Chapitre Premier

Bonjour à tous,

aujourd'hui, je vous propose de découvrir les deux premiers chapitres de mon roman, Destination Providence, paru aux éditions Haro.

Disponible sur toutes les plateformes en numérique, ainsi qu'en librairie à la commande.

Bonne lecture à vous :)

Chapitre premier

— Drew, mon lapin, magne-toi le cul et viens nous sortir de là ! Je n'ai aucune envie de finir trouée façon passoire.

La voix de Lyn grésilla dans les haut-parleurs du cockpit, en partie couverte par le bruit des rafales de balles qui crépitaient autour d'elle. Aux commandes du vaisseau, le son était de si mauvaise qualité que Drew ressentait presque physiquement la distance le séparant de l'astéroïde JOT4652HJ, sur lequel Lyn se trouvait en fâcheuse posture.

— On s'y emploie, marmonna-t-il entre ses quatre rangées de dents serrées.

Sa seule ligne d'horizon se résumait désormais à la silhouette oblongue de l'astéroïde, nimbée d'étincelles guerrières dans la nuit spatiale. À la surface de ce damné caillou, quelques cratères peu profonds se dessinaient en creux tandis que les tours de minage, seules constructions assez hautes pour être repérables à basse altitude, se hérissaient comme autant d'épines.

Le vrai danger ne provenait cependant pas des angles coupants et arides de l'architecture spatio-industrielle, aussi peu engageants soient-ils. Non, ce que Drew devait à tout prix éviter, c'était le tir croisé des canons anti-aériens braqués sur le vaisseau. Vigilants et agressifs, ceux-ci ne lui laissaient pas une seconde de répit. Les impacts des canons à plasma s'égrainaient tout autour de la coque en une myriade de particules d'un bleu électrique. Un spectacle à la rythmique impeccable, d'une fascinante beauté s'il n'avait été aussi mortel.

Pour le moment, les boucliers tenaient le choc, mais ce ne serait peut-être pas le cas jusqu'à la fin des manœuvres d'approche.

— Drewwww !

La mauvaise qualité du système de sonorisation du vaisseau ne parvenait plus à masquer la crispation de Lyn, pas plus que son ton faussement décontracté. Ça avait l'air de sacrément chauffer en bas. Seul souci : Drew se trouvait cloué à bonne distance de l'astéroïde, dans l'incapacité de se poser pour porter assistance à l'équipe au sol. Ce n'était pas faute d'avoir prévenu Lyn que sa combine était foireuse. On n'avait pas idée aussi...

Se faire embaucher par une société de forage hors-monde tout en espérant sortir le maximum de marchandises en douce le moment venu, quelle que soit la manière d'envisager le déroulement de l'opération, ça ressemblait à un mauvais plan. De ceux qui finissent toujours mal. Ou, au mieux, vous font frôler la catastrophe toutes les deux secondes...

Peu ou prou cette sensation que l'on éprouve en tombant de la cime d'un arbre pour mieux se raccrocher aux branches. Au début, on a l'impression d'avoir échappé au pire, puis les branches en question se mettent à céder, les unes après les autres. Inexorablement. Et l'on se rend compte qu'on n'est parvenu à rien d'autre qu'à ralentir sa chute, en écopant au passage d'une bonne palanquée d'hématomes en tout genre, sans savoir si on ne va pas se rompre le cou au moment de toucher terre.

De quoi vous laisser un goût amer sur les papilles.

C'était ce que ressentait Drew en sachant la moitié de leur équipe en mauvaise posture, clouée sur ce satané caillou. L'autre moitié, dont Drew, patientait en orbite stationnaire depuis des jours, dissimulée par le champ de débris qui gravitait autour de l'astéroïde. Une manœuvre audacieuse, mais le Providence était un bon vaisseau, rapide et discret, idéal pour se faufiler sans être vu. Quant à son pilote, il savait tirer le meilleur parti de ces qualités.

Drew ne faisait pas pour autant de miracles. Quand, depuis la surface de la station minière, Lyn avait enfin transmis le signal convenu, elle avait juste oublié de mentionner les canons à plasma. Ce qui compliquait singulièrement la tâche de son pilote censé récupérer l'équipe au sol ainsi que les marchandises détournées par leurs soins.

Il avait juré en évitant les premiers tirs qui l'avaient pris pour cible. Pour autant, il n'était pas le seul dans la panade. Lyn, son capitaine, et Shaaki, la mercenaire qurax qui les accompagnait en mission depuis un bon bout de temps, essuyaient elles aussi des tirs nourris, piégées à la surface. L'équipe de sécurité de GCK Mining n'appréciait sans doute pas qu'on tente de les délester d'une bonne partie du sargonium extrait au cours du mois écoulé, soit une perte sèche de quelques dizaines de milliers de GSU, la monnaie galactique standard.

Ce qui se révélait fort dommage, parce que là était précisément l'intention de Lyn. Et quand Selina « Lyn » Tanaski avait une idée en tête, difficile de l'en faire démordre. Même en renforçant la sécurité avec des calibres 50...

— Lyn, appela Drew en esquivant une nouvelle bordée de tirs plasma, il faut que tu me désactives les générateurs de ces saloperies de canons anti-aériens. Au moins un ! Je ne peux rien faire avec ce foutu tir croisé. On va bousiller le vaisseau.

— Roger, Big Boy. Qu'est-ce que tu ferais sans moi, hein ? Shaaki, couvre-moi...

— OK, boss, gronda la gigantesque femelle alien.

— Faites place, manants !

En dépit du caractère tendu de leur situation, Drew se surprit à ricaner. Poushran, ce qu'il aimait ce boulot ! Sa boss était folle, ils passaient leur temps à flinguer – ou à recruter, suivant les circonstances – des mercenaires plus tarés les uns que les autres, les shoots d'adrénaline étaient fréquents et intenses et, cerise sur le gâteau : il pouvait piloter ce petit bijou qu'était le Providence...

S'il ne parvenait pas encore à se rapprocher de l'astéroïde, le vaisseau ne s'en dérobait pas moins à chaque salve avec agilité et élégance. Il fallait avoir une paire bien accrochée et du doigté pour faire voler le Providence, et Drew possédait ces deux qualités. Un sacré pilote, peut-être bien le meilleur de sa génération qu'ils disaient à l'Académie. C'était en tout cas en lui bourrant le mou avec ce genre de fadaises que l'État-Major triv avait cherché à le retenir. Sa volonté de ne pas se réengager dans l'armée régulière au terme de son service obligatoire avait dû défriser ses supérieurs.

Drew ne le regrettait pas, car rien ne valait l'adrénaline pure qui l'envahissait en sentant le Providence répondre dans la milliseconde à ses injonctions. Il le pilotait du bout de ses trois doigts, effleurant avec légèreté les panneaux tactiles comme on caresse un corps capricieux. Profilé à la manière d'un oiseau de proie, le vaisseau aurait pu n'en faire qu'à sa tête, aussi insaisissable qu'un vent solaire, mais Drew connaissait tous ses tours et savait comment le faire chanter.

Il continua de jouer à cache-cache un petit moment avec les tirs de plasma, peut-être bien pour son seul plaisir. Un balai vif et nerveux dans les débris du champ d'astéroïde. Une danse aussi silencieuse que l'espace lui-même.

Drew repensa à ces vieilles fictions animées que lui avait montrées Lyn les soirs d'escale, des « films » si on utilisait le mot terrien. Les batailles spatiales s'y déroulaient toujours au milieu d'un concert de bruits synthétiques. Un ricanement secoua Drew. Il était bien placé pour savoir que tout ce qui entoure le pilote dans ces moments-là, c'est le silence du cockpit et le mouvement de ses propres mains, frénétique.

Comme à cet instant, alors qu'il infléchissait adroitement sa trajectoire pour éviter une salve lumineuse. De loin, on aurait dit une simple ligne de points bleus tracée dans l'espace. Sauf que cette foutue ligne était capable de trancher tous les blindages, aussi sûrement que le soleil liquéfie la graisse.

Alors que Drew n'osait plus l'espérer, les pointillés se trouvèrent soudain interrompus à bâbord.

— Canon plasma numéro 1 désactivé, annonça la voix chevrotante de Lyn. Magne-toi de venir nous tirer de là maintenant !

— À tes ordres, Capitaine.

Avec un sourire prédateur rendu encore un peu plus inquiétant par les deux rangées de dents pointues qui se superposaient sur chacune de ses gencives, Drew modifia la trajectoire du vaisseau. Maintenant qu'il n'était plus pris entre deux feux, le jeu allait pouvoir commencer.

Il ignora sans mal les tirs résiduels et piqua en direction de l'astéroïde, parfaitement au fait de sa mission. D'abord récupérer les marchandises détournées et stockées par leur partenaire dans un entrepôt désaffecté de la compagnie minière ; ensuite seulement il irait prêter main-forte aux deux combattantes qui poursuivaient leur diversion à quelques nautiques de là.

À mesure que le Providence se rapprochait de l'astéroïde, les contours de la station minière gagnèrent en netteté. Les bâtiments apparurent individuellement, comme essaimés à la surface de ce caillou à peine assez gros pour dériver dans l'espace sans risquer de se faire pulvériser. Bien sûr, tout cela ne constituait que des installations provisoires qui seraient déplacées sitôt les ressources de l'astéroïde épuisées. Pour passer au suivant.

Les corporations minières agissaient comme des parasites pour dépouiller chaque recoin de l'espace, méthodiquement, rationnellement, débusquant le sargonium où qu'il se cache. Pour cela, elles implantaient de petites exploitations aisément démontables et transportables en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, et ce afin d'exploiter le minerai le plus précieux de la galaxie.

Celle de l'astéroïde JOT4652HJ ne faisait pas exception à la règle. Quatre puits de forage à égale distance les uns des autres, le tout surmonté de tours permettant l'extraction et le conditionnement rapide du minerai. Quelques baraquements pour les ouvriers, une zone de stockage pour le matériel ainsi que les marchandises et une piste d'atterrissage sommaire. De quoi faciliter le transport des cargaisons vers les raffineries installées sur de solides planètes, elles.

Le plan conçu par Lyn excluait de facto cette zone, la plus surveillée de la station. Par contre, comme prévu, la situation se révéla tout à fait calme quand Drew manœuvra pour s'aligner à la verticale de l'entrepôt le plus éloigné des canons. D'après leur contact, ce bâtiment ne servait qu'à remiser du matériel de forage, rarement utilisé au demeurant. Le meilleur endroit pour procéder rapidement à leur petit échange.

Une piste de vol stationnaire surplombait l'édifice, installation standard pour ce genre d'entrepôt. Polyvalence et rentabilité avant tout.

Bien que la zone demeure déserte pour le moment, la fenêtre d'action était limitée. Tout discret que soit le Providence, les gardes en alerte n'avaient pas pu manquer l'entrée du vaisseau dans leur espace aérien et devaient déjà redéployer une partie des effectifs.

Drew bascula les propulseurs de quatre-vingt-dix degrés et enclencha le mode de vol stationnaire. Une minute lui suffit pour prendre position, la soute du vaisseau alignée avec le dôme mécanique au centre de la piste. Les mâchoires métalliques de celui-ci commencèrent à s'écarter sitôt le Providence en place et le monte-charge apparut, leur servant sur un plateau la cargaison négociée avec leur complice au sein de la compagnie minière.

Ce dernier se tenait sur la plate-forme, vêtu d'une combinaison spatiale complète, comme tous les occupants de l'astéroïde lors des sorties hors atmosphère artificielle. Il fit signe à Drew qu'il leur restait approximativement cinq minutes pour procéder à la récupération des marchandises. Soit trois fois plus de temps que nécessaire.

Ceci étant dit, l'heure avait sonné de mettre le dernier membre de l'équipage du Providence au boulot...

— Xjv7, appela Drew via le système de ComLink interne au vaisseau. Notre contact est sur la plate-forme mobile. Il est prêt à livrer, tu n'as plus qu'à embarquer la cargaison.

Depuis les profondeurs de la soute, le mécano krisk lui répondit aussitôt, sa voix aussi rugueuse et son ton aussi formel qu'à l'accoutumée.

— Bien, Commandant en Second Karëtchy.

X7, comme l'avait surnommé Lyn faute de pouvoir prononcer le nom du Krisk, n'en dirait pas plus. Il appartenait à une race d'une redoutable efficacité. En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, Drew entendit la soute du vaisseau s'ouvrir à la manière d'un ventre affamé. La plate-forme montante s'y engouffra, échappant à sa vue. Moins de deux minutes plus tard, elle faisait machine arrière, vide de tout ce qui n'était pas la haute silhouette d'un Arax, leur contact pour cette opération.

Les autres espèces avaient souvent tendance à sous-estimer les Araxs, sans doute en raison de leur faible espérance de vie et de leurs tendances outrageusement belliqueuses et impulsives. Mais Drew était trop intelligent pour juger toute une race sur la foi de quelques généralités. Leur partenaire s'était acquitté de sa tâche d'intermédiaire avec une rare efficacité.

Ce dernier lui fit d'ailleurs signe que tout était en ordre depuis la plate-forme qui disparaissait à nouveau dans les entrailles de l'entrepôt, engloutie par les parois du dôme mobile.

— Chargement arrimé de manière nominale et sécurisée, Commandant en Second Karëtchy, l'informa X7.

— Bien. On peut redécoller avant que les renforts essayent d'abîmer mon beau carénage...

Drew n'attendit pas d'avoir fini sa phrase pour mettre son projet à exécution. La montée en puissance des propulseurs f it vrombir le vaisseau qui s'éleva à la verticale. Une troupe d'une vingtaine de soldats vêtus de combinaisons aux armes de la colonie minière se précipitait déjà vers le dôme, insectes remuant avec frénésie au sol.

— Encore trop lents, les gars, ricana Drew en virant avec souplesse.

Le vaisseau s'éloigna de la zone de chargement avec la grâce d'un félin dédaigneux.

Encore une opération rondement menée. Juste comme les aimait Drew. Il était pourtant toujours inquiet quant au déroulement de la seconde partie du plan. Il devait encore récupérer ses deux coéquipières coincées au sol.

— Joli cœur cherche sa douce promise, appela-t-il via le ComLink.

L'humour de Lyn laissait toujours à désirer quand il s'agissait de mettre en place des messages codés...

— Douce promise espère l'arrivée de son joli cœur avec ardeur, répondit la jeune humaine de sa voix rauque.

Au moins, elle était en vie.

— Joli cœur est allé cueillir des fleurs pour sa douce promise. Il vient maintenant l'enlever sur son fier destrier.

— Cravache-lui donc la croupe, joli cœur. Sinon tu seras veuf avant d'avoir consommé le mariage...

Si l'on considérait le bruit de la fusillade qui lui parvenait via le système audio, la situation n'était guère plus brillante qu'au moment de leur premier échange. Dans les haut-parleurs, le souffle de Lyn s'élevait, haché et court. Un écho accentué par l'espace confiné de son casque scaphandrier.

— ETA deux minutes. Joli cœur, terminé.

Les systèmes de détection du vaisseau révélèrent la présence d'un grand nombre de troupes hostiles à proximité du signal émis par les deux combattantes. En bonnes stratèges, elles s'étaient dégoté une position retranchée, au sommet d'une tour de contrôle, ce qui leur garantissait un net avantage tactique. Pour autant, elles se trouvaient également acculées et sans possibilité de retraite. Drew avisa l'éclat lumineux et presque métronomique qui, au loin, jaillissait du fusil de précision de Lyn. La jeune femme couvrait le périmètre depuis son perchoir. Shaaki, elle, défendait l'entrée de la tour avec des armes lourdes. Drew en aurait presque souri. Règle numéro 1 du combat galactique : ne jamais laisser un Qurax jouer avec un lance-grenades.

Vu de l'extérieur, un observateur non averti aurait pu penser que les deux combattantes se trouvaient en très fâcheuse posture. Certes, la situation n'était pas idéale. Sauf qu'à bien y regarder, à elles deux, Lyn et Shaaki tenaient en respect une bonne dizaine de soldats parfaitement entraînés.

Pour autant, Drew savait que les munitions n'allaient pas tarder à manquer, aussi économes et prudentes soient les deux femelles. Il évalua les possibilités. Atterrir était exclu. Ils se retrouveraient cloués au sol par un feu nourri et le vaisseau risquait de subir des dommages conséquents. Et étant donné qu'il en avait ras les cornes de passer toutes les escales avec un chalumeau entre les griffes, Drew opta pour la seconde solution.

— Joli cœur à douce promise. Me voici en vue du sommet de votre sombre tour. Vous et la Princesse, tenez-vous prêtes à être enlevées vers un monde meilleur.

— Du sommet de ma tour, vraiment ?

Un sourire flottait dans la question de Lyn. Drew commençait à bien connaître les subtiles inflexions qui peuplaient la voix humaine : Lyn validait le plan tordu dont il venait de lui faire part à demi-mot.

— Princesse Shaaki, rejoins-moi dans la plus haute tour du château, ordonna-t-elle.

— J't'en foutrais, moi, des princesses..., répondit aussitôt la femelle qurax de sa voix grondante.

Elle obéit toutefois.

Pendant ce temps, Drew manœuvrait le vaisseau entre les bâtiments de la station minière. Comme par un fait exprès, il fallait que la tour de contrôle ait été implantée au centre de la zone la plus dégagée ! Il parvint cependant à trouver l'angle mort du canon à plasma encore en état et à se positionner en conséquence. Inversant une nouvelle fois les propulseurs pour repasser en mode gravitationnel, il laissa doucement descendre le Providence sur un axe vertical. Grâce en soit rendue aux nouveaux stabilisateurs achetés à leur dernière escale !

— Joli cœur prêt à quitter ces sombres cieux pour peu que sa douce promise le rejoigne, informa-t-il Lyn. X7, appela-t-il ensuite, mets-toi en position près du sas. Couvre leur retraite.

— À vos ordres, Commandant en Second Karëtchy.

Au moment où Drew alignait le sas d'embarquement du vaisseau avec la verrière de la tour, cette dernière explosa en un million de fragments étincelants. L'enfer se déchaîna alorsdans le poste de contrôle, les coups de feu illuminant la nuit de centaines d'éclats orangés.

— Drew, envoie-nous la passerelle d'abordage. C'est trop loin pour qu'on puisse sauter, statua Lyn, adossée au verre brisé.

Il obéit aussitôt et la plate-forme se déploya dans le prolongement du sas qui s'ouvrait. Lyn, quant à elle, contenait désormais leurs assaillants qui avaient mis à profit la retraite de Shaaki pour les suivre en haut de la tour. Profitant d'une ligne de mire dégagée, X7 se joignit à la fête, canardant leurs ennemis depuis le sas.

— Je vous couvre, boss. Passez devant, dit Shaaki.

— Tu me récupères en bas si je me vautre ? s'amusa Lyn en enjambant le parapet.

Drew retint son souffle en la voyant prendre le peu d'élan possible. Comment voulez-vous que les Humains arrivent à franchir des distances pareilles avec des jambes aussi courtes ? Lyn se propulsa pourtant sans la moindre hésitation. Elle s'élança gracieusement dans les airs, ses bras et ses jambes battant alors qu'elle poursuivait sa course, presque au ralenti.

Poushran, ça ne va jamais le faire, siffla Drew entre ses dents serrées.

Il avait tort. Son amie atterrit de justesse sur l'extrémité de la plate-forme qui ploya légèrement sous son poids. Elle ne s'en soucia pas plus d'une seconde et, sitôt debout, rechargea son arme avec les munitions que X7 venait de lui jeter.

— Shaaki, à ton tour, ordonna-t-elle en ouvrant le feu sur les soldats qui piégeaient la femelle qurax à l'intérieur de la verrière éventrée.

Cette dernière ne discuta pas et remit sans une seconde d'hésitation sa vie entre les mains d'une Humaine à moitié siphonnée et d'un Krisk moins épais qu'un lampadaire. Elle enjamba le parapet, son pas à la lourdeur d'un cuirassé ébranlant la passerelle de métal. L'articulation inversée de ses jambes puissantes lui permit de prendre un formidable élan et son saut la propulsa d'un seul coup à l'intérieur du Providence.

Drew repensa à ce jour où Lyn avait comparé les membres inférieurs des Qurax à ceux d'un animal de sa planète. Des kangourous, si sa mémoire était bonne. Il se dit qu'il devrait consulter Gnet, le réseau d'information galactique, juste histoire de découvrir la tête de ces bestioles...

Pour le moment, il avait d'autres priorités. Comme de rétracter la plate-forme d'abordage et de refermer le sas du vaisseau pour foutre le camp de ce poushran de caillou. Il s'y s'employa donc, réactivant les propulseurs à pleine puissance afin de s'arracher à l'attraction de l'astéroïde le plus vite possible.

Il leur fallut deux bonnes minutes à vitesse maximale pour se placer hors d'atteinte des canons à plasma, le second venant d'être réactivé. Une fois en sécurité, Drew se permit enfin de relâcher le souffle qu'il n'avait pas eu conscience de retenir. D'autant qu'ils n'avaient aucune chance d'être poursuivis, du moins pas avant un bon moment. La station minière se trouvait privée de ses deux chasseurs spatiaux que Lyn avait pris soin de saboter avant leur petite opération. Donc aucune chance d'être pris en chasse, du moins pas avant un bon moment.

Lyn débarqua dans le cockpit en riant. Débarrassée de sa combinaison spatiale, échevelée, en sueur, un Médipack pressé contre son flanc rougi de sang, mais vivante.

Elle tapa sur l'épaule de Drew, le visage fendu d'un large sourire.

— C'était un sacré rodéo, joli cœur.

— Comme toujours, douce promise...

Malicieuse, la jeune femme sortit une bouteille d'alcool balthäj de derrière son dos.

Pas à dire, la vie était belle...


La suite dans le roman ;)

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