Chapitre 25

Voilà plusieurs heures que Greg a pris le volant et que je somnole à l'arrière du véhicule. Mon sang exerce une pression insensée contre mon front et cela me rend patraque. La journée touche pratiquement à sa fin et nous n'avons toujours pas trouvé d'endroit où coucher.

- Et si nous nous trompons de route ? Je demande. Peut-être que nous sommes à l'opposé de notre destination.

- Nous essayons de rouler en ligne droite depuis notre sortie du tunnel, se justifie Hope, je pense que c'est le mieux à faire. Les bifurcations semblent mener vers les collines et montagnes environnantes.

- Vous pensez que c'est comment là-bas ? Je reprends.

- Cela doit être grand et inaccessible... suppose notre ami. J'imagine de grandes murailles en métal, des accès contrôlés et infranchissables. Des hommes armés jusqu'aux dents et des chiens de chasse. Des tours de contrôle, des fusils et des mitraillettes...

- Ta console de jeux doit gravement te manquer, coupe la jeune fille tout sourire.

Il doit y réfléchir depuis un moment pour avoir une image aussi précise de cet endroit. Après tout, chacun est libre d'avoir sa propre idée sur ce qui nous attend.

Je me redresse et colle ma tête contre la vitre. Le ciel se remplit d'étoiles et je me demande si ma mère peut aussi les voir. Le Soleil, la Lune et le ciel sont les rares éléments qui ne sont pas encore source de conflits. La Terre, par contre, est partagée, divisée et convoitée.

- Il faut que j'aille au petit coin ! Annonce Hope.

- Ici ? Maintenant ? Questionne Greg.

- Oui, ici et maintenant !

- Tu ne peux pas attendre un peu ? Il va bientôt faire nuit !

- Justement, je préfère y aller maintenant sans qu'aucun de vous ne soit obligé de me chaperonner.

La voiture ralentit.

- La jeune fille descend du véhicule et s'élance sur le bas côté.

- Ne regardez pas ! S'écrie-t-elle.

Je tourne la tête pour la rassurer.

- Si tu vois quelqu'un derrière les arbres, ne t'inquiète pas, c'est sûrement la même personne qui m'épiait hier, s'écrie mon ami.

Elle se dépêche et met moins d'une minute avant de revenir au pas de course sur son siège, soulagée.

- Tout s'est passé comme tu veux ? Demande-t-il.

- Tais-toi et démarre !

- A vos ordres, chef !

Il sourit puis met le contact. Une fois, deux fois... rien.

- Que se passe-t-il ? Dis-je, inquiet.

- Je ne sais pas, le moteur a dû trop chauffer. Je vais voir sous le capot !

Je descends et fais mine de comprendre la mécanique.

- Tu sais ce que tu fais ? Je demande.

- Pas vraiment... j'ai vu ça dans les films.

- Génial ! J'ironise.

Il trifouille quelques fils et verse un peu d'eau sur le moteur.

- Elle va repartir ? Crie la jeune fille depuis la fenêtre passager.

- Il faudrait la pousser pour contribuer au redémarrage, affirmé-je.

- Je suis épuisé, me confie Greg, on ne pourrait pas faire une pause ?

J'accepte car la voiture a besoin de refroidir. Je m'allonge sur la tôle chaude et continue de contempler les constellations. Mes camarades font de même et nous restons silencieux un bon moment. Nous échangeons quelques anecdotes et Greg nous fait mourir de rire. Il m'inspire, me complète.

Lorsqu'il est l'heure de repartir, nous nous plaçons à l'arrière, les mains sur le coffre et Hope au volant. Je m'apprête à pousser lorsque des vibrations étranges stimulent ma voûte plantaire.

- Tu sens ça ?

- Oui ! Répond-il.

Je me retourne machinalement et écarquille les yeux.

- Greg !

Je l'attrape par l'épaule et tends la main vers l'horizon.

Ils sont là, encore plus nombreux. Je les vois courir avec détermination et piétiner ceux qui trébuchent pendant leur course. Un nuage de violence et de vivacité contre nature nous menace et réduit notre temps d'action. Je ne saurais dire combien ils sont mais je les reconnais. Nous n'avons plus une seconde à perdre.

- Ce ne sont pas des animaux... constate mon ami, c'est impossible...

- Il faut remonter dans la voiture ! Pousse !

Hope ne semble pas remarquer ce qu'il se passe et tente de démarrer à plusieurs reprises.

- C'est le moment ou jamais ! Crié-je.

Je plaque mon épaule sur le coffre et continue de charger. Greg fait de même mais le résultat n'est pas concluant.

- Cette fois c'est fini ! Dis-je, découragé.

Je me retourne une dernière fois et aperçois, malgré la nuit tombante, la masse de prédateurs à moins de cent mètres.

- Pourquoi en ont-ils autant après nous ? Demande le garçon, d'où sortent ces gens ?

- Qu'est-ce qui se passe ? Interroge Hope, anxieuse.

- Continue de démarrer ! Ordonné-je.

Nous reprenons notre lutte contre la lourde carrosserie et je suis ravi d'entendre le vrombissement sous cette dernière.

- Accélère ! Hurlé-je, accélère !

Je m'adresse ensuite à Greg.

- Monte dans le véhicule, maintenant !

Il ne peut détacher son regard de l'attroupement qui se forme. Je le bouscule pour qu'il revienne parmi nous.

- Maintenant !

Nous courons côte à côte et attrapons chacun une portière afin de sauter dans le véhicule en marche. Je manque de trébucher et me rattrape de justesse. Je glisse sur le siège tel un mollusque et entends la jeune fille qui s'égosille lorsqu'elle aperçoit le violent remue-ménage qui se prépare dans notre dos.

Certains ne sont plus qu'à quelques mètres et l'un d'eux saute sur le pare-brise arrière. Je me couche par réflexe et conseille fortement à mon amie de passer la seconde vitesse. Elle active les essuie-glaces et slalome, terrifiée.

- Qu'est-ce que c'est ? Crie-t-elle, qu'est-ce que c'est ! D'où sortent-ils ! Qu'est-ce qui se passe ?

- Roule ! Hurle Greg, roule !

Elle met du temps avant de retrouver une conduite stable mais gagne rapidement de l'avance. Bon nombre de nos agresseurs perdent l'équilibre et font tomber ceux qui les suivent de près. Ils s'écrasent et se démembrent. Un effet domino se crée et nous permet de les distancer. Je m'assois correctement, attache ma ceinture et ferme les yeux. Voilà que me vient à l'esprit une conclusion à laquelle je n'aurais jamais cru songer jusqu'à ce jour.

Au final, n'étions-nous pas en sécurité à l'intérieur de notre ville et de nos frontières ?

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