En marge (partie 1/4)
/De nos jours /
Mon cœur tambourine dans sa cage à une vitesse folle, ma chemise de nuit colle sur ma peau humide et de fines gouttelettes perlent sur mon front.
Chaque détails me reviennent en mémoire, les mêmes qui me hantent la nuit, et que je tente désespérément de refouler au tréfonds de ma mémoire durant la journée... Les cris, les hurlements de douleur, d'une femme au bord de la mort, étalée sur la pierre... Une jeune femme, magnifique, que la souffrance n'aurait jamais dû déformer. Son regard se posait sur moi et dans sa longue robe blanche, elle implorait ma pitié, mais je ne pouvais rien faire, je n'étais qu'un être immatériel dans un rêve. Puis le décors changeait, la mystérieuse était là, assise sur un rocher au bord d'un ruisseau, la couleur de sa cape se confondait avec celle des chênes millénaires juste derrière, ses yeux brillaient plus que les pierres précieuses ornant sa coiffure, son sourire et sa grâce illuminaient les alentours. Mais mon soulagement était toujours de courte durée. Elle essayait de me parler, mais avant que je n'ais le temps de comprendre, elle se remettait à hurler, prise de soubresauts violents, et du sang s'écoulait de son abdomen. Court répit non ? S'en est trop, chaque cauchemars m'embrouille un peu plus l'esprit, et me donne la nausée
Je me lève, enroulée dans le fin tissu faisant office de drap et enfile une tenue plus correct qu'une simple chemise. Aucunes filles ne s'est réveillées dans le dortoir, toutes dorment profondément, avec plus ou moins de bruit. J'essaye de reprendre mes esprits mais n'y arrive pas. Il fait encore nuit dehors et le soleil ne se montrera pas de si tôt. L'idée de braver le couvre-feu instauré par le tyran me traverse l'esprit, ou plutôt, y reste gravé. Je me glisse vers la porte pour vérifier que la surveillante est bien endormie, avant de me diriger vers la fenêtre.
L'orphelinat c'est à la fois un paradis et un enfer où on essaye tous de se faire une place que l'on n'aura jamais. À la moindre règle non respectée, soit on ne mange pas de la journée, soit on se prends quelques coups de fouet mais au moins on a un toit, un endroit où manger et dormir... Un havre.
Depuis le temps que je suis là, depuis toutes ses années, je connais tous de cet endroit, les moindres cachettes, les plus petits objets déplacés, à comment manger lorsque l'on est privé de nourriture ou comment s'enfuir ...
Qui m'a déposé là ? Où sont mes parents ? Sont-ils encore en vie ? Autant de questions qui ne trouveront surement pas de réponse et qui pour moi n'ont plus aucune importance.
Depuis quelques temps, la situation en ville s'est envenimée, les tours de gardes se sont multipliés, ils sont devenus plus violents et ont même reçu l'ordre de tuer quiconque, serait dehors après le couvre-feu. J'en ai quand même parlé avec Louise, que quelque chose se préparait, mais elle s'est mise à rigoler en disant que j'hallucinais et que j'étais beaucoup trop sur le qui-vive ces derniers temps, puis elle a ajouté que c'était normal, que tout le monde est surveillé depuis qu'Il a pris le pouvoir, celui qui a envahi Deusterra, le roi sanguinaire du pays voisin.
Louise... Je l'ai rencontré quand j'avais cinq ans, elle était totalement déboussolée en arrivant, alors malgré ma timidité je l'ai aidée et on s'est tous de suite bien entendue. Pourtant, on est vraiment différentes. Elle, elle est sociable, elle aime se faire remarquer, alors que moi je ne parle presque pas et je préfère rester en retrait. Même physiquement : elle est grande, blonde avec de magnifique yeux bleus au reflet dorée qui m'ont hypnotisé la première fois que je les ai croisés et elle attire le regard de tous les garçons qu'elle croise... Tandis que moi, je suis plutôt le genre de fille qui se fond dans le décor et que l'on oublie facilement, avec des cheveux bruns toujours retombés devant mon visage pour cacher mes yeux.
Bref, un peu comme si on se complétait ... On a fait les quatre cents coups ensemble, mais depuis quelques temps j'ai l'étrange impression, qu'elle n'est plus totalement là, plus distante, plus absente... Elle qui d'habitude rit tout le temps aux éclats se renferme désormais petit à petit sur elle-même. Et j'ai peur qu'elle se laisse aller, pour je ne sais quelle raison, au méandre du désespoir... Elle n'a jamais accepté l'abandon de ses parents, qui l'ont déposé un matin devant la porte, en lui promettant de revenir la chercher le soir et ce souvenir la hante.
Mais d'un autre côté, moi aussi je me renferme sur moi-même, vis-à-vis d'elle, je n'ai pas envie de l'inquiéter avec tous mes cauchemars, d'autant plus, qu'elle les jugera sans doute comme inintéressant et sans rapport avec la réalité... UN côté que je n'aime pas chez elle, celui de tout prendre à la légère.
Je la regarde dormir quelques instants puis sort de mes pensées, je ne pourrais pas me rendormir. Les cris de la belle femme sont à présent gravé dans mon esprit pour le restant de la journée.
Chapitre corrigé le 26/12
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