Chapitre 22
George
Je parque ma voiture devant le local. A nouveau, Aida, la fille du restaurateur italien, vient à ma rencontre, un large sourire sur les lèvres.
- Salut, George ! Lance-t-elle joyeusement.
Merde. Elle peut pas aller emmerder quelqu'un d'autre ? Ah mais oui, c'est vrai, Adam ne fout plus les pieds ici.
- Salut, grogné-je.
- Comment tu vas ? poursuit-elle avec entrain. Tout se passe bien ? Tu as besoin de quelques chose?
Que tu te jettes de la première fenêtre que tu croises ? En hauteur de préférence.
- Oui. Non. Non.
Clairement, dégage.
- Ça fait longtemps que vous n'avez pas commander de pizza.
- Ouais, apporte nous une pizza, lancé-je distraitement en me dirigeant vers le local.
- Mais laquelle ?
- Égal. Pas de champignons.
- Je vais te surpendre.
Ce qui me surprendrait, c'est que tu arrives à faire une pizza.
Je passe la porte et rejoins l'équipe. Ross et Gavin sont confortablement installés dans le canapé tandis que Pino fait les cent pas dans la pièce en tapant du pied.
- J'ai commandé une pizza, annoncé-je simplement.
- A quoi ? demande Gavin en se frottant le ventre.
- Une pizza surprise par Aida.
La surprise serait qu'on parvienne à la digérer.
Gavin hausse un sourcil interrogateur. Je m'affale entre les deux, les écrasant à moitié. Pino se tourne vers moi et lance:
- Mais où étais-tu ? Ca fait vingt minutes qu'on t'attends.
- Ben ... Je commandais une pizza. T'écoute quand je parle ?
Pino pousse un long soupir mi-résigné, mi-fataliste, du genre "On ne parviendra à rien avec toi".
- Qu'est-ce que j'ai loupé ? reprends-je.
- On discutait de la tournée et de comment on allait l'organiser, répond Ross.
- Sans Adam ? m'étonné-je.
- Et sans toi, sourit Gavin.
- Mais je suis là, maintenant. Alors quel est le plan ?
- L'inspecteur m'a appelé. Adam peut participer à la tournée.
Clairement, je ne sais pas si c'est une bonne ou une mauvaise nouvelle.
- Et le projet des lumières tient toujours ?
- Ce que Adam veut, Adam obtient.
Malheureusement. Pourquoi suis-je le seul à ne pas aimer le rose diva des nouveaux spots ?
- L'ingénieur son ? Toujours Chris ? demandé-je, maussade.
- Toujours, répond Pino.
- Alors pourquoi je suis là ? Si tout est en ordre ?
Clairement, j'avais autre chose à faire de ma matinée.
- Nous avons un gros problème sur les bras, rétorque Pino, l'air grave.
- Laisse-moi deviner : Ça commence par un "A" et ça finit par un "M" ? Avec un "D" et un "A" au centre ? lancé-je ironiquement.
Gavin me donne un coup de coude dans les côtes pour me faire taire. Pino devient rouge de colère.
- Ce n'est pas drôle ! Ceci n'est pas une plaisanterie, proteste-t-il.
- Ben... On a qu'à changer de le chanteur. On a qu'à prendre un joueur d'harmonica à la place, ça sera toujours mieux que lui.
Et on touchera un public plus sérieux... et sénile.
Gavin pouffe de rire, et même Ross ne parvient pas à garder son sérieux. Pino explose comme un ballon d'Hélium.
- Cazzo di merda ! Espèce de Rompicoglioni, hurle-t-il en gesticulant.
- Tu captes que je ne comprends rien à ce que tu dis ? répliqué-je.
- Trou du cul. Je vais prendre l'air.
Pino quitte le local en claquant la porte.
- Qu'est-ce que j'ai fais encore ? Ce n'est pas moi qui le tend, c'est son fiston Adam.
- Tu n'arranges pas la situation, George, intervient Ross.
- C'est pas ma faute si c'est Adam qui nous fout dans la merde. Déjà que c'est nous devons rattraper toutes ses conneries.
- Tu sais bien, il traverse une mauvaise passe...
- Avec sa pimbêche de Maggie ? répliqué-je en reniflant d'un air méprisant.
- Arrête, elle est sympa, proteste Gavin. Je comprends pas pourquoi tu l'aimes pas.
Il y a une bonne centaine de raisons pour lesquelles je ne l'aime pas.
- Moi aussi, il m'arrive d'être au fond du trou, reprends-je. C'est pas pour autant que je deviens une loque imbibée d'alcool. Il croit quoi ? Qu'il est le seul à avoir des mauvais jours ?
- Il a toujours été comme ça, et tu le connais depuis bien plus longtemps que moi, dit Ross. Il lui faut juste du temps pour qu'il apprenne à se canaliser.
Même le meilleur des psychiatres n'y parviendrait pas.
- Il fout la merde, tranché-je. Il vit sa vie reclus sur lui-même. Il passe son temps à boire et à se plaindre et à nous passer ses caprices. Il s'en fout du groupe, il s'en fout de nous, il s'en fout de Pino, il s'en fout de sa famille. Il ne se rends même pas compte du mal qu'il fait et de l'inquiétude que nous éprouvons.
- Parce que tu t'inquiètes ? Toi, George ? ironise Gavin.
- Étonnant, n'est-ce pas ? rétorqué-je sur le même ton.
- Tu es encore plus égoïste que lui.
Ce qui n'est pas foncièrement faux. Mais j'accuse le coup. Je suis quand même clairement vexé.
- Moi au moins je m'investis, je prends des décisions pour le bien du groupe, contrairement à certains qui suivent les directives d'Adam et ses foutus spots. Bientôt on sera la compagnie des flamands roses !
- Moi au moins, je passe pas mon temps à rabaisser un gars qui a besoin de notre aide.
- Mais moi, je vois où est le problème. Et je vois que Undo va tout droit au désastre.
- Undo sans Adam, c'est comme du sirop sans eau, lance Gavin, bêtement.
- Parce que Undo, c'est Adam ? Undo, c'est nous tous.
- Dans ce cas, pourquoi tu veux le virer ?
- Parce qu'il fait de la merde.
- Euh ... essaye de placer Ross.
Gavin et moi, nous nous interrompons dans notre dispute et nous nous tournons vers lui. En cœur, nous lançons :
- Quoi ?
- Avez-vous remarqué que vous vous prenez la tête pour rien ? Ça fait moins de dix minutes que nous discutons d'Adam et vous êtes déjà en train de vous disputer comme des chiffonniers.
Gavin et moi restons un court instant silencieux avant de se lancer un rapide coup d'œil honteux.
Même quand Adam n'est pas là, il arrive à trouver un moyen de clairement nous faire chier.
La porte s'ouvre et Pino revient dans la pièce. Il semble plus calme.
- Bon, s'exclame-t-il. Reprenons... Il y a encore le festival Reading & Leeds. Adam doit aller seul l'après-midi pour régler le problème "Heather".
- Qu'est-ce qu'il y a encore avec Heather ? demandé-je.
- Il doit prouver à son public qu'il n'y a plus de problèmes entre eux. Pour qu'il y ait plus de cohérence avec le label. D'ailleurs, est-ce que quelqu'un sait si Louise vient ? Si c'est le cas, je dois faire le nécessaire pour qu'elle ait une place VIP en coulisse.
Une place VIP dans mon lit, clairement, c'est certain.
- Ouais, je pense qu'elle va venir, dis-je.
- Ah ouais, ces temps tu traînes pas mal avec elle, lance Gavin.
Merde. Il a remarqué. Il faut que je me sortes de là.
- De temps en temps, je passe la voir. Elle souffre de son frère, il lui faut une épaule pour pleurer.
Même si elle n'a pas encore pleuré sur la mienne. Peut-être qu'avec des oignons ... En fait, elle est où ma pizza dégueulasse "Made By" Aida ?
- Hey, Pino, t'as pas croisé Aida ?
- Pourquoi ?
- Mais pour ma pizza. Tu m'écoutes quand je parle ? C'est la troisième fois que je parle de ma pizza.
- Mais quel rapport entre la pizza et Louise ? réplique Pino.
- Je me comprends.
- Heureusement que tu te comprennes, lance Ross. Parce que nous...
- Donc, je récapitule : pour le festival, le chauffeur vous amènera sur place en début de soirée pour rejoindre Adam. Ce sera très serré, le concert débutera très rapidement. Vous arrivez, vous rejoignez Adam, vous montez sur scène.
- Et pourquoi on y va pas avant ? me plains-je. On aura même pas le temps de se boire une bière !
- On a déjà un ivrogne, inutile d'en rajouter d'autres, soupire Pino.
Je grogne et m'enfonce d'avantage dans le canapé. Je sens qu'on vas passer le plus clair de notre temps à empêcher Adam de boire.
- Quand tu verras Louise, tu pourras lui demander si elle vient ?
- Ouais.
- Tu la revois quand, d'ailleurs, ta Louise ? demande Gavin avec un petit sourire malicieux.
- Ben je sais pas ... Quand j'aurais le temps.
Comme si j'allais te dire que j'allais l'inviter au restaurant ce soir !
- Bon, j'ai encore pleins de choses à faire. Je vous laisse. On se revoit au festival.
Gavin et Ross se lèvent en même temps du canapé. Je suis le mouvement.
On sort tous du local et on croise Aida avec sa boite de pizza entre les mains.
- J'ai ta pizza, George, lance-t-elle avec un grand sourire.
- Ah, ben, on part là.
- Tu peux la prendre avec toi.
- Ouais ...
Je lui prends la pizza des mains et la jette dans ma voiture.
- Pino te payera.
Je m'engouffre dans ma voiture, mets le contact et pars à la recherche de la première poubelle dans laquelle je pourrais balancer cette pizza.
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