Chapitre 4

Lorsque j'ouvris les paupières, je restai un moment perdu dans mes pensées. Miraculeusement, le sort m'avait octroyé plusieurs heures de repos sans qu'elles ne soient abîmées par mon subconscient malade, une absence totale de cauchemars. Reprenant petit à petit mes esprits, je croyais retrouver les murs de mon appartement mais je fus vite rattrapé par la réalité. Je ne connaissais pas cette chambre. Les souvenirs de la veille se bousculèrent et j'arborais un sourire joyeux. J'avais eu le grand Chris Argent, il s'était donné à moi et avait même aimé ça. J'avais été témoin de visages plus savoureux les uns que les autres et l'espace d'un petit instant nous avions partagé bien plus que des blagues autour d'un verre. Je tournai la tête, prêt à profiter d'une douce matinée auprès de mon amant. Mais à la place, je me retrouvais face à un lit vide. Je tendis l'oreille à la recherche du moindre battement cardiaque, sans succès. Ma bonne humeur laissa place à une angoisse profonde. "Qu'est ce que tu as fait Peter ! Tu croyais sincèrement pouvoir coucher avec lui et qu'il soit là le lendemain, tout sourire ?! Forcément qu'il allait mal réagir. Bordel Peter pourquoi tu es obligé de toujours tout gâcher ?! Merde." grinçais-je tout bas. Je mis la main sur mon pantalon et descendis les marches. J'avais l'espoir minime de m'être trompé, peut-être avais-je mal entendu ? Non. La maison était vide. En m'approchant de la table je distinguais un petit bout de papier griffonné.

"J'ai dû m'absenter pour le boulot. Sers toi si tu as faim. Claque juste la porte en sortant.

Bonne journée à toi.

Chris."

C'était froid. Gentil, attentionné mais froid. C'était le genre de discours que je pouvais servir à mes coups d'un soir. J'eus un petit pincement au cœur. Alors, je n'avais été que ça, une petite passade, rien de plus. D'ailleurs, je voulais quoi de plus ? J'avais céder à la tentation, j'avais emprisonné entre mes bras mon seul et unique ami et il me fuyait. J'avais peur de le perdre. Je fus surpris par mon sentimentalisme naissant. Depuis quand je m'intéressais à ce qu'on ressentait pour moi ? Sûrement dès lors que je m'étais ouvert à lui, que j'avais appris à lui faire confiance, que j'avais accepté quelqu'un dans mon univers. Je grognai insatisfait de la situation. Je l'avais pourtant prévenu, je lui avais dit de me laisser partir, que j'allais mettre notre amitié en péril. Oui, dans un sens, c'était de sa faute. Je remontai finaliser ma tenue puis, je partis de cette maison qui semblait bien maussade quand la solitude m'accompagnait.

Je retournai à ma vie quotidienne sans donner ni attendre de nouvelles. Plus les jours passèrent et plus j'arrivais à oublier notre intimité passagère, plus j'effaçais de mon esprit son toucher doux et puissant, son souffle saccadé, ses larmes qui se dessinaient lorsqu'il murmurait qu'il aimait mes mouvements, le son de sa voix quand il prononçait mon prénom. Il fallait que tout devienne flou pour que je puisse retrouver un semblant de tranquillité. J'allais réussir, je n'avais pas le choix. Je me plongeai dans mes acquisitions de terrain. Le travail était ma bouée de secours. Suzanne me lançait des regards inquiets que j'ignorais sciemment. Je n'avais pas la force de m'étendre sur mes sentiments. J'avais moi-même du mal à les comprendre.

Dans l'un de mes moments de doute, je contactai Délia. Elle semblait heureuse de m'entendre et sa voix me faisait du bien. Elle n'était malheureusement pas disponible avant deux semaines, je pointai du doigt la tristesse de cette nouvelle mais acceptai de caler un rendez-vous à l'issue de cette période. Grâce à elle, je pris conscience que mes finances étaient florissantes et que je côtoyais une femme resplendissante, j'aurais du aller bien. Le silence radio d'un chasseur aurait dû être le cadet de mes soucis.
Dans cet état d'esprit, une semaine et demi passa, elle me parut aussi longue qu'un mois entier. Alors que je m'égarai dans un dossier, mon téléphone sonna.

- Hale, répondis-je distraitement.

- Salut Peter ! C'est Scott.

- Oh tiens, comment vas-tu ?

- Bien bien… et toi ?

- Notre Alpha suprême m'appelle, comment pourrais-je aller mal ?

- ... Bon. On a une urgence, réunion de meute ce soir à la clinique vétérinaire.

- C'est si gentiment proposé que je ne peux qu'accepter.

- Désolé… Mais c'est important…

- J'y serais, Scott.

- Merci ! À dix-huit heures !

Il raccrocha et mon cœur s'emballa. Il avait parlé de la meute. Le groupe au grand complet, les gosses comme les adultes. Comme Chris. J'allais donc le revoir. Je regardai l'heure, quatorze heures. Bien, il me restait un peu de temps, je me focalisais sur les rapports environnementaux de Beacon Hills. Je devais rester concentré. Je lisais des lignes de mots plus compliquées les unes que les autres. Je m'y perdis très longuement. Quand j'eus enfin fini de décortiquer les différents paragraphes, je vérifiai la pendule accrochée en face de moi. 

- Tsss quatorze heures trente. J'étais pourtant sûr qu'au moins deux heures s'étaient écoulées, tiquais-je.

Je n'avais plus le cœur à travailler, de toute façon, plus aucun dossier n'était important. J'étais en phase de conclure un autre marché mais l'affaire était simple et c'était un des employés qui s'en occupait. Mollement, je prenais mes affaires et m'éclipsais de mon bureau.

- Vous partez Mr Hale ?

- Ah oui désolé Suzanne, j'ai des choses importantes à gérer.

- Vous êtes souvent venus ces jours-ci, tôt le matin pour repartir sur les coups de vingt heures. Vous avez bien le droit de vous détendre. Mais vous allez bien ?

- Je… Vais voir un ami aujourd'hui… Je crois que j'ai quelque peu merdé. Et je ne sais pas trop quoi faire.

- Excusez-vous… Les amitiés c'est comme n'importe quelle relation. On peut faire des erreurs mais si on prend ses responsabilités et qu'on parle avec le cœur, ça finit toujours par s'arranger.

- Suzanne… Vous êtes parfaite.

- Des flatteries, encore, Mr Hale.

- Non non, je suis sincère. Je vais vraiment finir par vous demander de m'adopter. 

- Qui voudrait d'un fils aussi têtu que vous ?

- On ne peut pas rêver mieux, voyons !

- Haha, allez, bonne journée et bon courage avec votre ami.

- À demain !

Je me dirigeai vers mon appartement. Je me fis une tasse de café noir en grignotant un encas. Les heures passèrent lentement, je pus aisément faire un nettoyage intensif de ma cuisine et prendre ma douche. De l'eau froide, presque glaciale pour calmer la boule de stress apparaissant au creux de mon estomac. Guérir le mal par le mal. Mon corps tremblait sous la morsure du liquide. J'étais inquiet, je me demandais ce que j'allais devoir affronter. Un regard dédaigneux ? Un air désolé ? Une mine honteuse ? Aucun de ces scénarios ne me plaisait, mais le pire serait d'apercevoir du mépris dans ses yeux. Le reste du groupe ça m'importait peu, j'y étais habitué. Lui, c'était autre chose, je voulais de nouveau entendre son rire. La fraîcheur de l'eau provoquait des fourmillements sur mes mains, il était temps de sortir.
Je passai un moment à réfléchir à ma tenue. Je misais sur une chemise avec un petit gilet et un pantalon en toile. J'ajustai mes cheveux jusqu'à ce que je croise mon regard dans la glace. Quel idiot, je me bichonnais pour qui ? Un ami, s'il l'était encore ? N'importe quoi, j'étais un Hale, je me devais juste d'être présentable et élégant. Qu'on s'extasie devant ma silhouette élancée. Rien de plus. Suite à cette longue préparation, il était dix-sept heures trente, si je partais maintenant, j'arriverai un peu d'avance, peut-être qu'avec un peu de chance, lui aussi. C'était donc avec une très légère appréhension que je m'approchais de la clinique de Deaton quinze minutes avant l'heure prévue. Scott et Stiles étaient déjà présents.

- Salut Peter ! Et bien, tu ne te refuses rien ! Siffla Scott admiratif devant mon petit trésor à moteur.

- Les inséparables, toujours fourrés ensemble, c'est étonnant.

- Ouep, c'est une amitié de longue date. Tu veux que je t'explique la signification exacte du terme ou tu vois à peu près ce que c'est ? Me lança sarcastiquement le plus bavard des deux.

- Salut, grinça une voix derrière moi. 

- Cher neveu, tu arrives à pic, je commençais à saturer devant l'immaturité ambiante.

- Et c'est que le début, soupira d'exaspération Derek.

- Le Sourwolf ! Cool ! Les Hale les plus antipathiques réunis, on va bien se marrer. La dernière fois qu'on avait autant…

- Stiles, le stoppa l'alpha en faisant un signe de tête au nouvel arrivant.

- Qui sera là ? Interrogeais-je le latino avec un ton qui se voulait naïf.

- À peu près tout le monde, me répondit-il vaguement.

- Merci pour ta précision sans faille.

Derek pouffa de rire devant mon cynisme habituel, c'était plaisant de le voir aussi détendu. La discussion se tourna vers la raison de notre présence mais avant qu'on ne puisse en savoir plus, d'autres têtes connues se rapprochèrent. Lydia qui vint s'échouer dans les bras de son petit ami, Malia toujours collée à Liam, Mason et Jordan. Pas de traces de la personne que j'attendais. Je me résignai quand notre chef nous fit entrer dans ses locaux. À l'intérieur, c'était un Deaton un peu trop sérieux qui nous accueillit. Il était souvent de bon conseils mais assez ennuyeux, il fallait bien l'admettre.

- Bon, si je vous ai demandé à tous de venir ici c'est parce qu'on a retrouvé un cadavre mais je laisse Stiles vous en dire plus, introduisit McCall.

- On a retrouvé ce matin le corps d'un homme portant des blessures caractéristiques, expliqua le jeune policier. De longues entailles profondes sur le torse et la gorge arrachée par une mâchoire puissante…

- Oui… J'ai examiné l'étendue des dégâts, intervint l'émissaire. Ce n'est pas un animal qui en est à l'origine. On a sûrement un loup-garou tueur dans les parages.

- Pour l'instant, il semblerait que la victime n'ait aucun lien avec le surnaturel, commenta l'adjoint du shérif.

La conversation ne m'intéressait que très peu. Un inconnu qui décède sous les coups d'un loup, c'était triste mais ça ne me regardait en rien. Ce qui était plus problématique c'était qu'un loup et potentiellement une meute empiétait sur le territoire de Scott. Ça n'arrangeait pas mes affaires. Pendant que je réfléchissais à la cause possible de cet envahissement soudain, j'entendis la porte d'entrée s'ouvrir et des bruits de pas s'approcher à la hâte. Quelques secondes après, ils entrèrent dans la pièce. Isaac et Chris.

- Désolé pour le retard, souffla le plus vieux.

- Bonsoir tout le monde ! S'exprima joyeusement le plus jeune.

Je cherchai un contact visuel minime avec mon ancien amant mais rien, il ne daigna pas tourner la tête vers moi. Il gardait son visage sérieux et se plaça à côté du druide. Ce petit jeu commençait à m'énerver. J'avais sûrement dépassé les limites néanmoins, il n'avait pas eu l'air de se plaindre. J'avais piétiné notre amitié mais j'avais été assez prévenant. Et puis de nos jours, on pouvait très bien être amis "et plus", ça se faisait partout. Je ne demandais rien, non, plutôt je n'avais rien  demandé. C'était lui qui s'était rapproché de moi, qui avait cassé les barrières du Peter distant que je m'évertuais à maintenir. Je n'aurais pas dû baisser ma garde, accorder ma confiance et engager des sentiments dans une relation qui était perdue d'avance.

- Peter.. ? M'interpella l'hyperactif.

- Oui ?

- Tu nous as écouté ? Tu es d'accord ?

- Stiles, si je devais écouter toutes tes élucubrations, je serais devenu sourd.

- Non mais c'est important là ! Tu abuses.

- Au lieu de geindre comme une adolescente en mal d'attention, quelqu'un pourrait me faire un résumé ? Il y a eu un mort à cause d'un de nos semblables et ?

- On aimerait quadriller la forêt ce week-end. On voudrait que tu y participes avec… Me répondit Scott.

- Quel jour ? Le coupais-je.

- Samedi soir, même heure qu'aujourd'hui, on se rejoint ici.

- Je serais là. 

- D'accord.

Je lui fis un signe de tête et il mit fin à la réunion. Je n'avais pas le cœur à rester plus longtemps. J'allais enfin quitter cet endroit quand on m'interpella. C'était Malia qui, légèrement inquiète par mon attitude désinvolte, voulait m'inviter à déjeuner dans les prochains jours. Je lui proposai la semaine prochaine avec un sourire que je ne pouvais dissimuler, c'était rare qu'elle se préoccupe de moi. Elle accepta volontiers et partit rejoindre son petit ami, quant à moi je pris la direction de ma voiture. Avant d'y entrer, je jetai un dernier coup d'œil à Argent qui, enfin, me regardait ahuris. Inconsciemment, je le saluai et démarrai mon véhicule pour rentrer chez moi. Journée riche en émotions qui prenait fin.
Je ne résistai pas longtemps à l'appel du lit. Je m'endormis rapidement sans pouvoir supprimer l'image d'un Chris froid.

Mes cauchemars reprirent de plus belle, comme s'ils se rattrapaient de la nuit précédente. Plusieurs fois je me réveillai en sueur, les crocs et griffes sortis. J'étais terrifié, ma chambre était remplie de fantômes et la solitude ne faisait que leur donner plus de place. Ils étaient la preuve invisible de ma culpabilité, celle que je fuyais, celle qu'on ne me connaissait pas. J'étais pressé que cette torture nocturne prenne fin. C'était au alentours de huit heures que je pus m'en extirper, un équilibre vacillant entre un repos restreint et juste l'énergie qu'il fallait pour affronter ma journée. Dernier jour à me montrer au travail avant quelques semaines. Ma situation me permettait d'être en présentiel que pour les contrats importants. C'était appréciable et ça évitait que l'on me pose trop de questions, bien que cela flattait mon ego, je préférais avancer à visage couvert. Esquivant ainsi, avec brio, les remarques affligeantes de Stiles et de Derek. J'avais une réunion avec le bureau principal de la boîte, mon rôle consistait à jouer les décideurs face à des conseils plus ou moins judicieux. Les heures défilèrent rapidement et la nuit se déversa sur la ville sans que je ne m'en rende compte.
Une fois de retour à l'appartement, je sirotais tranquillement mon verre de vin en réfléchissant à cette histoire de meurtre. Pourquoi un loup solitaire empiéterait sur le territoire d'une meute,  et pas n'importe laquelle, celle du véritable alpha ? En y réfléchissant bien, s'il s'agissait d'un autre groupe, ça pourrait tourner en ma faveur. La place de l'éternel second ne m'avait jamais vraiment convenu. Si c'était un alpha qui s'amusait à tuer des innocents, ça n'irait pas à l'encontre des valeurs de Scott si, par mégarde, je nous en débarrassais. Prenant, évidemment, son statut au passage. Finalement, c'était une bonne chose cette intrusion. Heureux d'y trouver mon compte, je m'assoupissais vers un repos bien mérité.

Après une nuit légèrement plus calme que la précédente, je passais un début de journée tranquille. Une tasse de café, un livre, le silence. Quoi de mieux sur terre ? Ce vendredi allait être parfait. J'allais retrouver ma petite serveuse. J'avais décidé d'approfondir notre relation. Vernissage d'œuvres d'art, restaurant gastronomique au programme et peut-être une balade romantique. J'avais passé quelques coups de fil la veille. L'argent donnait des passe-droits intéressants. Aux alentours de seize heures, je me préparai, je choisis sans trop de mal un costume trois pièces bleu ciel. Un ajustement capillaire, un peu d'huile sur la barbe et j'étais fin prêt. Je devais aller la chercher à dix-sept heures. J'étais devant son immeuble à moins dix, "Un gentleman est toujours en avance.". Soudain, je la vis apparaître sur le trottoir, elle portait une robe noire et longue qui épousait magnifiquement bien les courbes de son corps. Elle avait relevé ses cheveux et s'était maquillée plus qu'à son habitude. Je descendis de la voiture et elle me fit un sourire ravageur. Conscient de la chance que j'avais, je lui embrassai les joues avant de lui tenir la porte du véhicule afin qu'elle puisse y prendre place. Je m'installai à ses côtés et nous filâmes calmement vers l'exposition. Je ne fus pas avare de compliments devant sa beauté, elle rougissait à chaque fois en me les renvoyant timidement. J'étais conquis. Elle me posa des questions sur les événements à venir, je n'y répondais que très évasivement, envieux de lui en faire la surprise.
Nous arrivâmes devant le premier lieu, des gens y entraient déjà. C'était un vernissage sur des peintures modernes. J'en avais entendu parlé lors d'une de ces soirées mondaines où l'on bavardait dans l'espoir d'y casser la monotonie. Je m'étais pris d'intérêt pour ces œuvres colorées, certaines me troublaient plus que de raison. Néanmoins, je gardais une préférence pour l'art figuratif. Délia semblait subjuguée par une toile avec une explosion de couleur un peu trop fournie à mon goût.

- Elle est superbe hein ? Me dit-elle en souriant.

- Oui. Mais il faut croire que le peintre a malencontreusement renversé ses pots.

Elle esquissa un léger rictus. Et bien, mon humour n'était pas au goût de tout le monde. Nous continuâmes de nous perdre dans les différentes zones de l'exposition en commentant les spectacles visuels se déroulant devant nous. Nous n'étions pas vraiment en accord sur les sentiments qu'ils nous inspiraient, elle préférait ceux qui ouvraient à une joie certaine et moi je me projetais à travers ceux qui nous plongeaient dans un océan de nostalgie. Je mettais ça sur notre différence d'âge, une dizaine d'années. Elle avait un regard plus neuf, plus naïf sur le monde que moi.
Alors que nous nous apprêtions à observer le dernier univers, nous tombâmes nez à nez avec la dernière personne que je voulais croiser aujourd'hui. Chris Argent me dévisageait étonné de me trouver ici en charmante compagnie. Son regard se figea ensuite sur mon accompagnatrice et il lui donna un magnifique sourire.

- Salut Chris. Je ne pensais pas te voir ici.

- Bonsoir Peter et bonsoir madame.. ?

- Bonsoir Mr Argent, vous pouvez m'appeler Délia. Je ne sais pas si vous vous souvenez de moi mais j'étais serveuse lors de votre cérémonie d'hommage, qui était vraiment touchante.

- Oh je vois… Et bien merci pour ce beau compliment. Vous avez commencé à vous fréquenter après cet événement ?

- Oui, on peut dire ça, se tortilla-t-elle en rougissant.

Le chasseur planta son beau regard dans le mien, j'y vis passé un éclair de tristesse puis il reprit :

- D'accord, je suis ravi d'avoir été utile. Bien, sur ce, je vais vous laisser, nous salua t-il.

- Attends, le stoppais-je en lui retenant le coude.

- Oui ?

Il se dégagea sèchement. Je ne savais pas pourquoi je l'avais arrêté. Mon corps avait bougé trop vite. Je cherchai désespérément une excuse à ce geste. 

- Qu'est ce que tu fais là ? Lui demandais-je bêtement.

- Je suis venu voir un ami qui expose ici.

- Argent, cet homme si populaire.

- Tu n'es pas en reste non plus.

Une légère tension s'était installée. On se toisait mutuellement jusqu'à ce qu'un petit bruit me raccrocha à la réalité. Le femme à mes côtés s'était légèrement éclairci la voix. 

- Pardon Délia. Nous allons y aller, Chris.

- Peter, Délia.

Il partit rapidement et nous reprîmes notre découverte. Délia parlait beaucoup, je n'écoutais qu'à moitié, la mine abattue de mon ami me perturbait beaucoup. Pourquoi nous montrer ce visage ? Était-ce parce qu'elle m'accompagnait ? Parce qu'il aurait préféré être à ma place ? Non, il n'était pas comme ça. Ça c'était moi, moi et mon ego surdimensionné. Lui, il ne s'embêtait pas avec ce genre de futilité. Alors, peut-être parce que j'étais sorti avec une autre personne après notre escapade charnelle ? Sûrement, mais il m'avait laissé seul, donc j'estimais en avoir le droit. Peu importe. Délia. Elle parlait des paysages qui défilaient devant nos yeux avec une joie qui m'arracha un petit sourire, elle était mignonne. Tant pis pour le chasseur.

Après avoir nourri nos esprits, il était temps de rassasier nos corps. Le restaurant était dans l'un de mes immeubles, je connaissais personnellement le cuisiner. Il venait de France et avait déjà conquis tous les palais les plus fins. J'avais beaucoup d'admiration pour lui et je lui avais proposé d'acheter les locaux, il avait accepté avec joie. Nous étions en train de finaliser le bail. Quand, la veille, je l'avais appelé, il était ravi de m'accueillir. Il avait bloqué "une table spéciale". En arrivant à l'intérieur de la salle, mon accompagnatrice était ébahi. Elle regardait partout puis me murmura :

- Je ne suis jamais allée dans un endroit comme celui-ci.

- Il faut bien que je t'impressionne un peu.

- C'est chose faite Mr Hale.

- Et ce n'est que le début.

Une personne habillée en noir vint à notre rencontre.

- Bonsoir, avez-vous réservé une table ? Demanda l'hôtesse. 

- Bonsoir, oui, au nom de Peter Hale.

- Très bien, laissez-moi vérifier. 

Elle parcourut des yeux un énorme registre avant d'écarquiller légèrement les yeux.

- Bien, je vous laisse me suivre.

Elle nous conduisit en haut d'un escalier blanc et nous entrâmes dans une pièce remplie de lumière tamisé, de grandes vitres s'étendaient à notre droite laissant apparaître un petit jardinet. Au milieu prônait une table blanche décorée avec bougies et fleurs. Au plafond était pendu un lustre de cristal. Notre hôte ne pouvait pas mieux faire. Mon invitée laissa échapper un soupir d'admiration et nous nous installâmes sur nos chaises. La serveuse nous donna chacun une carte et s'en alla sans un bruit. Après avoir choisi notre dîner, nous bavardâmes un moment. Elle m'expliquait qu'à terme, elle aimerait travailler dans ce genre d'établissement, pour l'instant elle emmagasinait un maximum d'expérience. Nous fûmes servi, un filet mignon pour moi et du saumon pour ma voisine de table. C'était délicieux. Nous les mangeâmes avec appétit. Entre le plat et le dessert, je tentais une approche, je lui saisis la main. D'abord surprise, elle ne la retira pas. Elle était tellement douce, j'avais l'impression d'avoir du velours sous ma paume. Elle voulut dire quelque chose mais on nous interrompit pour le dessert.

- Tu connais depuis longtemps Mr Argent ? Me demanda-t-elle, une fois que nous fûmes seuls.

- Un petit moment oui.

- Vous vous entendez bien ?

- Au début on se détestait pour des histoires de famille et au fil du temps, on est devenu amis. Pourquoi ces questions ?

- Je me les posais juste… Il a l'air gentil.

- Il l'est. Un peu trop des fois. Il a donné une chance à des personnes qui ne le méritaient pas. 

- Je vois.

- Heureusement, je suis plus beau, drôle et intelligent que lui. Tu es avec le meilleur de nous deux. 

- Et sûrement le plus modeste !

- Je suis juste réaliste, voyons.

Elle rigola de bon cœur, un son mélodieux auquel je pourrais m'habituer. Nous terminâmes le repas et je payai l'addition malgré les plaintes de Délia. Elle aurait sûrement changé d'avis en voyant le nombre à trois chiffres écrits sur le reçu. J'avais de l'argent, autant en faire profiter. Je lui proposai une balade nocturne mais elle refusa, le lendemain elle avait un gros service et ne voulait pas se coucher trop tard. Je la raccompagnai donc chez elle. Nous descendions tous deux de la voiture, je tenais à  lui dire au revoir convenablement. Je lui fis face en la dévorant des yeux, ses joues se colorièrent en rouge et je me penchai pour caresser ses lèvres avec les miennes. Elles étaient chaudes et avaient un goût sucré. Elle me retourna ce baiser chaste avant de murmurer "Tu veux monter ?". Évidemment, j'acceptai avec joie et nous nous enfermions quelques heures dans son monde.

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