre de rester à la maison et surtout de penser à lui.
J'ouvre les portes battantes et je m'habitue peu à peu à la luminosité artificielle. Le bar est un peu du style rustique, le genre de bar qu'on peut retrouver au fin fond du Texas. La majorité des clients sont des hommes et leur regard de porc me fait lever les yeux au ciel. Je me dirige vers le comptoir afin de commander une boisson mais la tête de Matteo apparaît en face de moi. Il me sourit et je feins d'être surprise.
— Matteo, j'ai cru que je n'allais plus te revoir depuis la dernière soirée, dis-je alors qu'il me donne une petite tape sur l'épaule.
— Enzo sait que sa frangine traîne dans ce genre de bar bourré de mâle ? demande-t-il sur un ton malicieux.
— Il ne sait pas et tu n'as pas intérêt à lui dire ! Je m'ennuie grave chez lui.
Matteo opine toujours avec son sourire bienheureux. Je pince les lèvres, ne sachant pas quoi dire.
Enzo et Matteo sont amis depuis leur enfance. D'ailleurs Matteo a un frère jumeau, Lukas, celui-ci est le contraire de son frère, du genre, il est très renfermé sur lui-même.
— Tu sais quoi, on a pas eu le temps de faire connaissance ! Lia apporte nous deux bières, s'il-te-plaît !
La serveuse acquiesce et, sans attendre, Matteo prend ma main et m'emmène vers une table vide. Il me pousse vers une chaise vide et le brun s'assit en face de moi, excité comme si on lui annonçait qu'il avait gagné au loto.
Bon, après il peut me rapporter des informations concernant Angelo ainsi que ses plans tordus...
— C'est fou comment tu ne ressembles pas à Enzo ! Aller, raconte-moi, tu es proche d'Angelo depuis quand ? demande-t-il, tout à coup, toujours avec son sourire qui commence à m'agacer.
Je fronce les sourcils.
Proche ? Déjà, selon moi on n'est pas encore proche et de plus, comment il sait tout ça ?
— Matteo, comment---
— Les commères de la ville. Hier soir on vous a vu à un concert ! m'explique-t-il tandis que la serveuse vient nous déposer nos commandes. Angelo n'est jamais sorti avec des filles.
— Mais Mila et Paula ? je questionne, curieuse.
Matteo boit une gorgée de sa bière et fait un geste avec sa main comme pour balayer mes mots.
— Elles sont juste là pour assouvir le plaisir du grand parrain. Il ne sort jamais avec ces deux-là. Bon sang ! Pendant que j'étais en Espagne, cet enfoiré ose te draguer !
Je faillis d'étrangler avec ma boisson et lui adresse un regard curieux. L'Espagne ?
Qu'est-ce qu'il faisait en Espagne ? Et pourquoi Enzo ne m'a pas dit ça ?
— Si ce n'est pas indiscret, tu faisais quoi en Espagne ? Je doute que tu sois parti là-bas pour flirter avec des filles de Barcelone.
Il semble être gêné puis il pousse un soupir.
— Je ne sais pas si j'ai le droit de dire...
— Trop tard, Matteo tu m'as déjà mis à la bouche, dis-je avec un sourire en coin. Après tout, on fait partie de la même famille désormais. Je ne dirai à personne, ni à Enzo, ni à Angelo.
Je lui lance un regard complice et il retrouve son sourire et il termine sa boisson avant de se lancer :
— Je suis comme un espion pour Angelo. Je pense que tu sais déjà qu'Angelo est en conflit avec les Moretti donc il m'a envoyé à Cadix afin de récolter des informations sur cette famille et seul Dieu sait à quel point c'était difficile de trouver où ils vivaient. Les Moretti vivent dans un endroit qui n'existe pas sur une carte...
La villa familiale n'est pas très loin de La Alcaidesa. Nous vivons dans un endroit totalement désert, sur une falaise, proche d'une mer qui se déchaîne sans cesse sur les rochers. Mon arrière-grand-père voulait vivre dans un endroit où personne ne pouvait le franchir à cause de la végétation.
Je hoche la tête en lui montrant que je suis vraiment intéressée, mais je commence à appréhender. Comment il a pu trouver la maison familiale ? Y-a-t-il un traître à la maison ?
— Et j'ai trouvé quelque chose qui va surprendre Angelo ! Nous savons tous que c'est l'enfoiré de Santos Moretti qui est le chef de la mafia et nous avons tous cru qu'il était l'enfant unique de Hortensia Moretti. Mais il s'avère que non ! Je sais désormais que cette femme avait une fille et elle a caché au monder entier. Aujourd'hui, elle doit sûrement avoir vingt-deux ans et on dit qu'elle n'était pas intéressée par l'héritage de sa mère, alors elle est partie vivre dans un autre pays. Daniela, tu te rends compte ? Ça peut changer tellement de choses cette information ! s'enthousiasme Matteo.
J'opine mais je sens que mon visage se décompose suite à cette... triste nouvelle. J'ai l'impression que mon cœur ne bat plus et mon sourire plaqué sur les lèvres commence à me donner des crampes.
La fille qu'il cherche, c'est moi.
– Ah ouais, c'est vraiment intéressant, j'arrive à dire alors que je commence à mourir à petit feu. Et... t'as une photo d'elle ? Si vous avez une photo d'elle, vous serez proche de votre but.
Bon sang, Sara ! Reprends-toi !
Je rêve ou bien je suis en train d'aider mon ennemi à trouver l'identité de la fille qu'il cherche, c'est-à-dire, moi ?
Le téléphone de Matteo émet un bruit et quand il le consulte, il ne se retient pas de crier, attirant quelques regards curieux sur nous.
– La fille avec qui je travaille m'a enfin envoyé une photo ! Daniela, on dirait bien que tu es mon porte-bonheur ! Tout ce que tu dis se met à réaliser dans les prochaines secondes ! s'exclame-t-il avant de me donner son Iphone.
Méfiante, j'observe la photo et retiens mon envie de lâcher un soupir de soulagement. C'est bien moi sur la photo mais j'avais sûrement quel âge à ce moment-là ? Quinze ans ? Et puis, je suis totalement méconnaissable aujourd'hui. Quand j'étais une ado, je kiffais teindre mes cheveux en rouge flamboyant, aujourd'hui, mes cheveux ont retrouvé leur couleur naturelle.
– Elle est vraiment... très belle, dis-je avant de lire le nom de la personne qui a envoyé cette maudite photo.
Aria Gomez.
Aria Gomez... ce prénom me donne une impression de l'avoir déjà entendue. Il va falloir que j'envoie un message à America, le fils de Carlos. Seul lui pourra m'aider sans que mon frère et son père le sachent.
Je redonne le téléphone à son propriétaire et je remarque une grande carrure entrer dans le bar. Des yeux bruns croisent le mien et cette stupide sensation étrange me chatouille au ventre.
Angelo s'avance vers nous et un silence plane tout à coup dans la salle. Il s'arrête à notre table.
— Matteo, je vais t'emprunter Daniela. Je souhaiterais passer le reste de la journée avec elle, annonce Angelo, ses yeux toujours sur moi.
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