Je ne peux reprendre mes esprits car la violence de l'émission sonore m'étourdit encore. Soudain, cela s'arrête. D'une seconde à l'autre, je replonge dans un monde de silence et de paix.

Je suis allongé et couvert de la tête aux pieds. Je n'arrive pas à estimer la durée du trajet. Je m'endors, me réveille, puis fais des cauchemars. Des souvenirs inexplicables naviguent dans ma conscience sans que je ne puisse les contrôler. Je réussis à ouvrir mes yeux, larmoyants. Mes paupières sont collantes et ma bouche est sèche. Je ne sais pas où je suis, ni où sont mes amis.

- Hope... dis-je avec douleur.

Ma gorge s'arrache à la moindre note.

- Greg !

Personne ne répond.

Des tâches noires se dessinent dans mon champ de vision et mon corps devient mou. Je perds connaissance. Des secousses violentes me réveillent. Ma tête bascule de gauche à droite comme désarticulée. J'ai mal à la nuque, mal aux jambes et au ventre. Des nausées surviennent mais je les atténue grâce à de longues inspirations.

Je cligne des yeux mais il fait noir. Mes mains sont liées dans mon dos et enchaînées à une barre de fer. Une cagoule étrange m'empêche de me situer et de savoir ce qui se passe autour de moi. Je suis privé de mes sens. J'ai du mal à percevoir des sons car mes oreilles restent sensibles. Je reconnais l'agitation corporelle à laquelle je suis soumis. Nous sommes dans un véhicule et la route est longue... incontestablement longue.

- Hope ! Je m'écrie. Greg !

Pourquoi ne me répondent-ils pas ? Si ces gens leur ont fait du mal, je ne le supporterai pas.

- Ne les touchez pas ! Je reprends, ne les touchez pas !

Je reprends mon souffle car l'oxygène manque sous ce voile de tissu.

- Détachez-moi ! Détachez-moi !

Je m'agite et tremble, me cogne et tape du pied, je m'égosille et entends à peine ma voix.

C'est donc ce qu'il passe lors des Distributions ? Les victimes sont ligotées dans une camionnette et se font malmener. Je suis dégoûté... dégoûté par ces gens. Qu'ils m'enlèvent cette capuche du visage pour que je puisse leur cracher dessus.

Ont-ils idée de mes intentions ? Ont-ils attendu que nous passions à l'acte après toutes ces semaines avant de nous tomber dessus ? Notre absence a-t-elle fait du bruit ? Quoi qu'il en soit, mon plan se déroule à la perfection. Je me doutais que le Destin était inaccessible. Je ne comptais pas partir à sa poursuite, mais simplement l'attirer vers moi. Il me facilite la tâche, m'emmène directement au cœur du projet. Je pourrais résister, me rebeller et libérer nos proches. Je pourrais faire tomber ce système, faire tomber Don Blorton. Mon père sera fier de moi... où qu'il se trouve.

Je sens un picotement dans mon cou. Une aiguille et un liquide chaud me transpercent la peau et me plongent dans un coma artificiel.