1- Start Again

Heya! Voici le premier jour de ma week, en espérant qu'il vous plaise uwu (je m'excuse d'avance, il est... Très angst? Mais promis ça deviendra plus fluff ensuite! Enfin pas beaucoup demain non plus mais bref... Bonne lecture X))


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Il ouvrit doucement les yeux, clignant plusieurs fois pour s'habituer à la lueur tamisée qui traversait le rideau de la chambre dans laquelle il se trouvait. Sa chambre. A la mafia portuaire.

Il soupira. Il ne savait pas trop comment il était arrivé là, il ne s'en souvenait pas et sa tête le lançait affreusement, comme s'il avait la gueule de bois -chose qu'il avait expérimenté un peu moins de deux mois auparavant, à l'occasion de l'année qui s'était écoulée depuis qu'il avait rejoint les rangs de l'organisation.

Pourtant, il ne se souvenait pas non plus avoir trop bu la veille. Peut-être était-ce là que résidait le problème. Il avait lu quelque part que chacun réagissait différemment à l'alcool, et qu'il était parfois possible d'avoir une légère amnésie.

Il n'empêche, il avait vraiment l'impression de passer à côté de quelque chose. Il grogna un peu avant de se tourner sur le flanc, tentant d'apaiser le bourdonnement qu'il avait dans le crâne, et le « quelque chose » qui lui échappait lui apparut enfin.

« Ohé, Chibi, tu es enfin réveillé ? » demanda narquoisement un jeune garçon, bandé de la tête aux pieds et même sur un œil comme un borgne, avant de se relever de la chaise où il était.

Chuuya tiqua sur le moment, car, même s'il se savait dans un lit, il avait l'impression que l'autre n'était pas beaucoup plus grand que lui, et devait avoir environ le même âge. Et il ne supportait pas qu'on le critique sur sa taille. Mais, plus important, comment l'autre connaissait sa taille debout ? L'avait-il déjà croisé quelque part ? Il ne lui disait absolument rien, même de vue.

Le rouquin se releva en position assise, tentant de reprendre contenance, bien qu'il eût envie de flancher en sentant sa tête le lancer encore plus. Sa fierté mise subitement à rude épreuve l'en empêchait.

« Qui es-tu ? demanda-t-il en fixant ses yeux bleu azur dans le seul visible de l'autre. Celui-ci sourit de plus belle.

-Ton partenaire, bien évidemment ! » répondit-il d'un ton enjoué en fermant l'œil et en penchant la tête de côté comme un enfant.

« Qu'est-ce que ça signifie ? C'est quoi ces conneries ?! s'insurgea l'autre après un silence qui commençait à s'éterniser, s'énervant facilement lorsqu'il ne comprenait pas une situation. Et qu'est-ce que tu fous chez moi ?!

-Hmm, tu as vraiment perdu la tête à ce point, c'est embêtant, répondit évasivement l'autre en commençant à déambuler tranquillement dans la pièce, ne prêtant pas du tout attention au plus petit. Et c'est vraiment dommage, à ton âge ! ajouta-t-il en se retournant soudainement vers son interlocuteur, un sourire narquois toujours scotché au visage.

-Sérieusement, qui es-tu ? Ça ne me fait pas rire du tout ! cracha le petit roux. L'autre commençait à sérieusement l'insupporter.

-Oh, je vois que tu ne me crois pas, répondit l'autre en faussant la surprise.

-Parce que tu trouves que ta tête inspire la confiance ?

-Evidemment ! assura-t-il, prenant un ton faussement outré.

-Tss, on aura tout entendu, rétorqua Chuuya, peu convaincu.

-Je suis Osamu Dazai, capitaine de la maf... » daigna enfin lui répondre l'autre après encore quelques secondes de silence, avant de s'arrêter subitement.

Car c'est ce moment que choisit le parrain de la mafia en personne pour entrer dans la pièce, coupant par sa seule aura malaisante la tirade grandiose qu'avait entamée son protégé.

Chuuya tenta de se relever en panique, pensant qu'il avait peut-être oublié une mission importante et ayant peur que ce soit la raison pour laquelle ces deux hommes se présentaient à lui -ce qui risquait d'être puni sévèrement- mais sitôt debout, il retomba assis sur son lit, pris d'un vertige.

« Tu commences à te remettre, c'est bien, déclara le parrain avec un signe de la main pour indiquer au jeune homme de rester assis, affichant un léger sourire presque machiavélique -comme toutes ses expressions faciales.

-Que... Comment ça ? demanda le rouquin, perplexe.

-Quel nul, il ne se rappelle vraiment de rien, pouffa en détournant le regard le brun, qui s'était assis nonchalamment à l'autre bout du lit sans qu'on ne le remarque.

-Aaaah ? Répète un peu pour voir ?! Et se rappeler de quoi ?! »

Dazai pouffa encore plus, avant de voir le regard glacier que lui lançait désormais son supérieur. Il se calma instantanément et détourna définitivement le regard sur le côté comme si de rien n'était.

« Ce n'est pas grave si tu n'en t'en souviens pas. Mais ce qu'il a dit est vrai, il est désormais ton nouveau partenaire, dit calmement l'ancien docteur.

-Alors vous nous épiez depuis le départ ? s'exclama subitement Dazai à l'autre bout du lit, faussement surpris et outré -mais il s'en était douté, évidemment.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé exactement ? Pourquoi je devrais coopérer avec... avec... Lui ?! demanda le rouquin, ignorant l'autre adolescent, qui lui était déjà désagréable bien qu'il ne le côtoie pas depuis longtemps, et trop respectueux de son supérieur pour se chamailler devant lui.

-Tu as un pouvoir destructeur, Chuuya, mais tu es incapable de le canaliser. Tu as perdu le contrôle, et Dazai est arrivé de justesse à te récupérer avant que tu ne te détruises toi-même, expliqua calmement l'adulte.

-Eh oui, tu m'en dois une, Chibi, déclara ledit Dazai en reportant son attention sur son partenaire. C'était sûrement la raison pour laquelle lui le connaissait mais que le rouquin ne s'en souvenait pas encore.

-Pourquoi lui ? demanda le rouquin, outré et se retenant à grand peine de frapper l'autre. Et comment ?

-Il peut annuler ton pouvoir une fois que tu en as perdu le contrôle. Sur ce, j'ai d'autres problèmes à régler » sourit narquoisement le parrain avant de s'éclipser.

Chuuya cligna plusieurs fois des yeux, incertain d'avoir compris ce qu'il s'était réellement passé.

« Sois heureux, tout le monde n'est pas digne de confier sa vie à quelqu'un d'aussi éminent que moi, ne put se retenir de fanfaronner le suicidaire.

-Comme si j'avais envie de confier ma vie à un parfait inconnu, surtout dans ton genre ! pesta le rouquin.

-Je crains que tu n'aies pas le choix » rétorqua le brun, employant un ton presque peiné.

Chuuya soupira. Il en avait parfaitement conscience. Il s'agissait d'un ordre du parrain, il ne pouvait certainement pas aller contre. De plus, partenaire était un mot un peu fort. L'autre avait beau avoir son âge et être, semble-t-il, tout bonnement insupportable, il n'en était pas moins capitaine, d'après ses dires. Ce n'était pas n'importe qui. Même si le jeune homme trouvait étrange de ne pas avoir eu vent d'une personne si jeune avec un grade supérieur au sien.

Pourtant, et malgré ce qu'il venait de dire, confier sa vie à cet insupportable personnage ne lui semblait étrangement pas si mal venu. Si ça lui permettait d'être une arme encore plus puissante sans mourir pour autant, alors c'était bon à prendre.

« Bien, je m'en vais, annonça le brun en se relevant pour joindre le geste à la parole. Il passa la porte, mais sa tête revint brièvement dans l'encadrement. Ne t'en fais pas, je ne te laisserai pas mourir, dit-il avec un sourire étincelant. Du moins, pas sans raison » ajouta-t-il tout de même avant de définitivement partir, évitant de peu l'oreiller qui fonçait sur lui à pleine vitesse, renforcé par la capacité du plus petit.

~

« S'il vous plaît !

-Non.

-S'il vous plaît, monsieur Kunikida ! supplia pour la énième fois Atsushi son supérieur.

-Tu comprends quand on te dit non, gamin ? soupira, exaspéré, le blond.

-On ne peut pas le laisser mourir comme ça !

-Si c'est ce qu'il veut, on n'y peut rien. Laisse faire les choses.

-Mais... Cette maladie...

-Oui, oui, je sais, elle est terrible, tu en as toi aussi été victime. Ecoute, ça s'est bien fini pour toi, alors essaie de faire quelque chose pour cet abruti de suicidaire si tu y tiens vraiment, mais ne m'y mêle pas. J'ai d'autres chats à fouetter » énonça le blond avant de retourner à ses dossiers.

Cela faisait une bonne demi-heure que leur nouvelle recrue tentait -en vain- de convaincre le blond de l'aider. Les autres détectives compatissaient, mais ils étaient impuissants également, aussi écoutaient-ils simplement d'une oreille distraite l'échange.

Le silence qui tomba après la déception du tigre-garou était seulement brisé par les mastications de Ranpo et le bruit que faisait son paquet chaque fois qu'il piochait dedans.

Et justement, à ces bruits, Atsushi se tourna vers le détective sans super-pouvoir.

« Monsieur Ranpo, vous ne pensez pas que l'on peut y faire quelque chose ? »supplia-t-il.

L'interpellé finit tranquillement sa bouchée, se leva, alla chercher un nouveau paquet, l'ouvrit et prit une nouvelle bouchée sous le silence presque religieux du jeune homme, avant de finalement répondre la bouche à moitié pleine :

« C'est un cas désespéré.

-Mais... »

Il n'eut pas le temps de continuer, car Dazai choisit ce moment pour faire son entrée -avec plus d'une heure de retard, ce qui était relativement peu- dans le bureau, et le silence retomba, perturbé désormais par le volettement d'une mouche.

« Quelle ambiance ici, plaisanta-t-il, avant d'êtr d'une quinte de toux. Quelque chose sembla sortir de sa bouche, mais il le récupéra immédiatement, ce qui n'empêcha personne de le remarquer. Qu'est-ce qu'il y a d'intéressant à faire ? demanda-t-il, tout sourire, sous le regard inquiet du tigre.

-Tes dossiers qui traînent depuis un mois, par ex... commença Kunikida.

-Bien, rien du tout ! Parfait !» le coupa le suicidaire avant d'aller s'installer sur le canapé et d'enfiler ses écouteurs.

Le blond serra les poings, mais se remit au travail. Il en avait bien trop pour perdre du temps avec cet imbécile.

Atsushi avait rongé son frein toute la journée pour ne pas aller harceler -une troisième fois- son supérieur. Maintenant que la journée était finie et que l'autre quittait son bureau, il se hâta et le suivit.

« Monsieur Dazai...

-Tu tu tu, je ne veux rien entendre, répondit-il d'un ton enfantin, accélérant le pas.

-Dites-moi au moins de qui il s'agit, et je... »

Le brun soupira, coupant la phrase du gris.

« Ecoute, Atsushi... Je vais mourir, et c'est mon souhait le plus cher, d'accord ? sourit-il comme s'il expliquait la vie à un enfant de cinq ans.

-Pas de cette manière-là. Vous souffrez. Je le sais, et c'est ce que vous voulez éviter, affirma-t-il.

-Pourquoi tu ne veux pas comprendre que c'est impossible ?

-Moi aussi, je pensais que c'était perdu d'avance, et pourtant... argumenta encore le tigre-garou, désespéré.

-Non. Lui, bien plus que d'autres, ne pourra plus jamais m'aimer. Je te l'affirme, répondit encore le plus âgé avec un ton laissant transparaître de la tristesse, marchant devant et toujours plus rapidement.

-Dans ce cas, acceptez de vous faire opérer, supplia-t-il encore.

-Je refuse de perdre les seuls moments de joie de ma jeunesse » dit-il avec une pointe de mélancolie, avant de repartir dans une quinte de toux qui le força à s'arrêter.

C'était la première fois qu'Atsushi le voyait aussi désespéré. D'ordinaire, sa coquille ne se brisait jamais devant les autres. Mais là, cela c'était produit.

« Mais je... Nous avons encore tous besoin de vous...

-Vous vous ... débrouillerez ... très bien ... sans moi » continua de tousser Dazai.

Un chrysanthème s'échappa de sa gorge, semblant dégager ses voies respiratoires. Il s'arrêta, récupéra la fleur, l'observa quelques instants sous le regard pétrifié de son subordonné, puis la jeta par-dessus son épaule avant de repartir.

« On dirait que mon heure est bientôt venue » murmura-t-il pour lui seul.

Atsushi voulait l'empêcher de continuer d'avancer, le retenir, voire même l'assommer pour le forcer à se rendre à l'hôpital. Il était trop médusé pour cela.

Cependant, il pensait avoir compris de qui il s'agissait, aussi prit-il son téléphone et appela-t-il la seule personne capable de faire quelque chose dans l'immédiat, son petit ami, même s'il était sûrement en plein travail.

~

Dazai quitta tranquillement le cimetière, sa prochaine destination déjà bien en tête. Ce n'était plus qu'une question de jours, voire peut-être même d'heures, avant qu'il ne le rejoigne lui-même, alors il était passé saluer une dernière fois Odasaku avant de le rejoindre définitivement.

Il ne réfléchit même pas à sa destination, ses pas le portèrent seuls, et il arriva devant le Lupin sans aucune notion du temps. Il était perdu dans ses pensées, et plus particulièrement dans ses souvenirs.

Définitivement, il ne regrettait rien. Tout du moins, pas des actions qui avaient suivies la mort de son cher ami et son départ de la mafia. En revanche, s'il remontait plus loin, évidemment, si, il y avait de nombreuses choses qu'il aurait voulu réécrire. Le destin pouvait vraiment être cruel parfois.

Il passa la porte, et descendit les escaliers si souvent parcouru. Pourtant, et pour la première fois, aussitôt arrivé en bas, il fit demi-tour et commença à remonter.

Ce fut sans compter sur la poigne de fer qui se referma sur son col et l'empêcha d'aller plus avant dans sa fuite.

« Où tu comptes aller comme ça, crétin de maquereau suicidaire ?! l'agressa une voix qu'il connaissait un peu trop bien.

-Tiens, Chuuya, je ne t'avais pas vu, qu'est-ce que...

-Et donc tu as tourné les talons parce que tu t'es subitement rappelé une course urgente ? s'insurgea le rouquin dans son dos, peu crédule.

-Maintenant que tu le dis, c'est vrai que j'ai laissé du lait sur le feu, donc si tu permets, tenta-t-il, des sueurs froides dans le dos. Il était la dernière personne qu'il souhaitait voir ici.

-Akutagawa m'a dit que tu me paierais un verre si je venais ici, donc tu n'as pas intérêt à te défiler, abruti.

-Attends, qu'est-ce que... »commença Dazai, faisant tourner ses méninges pour comprendre comment et pourquoi le bicolore avait fait cela, et avec un tel timing surtout.

Puis il repensa à Atsushi, et son esprit s'éclaira d'un coup. Il n'aurait jamais cru le nouveau détective aussi perspicace, il était fier de lui. Ou alors le problème venait de lui-même, il avait trop montré ses émotions.

Il soupira, puis se retourna pour observer le visage colérique de son ancien partenaire.

« Très bien, je vais te payer un petit quelque chose, Chibi » dit-il en lui tapotant le chapeau comme il l'aurait fait avec un enfant turbulent.

Il esquiva le coup de pied qui s'ensuivit et alla s'installer au bar, où l'attendaient déjà un verre de whisky à côté d'un autre de vin. Chuuya avait dû commander, car le barman venait de les poser sur le comptoir.

Le rouquin vint s'asseoir à ses côtés, furibond, et prit une gorgée de sa boisson d'un geste vif et sec. Puis il reporta son attention sur son compagnon, et attendit.

« Si tu comptes savoir pourquoi tu es ici, sache que ce n'est pas de mon ressort, et que je n'ai donc rien à te dire, si c'est ce que tu attends, déclara Dazai alors que le silence s'éternisait, faisant tourner distraitement les glaçons dans son verre.

-Parfait, dans ce cas je vais simplement pouvoir profiter de ce verre gratuit sans que personne ne vienne troubler ma tranquillité » rétorqua le plus petit, avant de boire une nouvelle gorgée.

Puis la tranquillité fut brisée lorsque le brun eut une nouvelle quinte de toux. Il voulut se lever pour pouvoir se défiler, mais encore une fois l'autre le retint.

« Ne crois pas que tu vas pouvoir partir sans payer juste parce que tu as attrapé un rhume à ta dernière petite baignade dans la rivière, dit-il sans animosité apparente, mais la menace dans ses paroles était largement perceptible.

-Ce n'était... pas mon intention, sourit Dazai, toussant toujours. Son ancien partenaire l'observait du coin de l'œil, lorsque cela se reproduisit. Il cracha un nouveau chrysanthème avant d'enfin réussir à respirer normalement.

-Ohé, qu'est-ce que c'est que ces conneries ?! paniqua tout en s'énervant Chuuya, se levant d'un coup de son tabouret – ce qui n'augmentait pas beaucoup sa taille, à bon entendeur-

-Rien, ne t'en f...

-Crétin, ne me le cache pas, cracha le rouquin en l'agrippant par le col et en le soulevant. Pas à moi ! De qui ?! »

Le brun toussa encore un peu, mais surtout à cause de la position inconfortable dans laquelle il était. En effet, la maladie des fleurs, aussi appelée Hanahaki, était plutôt compliquée à dissimuler. Ses racines commençaient à s'ancrer dans le cœur et les poumons de ceux dont l'amour n'était pas rendu.

Puis elles se développaient, faisant tousser voire recracher des fleurs les victimes, jusqu'à ce que mort s'ensuive, que l'amour disparaisse ou devienne partagé. Depuis la découverte de cette maladie, un traitement avait été trouvé, malheureusement, et sans qu'on se l'explique, il effaçait absolument tous les souvenirs qu'on possédait de la personne que l'on aimait, et il nous empêchait à jamais de retomber amoureux d'elle.

Pour toute réponse à la question du rouquin, Dazai lui lança juste un regard sérieux et appuyé, lourd de sens. Chuuya comprit aussitôt et le lâcha, effaré et perdu.

« Pourquoi... Pourquoi tu ne m'en as pas parlé plus tôt ? » demanda-t-il, choqué.

Cela faisait approximativement deux mois que les deux anciens partenaires s'étaient retrouvés, forcés de coopérer contre la guilde, depuis que le brun avait quitté la mafia. Cette date coïncidait avec le moment où il avait commencé à ressentir les symptômes de la maladie, contre toute attente.

Il n'aurait jamais pensé pouvoir l'aimer de cette manière-là, et pourtant, voilà où il en était désormais. Ridicule.

« Si tu comptes me forcer la main comme les autres pour que je me fasse opérer, c'est non : je refuse de perdre mes précieux souvenirs te concernant, clarifia aussitôt Dazai, voyant dans quelles réflexions s'était engagé le rouquin. Il lisait en lui comme dans un livre ouvert.

-Je... Laisse tomber, tu es trop têtu, tu y as déjà réfléchi et je n'y changerai rien, je suppose, soupira finalement Chuuya. Je suis sûr qu'autrefois, pourtant, tu aurais fait une croix dessus à la moindre occasion. L'amour rend vraiment aveugle.

-Visiblement, sourit le brun, sachant pertinemment qu'il n'avait pas si tort que cela. Il était vraiment horrible, durant ses années passées à la mafia. Bien plus que ce que le rouquin pouvait imaginer, d'ailleurs.

-Si mes souvenirs sont bons, le tigre-garou y avait réchappé de justesse parce qu'Akutagawa avait commencé à le reconsidérer, seulement... commença le mafieux avant d'être interrompu

-Je sais, tu n'as jamais pensé à moi de cette manière-là, et c'est tout à fait normal, répliqua Dazai. Je sais depuis le début que je suis voué à en mourir, ne te tracasse pas. Tu pourras te sentir coupable une fois que ce sera fait, si tu as encore de la considération pour moi à ce moment-là, dit-il espièglement.

-Espèce de... murmura Chuuya, des étincelles dans les yeux en serrant le poing, avant de se rasseoir. Déjà, comment est-ce que tu peux savoir ça, dit-il d'un ton presque... boudeur ?

-Tu te rappelles de notre première rencontre ? demanda alors Dazai.

-Ce n'est pas ce que je te demande ! s'insurgea le rouquin, vexé par ce subit changement de sujet. Enfin, il n'en tirerait peut-être rien de plus pour le moment, alors il joua le jeu. Evidemment. Tu t'étais pointé nonchalamment dans ma chambre comme si tu y étais chez toi.

-Eh bien ce n'était pas la première fois, rétorqua aussitôt le brun, ce qui surpris son interlocuteur.

-Comment ça ?

-Si je savais que tu ne pourrais pas me retourner mes sentiments, c'est tout simplement parce que tu en es incapable » continua le suicidaire.

Chuuya écarquilla les yeux, ayant peur de comprendre où il voulait en venir.

« Mais tu as oublié notre première rencontre, car tu as déjà été opéré de cette même maladie » finit Dazai, chuchotant presque.

Puis il lui narra ce qu'il s'était réellement passé, lorsqu'ils avaient tous les deux quinze ans. Comment il avait quitté les Brebis au profit de la mafia, largement poussé par le suicidaire. Le rouquin garda des yeux médusés et perdus durant toute son explication.

Puis il arriva à la partie un peu plus compliquée du récit -désormais, le brun doutait que la maladie le tuerait, l'autre le ferait avant.

« Attends un peu, déjà, comment est-ce que j'ai pu... t'aimer, dit difficilement Chuuya, à ce point-là ? interrogea-t-il surpris. D'ordinaire, s'il ressentait quelque chose pour la personne sans rien en retour, il oubliait presque aussitôt ses sentiments, peu importe de qui il s'agissait. Il ne comprenait donc pas comment il avait pu en arriver à ce stade-là.

-C'est de ma faute, rétorqua Dazai. Entièrement de ma faute. »

Le rouquin leva un sourcil interrogateur, ne voyant pas où il venait en venir.

« A l'époque, je n'étais qu'un crétin et un boulet...

-Et tu l'es toujours, le coupa le rouquin.

-Et j'ai joué avec tes sentiments, finit-il comme si de rien n'était, continuant même si son interlocuteur écarquillait de plus en plus les yeux. Quand j'ai compris que tu t'intéressais à moi, j'ai simulé. Je m'ennuyais, alors j'ai profité de ta faiblesse.

-Alors... Tu veux dire qu'on s'est fréquentés, et que je ne m'en rappelle pas ? »demanda Chuuya.

Le détective hocha gravement la tête.

« Pendant plus d'un mois. »

Le rouquin détourna alors les yeux, tremblant légèrement, comme si la vue de son ancien partenaire lui était désormais insupportable. Un long silence s'ensuivit, que Dazai n'osa pas rompre.

« Pourquoi tu ne m'as jamais rien dit ? dit-il en appuyant sur chaque syllabe, le regard fixé sur le mur d'en face. Pour la première fois, le brun était incapable de savoir quelles émotions le traversaient, à travers la froideur de son ton.

-C'est ce que l'on avait convenu avec Mori, soupira le brun. Tu aurais sûrement été incapable de rester mon partenaire si tu l'avais su. Je comptais te le dire après notre combat contre la guilde, j'attendais juste...

-Est-ce que j'étais d'accord ? l'interrompit Chuuya.

-Pas vraiment... Absolument pas, en fait » répondit à regret le brun, mais il lui devait au moins la vérité. Puis il fut à nouveau pris d'une quinte de toux. C'était insupportable. Ses poumons étaient en feu, son cœur tambourinait irrégulièrement et lourdement contre sa poitrine.

Le rouquin serra le poing autour de son verre, et ses jointures commencèrent à blanchir. Il ne regardait toujours pas son interlocuteur, mais il attendait qu'il continue.

« Tu n'étais même pas au courant, reprit Dazai. Tu pensais que je t'aimais, alors, au début, tu as camouflé la maladie, pensant qu'elle passerait. Mais elle a fini par s'aggraver, et tu as failli être tué durant une mission. Seulement, tu ne comprenais pas, refusant sûrement inconsciemment de le faire. Le parrain a fini par te droguer pour t'emmener sans encombre à l'hôpital. Tu connais la suite. »

Chuuya n'en revenait pas. Certes, il avait toujours trouvé ses souvenirs relativement flous, mais jamais il n'aurait pensé à ça. Il avait du mal à le croire, et surtout à l'accepter. Il avait un goût amer dans la bouche, qui se rapprochait d'un sentiment d'injustice.

« Pourquoi on ne m'a pas laissé le choix ? Peut-être que j'aurais préféré y passer, moi aussi » déclara-t-il froidement.

Il vit du coin de l'œil l'autre secouer la tête. Il refusait toujours d'affronter son regard.

« Tu viens de le dire, l'amour rend aveugle. Cela te semble sûrement bien étrange, aujourd'hui, mais c'est sûrement vrai. Je n'ai jamais autant chéri les souvenirs que j'ai de toi, et ne t'en fais pas. On ne va pas me laisser le choix, à moi non plus » finit-il par dire d'une voix un tantinet plus faible.

Chuuya le regarda alors subitement, surpris par cette déclaration. Il vit sur le visage de son ancien partenaire un sourire triste, tandis que ses yeux se fermaient doucement.

« Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Comment ça ? A quoi est-ce que tu joues ? s'énerva-t-il autant qu'il s'inquiéta. Le brun indiqua son verre vide de whiski du menton, qu'il avait bu au fur et à mesure de la conversation.

-Il y avait un somnifère puissant dedans. Placé par le barman à la demande d'Atsushi et sur conseils de Ranpo, je suppose. »

Chuuya avait du mal à comprendre ce qu'il se passait. En effet, il avait trouvé étrange que les verres aient été commandés avant qu'il ne le fasse, mais il s'était dit que c'était du fait de Dazai, sur le coup. Pourtant, lui-même venait d'avoir été trompé, alors même qu'il s'y attendait.

« Si tu savais, alors pourquoi...

-Je te devais la vérité, murmura-t-il d'une voix de plus en plus absente. S'il te plaît, continua-t-il en lui saisissant vivement les mains, comme dans un dernier sursaut d'énergie. Quand j'aurais tout oublié... Ne me pardonne pas si tu n'en es pas capable. Mais recommençons. Reprenons tout depuis le début » supplia-t-il, les yeux brillants, avant de déposer délicatement un baiser sur les lèvres du rouquin et de s'effondrer, inconscient, sur son épaule.

~

Il se réveilla dans une chambre qui n'était pas la sienne. Elle était bien trop blanche et rangée pour cela. Il cligna plusieurs fois des yeux, avant de rencontrer ceux, bleu azur, d'un inconnu assis à son chevet. Il se trouvait vraisemblablement à l'hôpital. Une nouvelle tentative ratée ?

« Enfin réveillé, abruti de suicidaire ? » ronchonna le rouquin. Il avait vraisemblablement passé une nuit blanche, Dazai en aurait été touché si seulement il avait su de qui il s'agissait.

Était-il devenu célèbre durant la période dont il peinait à se rappeler au point que des inconnus l'adulent ? Ses souvenirs étaient actuellement plus que flous, mais il en doutait tout de même.

« Bien, dans ce cas, je vais aller prévenir tes collègues, dit Chuuya en se levant, ne sachant pas par quoi commencer et atrocement gêné et perturbé. Au vu de son regard, l'autre l'avait vraiment oublié. Il refusait encore d'y croire.

-Attendez, est-ce que je pourrais au moins savoir pourquoi un nain roux, ringard et malpoli se permet de squatter ma chambre ? »l'arrêta le brun, un grand sourire aux lèvres.

Il avait beau l'avoir oublié, il n'avait pas perdu ce côté si agaçant que le rouquin détestait tant. Il serra fort les poings, prêt à frapper mais se retenant à grand peine.

« Je veillais à ce que tout se passe bien. »

Il avait dit la première chose qui lui était passée par la tête, et se rendait maintenant compte que c'était totalement futile comme phrase. Il rougit légèrement.

« J'aurais encore préféré que ce soit une jolie fille, à ce moment-là, soupira Dazai, faussant d'être désespéré.

-Alors comme ça, tu m'as vraiment totalement effacé de ta mémoire » constata douloureusement le mafieux.

Certes, il ne l'aimait pas de la manière qu'il aurait fallu pour l'empêcher d'en arriver là, il n'empêchait qu'il avait toujours considéré cet homme insupportable et égocentrique comme un ami précieux et lui avait voué une confiance sans borne.

Savoir que lui ne se souvenait de rien de tout cela faisait extrêmement mal.

« Très bien, faisons comme tu m'as dit alors, capitula le rouquin avant que Dazai n'ait pu en placer une. Recommençons. Chuuya Nakahara, se présenta-t-il en s'approchant et en tendant la main au suicidaire.

« Osamu Dazai, mais je suppose que tu le savais déjà » sourit-il doucement, presque sincèrement, comme s'il comprenait la souffrance de l'autre. Peut-être gardait-il une trace, infime, de ce qu'il avait ressenti durant ce que le rouquin avait toujours pensé être leur première rencontre.

Même si ce fait était impossible, évidemment. Il n'empêche que grâce à cela, Chuuya reprit espoir et se dit que, oui, ce serait possible de repartir à zéro. Presque.

Le destin avait été cruel. Ils ne s'étaient pas aimés en même temps, rendant leur relation impossible. Mais, tant qu'ils étaient vivants, alors toute une palette de possibilités s'offrait encore à eux. Même pour un mafieux et un détective.

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