Chapitre 14
—Methyst—
Je ne comprenais pas pourquoi Melody avait fait ça. Bon sang mais quel était son intérêt là-dedans ? Qui était-elle réellement ?!
J'aidais le professeur et Luke à chercher un moyen d'enfoncer la porte, parmi les tonneaux de vins remplis de liquides, mais rien ne semblait suffisamment solide. J'avais l'impression que Mère nous aidait également. Elle bougeait frénétiquement les tonneaux, scrutant les murs dès qu'ils étaient mis à nus.
Descole n'avait pas l'air très utile, il était agenouillé en face de la jeune femme rousse qui se faisait appeler Érica Prince devant moi et semblait lui parler à voix basse. Je la voyais marmonner par instant quelques mots en fixant Mère d'un air profondément haineux.
Cela me dérangeait. Pas seulement parce qu'elle semblait vraiment en colère contre le membre de ma famille auquel je tenais le plus, qu'elle ne connaissait même pas, mais aussi parce que cette expression remplie de haine et de froideur était celle de mon miroir. Son visage ressemblait énormément au mien. C'était presque comme si nous étions jumeaux, et pourtant nous n'avions pas les mêmes parents.
Je vis Mère donner un puissant coup de pied dans un tonneau vide en grommelant de frustration :
-C'est pas possible !!
-Vous cherchez quelque chose, Mme Beckett, demanda Luke ?
-À vrai dire, il est censé y avoir un passage secret qui est relié à l'extérieur dans chaque petite pièce de la cave. Mais ils sont principalement bloqués par des tonneaux pour aider à la conservation du vin. Or, là, je n'en trouve pas.
-Vous ne cherchez pas sur le bon mur, répondit Descole. Laissez-nous nous décaler, je vous prie.
Il releva la jeune femme rousse et, la maintenant par les épaules, avança jusqu'au mur en face de lui, dépouillé d'une bonne partie de ses tonneaux. Luke posa la question suivante :
-À votre avis, professeur, pourquoi Melody a agi ainsi ?
J'entendis Descole pousser un ricanement moqueur :
-Oh mais Layton doit bien avoir une idée, n'est-ce-pas ?
Je vis Layton réfléchir quelques secondes puis fixer Descole d'un air incrédule :
-Comment serait-ce possible...?
-Ce n'est pas parce que Bronev est en prison que TARGET a été entièrement démantelée, répondit tranquillement l'homme masqué d'un ton qui ne trahissait aucune émotion. Tu pensais vraiment que j'étais le seul à être au courant au sujet du potentiel du site archéologique que ton nouveau protégé à découvert ?
-Euh... J-je ne comprends rien...
Je doutais qu'ils aient réussi à m'entendre derrière les bruits des tonneaux que Mère faisait rouler sur le sol en essayant d'éviter de nous les lancer dessus.
-Pour faire court, TARGET est une organisation secrète dont le but est de voler le plus de ressources archéologique possibles, me répondit le professeur. L'année dernière, Luke et moi avons faire en sorte qu'un de leur plus hauts dirigeants se fasse arrêter, et je dois bien admettre que nous pensions que l'organisation se dissoudrait suite à cela...
J'entendis Descole marmonner quelque chose d'intelligible, tandis que la rouquine marmonnait à mi-voix :
-J'vais la tuer... J'vais tellement la tuer...
-Lucy, calme-toi, lui répondit son complice. On en reparle en sortant si tu veux mais là, c'est tout sauf le moment. Cale ta respiration sur la mienne, d'accord ? Fait comme moi.
Ainsi elle s'appelle Lucy ? C'est marrant, la racine de ce prénom vient de lumière, pourtant elle semble tout sauf lumineuse...
Je vis Luke lancer un regard profondément surpris au dos de Descole, tandis que lui et sa complice faisaient leurs exercices de respiration. Je la vis se calmer un petit peu, au fur et à mesure. Quand elle finit par se calmer un peu plus, elle offrit un regard neutre à son interlocuteur qui se redressa, pour observer ce qu'il se passait. Il aida la jeune fille à se relever et la poussa gentiment vers moi, après lui avoir murmuré quelque chose à l'oreille.
Elle me fixait dans les yeux, ayant l'air vraiment troublée pendant un moment, puis me dit d'une voix toute faible :
-Tu sais qui je suis, hein ?
-Je sais qui est ta mère, si telle est la question, répondis-je doucement.
C'était étrange, mais en entendant une voix aussi douce et timide, j'avais l'impression d'avoir affaire à une toute autre personne que le monstre qui m'a tant effrayé, qui a traumatisé tant de personnes et qui a tenté de tuer Mère.
-Donc non, tu ne sais pas...
-Je... Je ne sais pas quoi, demandais-je ?
-À ton avis, pourquoi on se ressemble autant, fit-elle ? Si tu sais qui est ma mère, tu dois savoir que nous avons le même père, n'est-ce-pas ?
Je restais sans voix. Une partie de moi me cirait que c'était faux, impossible, que mon père aimait ma mère et n'avait jamais aimé personne d'autre, mais l'autre savait déjà cela et n'avait qu'une envie, qui était de lui faire comprendre que j'étais au courant. Et puis, honnêtement, je ne connaissais pas mon père, comment aurais-je pu prétendre ce genre de choses ? Même ma mère m'en avait à peine parlé, comment aurais-je pu affirmer ce genre de choses avec autant de confiance en moi ?
J'entendis Lucy avoir un petit gloussement amusé et rajouter :
-Je suppose que tu sais ce que je suis, non ?
Je la dévisageais en silence. Je considérais ce visage, à peu près aussi vieux que le mien, et qui semblait pourtant porter des marques de douleurs que je n'avais pensé voir que sur de vieilles personnes ayant tout perdu. Son regard contenait une forme de désespoir que j'avais rarement vu, mêlé à la malice de ceux qui souffrent, comme je l'avais appelé. Je voyais souvent cela chez Mère, mais chez Lucy, c'était décuplé. Elle souriait légèrement, mais son sourire ressemblait plus à un masque qu'à un sourire sincère. Elle avait l'air d'avoir souffert de la perte de sa mère, et au vu de la façon dont elle se tenait, légèrement courbée en triturant ses mains, elle était nerveuse. Elle devait manquer de confiance en elle.
Au final, je crois que je ne la détestais pas, j'avais de la compassion pour elle. J'avais l'impression qu'elle était, en quelque sorte, seule contre un monde qui ne l'acceptait pas, parce qu'elle était trop étrange ou semblait trop mauvaise. J'avais aussi cette impression quand je pensais à ma situation. Je pensais que le monde n'arriverait pas à m'accepter, ou que s'il m'accepterait, c'était parce que je me serais plié en quatre pour ça. Mère me répète souvent que je suis trop gentil, et je sais qu'elle a raison. Pourtant, je ne peux pas m'empêcher d'être comme je suis. C'est pour ça que je ne me sens pas à ma place dans ce monde.
Même si, plus j'y pense, plus je me trouve idiot.
-Oui, je sais ce que tu es, répondis-je. Mais pas ce que tu penses être.
Elle avait l'air un peu surprise, mais ne rajoutait rien.
Je me tournais pour voir ce que faisaient les autres. Layton, Luke et Descole étaient en train d'unir leurs forces à celles de Mère pour pouvoir arriver à trouver cette trappe.
-Nous devrions les aider, dis-je.
-Hm...
-Co-comment va ton épaule ?
-Mon... épaule ? Elle me fait mal, mais ce n'est pas grave. M. Descole s'en est bien occupé, les points de suture tiennent. Et puis, honnêtement, nous avons d'autres préoccupations.
-On a réussi, entendis-je Luke exulter de joie !!!
En effet, nous pouvions voir une trappe dans le mur, qui ressemblait à l'ouverture d'un placard. Quand mère l'ouvrit, nous pûmes voir qu'il s'agissait d'un tunnel suffisamment grand pour que nous puissions y passer chacun notre tour, à quatre pattes.
Mère allait y entrer, lorsque le professeur la retint :
-En temps que gentleman, je serais d'avis de laisser passer les dames d'abord, cependant, nous ignorons où il mène exactement. Je passerai devant.
-Sans armes ? Allons, Layton, tu es plus brillant que cela d'habitude, dit Descole d'un ton moqueur en s'engageant dans le tunnel après avoir dégainé son épée.
Je regardais successivement Mère puis Lucy. La jeune femme semblait encore pleine de ressentiments, mais elle semblait arriver à les brider.
Je me rassurais en me disant que, de toutes manières, elle ne ferait pas quelque chose d'aussi idiot que de l'attaquer devant nous à ce moment précis.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top