- Chapitre 1.2: Annonce surprenante-
- Cela fait désormais dix ans que nous te suivons ici pour un cancer lymphatique, et malheureusement, une fois de plus, nous avons une mauvaise nouvelle à t'annoncer. Les résultats de ton dernier scanner nous sont parvenus hier, et nous avons constaté la présence de multiples tumeurs*. Étant donné tes antécédents, il est fort probable qu'il s'agisse d'une rechute** de ton cancer.
La jeune fille n'était pas étrangère à ces phrases douloureuses qu'elle avait déjà entendues à maintes reprises au cours de ces longues années. À l'écoute de ces mots affligeants, une douleur immense la traversa de part en part. Un sentiment de colère surgit en elle, lui donnant l'envie irrépressible de tout détruire et de crier pour extérioriser sa souffrance. Son regard se plongea alors dans celui de sa mère, assise à ses côtés, qui affichait un air dépité mais gardait un sourire sur les lèvres. En la voyant dans cet état, ses yeux se remplirent de larmes. Elle se sentait coupable de lui infliger une telle souffrance. Sa mère avait toujours été présente pour la soutenir, montrant une force inébranlable, mais Nelia n'était pas dupe et savait bien que derrière son sourire rassurant de mère se cachait en réalité beaucoup de souffrance. À cet instant, sans trop savoir pourquoi, Nelia se mit à penser à son père. Bien qu'elle n'ait que peu de souvenirs de lui, elle aurait tant souhaité qu'il soit là en ce jour difficile. Qu'il puisse les réconforter et soutenir sa mère dans ces moments-là. Malheureusement, cela était impossible car il avait disparu de manière soudaine il y a environ dix ans, quelques jours seulement après la première annonce de sa maladie.
Le docteur reprit son discours d'une voix plus sérieuse et inquiétante, interrompant Nelia dans ses pensées.
- Nous devons agir rapidement. La maladie se propage de manière incontrôlable, envahissant certains de tes organes. Nous devons débuter un traitement dès que possible.
Il marqua une pause pour leur permettre d'assimiler la nouvelle. Nelia, les poings serrés, se sentait de plus en plus mal. Les battements de son cœur s'accéléraient progressivement, ne jouant plus du tout sa mélodie habituelle. Sa mère, quant à elle, s'accrochait du mieux qu'elle pouvait pour soutenir sa fille. Un court instant s'écoula avant que le médecin ne reprenne la parole.
- Si nous ne faisons rien, j'ai bien peur qu'il ne te reste plus que quelques mois à vivre. Tu es consciente que nous avons utilisé de nombreux traitements au fil des années, mais malheureusement, ils se sont révélés inefficaces après un certain temps. Nous n'avons que peu d'options devant nous. Les traitements conventionnels ne sont plus efficaces pour ta maladie.
Il s'arrêta un moment puis poursuivit :
- J'ai eu des discussions avec plusieurs collègues et nous avons découvert un traitement novateur et très prometteur qui pourrait fonctionner. Ce traitement implique la prise de petites pilules antimitotiques trois fois par jour. Nous ne pouvons pas te garantir que cela sera efficace, mais nous espérons que cela te permettra de vivre un peu plus longtemps. Avant de démarrer quoi que ce soit, nous devons parler de ton statut, ajouta-t-il en soutenant le regard de la jeune fille.
Nelia, accablée par toutes ces informations, décida de se lever un instant et fit quelques pas en direction de la fenêtre, mais s'arrêta brusquement. À moitié consciente, les derniers mots du médecin résonnaient en elle : "Nous espérons que cela te permettra de vivre un peu plus longtemps". Des mots durs et trompeurs pour quelqu'un qui ne souhaite pas mourir. Son esprit était embrouillé, ses oreilles bourdonnaient, son cœur battait la chamade et sa respiration devenait irrégulière. Elle ressentait cette terrible sensation d'étouffement et ses yeux commençaient à lui jouer des tours. Elle fut prise de vertige, sa vision se brouilla et finit par s'obscurcir totalement. Dans un dernier élan de conscience, elle lutta pour rester debout mais fut incapable de résister davantage et s'écroula au sol, inconsciente.
Dans la panique, la mère, inquiète, se leva brusquement et accourut vers sa fille qui gisait au sol. Sous le choc et dans un acte désespéré, elle saisit ses bras et se mit à la secouer en la suppliant de se réveiller. L'homme à la blouse blanche, qui s'était lui aussi précipité, l'interrompit dans son moment de désespoir. Il posa sa main sur l'épaule de la mère et lui demanda de se reculer pour qu'il puisse effectuer les premiers secours. Il commença par vérifier la respiration de Nelia qui semblait tout à fait normale. À l'aide de son majeur et de son index posés sur son cou, il prit son pouls qui ne semblait pas particulièrement inquiétant. Battant tout à fait normalement, il n'y avait pas de quoi soupçonner un problème cardiaque.
Après avoir réalisé ses premiers gestes, le médecin qui n'avait pas l'air d'être trop inquiet quitta la pièce un instant et revint directement accompagné d'une infirmière qui tenait dans ses mains une poche de glucose à 5,5 %. À deux, ils levèrent la jeune fille et la placèrent sur le lit qui se trouvait à quelques pas de l'endroit où elle s'était écroulée. Une autre infirmière entra calmement avec de nombreux tubes dans un bol et s'approcha de Nelia. Pendant que l'une préparait la perfusion, l'autre s'occupait de lui faire une prise de sang ainsi que de lui placer un cathéter. Le docteur, quant à lui, toucha quelques mots à la mère et sortit de la pièce. Les infirmières, après avoir effectué leurs tâches, sortirent à leur tour, laissant la jeune fille inconsciente, une poche de perfusion reliée à son bras.
À peine les infirmières étaient-elles sorties que Nelia reprit connaissance.
- Qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi ai-je si mal aux bras ? S'interrogea-t-elle, un peu déboussolée.
Elle redressa la tête et observa ses avant-bras endoloris. L'un était parsemé de quelques bleus et de petits pansements circulaires, typiques des prises de sang. Sur l'autre bras, un pansement plastifié énorme laissait entrevoir le fil de la perfusion. En suivant du regard ce long fil transparent, elle aperçut sa mère assise près de la pompe, la tête baissée entre les mains. Instinctivement, sa mère releva le visage, les yeux gonflés de larmes, et accourut à son chevet.
- Comment vas-tu ? Demanda sa mère, inquiète.
- Ça va, juste un peu fatiguée. Qu'est-ce qui m'est arrivé ? Murmura-t-elle d'une voix douce et faible.
- Tu t'es évanouie et ils ont dû te mettre une perfusion de glucose, répondit sa mère calmement.
- C'est à cause de ma maladie ? Demanda-t-elle, préoccupée.
- Non, le médecin m'a expliqué que ton malaise était dû au choc de la mauvaise nouvelle, la rassura-t-elle d'une voix réconfortante.
Nelia esquissa un sourire de soulagement en réponse.
- Je vais prévenir les infirmières que tu es réveillée. Repose-toi un peu, dit-elle en se dirigeant vers la porte qui s'ouvrit et se referma rapidement, la faisant disparaître.
Allongée sur le lit, le visage tourné vers la gauche, Nelia se mit à contempler à nouveau le paysage verdoyant offert par la fenêtre.
De longues minutes s'écoulèrent et sa mère revint accompagnée du docteur, qui conservait toujours son air impassible et son regard froid. Il s'approcha de la jeune fille et lui demanda s'il pouvait l'examiner. Sans trop d'hésitation, elle acquiesça d'un signe de tête. Il prit son stéthoscope et le plaça sur le devant de sa poitrine, marquée par de nombreuses cicatrices disgracieuses, témoignages de ses heures passées au bloc opératoire et de ses multiples traitements.
Il plaça ensuite son stéthoscope sur le haut de son dos et écouta attentivement les battements de son cœur. Un rythme harmonieux et régulier, ce qui était plutôt bon signe. L'homme rangea son stéthoscope dans la poche gauche de sa blouse et posa une question d'une voix monotone :
- Comment te sens-tu ?
- Je me sens bien, répondit Nelia d'une voix pétillante.
- As-tu des vertiges ?
- Non, je n'en ai pas.
- Ton corps a subi un énorme choc émotionnel. Avec un peu de repos, tu te sentiras mieux dans peu de temps. Pendant que tu étais inconsciente, nous t'avons fait une prise de sang et les résultats ont montré que les marqueurs tumoraux sont restés stables depuis la dernière prise de sang. Cela signifie que ta maladie est restée au même stade. En revanche, nous avons remarqué que tu es fortement déshydratée. C'est pourquoi tu dois recevoir une poche de glucose. Après cela, tu pourras rentrer chez toi, déclara-t-il en esquissant un sourire forcé.
L'homme, dont les yeux étaient fixés sur Nelia, regarda ensuite la mère avant de reporter son attention sur la jeune fille.
- En examinant ton dossier, j'ai remarqué que tu as récemment atteint la majorité. Lorsque j'ai discuté avec ta mère, elle m'a confirmé que tu n'étais pas encore en possession de la puce XZ1. Tu dois être consciente que de nos jours, la puce basique est devenue un gadget incontournable qui facilite notre quotidien. De plus, tu es maintenant dans le classement RPL, et si tu souhaites recevoir ton traitement, en tant que médecin, je te conseille vivement de te faire implanter la puce dès que possible. Je dois te mettre en garde. Si, pour une raison quelconque, tu refuses, tu perdras ton statut privilégié, et par conséquent, nous ne pourrons plus te traiter en priorité ni te fournir les meilleurs soins, ajouta-t-il d'un ton calme.
- Ta convocation est prévue dans deux mois, n'est-ce pas ? demanda-t-il à Nelia.
- Oui, je pense, affirma-t-elle sans réagir à ce qu'elle venait d'entendre.
- Voici les médicaments pour les deux prochains mois. Pour le reste, nous ne pouvons rien faire tant que tu n'auras pas effectué l'implantation. Le prochain rendez-vous te sera donné dès que tu auras la puce, conclut-il d'un ton ferme avant de quitter la pièce.
Les deux femmes furent surprises par ces dernières remarques. En effet, dans ce monde, il était considéré comme indispensable et normal d'avoir la puce et de suivre le mouvement pour éviter les conséquences du système. Pour la mère, la seule et unique solution envisagée était que sa fille se rende à la convocation. Quant à Nelia, qui était réticente, elle trouvait que ce rendez-vous était encore trop éloigné pour prendre une décision.
Afin de tuer le temps, Nelia tenta de se reposer un peu, mais en vain. Assaillie par de multiples pensées négatives, elle ne parvint pas à fermer l'œil. Elle demanda à sa mère de lui apporter son sac et en sortit son ordinateur. Pour distraire son esprit et échapper à cette sombre réalité, deux choix s'offraient à elle. D'un côté, si elle avait suffisamment de courage, elle pouvait commencer le travail qu'elle devait rendre avant la fin de la journée. D'un autre côté, elle pouvait se détendre en regardant un film ou une série. Le choix était plutôt évident : elle avait désespérément besoin de s'évader de ce monde cruel. Elle se connecta donc à l'une de ses plateformes de streaming préférées et décida de revoir l'un de ses animes favoris.
Sa mère, de son côté, passa quelques appels téléphoniques. Le premier était pour prévenir son travail qu'elle ne pourrait pas s'y rendre l'après-midi, et les autres étaient destinés à son entourage pour annoncer la rechute. Une fois qu'elle eut terminé, elle se mit à travailler sur sa tablette. Même si sa fille était malade, elle ne pouvait se permettre de manquer une journée entière de travail, et encore moins de perdre son emploi. Ce n'était pas qu'elle avait des difficultés financières particulières, mais plutôt parce qu'elle était seule à subvenir aux besoins quotidiens et aux frais exorbitants liés aux études de ses enfants. De plus, l'annonce de la rechute signifiait des frais médicaux supplémentaires, d'autant plus élevés en raison du nouveau traitement novateur qu'elle allait recevoir.
La perfusion prit plusieurs heures avant de se vider complètement, ce qui lui laissa le temps de regarder quelques épisodes. Le son d'un bip-bip émanant du baxter annonça la fin de la poche. Nelia appuya alors sur le bouton rouge fixé au mur à sa gauche pour appeler une infirmière. Il fallut une dizaine de minutes avant que celle-ci n'entre dans la chambre. Arrivée près du baxter, elle effectua machinalement la tâche sans prononcer un mot. Elle éteignit le dispositif et retira ensuite le cathéter, laissant sur la peau claire de Nelia une marque difforme bleuâtre.
Une fois sa mission accomplie et juste avant de partir, l'infirmière rompit le silence en leur annonçant qu'elles pouvaient maintenant rentrer chez elles.
En peu de temps, elles avaient terminé de rassembler leurs affaires. Elles quittèrent la pièce où régnait, comme dans tout le bâtiment, une odeur désagréable mêlant les produits médicaux à l'odeur caractéristique des êtres humains, rappelant ainsi la fragilité de la vie.
Pour sortir de cet endroit, elles empruntèrent exactement le même chemin qu'au matin. L'atmosphère dans les couloirs et le hall était devenue plus animée et agitée. Malgré la foule de personnes stressées, tristes, malades et mourantes, elles atteignirent rapidement les portes principales et quittèrent cet environnement anxiogène.
Définition :
* tumeur maligne : des cellules cancéreuses envahissantes.
**rechute : Reprise évolutive d'une maladie qui était en voie de guérison.
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