018 | La tanière de l'audace

𝙼𝚘𝚗𝚍𝚒𝚊𝚕  𝚍𝚎  𝚑𝚘𝚌𝚔𝚎𝚢  𝚓𝚞𝚗𝚒𝚘𝚛

𝙻𝚊  𝚕𝚒𝚜𝚝𝚎  𝚍𝚎𝚜  𝚒𝚗𝚟𝚒𝚝𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗𝚜  𝚊𝚞  𝚌𝚊𝚖𝚙  𝚍𝚎  𝚜é𝚕𝚎𝚌𝚝𝚒𝚘𝚗  𝚍𝚎  𝚕𝚚𝚞𝚒𝚙𝚎  𝚌𝚊𝚗𝚊𝚍𝚒𝚎𝚗𝚗𝚎

𝙿𝚞𝚋𝚕𝚒é  𝚕𝚎  𝟸𝟶  𝚗𝚘𝚟𝚎𝚖𝚋𝚛𝚎

À  𝚖𝚘𝚒𝚗𝚜  𝚍'𝚞𝚗  𝚖𝚘𝚒𝚜  𝚍𝚎  𝚕'𝚘𝚞𝚟𝚎𝚛𝚝𝚞𝚛𝚎  𝚍𝚞  𝙲𝚑𝚊𝚖𝚙𝚒𝚘𝚗𝚗𝚊𝚝  𝚖𝚘𝚗𝚍𝚒𝚊𝚕  𝚍𝚎  𝚑𝚘𝚌𝚔𝚎𝚢  𝚓𝚞𝚗𝚒𝚘𝚛  𝚎𝚗  𝙵𝚒𝚗𝚕𝚊𝚗𝚍𝚎𝙷𝚘𝚌𝚔𝚎𝚢  𝙲𝚊𝚗𝚊𝚍𝚊  𝚊  𝚍é𝚟𝚘𝚒𝚕é  𝚕𝚞𝚗𝚍𝚒  𝚖𝚊𝚝𝚒𝚗  𝚕𝚎𝚜  𝟹𝟷  𝚓𝚘𝚞𝚎𝚞𝚛𝚜  𝚚𝚞𝚒  𝚘𝚗𝚝  𝚛𝚎ç𝚞  𝚞𝚗𝚎  𝚒𝚗𝚟𝚒𝚝𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗  𝚊𝚞  𝚌𝚊𝚖𝚙  𝚍𝚎  𝚜é𝚕𝚎𝚌𝚝𝚒𝚘𝚗  𝚍𝚎  𝚕𝚚𝚞𝚒𝚙𝚎  𝚗𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗𝚊𝚕𝚎  𝚚𝚞𝚒 𝚊𝚞𝚛𝚊  𝚕𝚒𝚎𝚞  𝚍𝚞  𝟻  𝚊𝚞  𝟿  𝚍é𝚌𝚎𝚖𝚋𝚛𝚎𝙻𝚎𝚜  𝚓𝚘𝚞𝚎𝚞𝚛𝚜  𝚒𝚗𝚟𝚒𝚝é𝚜  -  𝚜𝚘𝚒𝚝  𝟺  𝚐𝚊𝚛𝚍𝚒𝚎𝚗𝚜  𝚍𝚎  𝚋𝚞𝚝𝟷𝟸  𝚍é𝚏𝚎𝚗𝚜𝚎𝚞𝚛𝚜  𝚎𝚝  𝟷𝟻  𝚊𝚝𝚝𝚊𝚚𝚞𝚊𝚗𝚝𝚜  -  𝚟𝚒𝚜𝚎𝚛𝚘𝚗𝚝  𝚞𝚗𝚎  𝚙𝚕𝚊𝚌𝚎  𝚊𝚞  𝚜𝚎𝚒𝚗  𝚍𝚎  𝚕𝚊  𝚏𝚘𝚛𝚖𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗  𝚌𝚊𝚗𝚊𝚍𝚒𝚎𝚗𝚗𝚎.

Charlie, où est ta carte Opus?

Mmh, oui.

𝙿𝚊𝚛𝚖𝚒  𝚌𝚎𝚜  𝟹𝟷  𝚓𝚘𝚞𝚎𝚞𝚛𝚜𝟻  𝚍'𝚎𝚗𝚝𝚛𝚎  𝚎𝚞𝚡  𝚜𝚎𝚛𝚘𝚗𝚝  𝚙𝚘𝚜𝚜𝚒𝚋𝚕𝚎𝚖𝚎𝚗𝚝  à  𝚞𝚗𝚎  𝚍𝚎𝚞𝚡𝚒è𝚖𝚎  𝚙𝚊𝚛𝚝𝚒𝚌𝚒𝚙𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗𝙽𝚊𝚜𝚑  𝙼𝚌𝙼𝚒𝚕𝚕𝚊𝚗𝙹𝚘𝚑𝚗  𝙷𝚘𝚕𝚖𝚎𝚜𝚆𝚒𝚕𝚕𝚒𝚊𝚖  𝙲ô𝚝é,  𝚉𝚊𝚌𝚔  𝙱𝚛𝚘𝚘𝚔𝚎  𝚎𝚝  𝙿𝚑𝚒𝚕  𝚂𝚖𝚒𝚝𝚑  é𝚝𝚊𝚒𝚎𝚗𝚝  𝚍𝚎  𝚕𝚊  𝚏𝚘𝚛𝚖𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗  𝚗𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗𝚊𝚕𝚎  𝚊𝚞  𝚍𝚎𝚛𝚗𝚒𝚎𝚛  𝙼𝚘𝚗𝚍𝚒𝚊𝚕  𝚓𝚞𝚗𝚒𝚘𝚛  𝚕𝚘𝚛𝚜𝚚𝚞𝚎  𝚕𝚎  𝙲𝚊𝚗𝚊𝚍𝚊  𝚊  𝚛𝚎𝚖𝚙𝚘𝚛𝚝é  𝚕'𝚘𝚛.

Oui? Ça ne répond pas à ma question.

𝙽𝚊𝚜𝚑  𝙼𝚌𝙼𝚒𝚕𝚕𝚊𝚗𝚕'𝚎𝚜𝚙𝚘𝚒𝚛  𝚍𝚎𝚜  𝙵𝚕𝚊𝚖𝚎𝚜  𝚍𝚎  𝙲𝚊𝚕𝚐𝚊𝚛𝚢𝚎𝚜𝚝  𝚙𝚛é𝚜𝚎𝚗𝚝𝚎𝚖𝚎𝚗𝚝  𝚊𝚞  𝚜𝚘𝚖𝚖𝚎𝚝  𝚍𝚞  𝚌𝚕𝚊𝚜𝚜𝚎𝚖𝚎𝚗𝚝  𝚍𝚊𝚗𝚜  𝚕𝚊  𝙻𝚒𝚐𝚞𝚎  𝚍𝚎  𝚑𝚘𝚌𝚔𝚎𝚢  𝚓𝚞𝚗𝚒𝚘𝚛  𝚖𝚊𝚓𝚎𝚞𝚛𝚎  𝚍𝚞  𝚀𝚞é𝚋𝚎𝚌  𝚊𝚟𝚎𝚌  𝟸𝟹  𝚋𝚞𝚝𝚜  𝚎𝚝  𝟹𝟺  𝚙𝚊𝚜𝚜𝚎𝚜  𝚙𝚘𝚞𝚛  𝚕𝚎  𝙹𝚞𝚗𝚒𝚘𝚛  𝚍𝚎  𝙼𝚘𝚗𝚝𝚛é𝚊𝚕  𝚌𝚎𝚝𝚝𝚎  𝚜𝚊𝚒𝚜𝚘𝚗𝙲𝚎𝚝𝚝𝚎  𝚊𝚗𝚗é𝚎𝚕𝚎𝚜  𝙵𝚕𝚊𝚖𝚎𝚜  𝚕𝚎  𝚕𝚊𝚒𝚜𝚜𝚎𝚗𝚝  é𝚟𝚘𝚕𝚞𝚎𝚛  𝚍𝚊𝚗𝚜  𝚕𝚊  𝙻𝙷𝙹𝙼𝚀  𝚙𝚘𝚞𝚛  𝚕𝚊  𝚏𝚒𝚗  𝚍𝚎  𝚕𝚊  𝚜𝚊𝚒𝚜𝚘𝚗  𝚎𝚝  𝚙𝚊𝚛𝚝𝚒𝚌𝚒𝚙𝚎𝚛  𝚊𝚞  𝚌𝚑𝚊𝚖𝚙𝚒𝚘𝚗𝚗𝚊𝚝  𝚍𝚎  𝙵𝚒𝚗𝚕𝚊𝚗𝚍𝚎𝚙𝚞𝚒𝚜  𝚕𝚎  𝚐𝚊𝚛𝚍𝚎𝚛𝚘𝚗𝚝  𝚎𝚗𝚜𝚞𝚒𝚝𝚎  𝚍𝚊𝚗𝚜  𝚕𝚎𝚞𝚛  é𝚚𝚞𝚒𝚙𝚎𝚌𝚘𝚕𝚎  à  𝙲𝚊𝚕𝚐𝚊𝚛𝚢  𝚊𝚏𝚒𝚗  𝚍𝚎  𝚕𝚎  𝚙𝚛é𝚙𝚊𝚛𝚎𝚛  à  𝚜𝚊  𝚙𝚛𝚎𝚖𝚒è𝚛𝚎  𝚜𝚊𝚒𝚜𝚘𝚗  𝚍𝚊𝚗𝚜  𝚕𝚊  𝙻𝙽𝙷.

Charlie! s'impatienta Juliette. Où est ta carte Opus ? Et qu'est-ce que tu lis comme ça?

Charlie éteignit précipitamment l'écran de son téléphone et releva son regard vers sa soeur. Derrière Juliette, de fines goutes de pluie traçaient la fenêtre. Le ciel, bientôt hivernal, était déjà noir à sept heures.

Ignorant la dernière question, Charlie tendit à la benjamine de la famille l'objet de sa requête.

Es-tu certaine que ça ne te dérange pas de rester seule ce soir? s'assura la plus jeune, en enfilant son manteau.

Leurs parents partis au chalet, Charlie et Juliette avaient décidé de rester à Montréal pour la fin de semaine. L'une en raison de sa vie sociale, l'autre prétextant les études. La vérité était qu'aucune d'entre elles ne voulait affronter cet endroit rempli de souvenirs.

C'est bon, Juliette. C'est moi la plus vieille, je n'ai pas besoin d'être gardée.

Je ne parle pas de te garder, mais de te tenir compagnie pour que tu ne sois pas seule un vendredi soir.

En simple réponse, Charlie lui offrit un bref signe de tête qui se voulait rassurant. Ses besoins de solitudes restaient, pour la plupart, incompris. Elle préférait rester dans le confort de sa maison, comme un animal sauvage dans sa tanière.

Ok, à demain alors.

Malgré que Juliette vivait son adolescence bien différemment, Charlie n'avait jamais ressenti la comparaison dans leur relation. Un phénomène qui, aussi malsain qu'il pouvait l'être, pouvait engendrer le dépassement.

Charlie avait été victime de ce sentiment qu'une seule fois auparavant: avec Nicolas.

Il fut un temps où elle jalousait l'attention que son frère attirait autour lui. Alors qu'on la complimentait d'être gentille, intelligente et belle lorsqu'elle souriait, on clamait une force et une bravoure à Nicolas. On faisait rêver la fillette de princesses et on la projetait à l'école pour répondre aux attentes de la société, tandis que l'on offrait au jeune garçon des ambitions d'aventures et de découvertes.

Charlie s'était alors mise à la quête de cette même reconnaissance, suivant son frère comme le faisait une ombre. Elle aimait ce qu'il aimait, elle jouait à ce qu'il jouait, elle rêvait de ce qu'il rêvait. Son sang était le sien. Elle se sentait plus forte, plus brave, plus Nicolas.

Et, inévitablement, depuis la mort de son jumeau, l'identité de Charlie avait été bouleversée. Elle était dans cet état d'arrêt, où elle ne ressentait plus la motivation à se dépasser. L'audace lui était devenue sans intérêt.

Elle était donc simplement devenue ce qu'on semblait attendre d'elle: gentille, intelligente et belle lorsqu'elle souriait.

Charlie dut mettre de côté ses peines au fond de ses souvenirs au moment où la sonnette de la maison retentit. Elle ouvrit la porte et tous ses muscles se figèrent devant la vision qui s'offrait à elle. Les yeux écarquillés, elle perdit momentanément son souffle.

Sur le trottoir, Louis et William se tenaient droits devant elle. Leurs mèches de cheveux humides étaient collées sur leurs tempes, alors que leurs yeux brillaient dans le fond sombre de l'hiver.

Louis prit l'état de paralysie de Charlie comme une invitation à entrer. Il se faufila dans le cadre de porte avec une familiarité qui lui était propre.

Will a oublié de payer le câble, ce mois-ci. On vient regarder le match contre Boston.

Avant même que Charlie ne puisse répondre, le frisé s'était engouffré dans le couloir, sous le regard désespéré de William.

Les rougeurs qu'avait causées le froid sur les joues de ce dernier faisaient ressortir la plaie qui cicatrisait sur le haut de sa lèvre rose. L'hématome sur sa tempe se dissipait dans son teint porcelaine.

Désolé, pour Louis, s'excusa-t-il faiblement, pointant du menton son coéquipier qui, lui, s'était déjà installé dans le salon. Et désolé pour la dernière fois. Je n'aurais jamais dû te parler ainsi.

Le silence de Charlie régna. Elle ne savait trouver les mots pour répondre. Pour être honnête avec elle-même, la jeune femme n'arrivait pas à en vouloir à William. Sa raison se confrontait à son coeur.

Lors de leur dernier échange, le garçon avait, tout comme elle, été guidé par le trouble qui l'habitait. Rien ne justifiait la méchanceté, mais Charlie ne pouvait se permettre de le juger sur la façon dont il gérait ses maux.

Et, dans cette erreur, Charlie trouva une beauté en William qu'elle n'avait jamais vu auparavant.

Je voulais t'appeler pour te demander si l'on pouvait venir, affirma William en frottant sa nuque. Mais comme tu n'as pas répondu au message d'excuses que je t'ai laissé...

Charlie, où ranges-tu tes chips? coupa la voix de Louis de la cuisine.

Charlie fronça les sourcils et secoua la tête pour que les événements s'emboitent dans son esprit.

J'avais bloqué ton numéro, réalisa-t-elle. Quand tu me l'as donné, tu m'as demandé de t'avertir que j'étais bien rentrée, puis de le bloquer.

Sous la surprise, les traits moqueurs de William naquirent. Une brillance apparut dans ses orbes verts et Charlie aurait pu jurer avoir vu le soulagement passer dans ses prunelles.

Je t'ai dit que tu pouvais le bloquer, pas que tu devais le faire.

Charlie haussa les épaules, un sourire en coin sur le visage. En humectant ses lèvres gercées par le froid, elle étudia attentivement William. Un silence s'installa entre eux, comme pour leur laisser le temps de s'apprivoiser.

Ce soir là, alors que l'air autour d'eux était doux et turbulent à la fois, une des barrières de Charlie céda. Elle comprit que pour avancer, elle allait devoir baisser ses gardes. Nous avions tous à affronter nos blessures et William n'en faisait pas exception. Il fallait se respecter; être patient.

La pleine lune revenait toujours, il fallait simplement lui en laisser le temps.

Et bien, tu rentres ou pas? demanda Charlie d'une voix claire qui frôlait la provocation.

Dans ce même élan, William entra dans la maison, ses iris scellés aux siens. Il réduit la distance entre eux, un sourire espiègle sur les lèvres. Un frisson grimpa le long de la colonne vertébrale de Charlie, alors que le souffle chaud du joueur de hockey percutait ses joues.

Il resta immobile un instant, puis frôla l'épaule de la jeune femme pour se rendre au salon. La voix d'un commentateur sportif et les bruits du micro-ondes se mélangeaient dans la pièce.

Es-tu réellement en train de te faire du pop-corn, St-Pierre? questionna William, estomaqué.

Je ne trouvais pas les chips.

Le regard curieux de Charlie s'arrêta sur Louis qui était assis devant la télévision qu'il avait allumée. Elle n'avait toujours pas osé avouer à Max qu'elle avait aperçu son échange passionnel avec le frisé le soir de son anniversaire. Elle avait espéré, en vain, que son ami aborde le sujet par lui-même. Ce manque de développement impatientait son esprit, l'hantant de questions les plus indiscrètes les unes que les autres.

Louis quitta la pièce, entrainé par la sonnerie du micro-ondes dans la cuisine, et l'attention de Charlie fut tournée vers William.

Félicitations pour ton invitation au camp de sélection, souffla-t-elle si faiblement qu'elle douta d'avoir été entendue.

Les yeux de William la transpercèrent avec force et elle sentit son coeur se mettre à palpiter, malgré le masque d'indifférence figée sur son visage. Le sourire rempli de sous-entendus du garçon lui fit regretter ses mots, jusqu'à ce qu'elle vit de légères fossettes creuser ses joues.

Charlie, ne me dis pas que tu suis ma carrière en cachette?

Non! s'empressa-t-elle de répondre. L'article m'a été proposé sur Facebook.

Le capitaine du Junior de Montréal émit un rire étouffé, sans quitter Charlie du regard. Peu importe l'explication, rien ne semblait pouvoir enlever le sourire sur son visage.

Au début, je croyais que tu me mentais quand tu affirmais ne pas aller sur mon Instagram, commença-t-il. Par contre, maintenant que je sais que tu as bloqué mon numéro, je dois avouer que je ne sais plus quoi en penser.

Tu sous-estimes ma capacité à avoir la tête dure, William.

Et quelle erreur de ma part!

Louis les rejoint au salon, un bol dans les mains. Les deux joueurs de hockey se concentrèrent vers le match, laissant Charlie à ses observations.

N'ayant aucun intérêt pour ce qui se déroulait à la télévision, elle s'étonna à être captivée par la manière dont Louis et William étaient passionnés. À chaque fois qu'ils s'exclamaient devant un jeu, elle avait l'impression qu'il y avait toujours de belles choses devant lesquelles on pouvait s'extasier.

William avait la manie de mordre sa lèvre inférieure lorsqu'il appréhendait. Ses yeux suivaient la rondelle avec un engouement que Charlie jalousait et admirait à la fois. L'envie monta en elle, sans réellement qu'elle en comprenne la nature, et elle se mit à désirer ressentir le même sentiment que lui présentement.

Quand pars-tu pour le Championnat? demanda-t-elle.

Je pars en Alberta pour le camp de sélection la semaine prochaine, répondit William. Si je suis pris, j'irai directement en Finlande.

Je ne peux pas croire que tu me laisses encore seul pour le temps des fêtes, se plaignit Louis dans un grognement. Avec qui je vais me saouler pour le jour de l'an?

Avec Charlie? proposa son ami d'un sourire narquois.

Le frisé tourna son visage vers la jeune femme, comme pour analyser la proposition, et Charlie vit l'espoir s'éteindre complètement dans ses iris.

Tu es le genre de personne qui joue au Monopoly à Noël, n'est-ce pas? supposa Louis, une grimace sur le visage.

Je ne te permets pas, rit Charlie en le pointant du doigt. N'oublie pas que c'est moi qui te permets d'écoute la partie de hockey ce soir.

Les mains dans les airs, Louis s'avoua vaincu et reporta son attention vers la partie, où les Bruins de Boston venaient de compter un but. Charlie se retint de rire devant les plaintes et jurons des deux garçons.

Je ne me suis pas inscrit à la prochaine session à l'école, lui chuchota William d'un ton neutre, sans détourner son regard de la télévision.

La provocation était pourtant claire, comme un test. La confrontant dans ses valeurs et perceptions, William appréhendait le jugement de Charlie. Cette fois-ci, cependant, une expression différente traversait les traits doux de son visage.

Charlie se surprit à comprendre la décision du capitaine du Junior de Montréal. Le rêve était à lui, et il était tout près de l'atteindre. Il avait pris des risques et il en était maintenant récompensé.

Elle n'enviait pas son succès, loin de là, mais plutôt son audace.

Je ne sais pas comment tu fais, répondit-elle sobrement.

L'honnêteté de Charlie bouscula William d'une façon inattendue. Il se mit à vouloir, pour une raison inconnue, faire réagir la jeune femme. Elle avait toujours été réactive face à lui et il avait la sensation qu'il pouvait l'aider à détruire les murs qu'elle s'était construits.

Il faudrait que tu te donnes un défi chaque jour, pour briser ta rigidité.

Je ne suis pas ri..

Par exemple, la coupa-t-il. Ce soir, tu pourrais ne pas te brosser les dents.

Charlie lui lança un regard rempli de détresse, une expression scandalisée sur le visage, et William s'esclaffa.

Désolé, c'était peut-être un exemple trop extrême pour commencer. Fais juste débloquer mon numéro pour ce soir.

Des plans pour que tu me harcèles, soupçonna la brune, en levant un sourcil.

C'est le risque, Charlie. C'est ce qu'on appelle vivre dangereusement.

Incrédule, Charlie débloqua tout de même le numéro, ignorant les voix dans sa tête qui lui demandaient pourquoi elle ressentait ce désir de prouver quoi que ce soit à William. Depuis cette idée de défi, un bouillonnement au creux de son estomac réchauffait son corps.

Et, étrangement, elle était prête à être brulée par cette sensation.

Et puis, comment tu te sens? Pas trop bouleversé?

Alors, c'est quoi la suite? l'ignora Charlie.

Une chair de poule se mit à dessiner ses avant-bras, trahissant son enthousiasme. Près d'elle, la présence de William chatouillait ses sens. Il sentait le rêve et le changement.

Demain, tu dois faire une activité spontanée, suggéra-t-il. Genre aller au Biodôme.

Charlie éclata soudainement de rire, les sourcils levés par l'étonnement.

Je ne vais pas manquer une journée de travail pour aller au Biodôme, affirma-t-elle en secouant la tête d'un ton railleur.

D'où l'intérêt du défi, défendit William. Et c'est quoi ce ton condescendant envers le Biodôme, Charlie? Tu sauras que c'est une activité vraiment cool. Les manchots sont drôles. Et que dire du lynx emblématique!

Tu t'y connais.

Will a une étrange obsession pour le Biodôme, commenta Louis, se joignant à la discussion durant la pause publicitaire. Il faut dire que c'est une activité amusante.

William sourit d'un air triomphant, pointant son ami pour souligner ses propos.

Louis! s'offusqua Charlie. Tu me jugeais pour le Monopoly, alors que vous, vous allez au Biodôme?

Donc tu avoues que j'avais raison pour le Monopoly? s'empressa de répondre fièrement le frisé, encouragé par le rire espiègle de son coéquipier.

Louis et William échangèrent une poignée de main complice, sous le regard désespéré de Charlie.

C'est le lynx qui vous fait cet effet ou quoi?

À ce propos, Charlie, n'aie pas trop d'attente, rajouta William d'un air faussement dramatique, entre deux éclats de rire. Le Lynx est toujours dans sa tanière. On ne le voit presque jamais.

Charlie leva les yeux au ciel, laissant la soirée se terminer devant la défaite des Canadiens de Montréal en prolongation. Louis et William, emportés par la rivalité contre les Bruins de Boston, quittèrent la maison en s'offusquant devant le résultat de la partie.

Même après leur départ, leurs exclamations résonnèrent dans l'esprit de Charlie, comme un constant rappel du défi. Elle décida subitement d'envoyer un message à Jenna pour échanger sa journée de travail, prétextant être malade.

Ainsi, le lendemain, sans réellement comprendre ce qu'elle faisait, Charlie alla au Biodôme.

Un sourire discret s'étira sur ses lèvres lorsqu'elle fut devant la vitrine des manchots. Aux prises avec cette soudaine folie, elle baptisa le manchot qui criait plus fort « Louis » et celui qui semblait le plus fier « William ».

Et, dans l'espace de l'Érablière des Laurentides, le lynx était sorti de sa tanière.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top