Chapitre 29

La matinée s'était déroulée très rapidement. J'avais contacté Alexis, lui donnant sa journée pour se concentrer sur notre affaire. Il avait d'abord été surpris de mon appel mais m'avait rapidement invité chez lui. J'avais besoin d'en savoir plus. Connaître les failles de ma future victime. Il commençait à me faire confiance, il m’en parla donc pendant deux longues heures. La majorité de son discours était très peu intéressant, néanmoins, je pus en dégager quelques informations utiles. Malgré ses prédispositions physiques et mentales, William avait un point faible. Quand il était enfant, il se serait blessé au genou et en garderait encore des séquelles. Le contexte m'importait peu mais l'australien jugeait cela capital. Il était devenu bavard, trop. Je roulais souvent les yeux vers le ciel espérant que ma torture prenne rapidement fin. Il semblait s'en amuser. Il avait de la chance, il était protégé par Chris. Je ne pouvais donc pas céder à mes pulsions meurtrières. Et pourtant, mes griffes me démangeaient. Perdans patience, je me relevai soudainement. Il me suivit du regard.

- Ce n'est pas que je m'ennuie… M'exclamai-je. En fait si, ça me déprime de t'entendre me raconter tout ça. Bref. On a pas que ça à faire. On se retrouve chez Deaton dans une heure. J'aimerai avoir des réponses quant à miss Stéroïde.

- Je serais là.

- Bien. Oh et… Ça ira d'accord ? Je te sens légèrement anxieux. Tant que Chris t'appréciera, je t'aiderai.

- Tu l'aimes tant que ça ?

- Ça ne te regarde pas. Tout ce que tu as à savoir c'est que je suis de ton côté et je t'assure que ca vaut mieux.

- Fais attention. William est très doué pour savoir comment fonctionnent les gens.

- Parfait, je lui demanderai des conseils alors !

- Je ne rigole pas. Je t'aime bien et je n'ai pas envie que tu sois blessé.

- J'ai voulu te laisser agoniser dans la forêt, tu te souviens ?

- Mais aujourd'hui, je respire grâce à toi.

- Si ça te fait plaisir.

Je le quittai pour retrouver le calme de mon appartement. Je n'avais pas le temps de me reposer, de toute manière, je n'en avais pas l'envie. Ma peur s'était muée en angoisse. Quelque chose n'allait pas. Quelque chose m'échappait. Pourtant, j'avais réussi à garder Chris en dehors de tout ça et honnêtement, c'était le seul pour qui je m'inquiétais vraiment. Derek et Malia étaient des Hale et pas les plus faibles. Leurs constitutions leur permettaient de se soigner sans mal. Chris en revanche, bien que chasseur expérimenté, était plus vulnérable. Je me raisonnai en sentant l'eau fraîche glisser sur mon corps. J'avais consciemment préféré la morsure glaciale pour supprimer les pensées encombrantes. Tout allait se dérouler à la perfection. Tuer William, récupérer mon pouvoir d'alpha et ce soir, le retrouver pour ne plus m'en éloigner. « Moi, je les aime bien tes iris bleus. Le rouge c'est surfait. » Un murmure s'insinua en moi. Le souvenir d'une nuit passée. La voix de Chris. Mes yeux se brouillèrent. Des larmes, je pleurais. Parce que ma quête de pouvoir n'avait plus aucun sens, parce que la seule chose que je voulais, c'était que mes sentiments soient réciproques. Je voulais tout laisser tomber, le rejoindre, voir son sourire devant sa porte et l'enfermer dans mes bras. Je serrais ma main, plantant mes griffes dans ma paume, observant le sang qui s'écoulait, se mélangeant à l'eau. J'avais mal. Mon cœur était douloureux. J'avais l'impression d'être coincé dans un rôle que je ne voulais plus. Que pouvais-je bien y faire ? Tourner le dos à plus de vingt ans de lutte ? Parce que j'avais appris à aimer ? Non. C'était hors de question, j'étais si près du but. Encore un peu, je n'avais plus qu'à tendre le bras et tout était à moi. Juste un peu plus à attendre et tout serait terminé.

J’éteignis ma douche et passai des vêtements souples pour gagner en liberté de mouvements. Rien ne devait être laissé au hasard. Je n'avais  pas mangé ce matin et l'appétit me manquait. Toutefois, il fallait que je tienne pour ce soir. Alors, j’engloutis un sandwich sans en sentir le goût avant de prendre la route. Je ne faisais pas attention au paysage qui défilait derrière les vitres, perdu dans les couloirs sinueux de mon esprit.

L'entrevue avec miss Stéroïde s'était éternisée. Nous la gardions au chaud jusqu'à ce qu'on règle le problème William. À force, Deaton avait réussi à réunir plusieurs informations. Effectivement, la drogue prise était une sorte d'aconite modifiée. Apparemment, elle exacerbait la force physique, la rapidité et l'endurance. Sans blague. En contrepartie, le preneur perdait toute notion de danger et de douleur. L'effet se dissipait en trente minutes. C'était William qui lui en fournissait pour ses demandes de mission. Alexis était resté silencieux, choqué devant le véritable visage de son frère. Pourtant, je l'avais prévenu maintes et maintes fois. Pourquoi ne me donnait-on pas plus de crédit lorsque je prenais la parole ? Enfin, les familles désastreuses, ça me connaissait. Je lui tapotais l'épaule, pas que j'éprouvais une quelconque empathie, il m'inspirait plus de la pitié. Il en avait bavé depuis quelques mois. Je fus coupé dans mes élans sentimentaux par mon téléphone.

« Arrivé. Je continue ma filature. » - Reçu de Steven.

« Non. Prends toi un hôtel. Je m'occupe de la suite. » - Envoyé.

« Ça va ? C'est rare de te voir si sérieux. » - Reçu.

« Oui. Tu seras payé prochainement. » - Envoyé.

Je devais mettre Steven en sécurité. Je ne pouvais pas me permettre de perdre un allié de choix. Plus il se rapprochait de Beacon Hills, plus il était en danger.

Il ne nous restait que la venue de notre cher frère tueur et tout serait bouclé. Ils étaient deux en face, nous étions en supériorité numérique. La finalité de cet affrontement semblait être couru d'avance. Nous allions abattre nos ennemis facilement. Même s'ils faisaient usage de leurs stupéfiants, nous serions assez pour les maîtriser. C'était la conclusion qui s'imposait à moi quand j'entendis mon smartphone sonner. Décidément, la tranquillité était une denrée rare ici. Numéro inconnu.

- Peter Hale, répondis-je froidement.

- Quel plaisir de te parler de vive voix, s'exclama mon interlocuteur.

C'était un homme à la voix grave avec un fort accent. Je compris instantanément qui était à l'appareil. Je frissonnai, son appel ne présageait rien de bon. Avait-il une longueur d'avance ? Impossible. Je m’éloignai un peu de mes « amis » pour plus d'intimité.

- Je crois que je n'ai pas besoin de me présenter, reprit-il d'un ton jovial. En revanche, je te pensais plus bavard.

- Que me vaut cet honneur ?

- Honneur ? Carrément ? Je suis une star à Beacon Hills ? J'attends un accueil somptueux.

- Tu ne seras pas déçu.

- Pour tuer le temps, je flâne un peu dans les rues. C'est joli comme ville.

- Je t'aurais bien fait visiter mais je suis un peu pris en ce moment.

- Attention qui me touche mais, j'aime bien découvrir les choses par moi-même. Dire que j'ai failli être propriétaire d'une moitié de ces terrains… Félicitations d'ailleurs. Tu es dur en affaires.

- Je te retourne le compliment.

- Quelle gentillesse ! En d'autres circonstances, nous nous serions bien entendu toi et moi, c'est dommage… Malheureusement, je ne peux pas te laisser gagner pour notre autre petit différent. J'ai donc dû prendre des mesures, qui, crois-moi, ne me plaisent pas.

- M'assassiner sous un océan de paroles inutiles ? J'ai de l'entraînement.

- Haha, ricana-t-il. J'aurais préféré… Non, j'ai dû impliquer une personne qui n'a rien à voir là dedans… C'est de ta faute aussi, tu m'aurais laissé faire, rien de tout ça ne serait arrivé.

Mon sang ne fit qu'un tour. Christopher. S'il s'en était pris à lui, je ne répondrais plus de rien.

- Qui ? Grognai-je, feignant la naïveté.

- Vois-tu, au début, je te pensais froid, distant, peu engagé émotionnellement… Ça a duré un petit moment, tu sais, tu m'inspirais beaucoup. Et j'ai compris que, finalement, ce n'était pas le cas. On a tous nos faiblesses j'imagine. Elle a énormément de courage et elle a l'air si douce. Ça me fend le cœur de devoir me servir d'elle. Suzanne… Suzanne…

- Qu'est ce que…

- Tu es sûr qu'elle est en sécurité ? Tu connais son adresse ? À ta place, j’irais vérifier. Je ne sais pas où en est Mad.

- Si tu touches à un de ses cheveux, je t'assure que je te tue de mes propres mains.

- Je te préviens et tu me remercies à coup de menaces ? Mais je comprends, ça chamboule pas mal ce genre de nouvelle. Bon, en attendant,  je vais voir mon frère. Je te laisse gérer tout ça. Ce fut un plaisir Peter.

- Hélas, non partagé.

Je raccrochai, l'esprit légèrement troublé. C'était certainement du bluff. Suzanne était hors de danger… Ou peut-être pas. Elle n'avait pas à se confronter à ce genre de psychopathe. Et si, elle se faisait tuer par ma faute… Encore une victime innocente. Elle ne méritait pas ça, elle devait couler des jours heureux auprès de sa famille. Je me rapprochai des autres, agacé de la situation.

- Aleks, lançai-je froidement. Le déchet qui te sert de frère est dû genre à mentir ?

- Je ne sais pas… Je t'aurais bien dit que non, mais avec les derniers éléments… Je ne le connais pas vraiment.

- Même quand tu pourrais avoir une certaine utilité, tu te foires. C'est fascinant.

- J'ai rien vu venir, continua-t-il sans m'écouter. Donc sûrement oui. Il est très convaincant.

- Appelle Scott et toute la clique, je vais devoir m'absenter. J'ai une urgence. Tiens-moi au courant…

Il hocha la tête en signe d'approbation et je partis en trombe. J'avais merdé, je ne pensais pas qu'elle serait inquiétée. Elle ne représentait aucune menace alors pourquoi elle ? Parce que je l'aimais comme une mère. Je fulminai contre moi-même, j'avais manqué de discernement. J'avais laissé mes sentiments déborder et voilà le résultat. Il n'y avait qu'une seule chose qui comptait dans ce monde : le pouvoir. Il imposait le respect, j'aurais été plus puissant, il n'aurait jamais osé. Je regrettais amèrement d'avoir appris à ouvrir mon cœur. Mon masque froid, c'était ça qui, durant toutes ses années, garantissait la survie de mes proches. J'avais été trop gourmand. À vouloir partager mes émotions, aujourd’hui, j'en payais le prix.

Je conduisais vite, pas assez à mon goût. Son quartier de pavillon. Sa rue. Sa maison. Une nuit noire tombait, les lampadaires et la pleine lune étaient les seules sources lumineuses. L'endroit était silencieux. Je descendis de mon véhicule, essayant de capter les pulsations cardiaques qui s'élevaient chez elle. Deux, deux personnes parfaitement calmes. Je relevai le col de mon manteau et marchai prudemment vers le portail entourant la propriété. Sa fenêtre donnait sur son salon, je pouvais facilement discerner la silhouette de ma secrétaire et de son mari. Elle allait bien, pour l’instant. J’attendis en faisant le tour du pâté de maison. Quinze minutes et toujours rien. Plus le temps passait, plus je commençais à comprendre que tout cela ne menait nulle part. Je m'étais fait berner. Mon pressentiment était de retour. Frénétiquement, je regardai mon téléphone, espérant des nouvelles d'Alexis.

« Je retrouve William ici. Scott et les autres nous rejoignent. » Reçu de Alexis avec une position GPS en pièce jointe.

Il y a trente minutes. Trente putain de minutes. Tout pouvait se passer en trente minutes. Et moi, j'étais là, comme un con à l'autre bout de Beacon Hills. Je n'avais pas le temps de m'apitoyer sur ma naïveté. J'avais du chemin avant de les retrouver. « Scott et les autres » quels autres ? Stiles, son inséparable, c'était une certitude. Derek. Isaac. Malia. Liam. Et Chris ? Sûrement. Les événements prenaient une tournure qui ne me plaisait pas. Je perdais le contrôle et je détestais ça.

La route était longue, j'avais du mal à rester concentré, rongé par une peur grandissante. Enfin, après une éternité, je me garai à la lisière de la forêt. Sans attendre plus longtemps, je m'élançai dans les bois. Je déplorai mon incapacité à me transformer en loup complet, c'était une faculté bien utile, il fallait l'avouer. Je courais à en perdre haleine, rattraper mon retard était impossible mais je ne pouvais arrêter mon imagination quand à la finalité de cette nuit. Bien évidemment, j'avais le pire en tête. Chris mort, Derek agonisant, Malia les yeux clos. J'étais pris d'une endurance incroyable. Quoi qu'il puisse arriver, il fallait que je les retrouve vivants. Je devais les protéger. Je compris soudain que cette force qui me retournait l'estomac, cette angoisse était tournée vers eux. Pas vers moi, mon état, ma vie m'intéressait peu, seule les leurs avaient une quelconque importance. Peut-être que cet amour, au lieu d'être une faiblesse, je pouvais en faire une force.

Puis, cinq minutes après, je les aperçus. Alexis, Isaac et Liam étaient blessés, appuyés sur Stiles et Chris. Scott, Derek et Malia s'opposaient farouchement à trois personnes. William, une femme inconnue et, à ma grande surprise, miss Stéroïde. Malia se défendait bien, malheureusement, la force physique de son adversaire commençait à prendre le dessus. Sans réfléchir, je bondis pour stopper un coup de griffes perdu de miss Stéroïde. Je retrouvais toute sa puissance de la dernière fois. Elle gronda, mécontente de mon intervention, arrêtant momentanément les combats environnants.

- Et bien… Ricana mon neveu. Tu en as mis du temps, Peter.

- À ce que je vois, vous ne pouvez pas vous passer de moi, hein. J'arrive à peine et il y a déjà trois blessés.

- Mais maintenant que tu es là, on va y arriver, affirma saint alpha la mine réjouit.

Je souris, heureux d'avoir ma place dans leur petit groupe et repris les hostilités. J'évitai de justesse des coups brutaux. Nos trois opposants devaient être sous drogue. Leurs pupilles étaient dilatées, la couleur de leurs yeux était si pâle qu'elle s'approchait du blanc. Même celle de William, bien que je pouvais y discerner un cercle rouge. C'était mauvais, nous étions quatre mais chacun d'entre eux équivalait à deux loups. Scott et Derek se faisaient dominer. À tel point que, bientôt, le corps de saint alpha vola dans les airs pour venir s'écraser au sol. Il gémit de souffrance mais, son courage l'honorent, il se releva en titubant. Du sang coulait de sa bouche. Il l'essuya d'un revers de manche.

- Scott ! S'écria Christopher.

William se rapprochait, une férocité terrifiante dans le regard. Il était près à achever notre meneur. Une détonation s'éleva et l'australien sociopathe recula. Il avait été touché au ventre. Chris se précipita aux côtés de Scott, son arme toujours braquée sur William. Cet événement redonna du courage aux autres blessés qui nous rejoignirent. La situation était en train de s'inverser. Je devais bien avouer que notre protégé était d'une force exceptionnelle. Nous étions donc six contre deux et demi. Finalement, la défense adverse faiblissait. « Mad » avait un genou à terre, absorbant difficilement les attaques, tandis que j'avais réussi à prendre miss Stéroïde par la gorge. Les affrontements se terminèrent d'eux-mêmes. Nous étions les grands vainqueurs, ça n'avait pas été si difficile que prévu. Nous savourions notre supériorité quand Scott grogna.

- Bravo, nous félicita William.

Ce petit moment de joie intense, ce flottement où nous avions déjà établi notre triomphe fut balayé en quelque secondes. Je me retournai, découvrant avec horreur la scène qui s'était jouée dans l'ombre. William tenait fermement Chris, une main sur sa bouche et l'autre maintenant le pistolet sur la tempe de son propriétaire.

- Veuillez m'excuser, reprit-il. Je vous ai dérangé. Passons toutes les futilités pour nous concentrer sur l'essentiel. La vie d'Aleks contre celle de votre chasseur. Méthode un peu cavalière me direz-vous mais je n'ai guère le choix. Un chasseur tué par sa propre arme, c'est d'une tragique ironie.

Un silence pesant s'abattit sur nous. Chris ou Alexis. Pour moi, le choix était vite fait. J'étais même prêt à le tuer de mes propres mains s'il le fallait. Ce qui m'angoissait, c'était plutôt la réaction des autres. Scott fixait Chris, cherchant une réponse. Les yeux larmoyants, ces derniers échangèrent un hochement de tête. Chris demandait silencieusement à se sacrifier. Ce qu'ils pouvaient me mettre hors de moi avec leur sens de la justice. Innocent ou pas, la vie d'Alexis n'était rien comparée à celle de Christopher. Je resserrai ma prise sur miss Stéroïde qui suffoquait. Fort heureusement, j'avais une capacité presque infaillible à mentir.

- William, William, soupirai-je. Tu crois vraiment qu'ils vont laisser un innocent se faire tuer devant leurs yeux ? Ils sont tous prêts à se sacrifier pour que cela n'arrive pas.

- À vrai dire, Peter, je comptais un peu sur toi. Je joue beaucoup avec tes sentiments ce soir. Si le coup de la secrétaire n'était là que pour t'éloigner, toi, le membre le plus instable de ce petit groupe, maintenant, je suis sérieux. Livre moi le cadavre d'Aleks et je relâche ton cher et tendre.

- Sur moi ? Mes sentiments pour lui ? Pointai-je Chris du doigt.

- Oui, vous n'êtes franchement pas discrets. L'amour entre un chasseur et un loup-garou, ça a quelque chose de romanesque. J'aime beaucoup. Ça serait dommage que cette idylle se termine aussi rapidement.

- Amour ? Rigolai-je. Ce n'est rien de plus que de l'amusement.

- Je t'en prie ! Tu passes tout ton temps avec lui !

- Oh. C'est vrai que c'est ce que font la plupart des gens qui s'aiment… Seulement, je ne suis pas comme la plupart des gens. Demande-le à tous ceux ici présents… Son corps m’a bien divertis, je dois l'admettre, mais il commence à m'ennuyer et je me demandais justement comment me sortir de là. Si tu le tues, tu m'arrangerais plus qu'autre chose.

À travers les yeux ronds de Chris, je ressentais tous ses doutes. Mon cœur se brisa. Mais c'était une bonne chose, si lui, qui me connaissait si bien me croyait, mon adversaire n'en était pas loin.

- Je crois Peter, que tu essayes de me duper.

- Si seulement… Si je suis reconnu comme le psychopathe de la bande, ce n'est pas un hasard. Je suis incapable de ressentir le moindre sentiment. Je me suis accroché à lui comme j'aurais pu m'accrocher à Alexis. J'avais seulement besoin d'avoir quelqu'un sous ma coupe. Je suis comme ça, j'aime qu'on m'idolâtre.

L'étincelle qui faisait habituellement briller les yeux de Chris s'éteignit. Son regard glissa au sol et il laissa tomber la main qui retenait celle de William. J'inspirai profondément, me préparant à infliger le coup de grâce. Contrôler ses battements de cœur, faire comme si rien n'était. « Désolé Christopher… Si tu savais… J'ai l'impression d'arracher une partie de moi… Je t'aime. Seulement, je me suis promis de te maintenir en vie, même si tu dois me détester. Alors, je suis prêt à tout. » gémis-je Intérieurement.

- Lui ou un autre, ça n'a pas d'importance, haussai-je les épaules. Chris Argent ne représente absolument rien pour moi. Sa mort serait une libération et ça me donnerait une excuse pour te voler ton pouvoir d'alpha sans que Scott m'en veuille. Tue-le, vas-y, débarrasse-nous des chasseurs une bonne fois pour toute.

Je me focalisais sur le visage de William qui s'assombrissait au fur et à mesure de mon discours, essayant d'occulter les gouttes qui coulaient le long des joues de Chris. Jamais tromper mon monde n'avait été si douloureux. Derek et Stiles me regardaient avec mépris. Je souriais, arborant mon plus beau masque de sadisme, j'avais été convaincant.

- Je vois, expira William. Cher chasseur, je suis tellement triste pour toi. L'indifférence de ton amant est si cruelle… Je pensais vraiment qu'il tenait à toi. Quand j'ai parlé de sa secrétaire, il a réagi tout de suite et avec toi… Enfin… Tu ne m'es plus d'aucune utilité.

En prononçant sa dernière phrase, il lança puissamment Chris. Je voyais son corps voltiger dans les arbres avant de se cogner contre l'un d'eux. Un bruit sourd retentit, Christopher tomba ensuite, le visage contre terre. Mon chasseur était inerte, l'odeur ferreuse de son sang m'envahit les narines. Des cris de stupeurs raisonnèrent au creux de mes oreillers. Des paroles dont je ne saisissais pas le sens, des silhouettes qui couraient vers lui. Tout était flou, une rage effroyable s'empara de moi. Je n'avais plus qu'une seule pensée en tête.

Faire souffrir la personne qui était responsable de tout ça.

Justement, William profitait de l'agitation pour assouvir son dessein. Pathétique petit alpha. Je l'interceptai dans sa course, frappant où la balle de Chris l'avait perforé. Il glapit de douleur, m’arrachant un rictus de satisfaction. J'y plantais mes griffes, et lui déboîte le genou affaibli. Il s'effondra sur lui-même.

- Je vais te détruire, murmurai-je. Tu me supplieras bientôt de t'achever.

Je le repoussai, il tomba, le dos contre l'herbe. Il était fatigué, Scott m'avait bien préparé le terrain. Je sautai sur lui, ses iris rouges me dévisageaient de colère. Je frappa un coup, lacérant son bras. J'humais le parfum de son sang, douce senteur. Ce n'était pas suffisant. J'avais soif de vengeance.

- C'est donc ça ton vrai visage, railla ma victime. Tu es une bête sauvage.

- Tu ne le remarques que maintenant ? Ironique quand on sait ce de quoi tu es capable.

- Le chasseur…

- Je t'interdis de parler de lui, ton existence est si misérable que tu n'as même pas le droit de penser à lui. Tu souilles son être.

- J'avais donc raison…

- Qui sait ?

Je lui saisis son membre pour le fracturer, il n'était plus en état de le protéger. Il hurla. Parfait. Je lui assainis alors une blessure au visage, puis une deuxième. De son bras valide, il tenta vainement de m'arrêter. Cela me faisait beaucoup rire, on aurait dit une souris se trémoussant sous la patte d'un chat.

- Regarde-moi, grondai-je. Je veux me nourrir de ta souffrance.

- Tu n'es qu'un bêta, articula-t-il. Comment peux-tu être aussi puissant ?

- Je suis Peter Hale. Je suis l’alpha originel, je suis l'être le plus dangereux de cette ville parce que je n'ai aucune limite. Malheureusement pour toi, tu as touché à la seule personne qui aurait pu m'arrêter. Je suis celui qui va anéantir ta vie.

Je me remémorai l'image de Christopher inconscient. J'étais enragé contre William, de l'avoir blessé. Contre moi, de ne pas avoir réussi à le protéger, d'avoir dit des paroles aussi atroces. C'était lui et moi que je punissais. Lui et moi que je voulais exterminer. Son visage se confondait avec le mien et ça me donnait la nausée. J'allais l’assassiner froidement, en espérant faire taire ma culpabilité.

Je portais un troisième coup, un quatrième. Des éclaboussures de liquide rouge me tachèrent le visage. Je n’en avais que faire. Des mains essayaient de stopper ma folie en m'agrippant les poignets, je les repoussais. Sous moi, je sentais sa résistance diminuer. Enfin, il allait périr, j'allais périr. Je levais la main pour donner ma dernière attaque, celle qui lui serait fatale. Cependant, dans ce brouillard noir et écarlate, un soupire, un murmure atteignit mes oreilles.

- Peter, écoute-moi s'il te plait… Tu n'es plus comme ça. Je le sais, tu n'es pas un monstre.

Sa voix. Sa douceur. Sa respiration. Ses battements cardiaques. Il était vivant. Je relevais la tête et la tournai vers lui. Ses yeux bleus transperçaient mon âme. J'abaissai mon bras, soulagé. Soulagé d'entendre son souffle, soulagé que malgré tout, il croyait encore en moi. Je me dégageai de la carcasse immobile de William. Il était juste inconscient. Moi, je n'avais d'yeux que pour lui. Il était dans les bras de Scott, il lui souriait faiblement. J'entrepris de me lever mais mes jambes flageolèrent. J'allais basculer lorsque Malia vint à mon secours. Elle passa son bras derrière mon dos et m'aida à me mettre debout.

- La fille qui aide son vieux père, blaguai-je. On dirait presque une famille normale.

- La ferme papa, répondit-elle froidement.

« Papa », je lui jetais un coup d'œil, elle ne montrait aucune émotion. Je décidai donc de faire de même, bien qu'au fond de moi, j'étais vraiment heureux. J'avais fini par perdre espoir, elle m'avait fait le plus beau des cadeaux.

- Je présume qu'on va là-bas, lança-t-elle en me montrant Chris de la tête.

- Oui, marmonnai-je.

Elle m'accompagna jusqu'à lui. Lui aussi, était soutenu par Scott. Nos regards se croisèrent, je crus que ma poitrine allait exploser. C'était si bon de le voir de près. C'était si bon d'être libéré de mon ambition dévorante. C'était si bon de ne plus penser à subtiliser un pouvoir. J'étais prêt à changer, pour lui.

- Christopher, tu… M'exclamai-je.

- C'est terminé, me coupa-t-il faiblement avant d’avancer.

Je l’observai s'éloigner, sans un mot. Saint alpha me lança un regard plein de compassion, il pouvait se le garder, je n'avais pas besoin de sa pitié. Trois petits mots si lourds de sens. J'avais compris ce qu'ils cachaient. Christopher avait mis fin à notre relation sans qu'elle n'ait réellement commencé. Le sol s'ouvrit sous mes pieds. J'étais Peter Hale, un bêta solitaire, privé de son amour.

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