Chapitre 7




Après plusieurs heures, on me laisse enfin accéder à la partie tant convoitée de l'hôpital, la chambre de Maggie. Après une suite de couloirs, j'y arrive enfin.

Maggie est installée sur le dos, les bras le long de son corps. Ses cheveux blonds forment une auréole dorée autour de son visage. Un tube sort de sa bouche et est relié à une machine qui fait un bruit insupportable, mais qui s'occupe de respirer à sa place. Avec lui, le moniteur relève les battements de son cœur qui est devenu trop fragile pour battre tout seul.

En avançant, je me gratte nerveusement la tête, ne sachant pas comment réagir face à cette situation. Je souffle sur une de mes mèches brunes pour la dégager de mes yeux. Je m'arrête à sa hauteur et je ressens un pincement au cœur douloureux lorsque je remarque son visage enflé, boursouflé, presque noir.

- C'est tout à fait normal, me dit l'infirmière, comme si elle avait lu dans mes pensées.

- Pardon ? Quoi ? Répondé-je d'un ton absent.

- Son visage. Précise-t-elle. Ça partira au bout de quelques jours.

- Ah, oui. Bien.

Je m'assieds dans la chaise à côté de Maggie, les mains entre les cuisses, ne sachant que faire d'elles.

- Vous pouvez lui prendre la main si vous le souhaitez. M'autorise-t-elle.

- Mais ...

- Ne vous inquiétez pas pour le cathéter. Soyez juste doux, et je suis sûre qu'elle n'attend que ça avec tout ce qu'elle a traversé.

Je glisse ma main dans celle de Maggie mais ce geste ne parvient pas à la faire sortir de son coma, alors que je ne souhaite que ça ; qu'elle ouvre les yeux et qu'elle remarque que je suis là, près d'elle.

De l'autre côté du lit, l'infirmière se penche au-dessus de Maggie :

- Vous avez été forte. - Puis, se tourne vers moi - Ah oui ! Ce bouton est en cas de besoin. Pour mademoiselle Stonem, évidemment, mais aussi pour vous. N'hésitez pas à sonner en cas de nécessité.

Elle s'apprête à quitter la chambre, mais lorsqu'elle atteint la porte, elle se tourne une nouvelle fois vers moi et me sourit d'un air encourageant :

- Elle est forte. C'est une battante.

- Ouais...

- Je vous laisse, j'ai d'autres patients à aller voir mais n'hésitez pas à m'appeler.

- Ouais, bien sûr...merci.

La porte se referme derrière l'infirmière et je reste planté là. Et j'attends, le regard dans le vide, dans une position qui devient de plus en plus inconfortable au fil du temps, sa main dans la mienne. Malgré que cette position me donne un mal de dos de chien, je ne la lâcherai plus.

Je repense à son sourire, couvert par cet énorme tube. Et nos vacances en Espagne me reviennent en mémoire.

Magaluf.

Capital de la fiesta sur l'île de Majorque.

Station balnéaire de la débauche.

C'était l'idée de Gavin et de Elly. Et Maggie avait suivi. Nous y sommes allés à la fin du mois de mai, il y a de cela un an. Pino avait loué une grande maison proche de la mer avec piscine. George nous avait supplié de pouvoir venir également.

Dès notre arrivée à l'aéroport, George avait foncé sur une jolie brune, une française, et son amie, en vacances pendant quelques semaines. Une fois au courant de la destination des deux jeunes femmes, qui n'était qu'autre que la nôtre, George avait rapidement demandé leurs numéros de téléphone.

Une fois nos bagages récupérés sur le tapis, nous nous étions dirigés vers le hall principal et nous avions remarqué un homme qui tenait une pancarte avec nos noms inscrits dessus.

- Bonjour, je suis Amadeo, je vais vous emmener à la Casa de senõr Pino. Avait-il dit avec un accent espagnol.

Maggie, rempli d'enthousiasme, l'avait remercié avec un énorme sourire.

Amadeo avait réussi à caser tous nos bagages dans le coffre de son taxi Range Rover blanc et nous avions pris la route jusqu'à Magaluf. Il nous avait déposé dans un quartier tranquille avec des villas plus belles les unes que les autres, situé à moins de dix minutes à pied du centre de Magaluf et de la plage.

La maison que Pino avait loué pour nous était haute de deux étages, construite en pierres orangées, avec des volets peints en vert à chaque fenêtre. Une cour entourée de petits palmiers et de cactus menait jusqu'au perron de l'entrée.

Nous avions passé une semaine inoubliable. Nous avions fait des tours en bateau, nous nous étions baignés dans des eaux claires, promenés sur la plage, nous avions mangé des plats typiquement espagnols et nous nous étions prélassés au bord de la piscine de notre villa.

Durant cette semaine, je n'ai pas lâché Maggie. Son sourire et sa bonne humeur étaient contagieux. Je n'ai pas compté tous les instants que j'ai passé dans ses bras, à l'enlacer sur un transat au bord de la piscine ou sur le large canapé blanc du salon. Même les piques incessantes de George ne nous avaient pas atteint.

Le dernier soir, nous étions allés dans un bar avec les françaises que nous avions rencontrés au début de la semaine. Tous installés autour d'une grande table, la musique était forte et l'ambiance à la fête. L'alcool avait littéralement remplacé notre sang dans nos veines. Maggie dansait avec Elly pendant que George s'amusait avec des lunettes en forme de yeux.

- Vous partez demain, alors ? M'avait demandé Marie, l'une des françaises.

- Ouais. Et je crois que je ne pourrai pas faire un jour de plus ici.

J'avais porté le cocktail à mes lèvres, pendant que Marie m'observait vivement.

- C'est dommage. Avait-elle dit. Pourquoi tu ne pourrais pas faire un jour de plus ?

- Mon foie n'assume plus, avais-je rigolé.

Marie s'était mise à rire après un instant de réflexion, puis, avait lancé :

- En tout cas, c'était un plaisir de vous rencontrer.

Sonia, la deuxième française, qui était allée chercher encore un peu plus d'alcool, était revenu du bar en soulevant un énorme plateau rempli de bouteilles d'alcool forts. Nous avions trinqué à la fin des vacances.

Gavin s'était beaucoup amusé à poster sur Snapchat des vidéos de notre soirée. Au fils des heures, notre état de sobriété nous ayant quittés, la soirée avait totalement tourné au ridicule. Un homme en string dansait avec George au centre de la piste pendant qu'une poupée gonflable tournoyait dans les airs.

- Viens, on va clairement se faire un shot de tequila, m'avait crié George de la piste.

Après avoir regardé où se trouvait Maggie, je m'étais levé de ma chaise. Ma vision déjà troublé, je m'étais avancé avec Gavin vers le bar.

- Trois shots de tequila, avait exigé George.

La serveuse avait versé le liquide transparent dans de petits verres à shots. Une rondelle de citron posé sur chacun d'eux, nous avions fait santé, et nous avions tout avalé. Et quand en me retournant, j'avais vu Maggie sur les genoux d'un homme en chaise roulante, riant aux éclats, ses bras dans les airs, un sourire s'était emparé de mes lèvres. Elle paraissait heureuse, et j'étais bien. Bien, jusqu'au moment où l'homme s'était mit à s'agripper à ses roues et s'était enfuit du bar en dévalant la route en pente.

Avec Maggie.

- Il part ! avait constaté George.

- Oh, ah ouais, c'est vrai, il est plus là, avait lâché bêtement Gavin en rigolant.

Pris de panique, j'étais prêt à les rattraper, après tout, c'était un homme en chaise roulante, avec une pente raide, mais une chaise roulante quand même. Et puis, il s'était retourné et était revenu vers notre table. J'étais soulagé. J'avais enfin soufflé. À ce moment-là, Elly s'était écriée :

- On change de bar !

Alors, nous avions pris nos affaires, et nous nous étions dirigés vers le bar d'à côté. Sur le chemin, j'étais tombé sur un marchand de lunettes de soleil de mauvaise qualité. Ivre, et voulant absolument un accessoire débile, je m'étais arrêté.

- Hey, file-moi une paire, lui avais-je demandé.

Et il l'avait fait. Je les avais posés sur mon nez pendant que Gavin filmait, encore. Barjaquant un truc incompréhensible, je croyais discuter sérieusement du prix de mes lunettes bleu clair en forme de cœurs. Les gars se marraient plus loin. Puis, le vendeur avait remarqué que Gavin le filmait et avait pris la pose alors que moi, je voulais juste lui acheter ces maudites lunettes. Pour finir, je les ai eues, et j'avais même eu un selfie avec lui. Il ne me croyait pas quand je lui disais que j'avais deux millions d'abonnés sur Instagram.

- Je veux voir, je ne te crois pas.

Alors, j'avais posté cette photo : Lunettes kitsh sur le nez, verre d'alcool fort dans la main, tirant la langue, accompagné de mon nouvel ami, une description épineuse, des hashtags débiles... Le combo ultime pour un manager hors de lui. Je ne savais pas encore à cet instant que lorsque Pino tomberait sur cette photo, il envisagerait sérieusement de me tuer.

- Je m'appelle Madman ! S'était exclamé le vendeur. Tu n'oublies pas, hein !

- Adam ! Tu viens ? M'avait appelé Maggie.

- Je suis appelé, Madman ! Bonne soirée !

- Bonne soirée, petit frisé !

J'avais poursuivi ma route jusqu'au bar. Honnêtement, je ne sais toujours pas comment j'avais fait pour y arriver, ni même pour rentrer à la villa. Quoi qu'il en soit, cette soirée était une bonne soirée pour conclure ces vacances de folie.

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