Prologue

La pluie redoubla de force, alors qu'un éclair zébrait le ciel, illuminant tout sur son passage. Moro Verseau, regarda à travers son parapluie les gros nuages noirs avant de s'avançer vers une porte en métal. Elle semblait à peine tenir sur ses gonds, tant elle était abimée. Moro sortie son interface de poche et tapota doucement sur la surface vitrée. L'appareil s'alluma, éclairant son visage dans la nuit. Un hologramme se dessina lentement, laissant apparaitre l'image d'un bâtiment semblable à celui devant elle se trouvait. Elle était arrivée.

Elle regarda autour d'elle, aussi loin qu'il lui était possible dans la pénombre. Le premier lampadaire se trouvait à plusieurs dizaines de mètre et la rue n'était qu'une succession d'immeubles délabrés. Elle pouvait voir deux personnes à l'allure louche appuyés contre un mur. Ils avaient l'air d'attendre quelque chose, ou quelqu'un. Moro n'aurait pu dire s'il s'agissait d'hommes ou de femmes, mais son intuition lui disait de ne pas trainer trop longtemps.

Elle reporta son attention sur la porte à la peinture écaillé et poussa. La porte emit un crissement qui indiquait qu'elle n'avait pas été graissée depuis bien longtemps. Dans le hall, éclairé par une faible lumière, jonchaient tout un tas d'ordures le sol. Sans attendre, Moro tourna directement sur sa droite et toqua trois coups sec à la porte de l'appartement.

Au bout de quelque secondes, la porte s'ouvrit, laissant apparaitre une femme.

-Moro ! s'exclama-t-elle en la prenant dans ses bras. Moro se tendit à ce contact.

-Christianne...

- Je t'en prie, entre. Je suis si contente de te revoir. Ça fait quoi, 10, 15 ans ?

Moro ne répondit pas et pénétra dans un pièce à peine éclairée. Au milieu trônait une simple table, sur laquelle était posé la bougie, et une seule chaise. Sur la gauche, le plan de travail d'une cuisine ouverte était encombré de tout un tas de chose.

Moro observa Christianne qui s'appuyait sur la porte fermée. Brune, pale, le visage fin, le nez droit. Exceptés ses cheveux longs dont une mèche cachait son œil droit et ses yeux bleus, elle était son portrait craché. Moro remarqua ses ongles, rongés jusqu'au sang, et sous une robe noire qui semblait avoir vécue des jours meilleurs, elle affichait une maigreur alarmante. Elle semblait aussi très agitée.

-Assis-toi. Je suis désolé, je n'ai que de l'eau à t'offrir. Comment vas-tu ? et Ania ? Karine ?

-Christianne... Je doute que tu m'ais contactée et fait venir, après avoir disparue pendant 17 ans, pour me demander comment je vais. Viens-en au fait, s'il te plait...

-Oh, grande sœur, ne soit pas si tendue. Je sais que tu m'en veux d'être partie, mais tu sais très bien que je n'avais pas le choix. Avec mes crises...

-Et tu n'as rien trouvé de mieux que ce taudis dans la ville basse pour te cacher ? Non, après tout, c'est assez logique. Ici, personne ne serait venu te chercher. Même la police ne s'y aventure pas. Je repète : Que veux-tu ? »

Christianne resta un moment silencieuse, se triturant les doigts, avant de se diriger vers le fond de la pièce.

-Viens, je dois te montrer quelque chose.

Elle emmena Moro jusqu'à une porte fermée, au fond d'un couloir et hésita quelques secondes avant de poser la main sur la poignée pour ouvrir. Une chambre, plongée dans le noir. Moro tenta d'actionner l'interrupteur, mais il ne fonctionnait pas.

-Il n'y a pas d'électricité ici ou quoi ? Demanda-t-elle en sortant son interface.

-Pourquoi tu as emmener "ça" ici ? Et si ils te localise et viennent jusqu'ici ?

Moro regarda sa sœur, surprise. Elle faisait des allers-retours dans le couloir, marmonnant des choses inaudibles, complètement paniquée.

-Enfin, Christianne, tu n'as rien à craindre, nous sommes toutes les deux déclarés je te rappelle.

-Moi peut-être, mais pas elle ! cria Christianne, en désignant l'intérieur de la chambre.

Moro regarda dans la direction que d'elle lui montrait, mais ne distinguait rien dans les ténèbres. Elle tapota sur sa tablette et plusieurs boules de lumière, semblable à des lucioles s'élevèrent, éclairant légèrement la pièce. Elle était à peine plus grande qu'un cagibi et plein milieu, se trouvait un berceau. Moro s'approcha doucement et regarda à l'intérieur. Un bébé y dormait paisiblement, enroulé dans un linge blanc.

-C'est toi qui as fait ça ? Demanda Moro, avec un mouvement de tête vers l'enfant. Christianne se contenta de hocher la tête. Qui est le père ?

Aucune réponse. Christianne était au bord d'une de ses crises, Moro pouvait le sentir. Ses mouvements devenaient brusques et sa respiration erratique.

Elle devait accélérer.

-Ce n'est pas grave, reprit elle calmement. Tu sais très bien que tu n'as qu'à la déclarer, qu'elle n'ai rien à craindre.

Christianne s'approcha du berceau.

-Regarde de plus près.

Moro obéit et remarqua, parmi ses innombrables mèches brunes, une mèche entièrement verte. Alors qu'elle comprenait ce que cela impliquait, une sueur froide lui glissa le long du dos. Christianne lui carrassa doucement les cheveux.

-Voila pourquoi je ne peux pas la déclarer. S'ils la découvrent, Névaeh seule sait ce qu'ils lui feront...

- Christianne... Tu sais comme moi que cet enfant ne peut pas rester ici...

- Elle s'appelle Nathalie. Je peux m'en occuper, ils ne la trouveront jamais ici, comme ils ne m'ont jamais trouvée. »

-Tu sais que c'est impossible. Tu n'arrives même pas à te t'occuper de toi-même. Alors elle.

Alors que Christianne avait le regard fixé sur elle, Moro glissa discrètement une main en dessous Nathalie.

Elle se laissa 20 secondes pour agir. Il fallait qu'elle parte avant le début de la crise, qui semblait imminente. Seule, elle aurait pu gérer, comme à l'époque, mais avec un bébé dans les bras, c'était trop dangereux. Dans ces moments-là, son instinct animal de Christianne prenait le dessus. Peu importe qu'il y ait parent, sœur ou enfant en face, tous devenaient ennemi, tout autant qu'elle-même. Moro ne le savait que trop bien.

-Je peux le faire, repris Moro en resserrant sa prise. Je peux m'occuper d'elle, la mettre en sécurité.

Quinze secondes.

-Tu ne peux pas me l'enlever, c'est ma fille !

Dix.

-Tu pourrais venir avec nous, rester près d'elle.

Non, elle ne le pourrait pas.

Cinq.

-Je t'interdit de me la prendre !

Zéro. A L'instant où Moro tira pour amener le corps de Nathalie dans ses bras, Christianne renversa le berceau. Moro balaya l'air de son bras libre, éteignant les lucioles, les plongeant dans le noir. Elles'empressa de rejoindre la la lueur dans le salon, jusqu'à la sortie. Derrière, elle pouvait entendre le fracas des objets brisés et des hurlements de rage, mélangés aux pleurs de l'enfant serrée contre elle.

Une fois dehors, elle rejoignit sa voiture en courant, quelques rues plus hautes, et installa Nathalie coté passage. D'une main tremblante, elle programma sa destination sur le tableau de bord, les cris de sa sœur résonnant encore dans ses oreilles.

-Merde ! Cria-t-elle en frappant son volant.

De tous les descendants de Névaeh, il fallait que ça tombe sur la fille de sa folle de sœur. Le pire choix possible.

-Démarre. Dit-elle à sa voiture pour lancer le mode autonome.

Puis elle regarda Nathalie, sa mèche verte visible parmi ses cheveux bruns et se demanda comment elle allait pouvoir cacher quelque chose d'aussi gros.

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