Chap 32 : Vendredi 01 Août 2014

*******HENRI*******

C’est la fête nationale Suisse. Mes parents, Mary et sa famille sont là pour le week-end. Mon père en profite, généralement, pour saluer ses relations d’affaires dans un cadre moins formel, dont un en particulier qui organise un grand barbecue chez lui. Du coup ma mère en profite pour me rendre visite ainsi que Mary, Stuart et les enfants. Thomas et son épouse ne sont venus que quelques fois. Ils sont plutôt casaniers et quittent rarement Londres.
Ils sont tous arrivés la veille au soir et il y a plein de vie dans la maison. Ça me fait du bien.

Mary m’a demandé pour Pétra, j’ai dû lui dire que c’était fini entre elle et moi. Elle n’a pas eu l’air plus surprise que cela.

- Tu ne dis rien ?

- Que veux-tu que je dise Henri ?

- Ben je ne sais pas ? Tu dois sûrement avoir quelque chose à en dire non ? un commentaire ?

- Henri, je crois que tu n’y croyais pas trop à cette histoire. Quand nous en avions parlé c’est en tout cas ce que j’avais compris.

Je soupire. Elle est dans le vrai.

- Tu dois avoir raison !!

- Et je me doute qu’une certaine personne est responsable de ton manque d’intérêt pour Pétra, je me trompe ?

Je soupire à nouveau, d’une profonde lassitude cette fois. Pourquoi tout me ramène à elle ? Je voudrais me la sortir de la tête définitivement. De ma tête et de mon cœur, cœur en miette depuis ce jour à l’aéroport. Je secoue la tête pour chasser les images qui veulent toujours s’imposer à moi : Emma dans les bras d’un autre homme.

- Il n’y a personne d’autre. Je suis célibataire et cela n’est pas prêt de changer maintenant. Le sujet est clos Mary.

Elle n’est pas dupe. Ses sourcils froncés en disent long sur les questions qu’elle voudrait me poser mais elle me laisse tranquille, elle ne rajoute plus rien. Il n’y a rien à rajouter de toute façon. Le sujet est définitivement clos. Elle s’est jouée de moi. Sa trahison à l’aéroport est encore bien vivace dans mon esprit.

- Oncle Henri on ira voir les feux ?

- Bien sûr Oliver, on ne va quand même pas rater ça voyons.

Je l’attrape et le charge sur mon épaule : Il gesticule dans tous les sens tout en criant et riant à la fois. Je sors sur la terrasse où Stuart s’occupe du barbecue avec Emilie, la jumelle d’Oliver, en commis. Katy, la petite dernière de ma sœur, est allongée sur un transat, le pouce dans la bouche tout en regardant un dessin animé sur sa tablette.

- Ohhh, c’est quoi ce pouce dans ta bouche ? la taquinai-je

- Ben c’est le mien tonton

- Je sais que c’est le tien mais pourquoi il est dans ta bouche ?

Je me penche pour lui tirer le pouce de la bouche et elle le retient avec l’autre main tout en riant. Oliver lui, continue à gesticuler sur mon épaule et maintenant il me tape le bas du dos pour que je le pose, ce que je finis par faire.

- Oliver tu devrais te calmer un peu enjoint Mary. Viens plutôt m’aider à mettre le couvert tu veux ?

- Oui maman, j’arrive.

Je rejoins Stuart et Emily devant le barbecue.

- Ma chérie tu veux bien aller rejoindre ta maman en cuisine pour voir si les salades sont prêtes ?

- Oui papa, j’y vais. Tiens tonton tu prends ma place ?

Elle me tend la pince qu’elle avait en main et la manique, bien trop grande pour elle. Je soupçonne Stuart de vouloir parler et ça ne m’étonnerait pas que ça soit de Pétra.

- Vous avez rompu y’a longtemps  Pétra et toi ?

- En juin.

- Pourquoi tu ne m’as rien dit quand j’étais chez toi ?

Je hausse les épaules sans répondre. Il poursuit.

- Et il n’y a aucune chance pour que vous vous remettiez ensemble ?

- Stuart, je crois que Mary t’as parlé. Pétra n’était pas faites pour moi. Je n'étais pas amoureux. Je ne l’aimais pas assez pour aller plus loin et tu sais aussi qu’il y avait quelqu’un d’autre. Rien n’est possible avec cette personne non plus donc l’histoire s’arrête là.

- Pourquoi rien n’est possible avec cette jeune femme ? Ce n’est pas une question de couleur de peau j’espère ? Mary m’a dit l’avoir vue.

Je reste coi devant les mots de Stuart. Il croit vraiment que la couleur de peau d’Emma soit en cause ?  Je n’ai jamais rien entendu d’aussi ridicule.

- Non ! non ! Tu me prends pour qui ? Ça  n’a rien à voir !

- Tu me rassures. Excuse-moi mais je devais poser la question pour éliminer ce qui pouvait être l’obstacle le plus visible. Maintenant que ça c’est fait, dis moi quel est le problème ?

- Il n’y a pas de problème. Elle et moi ne sommes pas destinés à être ensemble c’est tout.

Je vois un sourire étirer ses lèvres. A quoi pense-t-il ?

- Alors tu envisageais du sérieux avec cette fille ?

- Je ne vois pas ce qui te fait dire cela Stuart !

- Probablement parce que tu as parlé de destin ? « Nous ne sommes pas destinés à être ensemble » ce sont tes mots Henri !

- C’est une façon de parler Stu. Ne vas pas imaginer quoique ce soit. De toute façon il n’y a plus rien à dire sur cette histoire.

- Tu as vraiment tout essayé  Henri ? Tu as pourtant l’air de beaucoup tenir à elle !!

- Stu, n’insiste pas tu veux. Je te dis que ça n’est pas possible donc laisse tomber.

- Ok, ok n’en parlons plus. Tu sais qu’on ne veut que ton bonheur.

C’est fou, tout le monde veut mon bonheur. Et si je n’étais pas fait pour le bonheur ? Si mon bonheur était ce que j’avais avant ? Avant de connaître Mlle Scott-Hallyway ? Les choses étaient bien plus simples. Je savais où j’allais en tout cas.

A cause d’elle j’ai perdu ma stabilité et ma tranquillité d’esprit. Les choses ne seront jamais plus comme avant.
Mais c’est tout récent… Trois mois. Laissons faire le temps, je finirai bien par me la sortir de la tête et j’emploierai tous les moyens pour cela… j’avais déjà commencé d’ailleurs.

*******

Les enfants se réveillent de leur sieste et déjà tout excités. Nous leur avons promis de les emmener aux festivités et voir les feux ce soir. Mes parents vont nous rejoindre plus tard là-bas.
Nous arrivons au jardin anglais sur les coups de 17h. Il y a beaucoup de monde. Nous avançons sur la promenade du Lac.  Je suis un peu nerveux, je m’attends à tout moment à voir Emma. Nous sommes sur la rive gauche, là où elle habite et même si les chances de la voir sont minimes, je l’espère secrètement.

- Est-ce qu’on pourra avoir des glaces maman ?

- Dès que nous verrons un marchand oui

Nous nous arrêtons devant l’horloge fleurie où Stuart nous prend en photo ainsi que devant la Fontaine  des Quatres-Saisons.  Nous prenons chacun une glace que nous dégustons assis sur un banc, Katy sur mes genoux.

- C’est vraiment une très belle ville.

- Oui et nous devrions  venir plus souvent dit Mary. Ça fait longtemps que  nous n’avons pas pris de vacances juste tous les deux mon chéri.

- Forcément avec des enfants ça se complique leur dis-je

- Oui mais c’est un tel bonheur de les avoir… je te souhaite de connaitre ça un jour Henri.

Je préfère ne pas relever, ça va encore partir sur ma vie amoureuse ou mon absence de vie amoureuse.

Nous rejoignons les parents sur la terrasse de l’hôtel Métropole.
Tout n’est que joie et liesse autour de nous et moi mon cœur est lourd. J’ai secrètement rêvé de l’apercevoir dans la foule, son sourire si enchanteur… elle me manque terriblement, je dois me rendre à l’évidence que le temps dans mon cas n’arrange absolument rien, les jours, les semaines, les mois passent et l’absence d’Emma est toujours aussi cruelle.

- Henri tu es avec nous ? demande Mary

- Oui, désolé, je suis là. Je me disais que je pourrais emmener les enfants chercher des lampions pour se mettre dans l’ambiance ?

- Ouiiiii on y va ! enchérit aussitôt Emily.

- Il y a des carrousels sur l’autre rive, ça pourrait être sympa de les y emmener propose Stuart.

- Et vous pourrez rester en profiter plus tard. Georges et moi rentrerons avec eux.

- Mère. C’est gentil mais…

- Pas de mais Mary, vous êtes là aussi pour prendre du bon temps. Les grands parents sont là pour ça aussi et pis nous n’avons pas eu le loisir de profiter d’eux aujourd’hui. Alors c’est entendu, vous pourrez rester plus longtemps et nous nous occupons de tout.

- Merci Livern. Mary et moi acceptons avec plaisir.

Nous passons encore bien trois heures sur la rive droite, mes neveux et nièces s’amusent comme des fous et l’espace d’un instant j’oublie ce qui ne va pas dans ma vie.

Le soleil est en passe de prendre la tangente vers d’autres cieux, laissant des trainées orangées dans le ciel, parsemées ici et là de cotonneux nuages. Je regarde la foule bigarrée se pressant le long de la promenade, les enfants tenant des lampions dans leurs mains. Nous sommes de retour sur la rive gauche pour nous installer dans un des bars, sous une tente, montée pour l’occasion sur les quais.

Nous sommes en bonnes places pour assister aux feux d’artifices.  Je sirote tranquillement ma bière quand je sens un picotement le long de ma nuque. Je sais qu’elle est là avant même de la voir. Mes yeux se posent sur une silhouette ronde, vêtue d’une longue robe blanche touchant presque le sol, une veste en jean et un panama blanc sur la tête, parfait sa tenue. Mon cœur rate plusieurs battements. Ils sont tous là, son oncle et sa tante, Olly et sa famille ainsi qu’Audric avec une blonde, probablement sa copine. L’homme de l’aéroport n’est pas présent. Elle ne l’a pas présenté à sa famille. J’en ressens une certaine satisfaction bien malgré moi. Je n’arrive pas à détacher mes yeux d’Emma. J’espérais la voir et je le redoutais en même temps.

Je la vois se pencher vers Matthieu pour lui prendre Ellie des bras. Elle plonge dans le cou de la petite et je souris à cette vision familière.  Je suis tenté d’aller les voir, mais la vision d’Emma embrassant cet homme me freine. En plus elle avait exigé de ne plus avoir de contact avec moi. Je devrais aussi expliquer à Stuart et Mary – qui ne manquerait pas de la reconnaitre – qui ils sont.

- Tu as reconnu quelqu’un ? me demande Mary, tout en suivant mon regard.

- Non personne menti-je, détournant aussitôt le regard.

Elle hoche simplement la tête, ni elle, ni moi ne sommes dupes.
Nous nous concentrons sur le feu d’artifice qui n’allait plus tarder.

*******EMMA*******

Nous avons passé la journée en famille et ça me fait du bien. Mon oncle et ma tante sont venus pour l’occasion. Audric est accompagné de sa copine du moment, Déborah. Elle a l’air sympa, même si je n’ai pas échangé beaucoup avec elle.  J’ai été tendue une bonne partie de la journée, j’avais tellement peur au détour d’une rue de croiser Henri et Pétra, même si je me doutais que ça n’était pas trop leur genre d’activité.

La journée avançant, je finis par me détendre et profiter de ce moment en famille. Paola devrait nous rejoindre dans un des bars sur les quais pour vivre le feu d’artifice avec nous.

- Emma tu peux la poser dans la poussette si tu veux, à force elle doit peser une tonne !

- Ça va Olly, je profite de ma petite nièce au maximum.

Comme si elle avait compris qu’on parlait d’elle, la petite se met à gazouiller dans mes bras me faisant un gros sourire dont elle a le secret.
Audric en profite pour glisser dans le bandeau noir de mon panama un petit drapeau Suisse et comme je ne peux rien faire avec Elly dans les bras, je le laisse faire.

- Il te va bien ce drapeau là lance t-il taquin.

- Le mien me va très bien aussi  répliquai-je avant de lui tirer la langue.

Je me concentre à nouveau sur le trésor que j’ai dans les bras et qui réclame toute mon attention. Olly me signale que c’est l’heure de son biberon alors nous cherchons une table de libre pour nous installer et en profiter pour nous désaltérer nous aussi.

Audric nous montre une tente tout au bout des quais qui a l’air d’avoir encore des tables de dispo. Pendant que nous marchons vers le bar éphémère, je crois sentir peser sur moi un regard insistant. Je tourne la tête en direction des bars que nous longeons sans parvenir à reconnaitre quelqu’un. Voilà que je commence à imaginer des choses.

- Ça va ma chérie ? me demande mon oncle Marcus qui a vu que je ralentissais.

- Oui, oui, j’ai juste cru  voir quelqu’un que je connaissais, mais je me suis trompée.

Il hoche simplement la tête en signe d’assentiment. Audric lui me fixe de son regard pénétrant, je crois qu’il a compris à qui je faisais allusion.  Je le vois à son tour balayer la foule et les bars  mais tout comme moi il n’a l’air de ne reconnaitre personne. Il m’adresse un sourire rassurant, l’air de dire « tout va bien, il n’est pas là, détends-toi ».

Une fois nourrie, Ellie s’endort dans mes bras et je finis par la coucher dans sa poussette.
Je savoure ma bière le regard perdu à l’horizon. Le soleil commence à décroître teintant la voûte  céleste d’orangé et laissant peu à peu s’installer les astres de la nuit. Le feu d’artifice ne devrait pas trop tarder. La foule commence à se presser contre les barrières de sécurité, voulant ne rien rater du spectacle qui promet d’être grandiose.
Paola nous a rejointes entretemps, pestant contre la foule qui l’empêchait d’évoluer tranquillement jusqu'à nous.

Je ferme les yeux savourant la légère brise qui prend la place des rayons de soleil, mon moment préféré de la journée.
Ellie est toujours endormie, complètement hermétique à tout ce qui se passe autour d’elle, la bienheureuse. Olly lui place sur les oreilles, des caches, histoires d’atténuer le bruit du feu d’artifice qui allait commencer d’une minute à l’autre.

Les premiers explosifs déflagrants illuminent la toile grise du ciel de ses couleurs. Des  « Ohhhh » et des « Ahhhh » admiratifs se font entendre dans la foule, toutes les têtes tournées vers le Lac  Léman dont la surface reflète les couleurs du ciel.  Une pluie de lucioles tombe de ce même ciel qui quelques minutes plus tôt était teinté de gris. C’est magique, féérique et l’espace d’un instant, j’oublie tout pour me concentrer sur ce magnifique spectacle qui me coupe littéralement le souffle. Ce monde recèle tellement de belles choses.

*******

Il est un peu plus de 1h du matin quand Audric se propose de me raccompagner. J’ai bien compris que j’étais l’excuse parfaite pour qu’il ne reste pas avec Déborah. Cette dernière n’habitant pas loin, nous l’a déposons tout de même en passant. J’aime mon cousin mais le voir agir comme il le fait me fait penser à Henri et ce n’est pas un compliment.

- Pourquoi ?

Il me regarde le sourcil levé, ne saisissant probablement pas le sens de ma question.

- Pourquoi quoi ?

- Déborah !

- Ben quoi Déborah ? Tu pourrais peut-être faire une phrase entière me rétorque t-il moqueur !

- Je crois que tu as compris. Tu n’avais pas besoin de me raccompagner, je pouvais très bien rentrer avec Matt et Olly par exemple. Oncle Marcus aurait très bien pu me raccompagner.

- Je sais. Mais je tenais à le faire et je te rassure, rien à voir avec Déborah. Il est prévu que je retourne chez elle après t’avoir déposée.

Alors là, c’est moi qui suis perdue. S’il doit passer la nuit avec elle, pourquoi s’être proposé pour me raccompagner ? Je le regarde les yeux emplis d’interrogation. Une sourde angoisse m’étreint subitement. Henri. Cela a forcement avoir avec Henri. J’en mettrais ma main à couper.  Je me tourne vers la vitre espérant ainsi qu’il ne lui prendra pas l’envie de s’épancher d’une quelconque façon, surtout si c’est pour me parler d’Henri.

- Cela fait un moment que je dois te parler de quelque chose.

- Audric…

- Non Emma. Je n’en ai pas pour longtemps  mais je dois le faire. Cela pourrait changer bien des choses. Même si tu as l’air d’aller bien, je sais qu’au fond de toi une blessure subsiste. Tu fais tout pour le cacher mais je le vois. Tes yeux ne pétillent plus comme avant. Je ne dis pas que tu es malheureuse hein, je dis juste qu’il te manque quelque chose.

- Oh ! Et tu vas me dire que ce qu’il me manque c’est Henri ?

- Non ! Je vais juste te dire une chose que j’aurais dû dire depuis quelques mois déjà. Tu en feras ce que tu veux après. Et quelle que soit ta décision je la respecterai. Passer à autre chose plus sereinement ou aller vers lui.

A ses derniers mots, j’émets bien malgré moi un hoquet de surprise. Que pense t-il détenir comme information susceptible de me faire changer d’avis ? Il pique ma curiosité maintenant.
Nous arrivons devant mon immeuble. Je m’apprete à descendre de la voiture quand il me retient par le bras.

- Non Emma. Je ne vais pas descendre. Mais ça ne sera pas très long. Un sourire carnassier ourle ses lèvres. Je suis attendu, ne l’oublie pas.

Je me réinstalle sur mon siège, lui faisant maintenant face, le dos contre la portière, pour entendre ses révélations. Même si je n’ai pas spécialement envie t’entendre parler d’Henri, ma curiosité a besoin d’être satisfaite, maintenant qu’elle est attisée.

******* Voilà le temps des révélations.  Je sais que vous attendez les retrouvailles... ça sera bientôt le cas.









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